"Antisémitisme : analyse d'un déni à gauche" : retour sur une émission polémique
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"Antisémitisme : analyse d'un déni à gauche" : retour sur une émission polémique

L’émission du 28 mars dernier titrée "Antisémitisme : analyse d'un déni à gauche" a suscité de (très) vives et (très) nombreuses réactions de la part de nos abonnés. 717 commentaires sur le forum (que nous avons tous lus), et des centaines d’autres sur les réseaux sociaux où les commentaires ont été autrement plus violents et virulents, notamment à l’adresse de Nassira El Moaddem qui a préparé et présenté cette émission, comme le déplorait notre rédacteur en chef et directeur de la publication, en début de semaine

Afin de faire face à ces commentaires, à l’indignation et à la colère qui parfois les accompagnent, la rédaction d’Arrêt sur Images a décidé d’y répondre par un billet du médiateur de la façon la plus transparente et honnête possible. Pour ce faire, nous nous sommes entretenus avec Nassira El Moaddem (vivement mise en cause dans le forum), Robin Andraca (directeur de publication et rédacteur en chef d’ASI) ; Hadrien Clouet (député LFI invité de cette émission et censé y avoir été malmené), ainsi que des membres de Tsedek et David Guiraud (mis en cause par nos invités).

Déséquilibre et impression d'un "tribunal déloyal"

Parmi les critiques qui reviennent le plus souvent, celle d’un plateau déséquilibré à "deux contre un", et l’impression d’un "tribunal déloyal". Le commentaire du forum le plus plébiscité par les asinautes (approuvé 85 fois) le résume très bien. L’émission y est décrite comme une "catastrophe" et un "petit tribunal", avec "Jonas Prado, de la galaxie Golem, en procureur". Est également pointé un éventuel "manque d'honnêteté intellectuelle". L'abonné ajoute que "la personne de LFI a eu la parole coupée" et "s'est retrouvée dans une position à peine différente d'un plateau de BFM" avant de conclure qu'il attendait "vraiment mieux d’ASI".

Ce sentiment de déséquilibre peut s'expliquer par le choix des invités. Robert Hirsch, militant au RAAR (Réseau d'Actions contre l'Antisémitisme et tous les Racismes) et Jonas Pardo, militant à Golem, portent les mêmes accusations de déni d'antisémitisme contre LFI (représenté par Hadrien Clouet sur le plateau). En conséquence, la même position peut se répéter par endroits, dans les discours des deux invités, ce que vous êtes nombreux à avoir également déploré. 

À propos du casting, notre journaliste Nassira El Moaddem tient à préciser que, pour elle, "les trois invités ne sont pas au même niveau, notamment parce que Robert Hirsch a une casquette d'historien" comme elle le présente en introduction de l’émission, même si elle reconnaît volontiers que cela n'a pas été suffisamment "exploité". Elle ajoute qu'en tant que député, Hadrien Clouet "a une forme de pouvoir" que n'ont pas les deux autres. Notre présentatrice rappelle aussi que l'on reçoit régulièrement des invités "du même bord qui partagent des positions politiques proches" mais que le déséquilibre n'est jamais pointé de la sorte et se demande, dès lors, pourquoi "ce serait un problème ici".

D'autres abonnés ont estimé qu'Hadrien Clouet n'a pas pu s'exprimer convenablement. À ce sujet, ASI a décompté le temps de parole du député autour de 30 minutesLa modération de la discussion a également été correctement menée, comme le reconnaît d'ailleurs Hadrien Clouet. Tout au long de cette émission, Nassira a laissé les propos se tenir en longueur (l'émission dure 1h40), empêchant par moments certains invités d'en couper d'autres, sans favoritisme. Robin Andraca précise d'ailleurs qu'"il n'y a absolument aucune faute déontologique dans l'émission".

Pour autant, "le fait d'enchaîner systématiquement les réquisitoires de Pardo avec ceux de Hirsch, sans possibilité de répondre point par point, nuit à la qualité de l'échange" pointe un asinaute. Un autre estime que cela "submerge Hadrien Clouet, qui ne pourra pas répondre à tout" et qui, en plus, "pourra esquiver les points pouvant le déranger". 

"Le temps nécessaire pour répondre à des interpellations est asymétrique" et oblige à un rendu "hyper défensif" regrette de son côté Clouet qui ne "voulait pas laisser passer des accusations"Nassira dit entendre et comprendre ces critiques.

Un "parti pris" anti-LFI ?

"Je ne m'abonne pas à ASI pour assister aux mêmes lynchages stupides qu'ailleurs à la télé ou la radio" ; "J' ai l'impression qu'on a juste voulu se faire LFI" : les commentaires accusant l'émission de porter un parti pris anti-LFI sont sévères. Certains estiment même que "la direction des débats par Nassira El Moaddem" a "accentué le déséquilibre par son ton et ses questions très à charge contre le député LFI" donnant "un effet de trois contre un". Vraiment ? Hadrien Clouet assure auprès d'ASI ne s'être senti "ni acculé ni agressé" par notre journaliste : "On est mis sur le grill, elle a juste fait son boulot". Mais il regrette tout de même que "le cadre de l'émission n'ait pas permis d'avoir un dialogue serein à deux contre un"Au sujet de ces critiques, Nassira exprime son désaccord : "Je n'ai pas du tout été agressive !". Ajoutant : "À aucun moment, Clouet n’a été empêché de répondre aux critiques qui ont été formulées, j'ai même insisté à plusieurs reprises pour qu'il puisse répondre".

"Est-ce que ces abonnés considèrent qu'on ne peut pas être pugnace avec la gauche et en particulier avec LFI ?", s'interroge aussi Nassira, qui considère qu'elle n'a "pas vocation à défendre les Insoumis contre vents et marées sous prétexte qu’ils auraient des positions politiques qui seraient proches [des siennes]", ajoutant "ce n'est pas comme cela que j'envisage mon travail de journaliste". Avis partagé par Robin Andraca : "Notre travail n'a vocation à défendre aucun parti politique, mais à informer le plus justement possible les gens qui nous lisent et nous regardent". 

À [44:52], elle interpelle le député insoumis et utilise la première personne du pluriel ("Nous, on vous a posé des questions très précises") en s'incluant donc aux côtés de Pardo et Hirsch, ce qui participe certainement à renforcer ce sentiment de "trois contre un". Ce dernier s'explique surtout par le fait que Nassira donne, par endroits (lors de la séquence sur le visuel LFI, sur laquelle nous reviendrons), son avis. Ce qu'elle assume parfaitement. À ce sujet, elle pointe une "critique à géométrie variable" qui ne serait pas acceptable : "Ça ne m'a jamais été reproché par les abonnés lorsqu'il s'agit de mes positions sur d'autres sujets, et c'est la première fois qu'on me le reproche depuis 2020". De son côté, Robin Andraca estime que "le rôle de l'animateur ou de l'animatrice de l'émission est en effet davantage de poser des questions, que de donner son avis. C'est malgré tout dans ce rôle-là qu'elle se situe, la plupart du temps, sur ce plateau". Concernant cette émission en particulier, il estime que cette façon de présenter "se défend" mais que "ce n'était peut-être pas indispensable" vu la composition du plateau. 

Autre élément vivement critiqué dans le forum et considéré comme un parti pris d'ASI jugé problématique : le titre de l'émission qui "officialise l'existence d'un « déni-à-gauche »". "Je fais partie des personnes choquées de l'absence d'un point d'interrogation", commente un abonné. "D'où sort ce terme de « déni » ? C'est peut-être par là qu'il aurait fallu commencer.... C'est les médias de droite et d'extrême droite qui ont "construit cette idée" abonde un autre. C'est également la critique principale formulée par Hadrien Clouet qui  juge ce titre "clairement en décalage avec l'objet de l'invitation [dont ce sujet ne constituait qu'une partie, dit-il], en plus que d'affirmer directement une thèse à charge". La thématique annoncée aux invités portait sur "les discours médiatiques sur l'antisémitisme, confirme Nassira, mais l'échange entre Pardo et Clouet a pris beaucoup plus de place et de temps que ce que j'avais imaginé"

Si un point d'interrogation eut, de fait, été plus prudent, son absence est parfaitement assumée par Nassira El Moaddem qui s'occupe de l'éditorialisation de la page de l’émission, ainsi que de sa titraille (le plus souvent en concertation avec la rédaction en chef) : "À partir du moment où il y a un certain nombre de propos problématiques qui sont tenus, notamment de la part de Mélenchon, qu’on y ajoute une affiche qui selon moi reproduit des codes antisémites, j'estime qu’il y a une forme de déni, oui". À la critique pointant que le titre "considère comme acquis sans avoir analysé l'existence d'un déni", notre présentatrice répond qu'elle "formule" ce déni "après une heure 40 d'émission". Qu’en est-il du côté de la chefferie ? Pour Robin Andraca, "le titre est bon, en ce sens qu'il reflète ce qu’il y a dans l’émission" mais il marque aussi le fait que l’émission n’est "pas très média".

Un manque d’analyse et de critique média ?

Vous êtes nombreux à vous être dits "frustrés" par l'émission qui selon vous "s'écarte de l'objectif premier d'ASI" et comporte "peu d'analyse" et confond "le débat politique et l'analyse des images". "Vous vous devez de déconstruire les images, pas de les commenter comme ailleurs" assène un abonné. "Il y là une forme de contradiction pour ASI de sortir de l'analyse de l'image pour se restreindre à l'analyse des réactions à l'image, lâche un autre. Constat partagé par Robin Andraca, qui comprend le sens de ces messages. "Ça arrive souvent que l’on soit plus axé sur le fond que sur la forme" répond de son côté Nassira qui argue également que "l'analyse des discours" fait partie des missions de l'émission : "Quels mots on utilise et de quelle manière, c'était le cœur de l'émission"

émission ASI, mode d'emploi 

Le thème de l'émission est généralement déterminé le lundi matin, en conférence de rédaction. Il peut être proposé par le ou la journaliste qui animera le plateau (3 fois sur 4 Nassira), ou par d'autres journalistes de la rédaction. À partir de là, malgré des échanges réguliers avec l'équipe tout au long de la semaine à propos de l'angle, des invité·es possibles, ou des images qui peuvent alimenter d'éventuels montages, le ou la journaliste en charge de l'émission bénéficie d'une autonomie éditoriale quasi-totale. C'est lui ou elle qui tranche sur la composition finale de son plateau (et le compose), l'angle choisi, les montages diffusés pendant l'émission (en concertation avec le ou la documentaliste de l'équipe), et la manière de mener son émission, et d'orienter le débat. Comme précisé dans ce contenu, c'est également lui ou elle qui écrit le contenu de l'émission, et propose un titre (source parfois de discussions au sein de l'équipe) avant publication. 

Concernant ce focus forme / fond (si tant est que l'on considère que le traitement médiatique ne relève que de la forme), Nassira dit préférer lorsqu'il y a "un équilibre entre les deux" et reconnaît que "pour cette émission c'est peut-être moins le cas que pour d'autres". Comment l'expliquer ? "Je sentais qu’il y avait une urgence de dire ces choses pour les invités".

Angler sur les accusations d'antisémitisme dans les médias et leur instrumentalisation (que nous documentons régulièrement) aurait indéniablement constitué une approche plus "médias", plutôt que la question de savoir si LFI est antisémite ou pas. Car la "narration médiatique dominante" pointe Robin, consiste à dire que LFI est antisémite. Il convient cependant de noter qu'à [01:00:18], le troisième "magnéto" diffusé concerne ces accusations d'antisémitisme visant LFI dans les médias. Après sa diffusion Nassira demande à Robert Hirsch : "C'est quand même compliqué de partir de propos très problématiques de la part de Jean-Luc Mélenchon ou d'une affiche qui reproduit des codes antisémites et de dire que le parti de la France insoumise est antisémite. Est-ce que vous cet écart-là vous le faites ?". L'historien de l'antisémitisme et militant répond : "c'est pour ça, que je n'ai jamais dit dans tout ce que j'ai écrit que la France insoumise était un parti antisémite". On ne peut donc pas affirmer qu'ASI relaie ici les mêmes discours que certaines chaînes d'info. Mais il est vrai que les invités ne commentent pas vraiment les images du magnéto et enchaînent rapidement sur les accusations portée contre "la gauche" qui n’est "pas claire sur l'antisémitisme" et l'antisémitisme "pas assez présent dans les discours antiracistes" (Hirsch).

Ce sentiment d'un manque d'analyse médiatique peut aussi s'expliquer par le fait que plusieurs séquences n'ont pas été diffusées, faute de temps, comme nous le confirme notre documentaliste, Erwan Batoz, qui s'occupe de préparer ces montages. C'est, par exemple, le cas d'un magnéto revenant sur les faux slogans antisémites de la manif du 22 mars, relayés dans plusieurs médias ou d'un autre sur les faux témoignages de victimes de l'antisémitisme dont l'analyse devait porter sur le potentiel préjudice pour la lutte contre l'antisémitisme, et sur la façon dont ils déforment les discours médiatiques. Leur diffusion aurait certainement atténué ce "sentiment de déséquilibre", concède Nassira qui regrette de ne pas avoir eu le temps de le faire. "Comme il l'a été dit sur le plateau, je suis parfaitement consciente de l'instrumentalisation politique et médiatique des accusations en antisémitisme qui visent la France Insoumise"Elle le reconnaît : "Jonas Pardo avait un certain nombre de griefs à faire à LFI, ça a pris beaucoup de temps" mais elle défend ce choix : "Médiatiquement parlant, ces gens ne se rencontrent pas donc c'était l'occasion pour lui de les adresser directement aux insoumis et pour Hadrien Clouet d'y répondre", ajoutant "on est dans notre rôle ici, de laisser cette discussion se faire sur les discours de l'antisémitisme"

Notre présentatrice rappelle par ailleurs que "l'instrumentalisation politique a été abordée et déconstruite" à propos  du "Rassemblement National dont la ligne a été relayée par un certain nombre de médias". La séquence et le magnéto sont visibles à [01:16:39].

Le visuel de Cyril Hanouna

17 minutes après le début de l’émission, est évoqué le fameux visuel polémique mettant en scène une image de Cyril Hanouna générée par IA et accusée de reproduire des codes antisémites. Un visuel que Daniel Schneidermann considère dans une chronique - elle aussi vivement critiquée - comme "très clairement inspirée des codes antisémites des années 30 (image de gauche, avec nez crochu, rictus de haine, regard lourdement cerné, visage penché en avant)".

Dans l'émission, Nassira décrit un "visage sombre à l'expression agressive, des sourcils froncés, le nez crochu, grimaçant, les dents apparentes". Un peu plus loin, et à la suite d'un léger quiproquo avec le député insoumis, Nassira le pousse dans ses retranchements afin de le faire sortir de ses éléments de langage : "On ne parle pas d'une image neutre de Cyril Hanouna ! On parle de ce nez crochu, on parle du fait que ce soit très sombre, qu'il soit comme ça, en hauteur, en position de domination. Ça, c'est des effets de la propagande nazie" argue-t-elle avant d'ajouter : "Enfin, je veux dire, je n'ai pas fait d'histoire de l'image pendant 5 ans pour le savoir !". La remarque semble avoir été mal perçue par certains, interprétée comme un signe de mépris. En réalité, Nassira veut simplement dire que les codes antisémites sont, à ses yeux, évidents. Et elle l'assume : "Je considère que le visuel représentant Hanouna est une affiche qui reproduit des codes antisémites". Mais insiste sur le fait que "cela ne veut pas dire qu'[elle] accuse le parti d'être antisémite". "Ce n'est d'ailleurs pas ce qui a été dit durant l'émission".

Certains abonnés ne sont pas d'accord avec cette façon de présenter les choses et déplorent le fait qu'elle "octroie d'emblée un caractère antisémite à une affiche qui ne l'est pas""Née en 1940, très opposée à toute forme de racisme dont l'antisémitisme, passionnée par l'affaire Dreyfus, je crois connaître les codes graphiques qui rendent antisémite un portrait ou une caricature" commente un autre asinaute avant d'ajouter "où voit-on dans le visuel de LFI un nez crochu et des oreilles pointues ?". À [46:29] Nassira cite un billet d’André Gunthert consacré au visuel. Certains regrettent que les éléments de ce texte qui mettent en balance la polémique ne soient pas évoqués ("il ne suffit pas de croire reconnaître quelques stéréotypes empruntés à un contexte où le juif était dénoncé par la caricature d’un physique prétendument «sémite» pour faire d'un portrait menaçant une image antisémite").

Des abonnés auraient aimé avoir notre ancien chroniqueur et enseignant-chercheur en culture visuelle en plateau pour proposer un véritable "arrêt sur images" sans parti pris, afin de leur permettre de se faire leur propre avis sur le sujet. Il est vrai que la présence d'un représentant de LFI aurait pu (dû ?) être l'occasion de lui poser davantage de questions sur les conditions de production du visuel (qui, selon LFI, a été créé grâce à Grok, l'outil d'IA de X, ce que répète Hadrien Clouet sur le plateau) et de la campagne dont il faisait partie. 

"Quelle requête [a été donnée à l'IA pour générer cette image] ? Quid des codes graphiques choisis : sachant que la campagne a débuté avec le duo Trump/Poutine, est-elle inspirée de la campagne américaine « Trump Resistance Movement » qui possède les mêmes codes visuels ? On a bien fait (à juste titre) une comparaison en plaçant côte à côte une affiche de propagande nazie et le visuel d'Hanouna, pourquoi ne pas le faire avec cette campagne contre Trump ? Quelle est la chaîne de validation (sans forcément donner des noms) ? Combien de visuels précisément ont été produits, avec quelles personnalités, quelle chronologie ?" se demande un abonné, précisant que ce sont des "questionnements qu'on a habituellement de la part d'ASI et qui là étaient totalement absents". Nassira répond : "Pour moi, la reproduction des codes antisémites est tellement évidente que je passe vite cette étape pour interroger la question du mode haineux en reprenant celle de Gunthert « Faut-il des images de haine pour dénoncer les discours de haine ? » mais elle dit comprendre que "ça ne soit pas suffisant pour certains abonnés qui auraient voulu s’attarder plus longtemps sur la question du caractère antisémite ou non".

Accusations diffamatoires et contradictoire

Dans le forum mais aussi sur les réseaux, plusieurs séquences ont suscité des réactions indignées, dénonçant un discours caricatural, de contre-vérités, voire diffamatoire, de la part de nos invités, et de Jonas Pardo en particulier. Nos journalistes n'étant pas omniscients, il leur est compliqué de pouvoir contredire toute affirmation approximative, partielle ou malhonnête formulée en direct. Ce qui ne les empêche pas d'intervenir quand les accusations sont excessives ou ne peuvent être contredites.

À [01:07:21], Robert Hirsch affirme que Tsedek est dans le "déni de l’antisémitisme", "alors qu'il y a de nombreux communiqués et interventions du collectif qui montrent l'inverse" plaide Simon Assoun du collectif en question, auprès d'ASI. Une minute plus tard, Jonas Pardo évoque, non sans mépris, les "dix juifs de Tsedek qui viennent de pondre un texte qui explique que la fête de Pourim est une fête génocidaire et que le judaïsme serait une religion qui prône le massacre". Nassira intervient immédiatement et somme le militant de bien vouloir "[laisser] Tsedek de côté parce qu'ils ne sont pas là pour répondre" et insiste "s'il vous plait, pas de règlement de compte". Difficile d'aller plus loin dans le contradictoire pour qui n'a pas lu le texte dont il est question. Sur les réseaux sociaux, plusieurs figures du collectif décolonial ont dénoncé les propos de Jonas Pardo, et n'ont pas hésité à contre-attaquer en visant le militant de Golem. Des passes d'armes qui n'ont rien d'inhabituel sur X pour les militants des deux collectifs.

Dans le forum, mais aussi sur X, il nous est demandé à maintes reprises pourquoi nous n'avons pas invité le collectif (juif décolonial) ou encore l’UJFP afin d'"équilibrer les débats". Commençons par rappeler qu'ASI invite Tsedek comme dans cette émission de novembre 2023, avec Simon Assoun du collectif  et Émile Ackermann, rabbin d'une synagogue orthodoxe moderne à Paris. Récemment encore, dans un article sur "Nous Vivrons" et le 8 mars, nous interrogions Tsedek mais aussi l'UJFP (Union Juive Française pour la Paix), ainsi que Kessem (collectif de féministes juifves decolonial·es françaises et israéliennes). 

Mais pour l'émission du 28 mars, Nassira (qui a carte blanche pour choisir ses invités, comme expliqué ci-dessus) a estimé que ce n’était "pas forcément une bonne idée d'inviter Golem et Tsedek sur le même plateau". D'une part parce que l'idée était de "pouvoir faire débattre un parti politique incarné par Clouet critiqué sur le déni de l'antisémitisme à gauche et des voix juives de gauche qui ont à dire dessus". D’autre part, parce que cela se serait, selon elle, "terminé en règlement de compte". Au vu de la réaction de Pardo sur le plateau et de celles "de part et d'autre" suite à la publication de l'émission, elle en est "encore plus convaincue" aujourd'hui.

Suite à la diffusion de l'émission, le compte @maobigschlong a diffusé sur X plusieurs séquences de l'émission dont il juge les "propos discutables". Dans l'une d'elle [01:36:56] , Jonas Pardo appelle "l'ensemble des forces de gauche à faire le bilan d'une période qui est celle de la période de Dieudonné" et évoque David Guiraud qui "dans une interview revendique avoir fait sa formation avec Alain Soral". Une référence à un portrait du député publié en décembre 2023 dans Libération dans lequel on peut lire "comme beaucoup de jeunes des années 90, David Guiraud a regardé des vidéos de Dieudonné et d'Alain Soral, antisémites à l'audience massive dans les années 2000 et 2010". En réaction à cet extrait de notre émission, le député du Nord a publié un long tweet aux allures de billet de blog : "Autopsie d'une diffamation". L'insoumis y affirme, pour la première fois publiquement, n'avoir "jamais tenu ces propos" et accuse le journal de les avoir "totalement déformés" pour "y laisser planer une ambiguïté qui suffirait à [le] clouer au piloris"

Et maintenant ?

À lire certains, cette émission du 28 mars serait "catastrophique" et susciterait une telle déception qu'elle les pousserait jusqu'au désabonnement d'Arrêt sur Images. La rédaction le regrette, évidemment. "On est très heureux quand les gens s’abonnent à ASI, c’est de très loin notre principale source de revenus, ce qui permet à Arrêt sur images de continuer à exister, et à nous de continuer à travailler" rappelle notre directeur de la publication. Robin Andraca martèle toutefois que "notre seule boussole est l'intérêt public" et qu’on "ne cédera à aucun chantage, ni de la part de partis politique, ni de la part d'abonnés même si l'on sait combien nous avons besoin d'eux et ce qu'on leur doit". En témoigne, en premier lieu, ce retour critique que l'on vous devait bien. 

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