Plaisanterie Hollande : presse algérienne choquée
François Hollande "exprime ses sincères regrets pour l'interprétation qui est faite de ses propos (...) il "en fera directement part" au président algérien Abdelaziz Bouteflika. Dimanche en fin d'après-midi , un communiqué de l'Elysée montre que le président a pris la mesure de l'émotion provoquée par sa plaisanterie sur le voyage de Valls en Algérie, dont ce dernier, est revenu "sain et sauf" selon les propos de Hollande.
Le quotidien officiel du pouvoir algérien, El Moudjahid avait pourtant minimisé comme le ministre des Affaires étrangères. Il n'évoque l'affaire qu'à la fin du bandeau de Une consacré au "partenariat stratégique global" entre la Chine et l'Agérie, citant le ministre des Affaires étrangères Lamamra interrogé à cette occasion : « Les propos du président français : une « moins-value » à l’esprit qui enveloppe les relations algéro-françaises ». El Moudjahid est le seul à rester discret sur cette polémique qui enflamme l'Algérie. Le Matin raconte l'incident et évoque une "saillie avec laquelle s’est tristement illustré le président français à l'occasion du 70e anniversaire du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif), lundi 16 décembre" Parlant de l'Algérie "Il en revient", dit François Hollande à propos de Valls avant d'ajouter "vachard avec un sourire satisfait : «Sain et sauf, c'est déjà beaucoup». Franche rigolade dans la salle du Crif." "Les médias français parlent de "petite phrase", mais en réalité, cette déclaration de Hollande sur un ton badin renseigne sur le fond de la pensée de cet homme. Elle illustre ce peu de considération qu’ils ont pour pour l’Algérie de Bouteflika mais aussi pour l’Afrique en général" analyse Le Matin. "Les relations entre l’Algérie et la France ne seront pas de sitôt normales tant que les officiels français ne verront en l’Algérie qu’une ancienne colonie prompte à se mettre au garde-à-vous pour leur bon plaisir." conclut Le Matin. |
Pour El Chorouk qui consacre une page entière à la polémique "L’humour de Hollande peut se retourner contre lui" et "l’ancien colon, n’a toujours pas digéré son départ du «paradis», et qui rêvait d’y rester à jamais."
Plusieurs personnalités citées par le journal portent des jugements sévères : "La France n'a jamais reconnu l'Algérie comme un état au même titre qu’elle, mais juste comme sa province." dt l'une tandis que l'autre considère que la France est un "un État qui ne respecte pas le peuple algérien".
Un troisième est encore plus sèvère face à la gauche française.
Selon lui, les relations franco-algériennes «n’ont jamais été fondées sur la base du respect mutuel, mais, elles sont tissées de manière à assurer la protection des intérêts français en Algérie.» En réponse à une question sur cette «humiliation», de la part d'un président, considéré par certains un ami de l'Algérie, Moussa Touati, répond en disant que la gauche française n'a jamais été l’ ami de l’Algérie, mais un ami des intérêts de son pays en Algérie."
Certains hommes politiques ont d'abord déploré l'absence de réaction du pouvoir algérien, remarque l'arabophone El Khabar (avec une photo de Hollande, et du président algérien Bouteflika du temps où il était en bonne santé, à la Une) qui cite Abdelmadjid Menasra, animateur du Front du changement.
Menasra parle de "blague honteuse", demande des excuses de la France, en disant que si ces mêmes paroles avaient été prononcées par Mohammed VI au Maroc, ou bien Moncef Marzouki, le président tunisien, la réaction d’indignation de notre Etat se serait vite fait entendre : "C'est parce que nous sommes faibles que Hollande ose nous insulter"
Ramtane Lamamra, ministre des Affaires étrangères algérien a finalement réagi de manière diplomatique
"Le sens de l’humour peut apporter une valeur ajoutée au sens des responsabilités lorsqu’il s’exprime avec élégance, avec mesure et qu’il introduit de la décontraction dans le cadre de cet art souvent austère qui est la pratique de la diplomatie. A l’inverse, le sens de l’humour peut être générateur d’une moins-value" Mais Lamamra a quand même parlé "d'incident regrettable".
Photo de Lamamra et Hollande à la Une pour Liberté.
"S’exprimant sur la “boutade” de Hollande, le ministre des Affaires étrangères a suggéré que l’Algérie attendait des explications de l’Élysée. «Pour les jours à venir, nous souhaitons trouver les moyens pour tourner la page»” note Liberté qui souligne que Lamamra a tenu à préciser qu'il "ne s’agit pas d’uneréaction officielle".
Le ministre des Affaires étrangères algérien s'exprimait lors d’une conférence de presse qu’il a animée, à Alger, avec son homologue chinois, Wang Yi.
Liberté cite aussi les réactions de Abderrazak Makri, président du parti islamiste Mouvement de la société pour la paix (MSP, qui a une cinquantaine de députés). Le fait d'avoir lâché cette plaisanterie devant des "sionistes" semble un facteur aggravant, dans l'attitude de Hollande.. :
Le ministre des affaires étrangères "minimise" constate Le Soir d'Algérie.
Un chroniqueur déplore à la Une la "Francomania" qui règne dans son pays, comme si l'Algérie était encore un département français, et il rappelle que la visite de Ayrault en Algérie a fait la Une de la presse algérienne, alors qu'elle était quasi ignorée par les médias français :
"Il y a une véritable maladie chez nous : c'est la Francomania ! Francophilie, francophonie, «Hizb França», tout ça est dépassé. On est branché sur la France comme si nous étions encore trois départements dépendant de la métropole. La dernière visite du Premier ministre a été superbement ignorée — mais alors, on s'en f... royalement sur toutes les chaînes françaises ! — alors qu'elle faisait la Une de tous les médias algériens ! "
Pour Le Jeune Indépendant "Mis à mal par l’évolution de la situation en République centrafricaine et au Mali et en situation critique face à la grogne sociale en France, le président François Hollande s’essaye à des diversions politiciennes qui, malheureusement pour lui, s’avèrent parfois improductives et susceptibles d’un effet boomerang. "
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