Foot et racisme : et ce fut le "negru" de trop
chronique

Foot et racisme : et ce fut le "negru" de trop

Et un jour, c'est le mot de trop. L'insulte de trop. Pourquoi ce mardi 8 décembre 2020 ? Pourquoi en cette 6e journée de Ligue des champions, lors de ce match PSG-Basaksehir , au Parc des princes, à Paris ? Pourquoi est-ce ce mot, "negru", prononcé par le 4e arbitre roumain Sebastian Coltescu, à l'endroit de Pierre Achille Webo, ancien attaquant camerounais et membre du staff du club turc, jugé trop véhément contre l'arbitrage, qui a été le mot de trop, provoqué la rébellion générale des deux équipes, et l'interruption du match  à la 22e minute ? Est-ce simplement le huis-clos sanitaire, qui a obligé chacun à entendre ce que l'on peut faire semblant, en temps ordinaire, de ne pas entendre ?

Sur le récit complet de ce moment de bascule, je vous renvoie au compte Twitter de RMC Sport, qui l'a fort bien couvert, et notamment à cette vidéo, qui relate et sous-titre tous les échanges des protagonistes. Demba Ba, attaquant remplaçant du club turc : "Quand vous parlez à un Blanc, vous ne dites pas 'ce Blanc'. Écoutez-moi. Alors pourquoi, quand vous parlez d'un Noir, vous dites, 'ce Noir' ?" "Venez, on se barre" dit simplement Demba Ba, coupant court aux laborieuses explications de l'équipe arbitrale.  Le mot de trop peut être un tout petit mot. Il peut être un mot mal compris. L'équipe des arbitres roumains s'est défendue, en expliquant que "negru", en roumain, signifie simplement "noir", sans connotation péjorative. Peut-être. Encore que des témoignages ont aussitôt commencé à fleurir sur la complaisance de ce même arbitre principal Ovidiu Hategan envers des insultes racistes proférées par des supporters du Dynamo Bucarest.  Ainsi le joueur Harlem Gnohéré, relatant un match à Bucarest : "J'avais entendu des cris de singes. Le même arbitre m'avait dit : c'est des cris de chiens."

"Venez on se barre". On se lève et on se casse. Demba Ba a-t-il lu Virginie Despentes, racontant Adèle Haenel ? Ou Lilian Thuram, qui publie ces jours-ci un livre sur le privilège blanc ? Ou les deux ? Il vient de loin, ce "Venez on se barre". D'une longue résignation sur le racisme des stades. "Si un jour, avec l’appui des joueurs blancs, ils décidaient de ne pas jouer, je pense que tout changerait rapidement" professait en 2019 l'ex-attaquant camerounais Samuel Eto'o, rappelle Le Monde. Et la footballeuse américaine Megan Rapinoe : "Parfois tu décides par toi-même de changer le monde, parfois ça te tombe dessus".

"Venez on se barre". Sans être familier du foot-spectacle, ni spécialement amateur du foot business, sans oublier une seconde que les héros de cette rébellion en globish sont aussi des stars internationales surpayées, ni que le foot est violence, comment, vivant ce moment, ne pas reconnaître le frisson familier des rébellions soudaines qui font chavirer les humiliations immémoriales, et qui emportent les citadelles ?

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