Dubaï, requiem pour une bulle
Pas de panique ! Dubaï n'est pas Lehmann brothers. Et la déconfiture de l'émirat sans pétrole n'entraînera pas "d'effet domino", comme celle de la banque américaine, l'automne dernier. N'empêche : la liste des participations détenues par l'émirat (Daimler, EADS, etc) devrait faire réfléchir à deux fois l'orchestre du "pas de panique". Lequel se partage d'ailleurs les antennes avec quelques solistes du "ça devait arriver". France Inter, ce matin, donnait la parole à l'un d'entre eux. "Ca devait arriver", car on n'a jamais vu un développement brûler ainsi les étapes, et se passer par exemple de la constitution d'une classe moyenne. Certes. Mais pourquoi ne pas l'avoir dit plus tôt ? Eternelle question, posée l'été dernier par Frédéric Lordon, de l'exclusion des voix critiques, dans les grands concerts unanimistes.
Apprenant au réveil le dévissage des bourses asiatiques provoqué par la quasi-faillite de Dubaï, on ne peut s'empêcher de revoir les merveilleuses images, que nous montraient complaisamment les télés françaises ces dernières années. Prodigieux concert des grues, île artificielle en forme de palmier, ruée des grands chefs cuisiniers français pour ouvrir des brasseries à choucroute au milieu des sables, crise du logement, embouteillages matinaux : les belles images, que fournissait le mirage ! Dubai était devenu un des marronniers préférés de Capital et de Zone interdite. Finalement, en concentré, n'était-ce pas la métaphore des prodiges du libéralisme ?
Comme d'habitude, tous ceux qui ont ainsi filmé la mini-bulle, se défendront en expliquant que la mini-bulle existait. Sa gonflette hypnotisante, son scintillement, ses reflets : tout cela, les caméras ne l'ont pas inventé. Certes. Mais il faudrait leur répéter inlassablement qu'une caméra n'est jamais neutre. Filmer une bulle, c'est la gonfler encore. Et plus on la filme de près, plus on contribue à l'infernal processus, et à son issue inéluctable.
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