Et Darmanin se révéla Moussa...
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Et Darmanin se révéla Moussa...

Et à l'instant de passer ses pouvoirs, Gérald Darmanin découvrit le racisme systématique français. "Je m'appelle Gérald Moussa Jean Darmanin. Si je m'étais appelé Moussa, je n'aurais pas été élu maire et député et sans doute n'aurais-je pas été ministre de l'Intérieur."

Mieux vaut tard que jamais. Ce même Darmanin qui, alors ministre de l'Intérieur, lors du vote de la loi immigration contre les Moussa d'aujourd'hui, avait regardé "avec bienveillance", selon Le Monde, les sénateurs LR durcir la version gouvernementale du texte, fait donc son coming out avec ses bagages, sous le regard impénétrable d'un Bruno Retailleau, qui ne s'appelle pas Moussa,  et s'est fixé trois priorités : "rétablir l'ordre, rétablir l'ordre, rétablir l'ordre".

Mais quelle histoire nous raconte-t-on donc, depuis la nomination de Barnier, avec le feuilleton haletant de la composition du gouvernement ? Quel est ce "narratif" ? Vu de l'extérieur, de chez nous, je veux dire de la gauche, le bras de fer surmédiatisé des derniers jours entre LR et le "bloc central" (appellation qui elle-même est une trouvaille de ce narratif), plonge dans une certaine perplexité. 

 A croire que ce sont deux partis farouchement opposés sur des points essentiels, qui se disputent le pouvoir. Mais sur quels points ? La réforme des retraites ? Michel Barnier, lors des primaires LR de 2021, était favorable à un âge légal de ... 65 ans ! Sur le déficit ? Sur la manière de faire gober à Bruxelles que l'on va s'employer à le combler, notamment en super-taxant  les "super-riches" ?  Mais qui peut croire que la veille droite, qui a toujours rêvé tout haut de l'abolir sans jamais l'oser, est davantage enthousiaste à rétablir l'ISF que le "bloc central" ?  Soudain, se seraient-ils tous poutouïsés ?

Sur les dépenses, alors ? Oui Macron a creusé le déficit, mais n'importe quel président de droite, face au COVID par exemple, aurait fait la même chose. Comme le "bloc central", je ne donne pas une semaine au gouvernement Barnier pour partir à la chasse aux fraudes sociales (vous savez bien, les pauvres qui s'achètent des écrans plats avec l'argent des allocs). Pour tout dire, vu de l'extérieur, la différence essentielle entre "le bloc central" et la vieille droite, c'est que les uns ont été au pouvoir sept ans, et pas les autres.

Sur la loi Immigration, il est vrai, l'opposition a été magistralement mise en scène. Par exemple sur l'instauration d'un titre de séjour sur les métiers en tension. Les sénateurs LR y étaient opposés. Les macronistes y étaient favorables, oui mais "sauf polygamie ou non respect des valeurs de la République". La divergence essentielle portait sur la question de savoir si on accepte tous les Moussa pour la plonge dans les restaurants, ou seulement les Moussa humbles et discrets, comme il sied aux Moussa. Autrement dit, sur la mise en musique de l'agenda RN.

Sans  doute une vraie divergence existe-t-elle ailleurs :  sur le "sociétal". L'inscription de l'IVG, les thérapies de conversion, le mariage pour tous. Heureusement, Barnier (qui votait en 1982 contre le remboursement de l'IVG par la Sécurité sociale) assure que ces "grandes lois de liberté de progrès social" ne sont nullement menacées. Il faut espérer que ce ne sera pas trop difficile, pour les nouveaux ministres, de gouverner ainsi contre leurs convictions profondes.

Donc, deux hypothèses. 

Soit la querelle LR / Bloc central portait seulement sur la répartition des postes de ministres, lutte de convoitises qui accroit ma perplexité personnelle : se sont-ils vraiment battus pour savoir qui enverrait davantage de kamikazes, dans ce gouvernement condamné d'avance,  dans lequel il n'y a que des coups à prendre ?

Reste une dernière hypothèse : celle d'une haletante mise en scène, histoire de donner au gouvernement Barnier le fameux "parfum de cohabitation" (nous avons  compris le résultat des élections, ce résultat nous oblige, on va tout changer. La preuve, voyez comment on se bastonne déjà).  Je n'ose y croire.


Le blog Obsessions est publié sous la seule responsabilité de Daniel Schneidermann, sans relecture préalable de la rédaction en chef d'Arrêt sur images.

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