Manif : un comptage des invisibles
Une vingtaine de grands medias adopteront demain leur propre système de comptage des manifestants, apprend-on. Testé la semaine dernière, le système, réalisé grâce à l'aide du cabinet spécialisé Occurence, a fourni un résultat quasi-identique au comptage policier, et très éloigné du comptage syndical. On verra bien quels résultats il donnera demain.
Quoiqu'il en soit, le comptage est un art difficile. Prenons l'exemple des manifestations de retraités de jeudi dernier. Ce soir-là, l'AFP a livré un bilan de "39 000 à 68 000" participants, cette fourchette se fondant sur les sources, a priori irréfutables, de la police et des syndicats.
Sauf qu'un journaliste basé à Lannion, Sylvain Ernault, arrive, lui, au chiffre de 117 000 manifestants (certaines manifestations regroupant, il est vrai, des personnels des EHPAD et des étudiants). Comment a-t-il fait ? Il s'est fondé sur la compilation, ville par ville, des comptages de la presse régionale sur "une petite centaine"
de défilés, soit trois fois plus que l'AFP.
Source du décalage : les manifestations ont été exceptionnellement importantes dans les petites villes, justement celles qui ont échappé au comptage de l'AFP (200 personnes à Thouars, 50 à Verdun, etc). "On posera l'hypothèse
,
dit Ernault,
que la colère monte d'abord dans les zones rurales, en proie à la désindustrialisation et à l'affaiblissement des services publics (santé, éducation, transports...). La fameuse métropolisation"
.
Si Ernault a ainsi réussi à rendre une visibilité aux invisibles parmi les invisibles, c'est qu'il a été alerté par la mobilisation particulièrement importante dans sa ville de Lannion. Il faut croire, en tous cas, que le gouvernement a de meilleures antennes que l'AFP, puisqu'il a (très légèrement) reculé sur la hausse de la CSG sur les pensions de retraite.
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