Journaliste indépendante, notamment pour Le Monde Diplomatique et Orient XXI, Meriem Laribi a eu un jour de 2023 une idée toute simple : se rendre à l'Elysée. Plus précisément, à la conférence de presse du (ou de la) porte-parole du gouvernement qui, chaque semaine, rend compte du Conseil des ministres. Et dans un but tout aussi simple : inlassablement, le questionner sur la politique française sur Gaza. Même si cette politique ne subissait pas de modifications notables d'une semaine à l'autre.

Plusieurs semaines durant, en 2023 et 2024, elle s'est donc emparée du micro laissé à la disposition des journalistes avec l'espoir, toujours vain, d'obtenir d'Olivier Véran, puis de Prisca Thévenot, ce qu'elle savait à l'avance ne jamais obtenir :  une réaction humaine, personnelle, hors des chemins balisés de la langue de bois. Ce faisant, elle a rompu avec un rituel suranné, dans lequel les journalistes posent pour la forme des questions auxquelles ils n'attendent pas de réponses. Cela n'a pas été sans frictions, ni impatiences ostensibles de la part des confrères et consoeurs. "C'était plié en vingt minutes, ça prend maintenant quarante minutes" se sont plaint certains. 

Postés par la journaliste sur les réseaux sociaux, ces échanges ont entretenu la petite flamme de la solidarité avec les Gazaouis. Encore trop, aux yeux de la présidence ? Après quelques semaines, l'Elysée a cru trouver la parade, en éliminant les journalistes de l'image des retransmissions de ces points de presse.

Bilan ? Mince, bien entendu. Meriem Laribi n'a pas fait dérailler à elle toute seule le train de la communication gouvernementale. Mais, sortant de son propre couloir, elle a ouvert une voie originale pour introduire son propre récit au coeur du récit de l'Etat. Dans l'océan d'indifférence qui aura entouré à Gaza seize mois de crimes de guerre en direct, elle tout simplement a fait sa part. Elle raconte ici ce voyage en terre inconnue.