Fichiers, l'éternel retour
C'est le cas du mot "fichiers". Même quand on affecte de ne pas le prononcer. A peine le subtil linguiste nommé Brice Hortefeux a-t-il annoncé la création de "deux nouvelles bases de données", que s'enflamment les polémiques, comme l'an dernier, à propos du fichier Edvige (à ce propos, je ne saurais trop vous conseiller de relire notre excellente enquête Edvige pour les Nuls et les journalistes, relecture indispensable pour suivre le débat qui s'annonce cette semaine).
Il est vrai que tout semble fait pour le brouiller, le débat. Ainsi, l'annonce de Hortefeux est faite quelques jours après les violences de Poitiers du 10 octobre dernier. Si l'on avait mauvais esprit, on pourrait penser que le gouvernement décrète dans l'urgence, pour masquer par un rideau de fumée une défaillance du renseignement préalable. Mais non ! Annoncer une loi, ou sortir un décret, dans l'émotion d'un fait-divers ? On sait bien que ce n'est pas le genre de ce gouvernement-là. De toutes façons, comme le souligne une enquête de Libé de ce matin, c'est par SMS, que les manifestants violents de Poitiers semblent s'être coordonnés. Il est peu probable qu'un fichier, quel qu'il soit, aurait pu être efficace pour anticiper les taguages, et bris de vitrines de Poitiers.
Accessoirement, ce gouvernement semble doté d'une remarquable capacité à foncer droit dans le mur. Sur la question des fichiers, par exemple, la commission des lois de l'Assemblée a adopté en mars dernier un rapport parlementaire, puis une proposition de loi qui, apparemment, attend toujours d'être inscrite à l'ordre du jour. Dans ces conditions, dégainer ses décrets un dimanche, est la meilleure manière, en effet, de passer inaperçu. Au moins, on parlera moins du prince Jean. Ce qui, au point où on en est, est peut-être le but de l'opération.
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