Démocratie : merci Murdoch ?
Et finalement, tout fonctionna comme prévu : comme prévu, c'est Associated Press, samedi soir, qui annonça la victoire de Joe Biden après sa victoire en Pennsylvanie, immédiatement suivie, comme prévu, par tous les médias américains, et mondiaux. S'ensuivirent les félicitations coordonnées au vainqueur de tous les États alliés des États-Unis, et notamment les Européens, comme si, vite, vite, il fallait bétonner cette narration-là, comme si elle était encore fragile, comme si le fantasme trumpien pouvait fracasser le ciment avant la prise, comme s'il fallait à toute force emmurer le père Ubu au milieu du décorum présidentiel, et le corneriser sur ses parcours de golf préférés.
Un simple cauchemar de quatre ans ? Seul l'avenir dira si le mandat Trump n'aura été que la parenthèse d'un troll complotiste installé dans les habits de commandant en chef, ou si les institutions démocratiques, et au niveau international le respect par les États-Unis de leurs alliances traditionnelles, lui survivront. Cette défaite démontre en tous cas la puissance d'institutions démocratiques, même quand le président démocratiquement élu est lui-même tout sauf un démocrate. Il est vrai que le programme du vainqueur n'a rien pour effrayer, ni les services sécuritaires, ni les gros donateurs qui financent les campagnes américaines, et dont Biden, au début de sa campagne, avait décidé d'accepter les dons illimités.
Au premier rang de ces institutions, donc, la presse. Si les États-Unis évitent la guerre civile tant redoutée, ils le devront peut-être à Rupert Murdoch. Nous racontons ici comment le conservateur New York Post
, après une ultime tentative anti-Biden ces dernières semaines, sur la foi d'un scoop douteux, a retourné sa veste en moins de quarante-huit heures, allant jusqu'à consacrer un émouvant article aux chiens du couple Biden. On connaîtra peut-être un jour la nature, et le moment précis, de la consigne donnée par Murdoch à ses médias américains (Fox News,
première à donner Biden vainqueur en Arizona,
et le New York Post
) de concéder la victoire à Biden. On en connaîtra peut-être même les raisons. On saura peut-être si Murdoch s'est simplement rangé au verdict de la démocratie, ou s'il s'est jugé incapable d'affronter, seul, tous les autres médias américains, anciens et nouveaux, qui tous, s'étaient résolus à brider la viralité de la parole de Trump. Reste une question, pour la beauté de la réflexion. Les choses se seraient-elles déroulées aussi harmonieusement si le vainqueur s'était appelé, supposons, Bernie Sanders ? Avec des si...
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