Tabou : dangers de l'austérité, bienfaits de l'euro faible
En Italie, au Portugal, en France, partout se déploie la "vague" des plans d'austérité, tambourinent les médias audiovisuels, le nez collé sur les cendres, les lunettes encrassées. Les ministres britanniques sont fermement invités à emprunter le métro. Pour un peu, Estrosi sacrifierait devant les caméras une de ses deux soupentes. Qui s'agit-il de convaincre ? Les électeurs allemands ? Les agences de notation ? Lémarchés ? Ou encore, tiens, le FMI ? Mais il semble lui-même faire demi-tour, en redoutant...les conséquences des plans d'austérité, qu'il préconisait voici encore quelques semaines.
Plus que jamais, dans la crise monétaire que traverse l'Europe, se fait sentir l'absence assourdissante d'une information économique indépendante, et...distanciée. Nous retrouvons les réflexes de nos grand-parents, qui décryptaient les blancs de la censure dans la presse collaborationniste, et écoutaient à la nuit les crachotements de la BBC. Un seul minuscule exemple : "la bourse de Tokyo a cloturé en baisse de 3 %, en raison des problèmes de la zone euro" mentionne, en cinq secondes, le journal de 8 heures de France Inter. Pourtant, à y regarder de plus près, ce ne sont pas "les problèmes de la zone euro", qui semblent inquiéter les boursiers japonais, mais bien plus précisément, comme le reconnaissait le patronat japonais, la chute de l'euro, et la perspective d'un euro faible. Et pourquoi l'euro faible affecte-t-il les Japonais ? Parce qu'il dope les exportations européennes, pardi, comme l'explique par exemple l'excellent blogueur Jean-François Couvrat, ou comme le tambourine Mélenchon. Mais alors, si cet euro faible est une si bonne nouvelle, pourquoi ne nous le dit-on pas ?
L'austérité est dangereuse, l'euro faible est une bénédiction : entendez-vous, dans les jités, aux radios du matin, défendre ces propositions, au moins à égalité avec les propositions contraires ? Certes, Mélenchon est invité partout, et la barbe de Jorion devient familière à des lecteurs et télespectateurs de plus en plus nombreux. Mais tous restent cantonnés au rôle du repoussoir de service, ou du prophète dont on ne célèbre la lucidité passée que pour éviter de lui demander ses solutions pour le présent. Quant à l'immense orchestre des petits instrumentistes de l'info, rédacteurs de dépêches, présentateurs de flashes et de chaînes d'info continue, éditorialistes de la presse économique, qui composent le bruit de fond, il continue pendant le naufrage d'annonner, imperturbable, sa vieille partition.
(Photo : les musiciens du Titanic)
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