Libé : Bondy blog applaudit le projet des actionnaires
"Il faut que Libé s’adapte à son époque !" assure dans sa tribune Nordine Nabili, le directeur du Bondy blog, qui applaudit le projet des actionnaires "contrairement aux autres rédactions parisiennes" et aux journalistes du titre qui ont accueilli ce projet "avec dédain". Et pour cause : de ce projet, ils en rêvent à Bondy ! Et Nabili rêve tout haut : "pensez un instant au plaisir, au tremplin que cela serait de faire tout ça dans un immeuble dessiné par Philippe Stark, entouré de start-upper, de think-tankers, de développeurs et d’innovateurs ! De faire de ce quartier the place to be, loin des salons des quartiers chics saturés de certitudes, pour gommer les frontières et les idées reçues, pour créer les conditions et attirer ainsi le tout Paris politique, économique et culturel." |
Le Bondy blog ? Maja Neskovic avait longuement suivi les journalistes de cette rédaction singulière. Créé en 2005 à l’initiative de journalistes suisses à l’heure des émeutes en banlieue, ce blog a ensuite été confié aux habitants de Bondy (Seine-Saint-Denis). Depuis près de dix ans maintenant, le Bondy blog continue d’informer sur la banlieue, mais pas que. Cette association forme aussi les jeunes au métier de journaliste et a su créer des liens avec l’Ecole de journalisme de Lille mais aussi le portail Yahoo! ou encore les chaînes LCP et France Ô pour des émissions télé. Et tout ça sans un rond, explique Nabili qui évoque, dans sa tribune, "des conditions précaires, avec des blogueurs payés au lance-pierre, des volontaires et des encadrants au SMIC". Joint par @si, le directeur du Bondy blog précise que l’association touche deux subventions publiques pour un total de 90 000 euros annuels. Ce maigre budget permet de payer deux mi-temps – Nabili et son assistante – et de rémunérer les piges des journalistes à hauteur de 40 euros.
"Bienvenue aux journalistes de Libé s'ils comprennent qu'il faut conquérir de nouveaux territoires"
Ce projet est donc, pour Nabili, une aubaine : "aussi lançons-nous un appel aux actionnaires de Libération de faire un pas de côté, de sortir des sentiers battus, d’oser accompagner le déplacement du centre de gravité de la capitale vers la périphérie. Bienvenue aussi aux journalistes de Libé s’ils comprennent que leur journalisme pourrait vite se retrouver sans objet maintenant que le public s’informe autrement, s’ils comprennent qu’il faut réinventer leur métier, conquérir de nouveaux territoires et tester de nouvelles narrations". Contrairement à ce que laisse entendre la tribune, Nabili n'invite pas l'ensemble de la rédaction à s'installer à Bondy mais convie plutôt des petits groupes de journalistes à venir travailler chez eux : "on aimerait se vivre comme une pouponnière et accueillir des journalistes du Monde ou même du Figaro. Aujourd'hui ce sont 350 journalistes installés à Paris qui font la pluie et le beau temps. Une corporation qui court les cocktails et fait courroie de transmission avec le pouvoir."
Cet appel aux actionnaires, doublé d'une invitation à investir Bondy – ville qui projette la création d’une "Cité des médias" – n’a pas trouvé preneur dans les colonnes de Libération : "j’ai bien sûr proposé cette tribune à Libé qui n’en a pas voulu. Oui j’ai la dent dure mais c’est parce que j’aime ce quotidien qui reste pour moi de référence. Mais je crois qu’il faut aller chercher l’argent ailleurs, et ce projet de restaurant, de Flore de XXIe siècle, est innovant". Pour Nabili, il faut le pousser plus loin en investissant en dehors de Paris : "ici, en banlieue, c’est l’Amérique, il y a tout à faire. Et Bondy, c’est Brooklyn ! On n’a pas de fric mais des idées". Pour le directeur, Bondy blog n’en est même pas à lever des fonds auprès d’investisseurs mais à lever de la psychologie : "il faut une envie politique et des prises de position qui permettent au journalisme de passer le périphérique". En cela Nabili veut croire à la nomination de Mathieu Gallet à la tête de Radio France : "il dit avoir des tas d’idées pour développer un service global. Nous l’attendons de pied ferme."
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