Forgeard : blanchiment, mode d'emploi
, attirant évidemment l'attention du matinaute. Poursuivi pour "manquement d'initié" (le terme précédent de "délit d'initié" a dû être jugé trop grossier), pour avoir vendu des actions alors que sa connaissance du retard pris par le programme de construction de l'Airbus A 380 lui permettait de savoir que le cours allait plonger, l'ancien co-président d'EADS est donc "blanchi", avec tous ses co-poursuivis. C'est donc par erreur, qu'une partie de la presse l'a "jeté en pâture", depuis trois ans. On murmure qu'il postule à une place sur la liste socialiste de l'Essonne, en prévision des Régionales (je plaisante, évidemment, c'est seulement pour vous faire réagir). Soit. Admettons évidemment l'idée de l'innocence totale de Forgeard. Tentons d'examiner les pièces.
Faites le test : tentez, ce matin, de connaître exactement le texte de la décision de l'Autorité des Marchés Financiers (AMF, anciennement la COB, c'est à dire une autorité administrive, et nullement judiciaire, c'est dire si le terme "blanchi" est excessif. Peut-on être "blanchi" par un gendarme, tant que le juge n'a pas jugé ?) Toujours la même technique : demandez "Forgeard" à Google News, et observez ce qui tombe. Un fatras de réactions, soulagées ou outragées. La mention d'un "texte de 25 pages". Mais de texte, point.
Ah si, pourtant. Dans le court laps de temps imparti au matinaute, voici, sur le site du Monde, une dépêche de Reuters, donnant un bref extrait de la décision. Que dit donc le "gendarme" ? Surprise : il ne dit nullement que Forgeard ne connaissait pas les retards de l'A 380, ni même qu'il avait décidé de vendre avant de les connaître. A en croire Reuters, l'AMF assure que cette connaissance "ne constituait pas une information privilégiée". Forgeard connaissait donc à l'avance la débâcle du planning de l'A 380, le bel avion dont les câbles électriques étaient trop courts, à la suite d'un malencontreux problème de transmission entre la France et l'Allemagne. Mais cette information n'était pas "privilégiée". Sans doute chacun, vous et moi, au prix d'une enquête de terrain rigoureuse, pouvait-il avoir accès aux mêmes informations. A lire Le Monde le mois dernier, on avait pourtant eu l'impression que la controverse ne portait pas sur le caractère "privilégié" des informations détenues par Forgeard (caractère alors contesté par personne) mais sur les obligations ou les interdictions d'acheter ou de vendre plus ou moins larges, qui découlaient de cette détention. Admettons que Le Monde n'ait rien compris en novembre. Admettons que le problème se soit déplacé en un mois. Admettons que Forgeard n'ait pas détenu d'informations "privilégiées". Admettons tout ce que l'on voudra. Si des exégètes de l'AMF passent par ici, je suis preneur de toutes explications de texte.
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