Sardou, ronchon préféré des Français
devant un monument du patrimoine français: le Ronchon National, un nommé Michel Sardou. Toute une soirée à bâiller d'admiration devant Sardou, et sa gaîté de bocage normand un dimanche de pluie. Je ne parle pas de Normandie par hasard. Sardou aurait bien aimé rester chez lui, en Normandie, avec ses chevaux. C'est sa femme, qui l'a trainé chez Bern, pour la promo du dernier album, celui des Adieux, l'arrachant à ses trotteurs. "Je viens d'en acheter un, une merveille." Bern : "une part de trotteur ?" Sardou : "j'ai une tronche à acheter une part de trotteur ?" OK. La charpente de provoc est intacte. Comme pour confirmer, c'est Florent Pagny qui chante "la France elle m'a laissé tomber". Parfait. Tout y est.
La provoc a cependant des limites. Interprétée par le jeune Amir, la femme des Années 80, par exemple, ne fait plus bander la France. Elle la fait seulement "marcher". Tiens tiens. Personne ne relève. A chaque époque ses interdits. En 67, rappelle Sardou, ce sont ses Ricains, qui furent interdits d'ORTF. Il faut dire que De Gaulle venait de faire sortir la France du commandement intégré de l'OTAN. Sardou ne l'avait pas fait exprès. La chanson était écrite avant. "Comment tu veux que je devine que ce grand machin allait sortir de l'OTAN ?"
Je sens qu'on va me reprocher de parler de Sardou, alors que tant d'autres sujets plus dignes d'intérêt, etc etc. Si le ronchon n'était que ronchon, on n'y prêterait pas attention. Mais il est LE Ronchon National. Le préféré des Français. Il faut prendre Sardou au sérieux. D'après Wikipedia, Sarkozy aurait expliqué que ce sont les Ricains de Sardou, par exemple, qui ont déterminé son atlantisme. Quarante ans plus tard, ça donne le retour de la France dans le commandement intégré de l'OTAN. A quoi tiennent les choses.
Le nouveau tube cru 2017 s'appelle "Le figurant". C'est l'histoire d'un raté du cinoche, qui traine depuis toujours sur les plateaux de grande solitude, une variante de l'éternel Je m'voyais déjà d'Aznavour. Comble de la déchéance : il arrive au boulot par la ligne 6. "Derrière Bébel derrière Bourvil, c'est moi. Derrière Lino derrière Lindon, c'est moi". Le monument a réquisitionné les monuments. Et voici la nouvelle plus ronchonne de la soirée : ça fonctionne. Très bien. Dès les toutes premières mesures, on sait qu'il a gagné. Qu'il va encore trotter grognon, en son enclos, dans la tête de la France. Mais tant qu'à faire, mieux vaut chanter les figurants du ciné, que la peine de mort.
Cet article est libre d’accès
En vous abonnant, vous contribuez
à une information sur les médias
indépendante et sans pub.
Déjà abonné.e ? Connectez-vousConnectez-vous