Séguin, une mort à l'ancienne
Une mort claire et nette, médicalement et médiatiquement. Une mort quasi-gaullienne. La nouvelle de la mort de De Gaulle, en 1970, fut conservée secrète par la famille toute la nuit, et éclata seulement en milieu de matinée dans une édition spéciale de France Soir dévorée par une manchette hors-normes, quand la famille eut pris toutes ses dispositions. La nouvelle de la mort de Séguin, intervenue dans la nuit, a été révélée au matin par RTL, ce qui laisse supposer une source policière, ou du côté des pompiers de Paris.
Pas de fuites, pas de conditionnels, pas de rumeurs sur Twitter, pas de paparazzi autour de la chambre d'hôpital. Quelques instants plus tôt, sur la même antenne, Pécresse et Aphatie discouraient sur les grandes écoles, sans se douter de rien. Une mort en trois mots, soudaine et franche, qui vient foudroyer en plein babil ordinaire les radios du matin. "Philippe Séguin...serait mort, selon RTL" hasarde le présentateur du journal de France Inter. Le matinaute vérifie sur Google News, qui n'en sait encore rien. Instants suspendus, où on est en avance sur Google ! Les vieux médias, ce matin, tiennent leur revanche.
Irruption de la mort dans la vie ordinaire. Invité de France Inter pour assurer la promo de son livre-téléfilm (où est la compile de tous ses discours ?), Jospin, revenant parfaitement vivant, lui, se fend d'un éloge du disparu. Bernard Guetta, chevalier du Oui au référendum de 2005, y va évidemment de son éloge de l'homme du Non. "On dit qu'il est peut-être passé à côté d'un rôle, d'un rôle qui aurait pu être celui de chef de l'Etat" hasarde RTL. "A qui pensez-vous ?" demande aussi RTL à Pasqua, convoqué au téléphone. Et le récent condamné, sublime : "Je pense à la France". Chez le gaulliste historique, toute émotion est nationale. L'auditeur apprendra néanmoins que Séguin et Pasqua se retrouvaient parfois "à la piscine de la thalasso, en Tunisie". Le babil a repris ses droits.
Cet article est libre d’accès
En vous abonnant, vous contribuez
à une information sur les médias
indépendante et sans pub.
Déjà abonné.e ? Connectez-vousConnectez-vous