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Brice Hortefeux, nouveau lexicographe

Derniers commentaires

Mieux que George Orwell…
Ou comment la réalité dépasse le fiction !


La France devient-elle un pays totalitaire ?

« Le ministre de l’Intérieur porte plainte contre des personnes qui ont accusé, dans différents médias, la police d'être responsable de la mort de Yayou Sanogo, un jeune homme de 18 ans, livreur de pizzas, victime d’un accident de moto à Bagnolet, le 9 août. »

Maintenant dés qu’un lambda témoigne d’un fait ne plaisant pas au Prince et/ou ses vassaux ; nonobstant le rôle de la justice qui devrait se prononcer sur tout témoignage se rapportant à un crime, Monsieur Brice Hortefeux Ministre de l’Intérieur fait pression sur les témoins pour les intimider et les empêcher de faire leur travail de citoyen.

Il me semble que cet comportement répréhensible est prévu par le code pénal.


Stan 1000g, soumis à aucune autorité


PS : ce sujet est trop important pour placer ma vanne habituelle de Hortefeux en boutefeux
Un femme de, soixante ans qui s'était immolée vient de mourir : elle protestait contre l'expulsion de son mari sans papier. Hortefeux macabre.
Décès
Est ce qu'il a pensé ce cher Mr Hortefeu, que le Vel d'Hiv n'existe plus ?
c'est vrai qu'il y a le parc des princes qui est encore plus grand....
Je viens d'achever la lecture d'un 1er livre d'Ahmed Djouder intitulé "Désintégration", paru chez Stock (*) en 2006. Les 156 pages sont un long cri de colère et de révolte contre un occident colonialiste, impérialiste, oppresseur, exploiteur méprisant et hypocrite des richesses et des peuples d'Afrique. En même temps qu'un constat amer. L'auteur est né en Lorraine, il est aujourd'hui éditeur et vit à Paris. On peut penser que la colère et l'amertume produisent parfois une expression excessive, caricaturale et partiale ; autrement dit, même si je comprends et partage les raisons de la révolte, je n'ai pas tout aimé dans le discours d'Ahmed Djouder. Mais c'est infime, comparé au "flux" de ce long monologue qui apostrophe vivement le lecteur supposé être un "français bien de chez nous" (si tant est que cela existe ...) un peu à la manière d'un rappeur parfois.

Deux extraits pour se faire une petite idée :

- la 1ère page du livre, reproduite en 4e de couv :

« Nos parents ne joueront jamais au tennis, au badmington, au golf. Ils n’iront jamais au ski. Ils ne mangeront jamais dans un restaurant gastronomique. Ils n’achèteront jamais un bureau Louis Philippe, une bergère Louis XV, des assiettes Guy Degrenne, des verres Baccarat, ni même un store Habitat. Ils n’assisteront jamais à un concert de musique classique. Ils ne posséderont jamais de leur vie un appartement ou une jolie propriété quelque part en France où finir leurs jours tranquillement. Non, ils ont préféré investir dans des maisons au bled, en ciment, au prix de plusieurs décennies de sacrifices, qui ressemblent vaguement à des cubes et qu’ils appellent des villas. »

- la page 101 : à propos de la jeunesse des quartiers...

" Nous, les petits casseurs et les petits tagueurs de banlieue, qui commettons de petits délits, sommes des feux follets. Nous exprimons un millionième de la violence reçue. Il ne s'agit pas d'accepter. Il ne s'agit pas de justifier. Il faut voir la violence, son origine. Nos vies sont des problèmes qui se mordent la queue : pas de république ? pas de fraternité. Pas de fraternité ? pas d'accueil. Pas d'accueil ? pas d'appartenance. Pas d'appartenance ? pas d'identité. Pas d'identité ? pas de transmission. Pas de transmission ? pas de langage. Pas de langage ? pas d'école. Pas d'école ? pas de formation. Pas de formation ? pas de métier. Pas de métier ? pas d'argent. Pas d'argent ? pas d'appartement. Pas d'appartement ? pas de point de départ. Pas de point de départ ? pas de sens. Pas de sens ? pas de valeurs. Pas de valeurs ? pas de république..."

(*) Stock ? Ils font de bons choix quand même souvent non ?
un commentaire que j´avais mis sur le sujet referendum en autriche que je trouve bien adapté ici

ça ressemble à une autre campagne de dénigrement des "nonistes" qui seraient donc tous xénophobes, racistes et antisémistes ( forcément), alors que les ouiistes qui dirigent l´europe en construisant un double mur barbelé électrifié de 15 mètres de haut avec plein de petits blitz herrteufel qui veillent à ce que personne ne passent, afin de conserver " les origines chrétiennes de l´europe", eux heureusement ne sont pas xénophobes. ils sont seulement plein de bon sens........
on écrira dans les livres d´histoire : " au XXIe siècle les migrations humaines s´arrêterent définitivement grâce à l´action conjuguée et clairvoyante de notre Guide de la Rupture (que les chinois traduisirent par Shakeqi),et de son ministre de l´immigration et de la race indo-européenne.
nous sommes gouvernés par des gens qui non seulement nous méprisent, mais de surcroit nous insultent, relayés par des Apathie qui reprennent le même de raisonnement. " si tu dis que not´président n´aime pas la France, alors tu es un fachiste. dans toutes les grandes démocraties telles que la tunisie, le fonctionnement est identique. " si tu critiques le gouvernement, alors tu critiques le pays, tu es un ennemi de la nation" pas étonnant que shakeqi en soit un admirateur.
mais shakeqi n´est pas une ordure puisqu´il veut qu´on commémore la shoah.^^

msieur princen , pourriez vous avoir l´amabilité de faire savoir à vot´patron que le conchie, lui et ses sbires.
« Petites et grandes soustractions », un documentaire de Christine Thépénier, documentariste qui « porte essentiellement sur le contrôle insupportable exercé par les institutions sur les personnes bénéficiaires du RMI, souvent déjà en grandes difficultés ». Les travailleurs sociaux savent bien que là aussi les mots ont un sens

Voici l'intervention de "Michel Chauvière, sociologue spécialiste des politiques et pratiques sociales, qui parle de ces nouveaux [s]maux[/s] mots comme "inemployabilité" :Petites et grandes soustractions

Extrait de l'article de Rue89 : Le rmiste, le travailleur social et sa calculatrice
[large]Novlangue[/large] - par le moteur de recherche du Monde diplomatique
La nouvelle vulgate planétaire par Pierre Bourdieu et Loïc Wacquant.
encore une question qui me vient à l´esprit.
si seuls sont autorisés à entrer en France ceux qui viennent pour être productifs, que ferons nous des français qui continueront à ne pas l ´être ?
on les expulse ?
ceux qui n´auront pas les moyens d´employer une domestique malgache devront accepter un emploi raisonnable ?
dans le nouveau lexique herrteufeulien on remplace "dents" par "ADN".
c´est la meveille du progrès technologique. le tri peut se prétendre "scientifique".lorsqu´on aura bientôt découvert le gène du criminel, du pédophile, du fainéant, du grèviste, du gauchiste, du casstoipovcon, (ptit préz nous a annoncé leur découverte prochainement durant la campagne) on pourra enfin peupler la France de gens sains d´esprit qui se lèvent tôt le matin.
Bienvenue chez edvige !!!
Rien de spécial à dire, si ce n'est que je trouve (comme souvent) votre chronique remarquable car elle remet parfaitement les choses et les mots à leur place.

Pour qu'elle sorte du cercle des Asinaute, je la mèle au 4 vents.

Ah si tout de même, un truc :
je suis étonné que cette commission,comme beaucoup d' autres mises en place par ce gouvernent,
une fois leur job fini ne s'expriment plus, ou très peu. Ne s'expliquent pas.

Or, comme le montre l'émission d'ASI. avec certains membres de la commission dite Copé, ces commissions sont pas mal phagocytées, voire instrumentalisées.
De la à penser que ce ne sont que des cautions pour endormir le populo et les médias (qui franchement sont très promptes à ne pas fouiller).

Là, Brice Hortefeux a pu tranquillement nous faire son petit glissement sémantique sans que les membres de a commissions qui ne sont pas des idiots,
(y avait du lourd), ne protestent ni ne s'en ne s'en émeuvent. Et c'est passé, comme TOUT le reste, comme une lettre à la Poste.

Sans voir e mal partout, une bizarrerie qui peut éclairer les choses : on retrouve Pierre Mazeaud dans le trio arbitral du dossier Tapie/CL.

Bien amicalement
Merci Judith. Oui les mots font les choses. Et un simple déplacement linguistique doit être à examiner avec microscope et jumelles. Judith est le Karl Kraus du XXI ème Siècle ! Pendant ce temps, Walpole, lui, s'est promené du côté de la Clairière des Justes à Thonon Les Bains pour cette Journée contre le Racisme et l'Antisémitisme. Il y avait là des hommes et des femmes de toutes conditions et bien sur nos écharpes tricolores, sous-prefet en tête. Voilà ce que Walpole écrit au final de son article ( "Ce dimanche, Clairière des Justes") :

"Après le morceau musical « Prière de la Vie juive » de Chagall, le Sous-Prefet s’essaya à une lecture historique, mettant l’accent sur la rafle honteuse du Vel’d’Hiv commandée par les politiciens pétainistes et exécutée par la Police française (oubli malheureux du qualificatif de “française“). Il évoqua les différents statuts des juifs qui furent autant de persécutions. «N’acceptons pas d’être les témoins passifs et les complices de l’Inacceptable. Luttons ».

Walpole fut alors pris d’un léger vertige lorsque s’imposèrent à lui les réminiscences des applaudissements très contemporains d’un certain Ministre célébrant les chiffres des expulsés ramenés par ses préfets, indifférent devant les cris des travailleurs africains expulsés des Foyers au petit matin. Attention, Walpole se garde bien de faire un amalgame a-historique et de rabattre les oppressions du moment sur l’Extermination. Mais il retiendra ce mot d’ordre : « Luttons » pendant que la Sonnerie aux Morts et la Marseillaise retentiront dans le calme de la Clairière.
"

Walpole [http://www.pensezbibi.com]
Bravo Judith pour ce remarquable exercice de décryptage sémantique. J'adore.

J'ai toutefois une grosse remarque sur votre chronique.

C'est le choix de 1984, ce livre qui, pour moi comme pour d'autres @sinautes ainsi que l'indiquent leurs posts, est à l'origine de ma conscience politique.

Je voulais vous faire remarquer que même si on dit que cette oeuvre avait été faite au départ pour critiquer la Grande Bretagne des années 40, Orwell étant anarchiste, j'ai beaucoup de mal à y croire car pour moi, elle est purement et simplement LA critique/analyse du modèle totalitaire sur laquelle il y a lieu de s'interroger. Je vous rappelle comment Hannah Arendt définit le totalitarisme : il s'agit d'un type de système qui est au-delà de la dictature parce que les dictateurs s'attaquent à leurs opposants, mais que les régimes totalitaires s'attaquent aussi aux innocents (Juifs ou homosexuels pour les nazis, koulaks pour le stalinisme, intellectuels ou porteurs de lunettes pour les Khmers Rouges....) . C'est un système où l'être humain n'est jamais en sécurité et donc doit se soumettre sans savoir ce qu'on pourrait lui reprocher. Il est une victime déshumanisée.
Si Big Brother vous regarde, c'est que n'importe quel comportement peut devenir déviant et faire de vous un ennemi du système à votre corps défendant. Dans sa cellule où il est enfermé au début de son emprisonnement, le héros de 1984 se retrouve avec comme compagnon d'infortune un fana du régime qui a été dénoncé par son fils parce qu'il disait dans son sommeil du mal de Big Brother.
Quant à la Novlangue, elle est un système de réduction maximale des mots et des concepts. C'est clairement expliqué par le promoteur de cette langue, ami du héros, qui lui aussi disparaîtra dans le précipice totalitaire parce qu'il pense trop, même s'il est en faveur du régime et de son système.

Or la Novlanque de Brice Hortefeux, c'est tout le contraire : même si on noie le poisson, on va vers l'accumulation des termes de la langue. La Novlangue orwellienne va vers la diminution du nombre de mots et du nombre de concepts, la Novlangue Hortefeux ouvre sur une expansion continue. A l'image du capitalisme qui va vers l'expansion continue et de la croissance et des territoires conquis (la mondialisation) et de la richesse (la financiarisation ou globalisation). Le système trouvera sa limite dans l'épuisement des ressources et des territoires à conquérir, et dans les krachs boursiers qui vont s'ensuivre, mais nous n'y sommes pas encore tout-à-fait, seulement aux premiers soubresauts. Par contre, les processus totalitaires et de dictature sont des limitations, et de la langue, et de la société.

En tout état de cause, il est à mon sens faux de penser que 1984 a un rapport avec ce qui nous arrive. Que la manipulation de la langue soit à l'origine même du pouvoir, je n'en disconviens pas, et ce brillant opus d'Orwell le démontre admirablement. Mais la démonstration s'arrête là. Je pense que Jean-Pierre Le Goff a raison de dire que le phénomène auquel nous devons faire face est d'une toute autre nature que le totalitarisme ou même l'autoritarisme, même s'il y a emprunt à d'autres systèmes d'asservissement, dont le totalitarisme.

Quoi ? C'est très difficile à définir. Mais je dirais qu'une première piste serait celui de l'expansion pure du pouvoir, évidemment celui des dominants. J'emploie dominants dans le sens éthologique et politique du terme, pas dans le sens marxiste. Par exemple, en plus de la dimension de la financiarisation et de la mondialisation comme accumulation, on constate que notre type de société voit une autre sorte d'expansion, c'est celle des droits des minorités (raciales, religieuses ou sexuelles........). Tant mieux pour elles, mais n'est-ce pas aussi quelque chose à interpréter comme une expansion du droit à la jouissance cher aux soixante-huitards (Jouissez sans entraves), avant tout au plaisir des dominants et de leurs affidés ? Cf toute une série de comportements bling bling à la tête de l'état en France. Ou les USA qui font la guerre en Irak dans l'intérêt de leurs multinationales, ce qui à terme provoque des problèmes politiques considérables. Ou quand on voit ces dirigeants occidentaux baver sur le modèle chinois qui a réussi la quadrature du cercle : une dictature efficace communiste avec le droit à la jouissance de ses dirigeants, ce qui n'était pas le cas des dictateurs soviétiques qui pour justifier leur domination étaient obligés de se serrer la ceinture et ne pouvaient vivre comme des milliardaires.

Cette accumulation du pouvoir serait géographique, sociale, politique, économique, financière et sur les plan politique et économique, ce pouvoir nous est confisqué, à nous, dominés des états dominants.
Ce serait simplement cela. Rien d'autre. Et cette expansion du pouvoir se ferait par des manipulations de masse qui n'existaient pas à l'époque d'Orwell. La différence entre la langue d'acier et la langue de coton, par exemple la Novlangue dite Hortefeux.
Et les promoteurs de cette novlangue et de ces manipulations de masse, que sont les Spin Doctors, profitent aussi du système. Ils ne "disparaissent" pas à la mode chilienne un jour comme dans 1984 mais vivent de rentes bien grasses.

Moi j'emporterais plutôt comme livres de plage les oeuvres de Noam Chomsky et de Marcel Gauchet, "L'Industrie du Mensonge : lobbying, communication, publicité et médias" de John Stauber et Sheldon Rampton, aux éditions Agone, "La Démocratie Post-totalitaire" de Jean Pierre Le Goff Editions La Découverte. Et le must : "Propos sur le champ Politique" de Bourdieu (hard si c'est votre premier bouquin de sociologie, mais très instructif sur le rôle des journalistes dans le champ politique).
Et tant qu'à faire, pour connaître la mentalité de ses ennemis (ne donnez pas d'argent, prenez-le à la bibliothèque,) "La Fin de la Démocratie" de Jean-Marie Guéhenno chez Flammarion.

Et je ne résiste pas au plaisir de redonner la conclusion de "L'Industrie du Mensonge" :

"Les lobbyings nous ont volé nos rêves et nous les ont rendus sous forme d'illusions. Il est de notre devoir de rêver plus fort, et de faire tout ce qui est en notre pouvoir, chacun à notre niveau, pour transformer ces rêves en réalité"
Je trouve que la notion de double-pensée est très intéressante pour parler de l'époque que nous vivons.
Il se passe des choses atroces. Et nous ne réagissons pas. Car nous ne voyons pas.
Ou nous croyons ne pas voir.

Chaque fois que j'y pense, je me dis que dans 50 ans, les écoliers et étudiants français parleront peut-être du quinquennat de sarko (j'espère que ça s'arrêtera là...) comme du pire outrage aux droits de l'homme de la république française.
et ils se demanderont où nous étions, ce que nous faisions, et surtout ce que nous ne faisions pas.

c'est peut-être pire que le totalitarisme ; c'est une forme de dictature insidieuse, que nous acceptons un peu plus chaque jour.
Chaque fois que j'y pense, je me dis que dans 50 ans, les écoliers et étudiants français parleront peut-être du quinquennat de sarko (j'espère que ça s'arrêtera là...) comme du pire outrage aux droits de l'homme de la république française.
et ils se demanderont où nous étions, ce que nous faisions, et surtout ce que nous ne faisions pas.

Hélas, j'ai bien peur qu'à cette époque, cela ne concerne plus que les étudiants de troisième cycle en Histoire Politique Européenne (région France) dont les parents gagnent plus de 20 000 euro par mois... autrement dit, personne ou presque. Quoi, je suis pessimiste, non, je ne fais que suivre la courbe rectiligne que nous suivons depuis quelques années déjà... hélas.

yG
j'essaie de rester optimiste

je crois que sarkozy peut être une chance, une chance de nous faire tomber si bas, que ça fasse tout changer

j'attends le grand soir, un grand soir pacifique, où les travailleurs de tous les pays du monde se tiendraient la main pour lutter contre le capitalisme ravageur...
j'essaie de rester optimiste

Vous y arrivez parfaitement, mais bon, je dois reconnaître que je suis un rabat-joie de première catégorie.

j'attends le grand soir, un grand soir pacifique, où les travailleurs de tous les pays du monde se tiendraient la main pour lutter contre le capitalisme ravageur...

Vu d'ici, votre journée s'annonce des plus longues, mais c'est probablement parce que je viens de m'acheter le dernier Naomi Klein que je dois penser cela...

Allez, j'arrête de vous noircir vos vacances bien méritées, surtout lorsque vous vous efforcez d'y mettre un peu de lumière et de chaleur.

;) yG
Je crois qu'il y a quelques amalgames dans ce que tu dis, qui sont peut-être même soutenus par certains auteurs (je n'ai pas lu l'intégralité des livres que tu cites). Je me permets humblement d'apposer une proposition parallèle à certaines de tes explications.




Je voulais vous faire remarquer que même si on dit que cette oeuvre avait été faite au départ pour critiquer la Grande Bretagne des années 40, Orwell étant anarchiste, j'ai beaucoup de mal à y croire car pour moi, elle est purement et simplement LA critique/analyse du modèle totalitaire sur laquelle il y a lieu de s'interroger. Je vous rappelle comment Hannah Arendt définit le totalitarisme : il s'agit d'un type de système qui est au-delà de la dictature parce que les dictateurs s'attaquent à leurs opposants, mais que les régimes totalitaires s'attaquent aussi aux innocents (Juifs ou homosexuels pour les nazis, koulaks pour le stalinisme, intellectuels ou porteurs de lunettes pour les Khmers Rouges....) . C'est un système où l'être humain n'est jamais en sécurité et donc doit se soumettre sans savoir ce qu'on pourrait lui reprocher. Il est une victime déshumanisée.


Je me questionne véritablement sur ce premier point : en quoi 1984 serait une analyse critique du totalitarisme spécifiquement? Car après tout, si l'on fait constamment des parallèles entre ce livre et le système dans lequel nous vivons (qui n'a rien de totalitaire actuellement, quoi qu'on en dise), peut-être le champ est-il bien plus vaste que le simple symptôme totalitaire qui est apparu au 20e siècle. Car en soi l'essentiel de leurs armes, de leurs systèmes sont apparus au 19e siècle. Il en est de même des concepts sur lesquels ils se basent. Les totalitarismes du 20e siècle ne sont pas des mises en place spontanées au service d'une idéologie mais simplement l'auto-destruction d'une société qui pré-existe au nazisme. De même, nous aurons beau prétendre avoir conçu nos sociétés par antagonisme avec ces mêmes totalitarismes, en réalité nous n'avons que préservé la même ligne de conduite. Je crois qu'il s'agit de cette ligne que tente de toucher du doigt Orwell et pas plus précisément le totalitarisme que n'importe quelle autre société occidentale.


Pareil, concernant Hannah Arendt, qui centralise sa problématique sur les camps de concentration, le totalitarisme-génocide. J'y avais fait référence dans la chronique de Bohler sur le bio-pouvoir, le génocide est le revers de médaille de la santé publique, si le bio-pouvoir peut s'accorder le droit d'encourager la production de la vie et sa fonctionnalité, cela ouvre nécessairement cela non-moins énorme d'en décréter l'éradication. Le problème fondamental d'Arendt sur cette question, c'est qu'elle persiste à conserver le mot "humain" sans jamais tenter de voir toutes les acceptions qu'il peut avoir. Si la victime est déshumanisée, quelle est cette humanité qu'on ne lui reconnaît plus et par conséquent, quand la lui reconnaissait-on? Car elle imagine l'humain-âme, l'humain judéo-chrétien, apte au bien et au mal mais toujours unique et irremplaçable. Mais cet humain-là, administrativement, n'a jamais existé. Et c'est administrativement que le génocide a eu lieu. L'humain administratif était à l'age classique l'humain-corps. Dans cette ère moderne dans laquelle nous sommes encore, l'humain administratif est l'humain-vivant. On parlera de cadre de vie, de mode de vie, de politique de natalité, de revenu minimum de subsistance, de temps de travail et de temps de loisir (ou temps de vie), etc. C'est cet humain-là que l'on éradique en employant des termes similaires, dans la taille des dortoirs des camps, le nombre de douches par semaine, les décisions médicales de qui est apte à mourir et de qui peut encore travailler, etc.

Si l'on cible en premier lieu un type de population, c'est autant une stratégie politique qu'une conception idéologique. Cette stratégie existe tout autant aujourd'hui, toutes les facettes de la société doivent avoir un nom : chômeurs longue durée, retraités, handicapés, homosexuels, professions libérales, étudiants, jeunes, délinquants, clandestins, immigrants, etc. Ces termes sont toujours reliés à des institutions précises, ils sont des prises nécessaires pour le pouvoir, des variables à gérer, à traiter selon des dispositifs et des processus précis, avec des enjeux clairs en arrière plan. Dans une société d'auto-destruction telle que le nazisme, l'enjeu derrière la catégorie du juif est l'éradication. Il existe aussi derrière l'art dégénéré, le communiste, l'handicapé, l'homosexuel, etc. Ce qui peut sembler curieux en parallèle de tout cela, c'est la guerre, le combat en dehors du pays, cette tentative d'expansion. Mais ce qui est amusant, c'est qu'elle se base dans un premier temps sur le rassemblement du peuple germanique (donc cela peut rester cohérent avec une logique d'auto-destruction). Ensuite se limite la théorie que j'expose. elle ne suffit pas, de toute manière à épuiser le sujet. Comme je le disais, je préfère mettre ça en parallèle de ce que tu as écrit. Il serait stupide de privilégier une seule pensée face à toutes les autres, il faut simplement les confronter.





Si Big Brother vous regarde, c'est que n'importe quel comportement peut devenir déviant et faire de vous un ennemi du système à votre corps défendant. Dans sa cellule où il est enfermé au début de son emprisonnement, le héros de 1984 se retrouve avec comme compagnon d'infortune un fana du régime qui a été dénoncé par son fils parce qu'il disait dans son sommeil du mal de Big Brother.
Quant à la Novlangue, elle est un système de réduction maximale des mots et des concepts. C'est clairement expliqué par le promoteur de cette langue, ami du héros, qui lui aussi disparaîtra dans le précipice totalitaire parce qu'il pense trop, même s'il est en faveur du régime et de son système.


Big Brother qui vous regarde, je ne pense pas que ce soit précisément pour prévenir une éventuelle désobéissance, le but est sans doute plus large. Premièrement parce que durant le livre on se rend bien compte que le système n'a nullement besoin de preuve pour éliminer les géneurs. Et il n'attendent pas la désobéissance du héros pour s'en débarrasser. On peut objecter que la première désobéissance vient de la pensée et qu'il a par conséquent déjà désobéi. J'en conviens, mais ce n'est pas la caméra de Big Brother qui le démontrera et là encore, c'est plus pervers que ça, c'est en poussant au vice qu'on attrape.

La société panoptique, d'observation, date du 19e siècle. Le 20e siècle n'y apporte qu'une technologie plus avancée. Et cette technologie n'est pas réservée aux totalitarismes, actuellement à Londres il y a 1 caméra pour 5 personnes. Et ça ne réduit pas la criminalité, ce n'en est pas le but. Le but pourrait-être aussi en lui-même de se sentir observé, de se savoir observé, même si ce n'est que potentiellement. Ce système est pour tous.

Ca m'évoque une expérience de psychologie concernant le miroir : nous sommes plus respectueux des règles en face d'un miroir. Ca peut paraître étrange mais l'expérience a été faite tour à tour sur des enfants puis sur des adultes; ça fonctionne (pour ceux qui veulent plus de détails, faites-moi signe, c'est un peu long à expliquer donc je ne vais pas décrire l'expérience maintenant).




Or la Novlanque de Brice Hortefeux, c'est tout le contraire : même si on noie le poisson, on va vers l'accumulation des termes de la langue. La Novlangue orwellienne va vers la diminution du nombre de mots et du nombre de concepts, la Novlangue Hortefeux ouvre sur une expansion continue. A l'image du capitalisme qui va vers l'expansion continue et de la croissance et des territoires conquis (la mondialisation) et de la richesse (la financiarisation ou globalisation). Le système trouvera sa limite dans l'épuisement des ressources et des territoires à conquérir, et dans les krachs boursiers qui vont s'ensuivre, mais nous n'y sommes pas encore tout-à-fait, seulement aux premiers soubresauts. Par contre, les processus totalitaires et de dictature sont des limitations, et de la langue, et de la société.

En tout état de cause, il est à mon sens faux de penser que 1984 a un rapport avec ce qui nous arrive. Que la manipulation de la langue soit à l'origine même du pouvoir, je n'en disconviens pas, et ce brillant opus d'Orwell le démontre admirablement. Mais la démonstration s'arrête là. Je pense que Jean-Pierre Le Goff a raison de dire que le phénomène auquel nous devons faire face est d'une toute autre nature que le totalitarisme ou même l'autoritarisme, même s'il y a emprunt à d'autres systèmes d'asservissement, dont le totalitarisme.


Comme je l'ai écrit dans un post un peu plus haut, le pouvoir le mieux accepté est celui qui a le plus caché ses mécanismes. C'est actuellement le cas de la démocratie. Donc je préfère renverser ton échelle et affirmer au contraire que le totalitarisme a emprunté à la démocratie (d'ailleurs si on oublie le communisme, qui lui part d'un principe révolutionnaire, le fascisme et le nazisme sont partis de démocraties) et qu'il a lui-même une durée de vie assez courte précisément parce qu'il montre sa répression. Le franquisme s'est éteint tout seul, il est amusant de le noter.

Les limitations dont tu parles existent autant ici qu'ailleurs, elles font juste parti du décor. C'est précisément ce qui est ingénieux. Ici nous parlons d'Hortefeux, du gouvernement Sarkozy, simplement parce que sa politique est brutale, très voyante, sans finesse. On s'est moins plaint de Mitterrand ou de Chirac, pourtant ce n'était pas spécialement meilleur, juste plus indolore.

Comme je le disais plus haut, Orwell ne définit pas plus le totalitarisme que la démocratie, plutôt un mode de pouvoir, institutionnel, qui s'est mis en place durant les deux derniers siècles.



Quoi ? C'est très difficile à définir. Mais je dirais qu'une première piste serait celui de l'expansion pure du pouvoir, évidemment celui des dominants. J'emploie dominants dans le sens éthologique et politique du terme, pas dans le sens marxiste. Par exemple, en plus de la dimension de la financiarisation et de la mondialisation comme accumulation, on constate que notre type de société voit une autre sorte d'expansion, c'est celle des droits des minorités (raciales, religieuses ou sexuelles........). Tant mieux pour elles, mais n'est-ce pas aussi quelque chose à interpréter comme une expansion du droit à la jouissance cher aux soixante-huitards (Jouissez sans entraves), avant tout au plaisir des dominants et de leurs affidés ? Cf toute une série de comportements bling bling à la tête de l'état en France. Ou les USA qui font la guerre en Irak dans l'intérêt de leurs multinationales, ce qui à terme provoque des problèmes politiques considérables. Ou quand on voit ces dirigeants occidentaux baver sur le modèle chinois qui a réussi la quadrature du cercle : une dictature efficace communiste avec le droit à la jouissance de ses dirigeants, ce qui n'était pas le cas des dictateurs soviétiques qui pour justifier leur domination étaient obligés de se serrer la ceinture et ne pouvaient vivre comme des milliardaires.


Le droit aux minorités me semble être, une fois encore, plus un questionnement sur le contrôle. Pour les contrôler, il faut les intégrer. Pour les intégrer, il faut les institutionnaliser. Le droit n'est jamais la création d'un comportement mais la reconnaissance de ce comportement. S'il y a un droit, c'est nécessairement parce qu'il y a et qu'il y a eu des interdictions. Ce qui est interdit est relégué au rang du secret, il faut faire croire à son inexistence pour ensuite diriger vers le droit, ce qui existe, qui est permis et donc implicitement encouragé. Car le droit à l'homosexualité reste un droit à ne pas être égal à l'hétérosexualité. En réalité, on tolère l'homosexuel, longtemps pourchassé, mais à condition qu'il se plie implicitement à et état du "moins que l'hétérosexuel" au moins du point de vue du droit, ce qui signifie par conséquent remise en cause de la légitimité intégrale de ce droit.

La jouissance chère aux soixante-huitards, c'est la jouissance de la consommation heureuse, celle des années 50, du début des 30 glorieuses, le début de la société de consommation. La révolution soixante-huitarde n'est pas une révolution du plaisir, de la jouissance. Ca c'est ce qu'on veut nous faire croire, nous faire retenir. L'aspect révolutionnaire de 68, c'est la remise en cause systématique du pouvoir institutionnel et cette révolution est un échec, vu qu'on n'en parle plus. Mais cette révolution a permis un déblocage dans l'éducation, la morale, les rapports sociaux, qui eux n'ont pas servi le politique mais l'économique : déblocage du "ça" freudien, passage d'une société autoritaire à une société de séduction. Le lien entre le droit des minorités et soixante-huit existe, c'est un lien de séduction : sois toi, sois libre, mais gagne ta liberté, consomme. La société post-soixante-huitarde est une radicalisation lente de la consommation, un retour lent à des idées conservatrices qui - le temps d'un rêve de quelques années, 5 ans tout au plus - semblaient être mises en danger. Mais curieusement, toutes les valeurs que l'on nous présentait comme à l'agonies durant la fin des années 80 et le début des années 90 sont aujourd'hui de nouveau "en bonne santé" : le mariage, la famille (à part le problème de la télévision, mais ce serait un peu long à expliquer et ce n'est pas mon propos principal), le travail... La construction est un peu différente toutefois, parce que le système économique est actuellement instable.

Quant à la dictature chinoise, elle ne durera pas éternellement, cela fait longtemps que petit à petit la nécessité économique grignote l'idéologie, tôt ou tard e régime chinois passera à autre chose (pas nécessairement la démocratie pour autant).



Enfin voilà je vais m'en tenir là pour aujourd'hui, mais il y a ici quelques idées que j'avais envie de confronter...

Je crois qu'il y a quelques amalgames dans ce que tu dis, qui sont peut-être même soutenus par certains auteurs (je n'ai pas lu l'intégralité des livres que tu cites). Je me permets humblement d'apposer une proposition parallèle à certaines de tes explications.

Les livres que je conseille sont des livres qui expliquent les formes et les modes de manipulation de cette nouvelle structure de domination qui puisent leurs sources très profondément dans le temps mais qui à mon sens a pris une nouvelle forme dans les années 1980, après la Grande Emancipation des années 70 à laquelle elle riposte. Mon post est ce que je pense moi

Je me questionne véritablement sur ce premier point : en quoi 1984 serait une analyse critique du totalitarisme spécifiquement? Car après tout, si l'on fait constamment des parallèles entre ce livre et le système dans lequel nous vivons (qui n'a rien de totalitaire actuellement, quoi qu'on en dise), peut-être le champ est-il bien plus vaste que le simple symptôme totalitaire qui est apparu au 20e siècle. Car en soi l'essentiel de leurs armes, de leurs systèmes sont apparus au 19e siècle. Il en est de même des concepts sur lesquels ils se basent. Les totalitarismes du 20e siècle ne sont pas des mises en place spontanées au service d'une idéologie mais simplement l'auto-destruction d'une société qui pré-existe au nazisme. De même, nous aurons beau prétendre avoir conçu nos sociétés par antagonisme avec ces mêmes totalitarismes, en réalité nous n'avons que préservé la même ligne de conduite. Je crois qu'il s'agit de cette ligne que tente de toucher du doigt Orwell et pas plus précisément le totalitarisme que n'importe quelle autre société occidentale.

Que notre type de société ne soit pas aussi démocratique qu'on le prétend, c'est certain. Maintenant, ne pas faire d'échelle de supportable entre le totalitarisme, la dictature, et nos démocraties imparfaites, ainsi que les démocraties de type autoritaire telles celles vers lesquelles tend la France actuellement, cela rend l'étude et l'argumentation sur une France qui se bonapartiserait totalement inutile et inaudible. Si tout égale tout, alors vivre en démocratie ou en totalitarisme, ça ne ferait aucune différence. Si certains ont vécu en totalitarisme, alors on pourrait l'accepter nous aussi si nos dominants nous y poussent. Ce raisonnement est évidemment inacceptable, ne serait-ce que parce qu'il suppose l'affiramtion "A quoi sert de lutter ?".

Pareil, concernant Hannah Arendt, qui centralise sa problématique sur les camps de concentration, le totalitarisme-génocide. J'y avais fait référence dans la chronique de Bohler sur le bio-pouvoir, le génocide est le revers de médaille de la santé publique, si le bio-pouvoir peut s'accorder le droit d'encourager la production de la vie et sa fonctionnalité, cela ouvre nécessairement cela non-moins énorme d'en décréter l'éradication. Le problème fondamental d'Arendt sur cette question, c'est qu'elle persiste à conserver le mot "humain" sans jamais tenter de voir toutes les acceptions qu'il peut avoir. Si la victime est déshumanisée, quelle est cette humanité qu'on ne lui reconnaît plus et par conséquent, quand la lui reconnaissait-on? Car elle imagine l'humain-âme, l'humain judéo-chrétien, apte au bien et au mal mais toujours unique et irremplaçable. Mais cet humain-là, administrativement, n'a jamais existé. Et c'est administrativement que le génocide a eu lieu. L'humain administratif était à l'age classique l'humain-corps. Dans cette ère moderne dans laquelle nous sommes encore, l'humain administratif est l'humain-vivant. On parlera de cadre de vie, de mode de vie, de politique de natalité, de revenu minimum de subsistance, de temps de travail et de temps de loisir (ou temps de vie), etc. C'est cet humain-là que l'on éradique en employant des termes similaires, dans la taille des dortoirs des camps, le nombre de douches par semaine, les décisions médicales de qui est apte à mourir et de qui peut encore travailler, etc.

Jamais Hannah Arendt n'a centralisé sa problèmatique sur le génocide. Sa recherche est au contraire une théorie sur l'humain dans son sens politique. Je me demande si vous ne confondez pas avec "Shoah" de Claude Lanzmann. Hannah Arendt, au contraire, considère qu'il y a un humain de type moral. Que cette existence va de soi, c'est un principe de réalité. C'est la "rationalité" nazie qui a ignoré l'être humain pour des raisons sans fondement moral, Les nazis s'étaient mis hors du sens commun. Si la philosophie part du principe que le moi, cad l'être humain n'existe pas, et que leur existence se doit d'être prouvée, la politique, elle, postule que l'être humain existe puisque la politique est l'ensemble des relations entre les êtres humains.

Si l'on cible en premier lieu un type de population, c'est autant une stratégie politique qu'une conception idéologique. Cette stratégie existe tout autant aujourd'hui, toutes les facettes de la société doivent avoir un nom : chômeurs longue durée, retraités, handicapés, homosexuels, professions libérales, étudiants, jeunes, délinquants, clandestins, immigrants, etc. Ces termes sont toujours reliés à des institutions précises, ils sont des prises nécessaires pour le pouvoir, des variables à gérer, à traiter selon des dispositifs et des processus précis, avec des enjeux clairs en arrière plan. Dans une société d'auto-destruction telle que le nazisme, l'enjeu derrière la catégorie du juif est l'éradication. Il existe aussi derrière l'art dégénéré, le communiste, l'handicapé, l'homosexuel, etc. Ce qui peut sembler curieux en parallèle de tout cela, c'est la guerre, le combat en dehors du pays, cette tentative d'expansion. Mais ce qui est amusant, c'est qu'elle se base dans un premier temps sur le rassemblement du peuple germanique (donc cela peut rester cohérent avec une logique d'auto-destruction). Ensuite se limite la théorie que j'expose. elle ne suffit pas, de toute manière à épuiser le sujet. Comme je le disais, je préfère mettre ça en parallèle de ce que tu as écrit. Il serait stupide de privilégier une seule pensée face à toutes les autres, il faut simplement les confronter.

OK, tu vas jusqu'au bout de ton raisonnement. Tu fais de la philosophie, dont le but est la recherche intellectuelle pour elle-même, parce que c'est plaisant, et agréable quand on a les neurones qui frétillent, mais ce n'est pas très fécond en ce qui concerne la façon de sortir de là. La politique, elle peut le faire, parce que les autres, c'est la réalité.

Big Brother qui vous regarde, je ne pense pas que ce soit précisément pour prévenir une éventuelle désobéissance, le but est sans doute plus large. Premièrement parce que durant le livre on se rend bien compte que le système n'a nullement besoin de preuve pour éliminer les géneurs. Et il n'attendent pas la désobéissance du héros pour s'en débarrasser. On peut objecter que la première désobéissance vient de la pensée et qu'il a par conséquent déjà désobéi. J'en conviens, mais ce n'est pas la caméra de Big Brother qui le démontrera et là encore, c'est plus pervers que ça, c'est en poussant au vice qu'on attrape.

Et surtout, il faut s'en prendre aux innocents, ceux qui le sont encore. C'est le principe du totalitarisme. Je suis sûre que tu devrais être passionné par Les origines du totalitarisme de Arendt. Le seul problème est d'oublier ses convictions post-marxistes. Je trouve que les tiennes sont bien hard.

La société panoptique, d'observation, date du 19e siècle. Le 20e siècle n'y apporte qu'une technologie plus avancée. Et cette technologie n'est pas réservée aux totalitarismes, actuellement à Londres il y a 1 caméra pour 5 personnes. Et ça ne réduit pas la criminalité, ce n'en est pas le but. Le but pourrait-être aussi en lui-même de se sentir observé, de se savoir observé, même si ce n'est que potentiellement. Ce système est pour tous.

Non. Mais si, elles ont a une grande utilité. Elle rassurent ceux qui vivent là et qui ont peur. Je ne sais pas si tu as lu une magnifique page de Saint Exupery qui fait l'objet de son livre posthume : Citadelle, où le chef arabe tourne autour de la citadelle qu'il veut vaincre, constate à quel point elle est haute et sans ouvertures. Elle semble inexpugnable. Et pourtant il en conclut qu'il sera vainqueur, parce que ceux qui ont peur et se coupent de l'extérieur sont déjà vaincus par leur propre peur qui les rend inaptes à vivre.

Ca m'évoque une expérience de psychologie concernant le miroir : nous sommes plus respectueux des règles en face d'un miroir. Ca peut paraître étrange mais l'expérience a été faite tour à tour sur des enfants puis sur des adultes; ça fonctionne (pour ceux qui veulent plus de détails, faites-moi signe, c'est un peu long à expliquer donc je ne vais pas décrire l'expérience maintenant).

Je ne connaissais pas. Mais je ne peux pas dire que ça m'étonne. Je voulais juste dire qu'à la fin, il y a tant de caméras qu'on ne fait plus attention. Et plus il y a de caméras, moins ça peut être contrôlé.

Comme je l'ai écrit dans un post un peu plus haut, le pouvoir le mieux accepté est celui qui a le plus caché ses mécanismes. C'est actuellement le cas de la démocratie. Donc je préfère renverser ton échelle et affirmer au contraire que le totalitarisme a emprunté à la démocratie (d'ailleurs si on oublie le communisme, qui lui part d'un principe révolutionnaire, le fascisme et le nazisme sont partis de démocraties) et qu'il a lui-même une durée de vie assez courte précisément parce qu'il montre sa répression. Le franquisme s'est éteint tout seul, il est amusant de le noter.

Je suis d'accord pour le fait que le pouvoir est d'autant plus efficace qu'il cache son mécanisme. Depuis le milieu des années 90, beaucoup de penseurs du mouvement altermondialiste, de Forrester à Klein, ont décrypté les manipulations du langage du néo-libéralisme. Il est possible de s'y référer, hélas, il n'y a pas eu d'"Altermondialisme pour les nuls", et toutes ces analyses sont éparses.
Pour ce qui est du fascisme et des démocraties, en Italie et en Allemagne, il s'agissait de très jeunes démocraties qui n'étaient pas assez fortes. Il n'y a pas d'exemple de totalitarismes qui aient émergé de démocraties installées depuis plus d'une génération.


Les limitations dont tu parles existent autant ici qu'ailleurs, elles font juste parti du décor. C'est précisément ce qui est ingénieux. Ici nous parlons d'Hortefeux, du gouvernement Sarkozy, simplement parce que sa politique est brutale, très voyante, sans finesse. On s'est moins plaint de Mitterrand ou de Chirac, pourtant ce n'était pas spécialement meilleur, juste plus indolore.

Comme je le disais plus haut, Orwell ne définit pas plus le totalitarisme que la démocratie, plutôt un mode de pouvoir, institutionnel, qui s'est mis en place durant les deux derniers siècles.

Si !!!!!

Le droit aux minorités me semble être, une fois encore, plus un questionnement sur le contrôle. Pour les contrôler, il faut les intégrer. Pour les intégrer, il faut les institutionnaliser. Le droit n'est jamais la création d'un comportement mais la reconnaissance de ce comportement. S'il y a un droit, c'est nécessairement parce qu'il y a et qu'il y a eu des interdictions. Ce qui est interdit est relégué au rang du secret, il faut faire croire à son inexistence pour ensuite diriger vers le droit, ce qui existe, qui est permis et donc implicitement encouragé. Car le droit à l'homosexualité reste un droit à ne pas être égal à l'hétérosexualité. En réalité, on tolère l'homosexuel, longtemps pourchassé, mais à condition qu'il se plie implicitement à et état du "moins que l'hétérosexuel" au moins du point de vue du droit, ce qui signifie par conséquent remise en cause de la légitimité intégrale de ce droit.

Le temps devait arranger cela. Le monde est plein de cultures qui acceptent l'homosexualité. Allez en Indonésie. Vous trouverez cela très tendre, tous ces homos qui se tiennent par la main.

La jouissance chère aux soixante-huitards, c'est la jouissance de la consommation heureuse, celle des années 50, du début des 30 glorieuses, le début de la société de consommation. La révolution soixante-huitarde n'est pas une révolution du plaisir, de la jouissance. Ca c'est ce qu'on veut nous faire croire, nous faire retenir. L'aspect révolutionnaire de 68, c'est la remise en cause systématique du pouvoir institutionnel et cette révolution est un échec, vu qu'on n'en parle plus. Mais cette révolution a permis un déblocage dans l'éducation, la morale, les rapports sociaux, qui eux n'ont pas servi le politique mais l'économique : déblocage du "ça" freudien, passage d'une société autoritaire à une société de séduction. Le lien entre le droit des minorités et soixante-huit existe, c'est un lien de séduction : sois toi, sois libre, mais gagne ta liberté, consomme. La société post-soixante-huitarde est une radicalisation lente de la consommation, un retour lent à des idées conservatrices qui - le temps d'un rêve de quelques années, 5 ans tout au plus - semblaient être mises en danger. Mais curieusement, toutes les valeurs que l'on nous présentait comme à l'agonies durant la fin des années 80 et le début des années 90 sont aujourd'hui de nouveau "en bonne santé" : le mariage, la famille (à part le problème de la télévision, mais ce serait un peu long à expliquer et ce n'est pas mon propos principal), le travail... La construction est un peu différente toutefois, parce que le système économique est actuellement instable.

Je suis d'accord sur ton analyse ces nouveaux droits. Mais ce n'est pas la pire chose qui puisse arriver à un être humain

Quant à la dictature chinoise, elle ne durera pas éternellement, cela fait longtemps que petit à petit la nécessité économique grignote l'idéologie, tôt ou tard e régime chinois passera à autre chose (pas nécessairement la démocratie pour autant).

Oui ! Mais certains bavent dessus avec envie.

Enfin voilà je vais m'en tenir là pour aujourd'hui, mais il y a ici quelques idées que j'avais envie de confronter...

Merci. J'aime avoir des contradicteurs de qualité.
Je vais m'acharner un peu tout en espérant que ça restera pour la bonne cause. J'ai déjà eu une confrontation vaine avec YG plus haut, on va voir si je ne dépasse pas les bornes une fois encore...



Les livres que je conseille sont des livres qui expliquent les formes et les modes de manipulation de cette nouvelle structure de domination qui puisent leurs sources très profondément dans le temps mais qui à mon sens a pris une nouvelle forme dans les années 1980, après la Grande Emancipation des années 70 à laquelle elle riposte. Mon post est ce que je pense moi



Je ne désirais pas t'accuser de ne pas penser par toi-même. J'avoue que ma formulation était un peu floue, j'entendais par-là que j'estimais ta pensée croisable avec un point de vue supplémentaire qui ne me semblait pas être pris en compte. Et comme je suis moi-même influencé par mes lectures (ma hantise étant d'ignorer un point de vue pertinent simplement en m'acharnant sur la pensée d'un seul auteur) je me suis projeté dans ton écrit en me disant que peut-être que tu n'avais pas encore envisagé le point de vue que j'ai présenté... Nul jugement de ma part, donc, je voulais juste insister là-dessus en préambule...





Que notre type de société ne soit pas aussi démocratique qu'on le prétend, c'est certain. Maintenant, ne pas faire d'échelle de supportable entre le totalitarisme, la dictature, et nos démocraties imparfaites, ainsi que les démocraties de type autoritaire telles celles vers lesquelles tend la France actuellement, cela rend l'étude et l'argumentation sur une France qui se bonapartiserait totalement inutile et inaudible. Si tout égale tout, alors vivre en démocratie ou en totalitarisme, ça ne ferait aucune différence. Si certains ont vécu en totalitarisme, alors on pourrait l'accepter nous aussi si nos dominants nous y poussent. Ce raisonnement est évidemment inacceptable, ne serait-ce que parce qu'il suppose l'affiramtion "A quoi sert de lutter ?".



Qu'on puisse créer des hiérarchies en terme de pire, ça me semble possible (j'avoue ne pas avoir la sensation d'avoir dit le contraire). En même temps quand j'essaie de faire ces hiérarchies au nom des pertes humaines, j'ai toujours du mal à désigner un pire qui ne soit pas, finalement, affaire de point de vue. Un peu plus bas tu dis en substance qu'au fond je cherche plus à réfléchir qu'à trouver/proposer des solutions. Ca me semble injuste. Si je ne crois pas que les sociétés de masses puissent offrir de système à la auteur des idées qu'elles prétendent défendre, cela ne signifie pas pour autant que j'ai banni l'action et encore moins que je n'agis pas moi-même. Je pense juste que la solution n'est pas politique au sens de théorie, de système et/ou de moralité des dirigeants. Pour autant que je sache - mais ce n'est jamais que ma conviction - si l'humain est animal politique, interagissant avec le sacro-saint Autre, ce n'est pas naturellement par équité et raison, plus selon des réflexes, des rites et des convictions. Il me semble possible d'y insérer de la réflexion, de la remise en question, et par ce biais d'y ajouter n'importe quoi y compris de la raison et de l'équité ou n'importe quoi d'autre. L'éducation aussi est possible, mais signifie qu'il faut cette démarche en amont pour savoir quoi enseigner. On peut créer des réflexes mais il est difficile de créer de la conscience, du traitement de l'information. Or il me semble que celui qui joue sur le réflexe l'emporte sur celui qui joue sur le traitement, tout du moins dans une société de masses. Produire de l'intelligence à l'échelle sociétaire est pourtant ce qui contribue à créer une société moins décousue, plus cohérente. La question du "A quoi sert de lutter" ne traduit que le doute quant à ce contre quoi on lutte et qu'apportera ce combat.


Bien sûr ce n'est pas une raison pour ne pas tenter de changer les choses et une fois encore ce n'est pas là ce que je veux dire. C'est simplement une méfiance naturelle qui s'éveille en moi chaque fois que l'on me parle de politique de masse. Cela ne me donne pas raison et de toute manière avoir raison sur ce point ne m'intéresse pas, c'est juste un principe d'action qui s'avère utile à mon échelle, dans ma situation. Or il me semble que l'échelle de l'individu est la véritable base du politique.




Jamais Hannah Arendt n'a centralisé sa problèmatique sur le génocide. Sa recherche est au contraire une théorie sur l'humain dans son sens politique. Je me demande si vous ne confondez pas avec "Shoah" de Claude Lanzmann. Hannah Arendt, au contraire, considère qu'il y a un humain de type moral. Que cette existence va de soi, c'est un principe de réalité. C'est la "rationalité" nazie qui a ignoré l'être humain pour des raisons sans fondement moral, Les nazis s'étaient mis hors du sens commun. Si la philosophie part du principe que le moi, cad l'être humain n'existe pas, et que leur existence se doit d'être prouvée, la politique, elle, postule que l'être humain existe puisque la politique est l'ensemble des relations entre les êtres humains.



Ici aussi je crois qu'il y a incompréhension mutuelle.Quand j'affirmais qu'Hannah Arendt se centrait sur le génocide, j'entendais dans la réflexion que tu présentais, nullement dans l'oeuvre en elle-même dans sa globalité. Et je n'en parlais que pour tenter d'y confronter cet autre point de vue qui est ce que je présentais comme une "pensée administrative", qui après tout ne voit pas trop de différence entre les camps de concentration et les camps de transit pour les sans-papiers à la différence près que le but ici n'est pas l'extermination. Ce que je tentais de toucher du doigt, implicitement, c'est le fait que curieusement l'application de la solution est indifférente au choix de cette solution. Présenter l'extermination des juifs comme principe d'une société "en meilleure santé" est certes différent de considérer que renvoyer les étrangers (noirs) chez eux préservera notre société. Pourtant le procédé est le même. On peut certes me reprocher que je prends ici deux exemples qui sous-tendent une forme de racisme, de xénophobie. Il me semble cependant que des exemples similaires peuvent être pris ailleurs : le minimum vieillesse par exemple. C'est juste un chiffre sur du papier mais cela porte atteinte à la qualité de la vie. Bon je ne vais pas m'étaler dessus éternellement, je tenais juste à préciser un peu.

Tout ça pour dire que la "rationalité" nazie, comme tu disais, n'est pas à mes yeux à proprement parler nazie, elle est administrative, économique, industrielle et occidentale.

Sinon, effectivement le politique présuppose l'humain, mais une certaine conception de l'humain qui n'est pas unique dans le temps et l'espace. Interroger cette conception de l'humain, c'est interroger le politique et donc d'une certaine manière c'est agir.






OK, tu vas jusqu'au bout de ton raisonnement. Tu fais de la philosophie, dont le but est la recherche intellectuelle pour elle-même, parce que c'est plaisant, et agréable quand on a les neurones qui frétillent, mais ce n'est pas très fécond en ce qui concerne la façon de sortir de là. La politique, elle peut le faire, parce que les autres, c'est la réalité.



J'avais cité ce passage, sur ce point je te trouve injuste. Et peut-être n'est-ce pas exactement ce que tu veux signifier mais j'ai la sensation en lisant ce passage que tu opposes ce que je pense au processus politique. Je ne vais pas réagir trop brutalement vu qu'il y a peut-être incompréhension, mais cela me semble très critiquable, ce qui est avancé ici.


J'exposerai juste cette petite conviction qui est la mienne : il n'y a pas de connaissance, il n'y a pas de compréhension sans transformation dans l'être même du sujet. Il me semble que réfléchir, c'est déjà agir.





Et surtout, il faut s'en prendre aux innocents, ceux qui le sont encore. C'est le principe du totalitarisme. Je suis sûre que tu devrais être passionné par Les origines du totalitarisme de Arendt. Le seul problème est d'oublier ses convictions post-marxistes. Je trouve que les tiennes sont bien hard.



Je me méfie de ce mot, "innocents". Qui est innocent et par rapport à quoi? Voilà ce que cela m'évoque. Et ces questions m'empêchent profondément d'en faire un principe du totalitarisme...

Et encore un fois, réduire ma pensée à une étiquette marxiste ou post-marxiste, c'est assez réducteur et c'est bien mal la connaître que de supposer cela. Je suis plus facilement nietzschéen ou foucaldien. Voire plus facilement structuraliste. Je n'envisage pas le social comme un conflit binaire entre ceux qui ont le pouvoir et ceux qui ne l'ont pas. Je parle aisément de conflit mais à l'échelle individuelle, et je l'entends plus facilement comme un conflit avec soi-même pour s'ouvrir qu'un conflit avec l'autre pour le pouvoir... S'il me semble évident que socialement le pouvoir est un pôle par rapport auquel on se positionne, il ne semble pas évident qu'il crée un rapport binaire. Par contre, dans une société de masse, tout ce qui est touché par le pouvoir y réagit, c'est une évidence. Et il y a énormément de manières de réagir. Bref, je trouve cette étiquette que tu apposes sur mon front quelque peu abusive...





Non. Mais si, elles ont a une grande utilité. Elle rassurent ceux qui vivent là et qui ont peur. Je ne sais pas si tu as lu une magnifique page de Saint Exupery qui fait l'objet de son livre posthume : Citadelle, où le chef arabe tourne autour de la citadelle qu'il veut vaincre, constate à quel point elle est haute et sans ouvertures. Elle semble inexpugnable. Et pourtant il en conclut qu'il sera vainqueur, parce que ceux qui ont peur et se coupent de l'extérieur sont déjà vaincus par leur propre peur qui les rend inaptes à vivre.



Je te trouve bien prompte à nier ce que j'ai avancé... Et bien prompte également à considérer que les caméras sont uniquement une réponse au sentiment d'insécurité contemporain... Cela me semble bien plus complexe et il ne me semble pas que les caméras soient perçues par ceux qui ont ce sentiment d'insécurité comme une réponse à leur demande... Je crois qu'il y a matière à discussion sur ce simple sujet de la véritable fonction de ces caméras, du fait aussi qu'on les voit, voire qu'on nous les annonce comme c'est le cas dans la législation française...




Je ne connaissais pas. Mais je ne peux pas dire que ça m'étonne. Je voulais juste dire qu'à la fin, il y a tant de caméras qu'on ne fait plus attention. Et plus il y a de caméras, moins ça peut être contrôlé.



Raison de plus pour en discuter et comprendre quel pourrait en être l'enjeu profond.





Je suis d'accord pour le fait que le pouvoir est d'autant plus efficace qu'il cache son mécanisme. Depuis le milieu des années 90, beaucoup de penseurs du mouvement altermondialiste, de Forrester à Klein, ont décrypté les manipulations du langage du néo-libéralisme. Il est possible de s'y référer, hélas, il n'y a pas eu d'"Altermondialisme pour les nuls", et toutes ces analyses sont éparses.
Pour ce qui est du fascisme et des démocraties, en Italie et en Allemagne, il s'agissait de très jeunes démocraties qui n'étaient pas assez fortes. Il n'y a pas d'exemple de totalitarismes qui aient émergé de démocraties installées depuis plus d'une génération.



Je dois admettre que tu as raison concernant le nazisme et le fascisme.







"Comme je le disais plus haut, Orwell ne définit pas plus le totalitarisme que la démocratie, plutôt un mode de pouvoir, institutionnel, qui s'est mis en place durant les deux derniers siècles."

Si !!!!!



Ici encore je te trouve bien prompte à réagir. Je persiste à penser qu'il serait intéressant au moins de relire ce livre en envisageant cette problématique. Cela me semble même cohérent de la part d'un penseur anarchiste de ne pas seulement remettre en cause le totalitarisme mais également d'autres formes de pouvoir qui y sont apparentées et par conséquent nécessairement ce qui lie ces systèmes. Ce qui ne signifie pas pour autant que cette analyse ne se centre pas sur le totalitarisme. Je pense juste que ce livre est encore plus large.







Le temps devait arranger cela. Le monde est plein de cultures qui acceptent l'homosexualité. Allez en Indonésie. Vous trouverez cela très tendre, tous ces homos qui se tiennent par la main.



Je sais bien que l'homosexualité est acceptée dans d'autres cultures. Cela ne signifie pas que nous allons, nous autres, occidentaux, nous calquer sur elles. Tout du moins pas sans que l'on persiste à critiquer la pensée qui s'y oppose...






Je suis d'accord sur ton analyse ces nouveaux droits. Mais ce n'est pas la pire chose qui puisse arriver à un être humain



Certes, mais je n'ai jamais dit le contraire.






Oui ! Mais certains bavent dessus avec envie.



Sincèrement, je suis trop peu informé sur la question pour savoir quoi que ce soit à ce sujet.




Merci. J'aime avoir des contradicteurs de qualité.



C'est flatteur donc merci. Si seulement la qualité était une constante chez moi...

Merci à toi pour cet échange en tout cas.
@ Liliane Le Roscouët

Tout dépend de ce que l'on garde, l'esprit ou la lettre, sur la lettre, vous avez peut-être raison, une réduction de la langue n'équivaut pas à un démultiplication de celle-ci, mais dans l'esprit, c'est la même chose, la conclusion est de même nature, une domination. Peu importe donc que le totalitarisme soit né sous une forme bien particulière ou ait été théorisé historiquement sous cet angle angle, il peut évoluer, s'adapter, et il le fait d'ailleurs.

Certes, nous ne sommes pas dans un totalitarisme à l'ancienne, Hortefeux n'est pas Goebbels, mais créer un nouveau mot, une nouvelle image, pour en rendre compte, c'est encore repousser à plus tard, non pas la compréhension, mais la contre-réaction à ce qui nous opprime. C'est là-dessus aussi que le pouvoir compte pour s'exercer, changer les mots, ne jamais être esclave de ces derniers, pour que la parole (de dénonciation) ne lui colle pas à la peau, comme un slogan, slogan qu'il doit être le seul à pouvoir user d'après lui.

Sachons donc reconnaître la domination sous ses nouvelles formes et ne pas nous arrêter aux dissemblances (mais bien plutôt aux ressemblances).
Car, rompre la filiation idéologique (maintenu grâce à la même appellation) avec des actes jugés aujourd'hui communément nauséabond est un moyen pour les formes nouvelles de dictature, de totalitarisme de se faire passer pour toute autre et donc accepter, alors qu'elles n'en sont qu'une autre dimension, une autre forme d'expression.

Démasquons-les pour ce qu'elles sont, rappelons leur les "maux" (dictature, totalitarisme, esclavagisme...) qu'elles ne veulent plus entendre.

yG

ps: L'expansion du capitalisme, image militaire de conquête tout à fait appropriée, laisse néanmoins entendre une saturation possible.
Or, celle-ci en terme de demande n'existe pas, demandez plus fort et le marcher vous fournira plus fort, il n'y a pas de limite à son expansion, car, il ne dépend pas d'un objet, mais d'une volonté, d'un désir avant tout personnel, individualiste.
@ @ Liliane Le Roscouët

Pour rendre plus clair mon propos précédent, il est symptomatique de constater que Guy Moquet, un résistant communiste mort fusillé est invoqué par notre président pour nous inciter à nous retrousser les manches, une exploitation fallacieuse de la vie de ce jeune homme à des fins sans commune mesure (résistance à l'occupant contre participer au travailler plus, trouvez le rapport ?), mais qu'il s'offusque dès lors que certains parlent de rafle concernant les clandestins par les forces de l'ordre.

Un deux poids deux mesures caractéristique de l'abus de pouvoir, le côté négatif de certains pouvoirs.

Seul le pouvoir a le droit de choisir l'Histoire, les analogies, de les exploiter, de les distordre, nous, nous sommes avant tout privé de ce droit, bien que nous l'appliquions pourtant (bien souvent) avec plus de parcimonie, de discernement que lui.

En nous obligeant à rester au pied de la lettre, ce qu'il ne s'impose pas d'ailleurs, il nous prive de la force de l'analogie, de l'usage de l'histoire. Lui seul y a accès pour l'usage que l'on sait.

On peut toujours à juste titre alléguer que l'histoire ne se répète pas, que ce n'est jamais tout à fait la même chose, d'un point de vue purement intellectuel, d'historien par exemple, cela peut se tenir, mais, l'usage qui est fait de cette probité/frilosité intellectuelle par le pouvoir ne lui sert qu'à échapper à toute critique basée sur la comparaison, à tout usage de l'histoire par le peuple pour le mettre face à ses responsabilités.

C'est encore et toujours par l'asymétrie (la non-réciprocité) des pouvoirs que le pouvoir se caractérise. Lui peut exploiter, ce que nous n'avons pas le droit de faire (surtout à son encontre).

yG
Tout-à-fait d'accord. Et cela reste une technique de manipulation extrêmement sophistiquée et nouvelle dont nous devons nous défendre.

@ Yannick G

Tout dépend de ce que l'on garde, l'esprit ou la lettre, sur la lettre, vous avez peut-être raison, une réduction de la langue n'équivaut pas à un démultiplication de celle-ci, mais dans l'esprit, c'est la même chose, la conclusion est de même nature, une domination. Peu importe donc que le totalitarisme soit né sous une forme bien particulière ou ait été théorisé historiquement sous cet angle angle, il peut évoluer, s'adapter, et il le fait d'ailleurs.

Je ne suis pas d'accord et je persiste. Dans la conversation que le "héros" de 1984 a avec son ami dont la tâche est de manipuler le langage, le fait que les concepts se réduisent est très important. Cela correspond à ce que Hannah Arendt appelle la réduction de l'espace politique. Moins de mots, donc simplification des relations et déshumanisation.

Certes, nous ne sommes pas dans un totalitarisme à l'ancienne, Hortefeux n'est pas Goebbels,

Je répète que nous ne sommes pas dans un totalitarisme, mais dans une marche vers plus d'autoritarisme. Comme je l'ai expliqué à Damien plus haut, si vous considérez qu'il n'y a pas d'échelle, de degré dans les types de pouvoir, si le totalitarisme n'est pas une horreur à vivre et égale la démocratie, alors à quoi bon faire quelque chose quand la situation se dégrade ? Vous devriez discuter avec des gens qui ont vécu sous le totalitarisme et sous des dictatures. Je pense que vous changeriez d'avis. Et vous trouveriez de bonnes raisons de lutter pour que ça ne vous arrive pas à vous.

mais créer un nouveau mot, une nouvelle image, pour en rendre compte, c'est encore repousser à plus tard, non pas la compréhension, mais la contre-réaction à ce qui nous opprime. C'est là-dessus aussi que le pouvoir compte pour s'exercer, changer les mots, ne jamais être esclave de ces derniers, pour que la parole (de dénonciation) ne lui colle pas à la peau, comme un slogan, slogan qu'il doit être le seul à pouvoir user d'après lui.

Là, je n'y avais pas pensé comme cela, mais c'est exactement ça.

Sachons donc reconnaître la domination sous ses nouvelles formes et ne pas nous arrêter aux dissemblances (mais bien plutôt aux ressemblances).
Car, rompre la filiation idéologique (maintenu grâce à la même appellation) avec des actes jugés aujourd'hui communément nauséabond est un moyen pour les formes nouvelles de dictature, de totalitarisme de se faire passer pour toute autre et donc accepter, alors qu'elles n'en sont qu'une autre dimension, une autre forme d'expression.

Démasquons-les pour ce qu'elles sont, rappelons leur les "maux" (dictature, totalitarisme, esclavagisme...) qu'elles ne veulent plus entendre.

Sous les réserves émises plus haut, d'accord.
yG

ps: L'expansion du capitalisme, image militaire de conquête tout à fait appropriée, laisse néanmoins entendre une saturation possible.

Justement, la saturation, c'est la limite du globe terrestre. La mondialisation, en s'étendant, trouve des salariés moins chers à payer que les précédents. Mais la planète Terre est finie, et l'accélération de ce processus, lorsqu'il aura "fini" la Chine, l'Afrique et différents petits états encore vierges, fera un effet qu'on a appelé aux USA au 19ème siècle la "Fin de la Frontière" parce qu'il n'y aura pas de fuite en avant possible et de nouveaux salariés à mettre en concurrence.
Lorsque les pionniers ont arrêté de pouvoir aller plus à l'est à cause de l'Océan Pacifique, ils se sont mis à lutter chez eux parce que la fuite en avant n'était plus possible. Si vous êtes en expansion continue et en avez besoin, si vous êtes dans un monde fini, vous êtes secoués. Et le système l'est déjà à cause de l'épuisement des ressources.


Or, celle-ci en terme de demande n'existe pas, demandez plus fort et le marché vous fournira plus fort, il n'y a pas de limite à son expansion, car, il ne dépend pas d'un objet, mais d'une volonté, d'un désir avant tout personnel, individualiste.
Si ! Les ressources de la planète Terre ne sont pas infinies. Elles vont s'épuiser très rapidement. Voyez là. C'est assez ancien, mais c'est toujours d'actualité.

Merci pour la contradiction que j'ai appréciée.

@ Liliane Le Roscouët

Avant propos: Cette réponse est un peu redondante avec mes précédentes et vous avez certainement compris l'essentiel de ma pensée sur ce point depuis, mais j'étais en cours de rédaction parallèlement à vous, donc, ne vous étonnez pas si je reprends quelques points déjà esquissés. J'ai noté mentalement vos réponses. Mais libre, bien entendu, à vous d'en rajouter.

Je ne suis pas d'accord et je persiste. Dans la conversation que le "héros" de 1984 a avec son ami dont la tâche est de manipuler le langage, le fait que les concepts se réduisent est très important. Cela correspond à ce que Hannah Arendt appelle la réduction de l'espace politique. Moins de mots, donc simplification des relations et déshumanisation.

Je ne nie pas l'impact de la réduction du vocable. Moins de mot, c'est toujours appauvrir notre vision et donc compréhension du monde. L'image de l'arc-en-ciel réduit à sept couleurs est une classique analogie de ce qu'il en court d'appauvrir notre spectre de dénomination.

Ce que je voulais souligner, c'est qu'on arrive au même résultat, l'inaction, la non réaction face au pouvoir, lorsque celui-ci appauvrit le mot ou à l'inverse les démultiplie.

Le trop comme le trop peu rendent, comme vous le soulignez équivalent des notions qui n'ont pas à l'être.

Trop de mot, le pouvoir en use en interchangeant ces derniers. "Vous n'aimez pas celui-ci, qu'à cela ne tienne, en voici un autre". Pas assez de mot, les nuances sont abolies, l'autoristarisme est nommé totalitarisme, les fâcheux sont baptisés fascistes comme vous le rappelez.

Une réduction dont use encore le pouvoir qu'il s'empresse le cas échéant de dénoncer, en montrant en quoi il n'est pas comme les régimes totalitaire, en insistant sur les dissemblances, pour mieux nier les ressemblances.

Je répète que nous ne sommes pas dans un totalitarisme, mais dans une marche vers plus d'autoritarisme.

Et vous avez raison, seulement, en restant au juste mot, vous vous privez de la force de révolte, d'indignation que peut nous fournir l'histoire, les phares du passé nous éclairent sur ce que peuvent devenir les autoritarismes, n'attendons-pas qu'ils y parviennent pour nous y opposer. D'élections démocratiques au totalitarisme, le chemin a déjà été emprunté, n'occultons pas cette donnée historique par excès de prudence. Après, il sera trop tard.

C'est en avançant à pas de loup que les prédateurs gagne du terrain. faisons du bruit, trop de bruit, peu importe, nous ne sommes pas dans l'histoire de Pierre et le loup, nous, nous en voyons déjà la queue, nous savons qu'il est là, va-t-il attaquer plus violemment, n'attendons pas de le découvrir, débusquons-le temps qu'il est temps..

Comme je l'ai expliqué à Damien plus haut, si vous considérez qu'il n'y a pas d'échelle, de degré dans les types de pouvoir, si le totalitarisme n'est pas une horreur à vivre et égale la démocratie, alors à quoi bon faire quelque chose quand la situation se dégrade ? Vous devriez discuter avec des gens qui ont vécu sous le totalitarisme et sous des dictatures. Je pense que vous changeriez d'avis. Et vous trouveriez de bonnes raisons de lutter pour que ça ne vous arrive pas à vous.

Je me suis mal exprimé ou plutôt pas assez. Pour revenir encore une fois sur ce point, je ne considère pas qu'il n'y a pas de différence, je dis que nous ne devons pas nous arrêter à la situation actuelle, car, justement, le pouvoir fait tout pour la rendre invisible, inodore, inaudible de toute façon, alors que nous pouvons voir plus loin pour susciter une vraie révolte, maintenant, si nous n'avons pas peur d'utiliser l'histoire dans ce qu'elle peut nous apprendre.

Sarkozy répondant à Joffrin sur la monarchie, parlant du "Mot Juste", vous vous en souvenez, alors que c'était lui qui en confisquant la parole (ne la redonnant pas à Joffrin) avait mésinterprété (occulté l'angle pertinent de l'analyse du journaliste, pour ne grossir que l'élément dissemblable, à savoir, lui est élu, pas de droit divin. Mais son fils est bien son fils et bel et bien nommé et non élu par le peuple, que je sache.). Vous voyez en quoi le Mot Juste sert ceux qui veulent échapper à étiquettes qui grattent aux entournures.

Justement, la saturation, c'est la limite du globe terrestre. La mondialisation, en s'étendant, trouve des salariés moins chers à payer que les précédents. Mais la planète Terre est finie, [...] parce qu'il n'y aura pas de fuite en avant possible et de nouveaux salariés à mettre en concurrence.

Votre approche est plus optimiste que la mienne. Nous constatons déjà qu'il suffit de détruire les acquis sociaux chez nous pour remettre en concurrence (ne serait-ce que sous la menace d'une hypothétique délocalisation) pour que le patronat ici exploite davantage les ressources humaines locales.

Puisqu'ils usent de la peur, les exploiteurs peuvent continuer à faire le tour de la planète pendant des siècles, hélas.

Les ressources de la planète Terre ne sont pas infinies. Elles vont s'épuiser très rapidement.

Je n'en doute pas, hélas. Par contre, je doute que cela suffise à changer la donne, ce n'est pas pour autant qu'il ne faut pas s'y opposer.

J'ajouterai, en liaison avec la notion de peur, mais je suis un incurable pessimiste, que cette nouvelle peur, tout à fait légitime elle, la fin des ressources, risque de davantage servir le pouvoir pour, par exemple, limiter la redistribution et pour exhorter à travailler plus tout en gagnant moins (de ressource), prochaine étape (déjà en marche forcée d'ailleurs). La peur ne sert pas qu'à réagir ou prendre conscience, elle sert d'abord à contraindre, hélas.

yG
Merci pour votre liste de saines lectures – et remarques judicieuses :-)

[quote= Le système trouvera sa limite dans l'épuisement des ressources et des territoires à conquérir, et dans les krachs boursiers qui vont s'ensuivre, mais nous n'y sommes pas encore tout à fait, seulement aux premiers soubresauts. ]
Pas encore tout à fait, mais cela s’accélère :-)

[quote= on voit ces dirigeants occidentaux baver sur le modèle chinois qui a réussi la quadrature du cercle ]
Ja – ce modèle ne tiendra pas indéfiniment :-)

[quote= « Les lobbyings nous ont volé nos rêves et nous les ont rendus sous forme d'illusions »]
L’achoppement : illusions qui perdureront tant qu’elles n’apparaîtront pas comme telles mais finiront pas s’effondrer avec "l’épuisement des ressources et des territoires à conquérir" (ça viendra).
Je vais tomber légèrement dans le hors sujet mais cela m'évoque une réflexion dans laquelle je m'embourbe en ce moment et tenter de la nommer, de la partager contribuera à me la rendre plus claire...


J'ai la sensation que le pouvoir en occident est désormais rationnel sous toutes ses formes. Ce qui ne signifie pas qu'il n'est esclave d'aucune morale, d'aucun préjugé social et qu'il ne serait issu que d'une pure intellectualité éclairée, rêve de nos chères Lumières. Bien au contraire, il est rationnel dans sa forme, dans ses procédés, dans sa légitimation, non dans ses intentions. Il est industriel, à l'image de notre société, chronométré, réglé comme une horloge, avec peu ou pas de pauses, champ de bataille constant où le repos est faiblesse parce que brèche offerte aux opportunistes.

Il est amusant de prendre un exemple simple : comment en sommes-nous venus à séparer les théoriciens de la politique et ses techniciens ? Car à gauche ou à droite, ceux que l'on nous présente comme meneurs ne sont nullement des têtes pensantes, ils sont techniciens d'un des aspects du pouvoir politique, lui-même étant un aspect du pouvoir sociétaire. Sarkozy n'a rien inventé, et ce n'est qu'un exemple.


Cette idée du pouvoir rationnel n'est pas neuve, me dira-t-on, et on aura bien raison. Pourtant je trouve surprenant qu'après l'avoir tellement rabâché, sous une forme ou une autre, aucune solution ne s'applique véritablement en contre pouvoir depuis les deux derniers siècles. Et c'est sur ce point que je commence à échafauder une hypothèse : la nature même rationnelle du pouvoir fait qu'une critique elle-même rationnelle ne peut le contrer. C'est concrètement comme une course à l'armement : il faut sans cesse s'armer plus que l'autre, avoir plus d'arguments, plus de preuves, plus de témoins, de techniciens pour la cause, etc. Les querelles scientifiques quant aux nouvelles technologies en sont une facette et un exemple assez clair quant aux processus employés. Prenez les OGM, ou encore les portables. De loin ça ressemble à une gabegie où tout le monde se tape dessus à coups de paradigmes expérimentaux dans la gueule. Mais de plus près on peut constater des enjeux, des sources, des certitudes, etc. Au final, le camp qui gagne la bataille est le plus nombreux. Ca peut être simplement pour des causes médiatiques, c'est le cas des portables et des OGM. Mais ces deux exemples ne sont que la partie émergée de l'iceberg. Sachez que la majorité des arguments médiatiques employés dans ces deux cas existent pour l'essentiel depuis 10 ans quand ce n'est pas plus (20 ans pour les OGM).

Ca, c'est concrètement une banale guerre de tranchées : deux positions relativement figées par les médias (qui vulgarisent le problème en quelque chose de binaire, pour ou contre) où l'opinion publique la mieux manipulée tranchera. C'est une guerre longue, ça se joue à l'épuisement des théories (avec parfois des couches successives de théories, c'était le cas de l'invasion de l'Irak avec l'opinion publique états-unienne).

Par conséquent on peut remonter un peu plus haut : les usines à production d'arguments. Ce sont des mécanismes de rationalité, la raison qui se bât contre elle-même. Tout se joue sur la logique des discours, scientifiques, techniques, langue de bois, etc. On les trouve dans les entreprises, les commissions parlementaires, il fut un temps ou les syndicats en produisaient (maintenant c'est un peu plus restreint), etc.


Et il y a aussi des stratèges. Ils existent pour les médias, ce sont ceux que l'on observe le plus facilement. Leur fonction relève de la gestion de l'armement en fonction des fragilités de l'adversaire, de ses forces également. Leur action est ciblée, localisée, avec souvent un but précis derrière. Mais ils ne sont pas les seuls. Il y a les stratèges de la reconnaissance, qui eux vont tâter le terrain, voir où on en est sur une question précise, comprendre pourquoi tel phénomène a lieu sans qu'on ait pu le prévoir. Et nécessairement il y a l'autre facette, les think-tanks, les spécialistes de la prévision, ceux dont le but est de prévoir les évolutions. Par exemple, c'est devenu une évidence depuis 2002 que la gauche française a littéralement épuisé toutes ses ressources rationnelles durant les 30 dernières années. Plus d'idées, plus de représentants de ces idées, plus de lieux de production de ces idées, plus d'institutions permettant de centraliser ces idées pour en planifier l'usage, etc.

Une bataille idéologique parmi d'autres, donc, qui a été perdue. Mais dans une ère d'économie, il semble d'autant plus évident que ces guerres rationnelles sont nourries par une économie, elle-même rationnelle, industrielle, technique, qui vient nourrir cette production de concepts, voire qui vient parasiter la production de concepts potentiellement antagoniques (l'éducation et les médias sont des aspects majeurs sur cette question).


Tout cela pour me questionner simplement : peut-on vaincre une rationalité dominante par la rationalité ? Seulement si je parle de rationalité "dominante", je sous-entends nécessairement qu'il y a d'autres rationalités "opprimées" ou à une rationalité plus générale incluant des valeurs éthiques précises etc. Cela pourrait vouloir dire qu'après tout, c'est une simple lutte pour avoir raison, en supposant qu'avoir raison donnera accès à l'autorité sur les autres (ça me rappelle vaguement la chronique de Judith sur l'intervention radiophonique de Fillon).

Cependant je ne peux pas m'en tenir à une conclusion de ce type : ça ressemble précisément à la conception marxiste, avec un rapport dominant/dominé systématique. Or ce que proposaient Marx et Engels pour rééquilibrer la lutte, c'est de permettre au prolétaire (qui n'est pas l'ouvrier d'ailleurs mais n'importe quel travailleur dont le savoir est passé dans la machine, donc ça peut être un médecin aujourd'hui) c'est donc de permettre au prolétaire de compenser la perte de son savoir par un autre savoir, sur la société elle-même, sur la situation dans laquelle il se trouve, lui donner donc les armes pour s'en sortir. C'est exactement ce que je décrivais : combattre un champ de rationalité par un autre champ de rationalité, théorie contre théorie, discours contre discours.

Or, comme je le décrivais plus haut, cela ne donne rien d'autre qu'une course à l'armement rationnel, à ce jeu-là, l'industrie gagne toujours sur l'individu qui ne suit pas l'industrie, qui n'en est ni l'esclave ni le bénéficiaire. Donc un problème conséquent, comment sortir de ce cercle vicieux ? Entre accepter l'asservissement par la raison (et l'obéissance à ce qu'on nous présente comme raison) et prendre le parti du refus - qui a pour conséquence la marginalisation ou le conflit avec toujours un train de retard (ce qui revient toujours à perdre si l'adversaire ne fait pas d'erreur stupide, car la mécanique est aujourd'hui bien huilée) - comment ne pas être absorbé, comment avoir une prise, une poids, bref comment influencer la société autant qu'elle tend à nous influencer? Comment participer à sa construction (et donc n'être pas un simple matériau à son auto-expansion)?


Est-il possible de sortir de cette guerre des rationalités en passant par autre chose que la rationalité? Il me vient une réponse évidente : la spiritualité, avec son corolaire massif qu'est la religion. C'est une réponse ancienne et elle marche encore bien... Quoi d'autre?

On peut poser d'autre questions d'ailleurs. Toujours en admettant cette guerre des rationalités, quelles positions peut-on y prendre ? Comment faut-il la juger? Qu'est-ce qui fonde cette légitimité de la rationalité? Qui en sont les véritables responsables (en supposant donc qu'il y ait des responsables encore vivants, ce qui reste à prouver...)?


Et après tout, comme le sous-entend ce passage de 1984, ce fonctionnement rationnel, cette pensée non-pensée, cette conscience devenue inconsciente ne traduit-elle pas simplement la venue de l'automatisme? On peut se considérer comme rouages d'un mécanisme organique qui s'auto-génère, un pur agencement ancestral dont la pensée est rendue inaccessible ni par les règles ni même par les discours mais précisément par le temps. Cette époque où un interrupteur imaginaire (curieux terme que celui d'"interrupteur" pour décrire ce cercle de l'automatisme) aurait été enclenché, entrainant les générations futures dans un mouvement ni compris ni accepté mais fondamentalement appliqué.

C'est la vision quelque peu technophobique qu'a colporté le cyber-punk depuis sa création (Matrix à cet effet n'a précisément rien inventé), celle de la société automatique où la seule question devient le camp que l'on choisit, tout en sachant pertinemment que plus aucune cause n'est juste parce que la justice elle-même n'a plus le sens traditionnel qui lui a donné corps tout au long de l'histoire. C'est une ère curieuse où le système rend esclave par l'apparente relativité des systèmes : où que tu es il y a un pouvoir, la seule que tu choisis devient alors l'esthétique que tu attaches à ton existence, parce que ni la liberté ni une quelconque conception métaphysique ne peut plus avoir de sens désormais.

Nécessairement, après une telle description, il semble difficile de rattacher un tel discours à notre réalité actuelle. Mais comme disait Foucault lui-même au sujet des formes de pouvoir : "C'est à la condition de masquer une part importante de lui-même que le pouvoir est tolérable. Sa réussite est en proportion de ce qu'il parvient à cacher de ses mécanismes. Le pouvoir serait-il accepté s'il était entièrement cynique? Le secret n'est pas pour lui de l'ordre de l'abus; il est indispensable à son fonctionnement. Et non pas seulement parce qu'il l'impose à ceux qu'il soumet, mais peut-être parce qu'il est à ceux-ci tout aussi indispensable : l'accepteraient-ils, s'il n'y voyaient une simple limite posée à leur désir, laissant valoir une part intacte - même si elle est réduite - de liberté? Le pouvoir, comme pure limite tracée à la liberté, c'est, dans notre société au moins, la forme générale de son acceptabilité." Michel Foucault, Histoire de la sexualité, tome 1 La volonté de savoir, chap. IV Le dispositif de la sexualité, 1. Enjeu, 1976, p. 113-114, ed. Gallimard.


Au fond, c'est peut-être là la solution aux guerres de rationalité, comprendre et non plus savoir, être sage plutôt que puissant. Ou peut-être n'est-ce que le rêve de l'esclave.
Eh oui, la manimulation par le langage ne date pas d'hier. Un autre petit exemple qui me semble à propos : les membres d'une commission chargée de réfléchir sur la constitution s'appellent des sages. Pierre Mazeaud, ancien président du conseil constitutionnel, en sait quelque chose, puisqu'on ne dit pas : conseil dont les membres sont nommés par les 3 plus hautes autorités de l'état (présidents respectivement de la République, du Sénat et de l'Assemblée nationale),
mais plus simplement "conseil des sages". Il ne perd donc pas son statut, avec cette nouvelle "commission de sages".

c'est tout de même bien fait, même libé s'y laisse prendre : http://www.liberation.fr/actualite/societe/337340.FR.php
et là je ne comprends plus : cet article dit le contraire de ce que je viens de lire sur @si ... ah mais non, c'est juste qu'il prend pour un détail les quelques nuances apportées par la commission.

alors du coup je suis allé voir sur http://www.espace.asso.fr/special/mazo_doc.htm
où il y a le texte de la commission. C'est 159 pages, et si on lit en diagonale, ça a l'air vraiment bien et rassurant. Par exemple :
"Ces droits constitutionnels – droit à une vie familiale normale, liberté du mariage - ne
peuvent être niés parce qu’un contingent est saturé en cours d’année."

Pas bête donc : noyer les informations gênantes ! Car après avoir lu ça, on n'a plus trop envie d'être contre la commission, et inconsciemment on va pouvoir passer l'éponge plus facilement. Voilà je pense la plus grande force de ce rapport !

Just for fun : le petit passage novlangue dont il est question dans la rubrique de Judith Bernard, auquel je rajoute ce qu'il y a un peu avant et un peu après

"Au regard du principe d’égalité (principe de nature à la fois constitutionnelle et
conventionnelle), les contingents par pays ou par régions d’origine ne sont justifiés que par
l’intérêt commun du pays d’accueil et du pays d’origine. Il doit s’agir d’un pacte « gagnant
gagnant » dans la perspective du retour."
[...]
" Ainsi comprise, la politique des quotas n’a plus guère à voir avec cette fixation
unilatérale et opportuniste de contingents d’entrées que l’on sous-entend en parlant de quotas.
Elle consiste à lier la question des flux migratoires et celle du développement des pays
d’origine dans une perspective du « co-développement »."

Dans la suite, c'est souvent l'histoire du co-développement qui revient. Une bien belle idée qu'il reste encore à définir, mais pas besoin de la définir si clairement pour justifier un contingent par-ci par-là. Je suis vraiment très impressionné de voir que l'on peut écrire un texte aux apparences humanistes tout en laissant un tel champ libre. Chapeau !
Merci pour votre brillant article, Judith.

J'ai travaillé sur Orwell et je ne me lasse pas d'en parler sur ce site. Cette fois, vous me tendez la perche, et c'est très tentant...

Mais non. Je vais parler d'une chose plus légère, qui illustre aussi votre propos.

Dans un épisode des Simpson, un scientifique permet à Bart et Lisa d'avoir un aperçu de leur avenir. Ils sont adultes, et Lisa Simpson n'est autre que... présidente des Etats Unis. Elle doit prononcer un discours à la télévision. Les temps sont durs, et elle doit imposer aux américains un nouvel impôt. Elle appelle cela "une dette citoyenne", preuve de solidarité à la nation américaine et à son peuple. On voit les personnages du bar de Moe applaudir cette initiative. Ils aiment tous cette idée de dette citoyenne. Mais Bart intervient en direct pendant le discours de sa soeur, et lance : "Alors Lisa, tu leur as parlé de ce nouvel impôt ?" La caméra tourne toujours, et Lisa a un sourire gêné. Les hommes accoudés au bar changent de ton, et insultent la jeune présidente dont ils venaient de faire l'éloge.

Vous voyez bien. Ce n'est pas un nouvel impôt: c'est une dette citoyenne.

Ce n'est pas un quota: c'est un objectif chiffré.

Ce n'est pas le Ministère de la torture, mais de l'amour.

Merci Judith, de nous rappeler que le roi est nu. Orwell, lui, nous dirait, dans sa causticité anglaise :

"Navré de vous le dire : je vous avais prévenus."
Merci pour ce magnifique article! Comme David F, j'ai froid dans le dos en voyant ce ministre...

Je n'ai qu'un regret, c'est que @SI ne nous offre qu'UN de vos jolis yeux, alors qu'il nous gratifie de DEUX yeux (bovins) de B.H !
Vichy, l'Hôtel du Parc, quelle jolie époque...

Le Maréchal parcourant benoîtement les allées avec sa canne emblématique,

Il eût été criminel (c'est curieux comme ce mot trouve sa place ici...) de ne pas la faire revivre, cette époque bénie !

Brice Hortefeux (je n'ai pas dit "Croix de Feu") s'y emploie avec un talent qui force l'admiration...

Ne boudons pas notre plaisir, quoi de plus réjouissant qu'un sale étranger qui franchit la frontière dans le bon sens ?

Et dire que si 53% des Français n'avaient pas voté Sarkozy nous aurions été privés de ce plaisir délicat !

A quoi tiennent les choses, c'est pas croyable !

***
ils ont pensé à fermer les frontières dans les DEUX sens ? ( je travaille avec français d'origine marocaine qui en avait marre d'être un étranger en France et au Maroc, alors tant qu'à être un étranger, il est venu en Espagne)
Merci pour ce bel article très complet.

Je passe un peu à côté du sujet et c'est pas gentil de critiquer le physique des gens, mais moi, il me fait peur Hortefeux... Je crois dur comme fer que la pensée profonde de toute personne peut se lire sur son visage ( plus ou moins facilement ), et pour lui, franchement... j'en claque des dents.
Je vous adore.
Vous réalisez par vos chroniques mon "rêve" de toujours : déceler les rapprochements
entre notre monde contemporain et ce chef-d'oeuvre de George Orwell.
J'ai fouillé les librairies pour dégoter quelques livres qui semblaient prometteurs :
Sous le soleil de Big Brother de François Brune (intéressant),
Orwell éducateur de Jean-Claude Michéa auquel je n'ai rien compris ;-)

Mais pour l'instant, rien de convaincant.
À part vos chroniques…

Si vous connaissez des livres illustrants ce parallèle, dîtes le moi.
Pour contourner l'«arrêtducrime»…

Merci
Chère Judith Bernard, je vous aime ! Si ! Si ! (Et Bonne vacances à vous ! Snif...)

En plus du caractère odieux et inconstitutionnel de ces quotas humains, j'avais cru comprendre qu'ils engendrent aussi une "impunité" de certains délinquants et criminels, car tout occupé que sont nos policiers à courir et contrôler les personnes ayant "l'air" étrangers pour arriver aux quotas d'explusion imposés par leur hiérarchie, ils traitent beaucoup moins les vrais délits voire crimes (essayer donc d'ailleurs de déposer une plainte pour vol, vous allez rire...).
Nous n'avons plus de police républicaine, nous n'avons plus qu'une gigantesque police des frontières et de l'immigration.

Diantre, je me sens las...
j'essaye simplement d'ouvrir les yeux à ces malins afin qu'ils essayent de faire travailler un peu leur intelligence.

Le malin c'est celui qui gagne une bataille.

L'intelligent c'est celui qui gagne la guerre.

Ce que je leurs dis aux malins (ceux qui ne regardent pas très haut) c'est qu'il y a des gens intelligents qui vont reprendre le dessus et qui les conduiront vers une paix durable.

Plutôt ils auront compris, mieux cela vaudra pour tout le monde, vous les faux sarkozystes et leurs vrais amis, moi.

Quant aux autres aux plus malins que tous : si ils continuent à suivre le malin suprême ils vont tomber dans le ravin car à la hauteur de ses yeux leurs chef ne l'aura pas vu arriver.

Son seul mérite à ce malin suprême (je précise sarkozy pour ceux qui n'auront pas voulu le comprendre), son seul mérite, disais-je à sarkozy ce sera de nous avoir débarrassés de ces plus que malins et surtout de lui-même.

Avenir illimité aux intelligents et très limité aux malins.
Déjà cité par SB,

on peut relire

« La parole manipulée » par Ph. Breton, Ed. La Découverte/Poche,

« pour réfléchir aux conditions de l'épanouissement d'une véritable liberté de parole afin de permettre un meilleur accomplissement de la démocratie. »
Merci, Judith, pour cette chronique. Je me joins sans hésiter à tous ceux qui se félicitent de vous voir dénoncer cette politique d'objectifs chiffrés. En parcourant le rapport en question (en particulier les pages 21-25), ce n'est pas spécialement la substitution du terme "contingents" à celui de "quotas" qui retient mon attention ; les "sages" rejettent l'idée de quotas (ou contingents) établis de façon unilatérale mais considèrent comme légaux des quotas (ou contingents) obtenus par convention entre états - dont ils soulignent d'ailleurs certaines difficultés : ce n'est donc pas le choix du terme qui importe, mais la question de savoir de quels quotas il s'agit, et dans quel cadre juridique. Ce qui m'interpelle le plus, c'est qu'en plus d'indiquer que c'est inutile, les sages précisent que cette possibilité de limitation existe déjà : les contrats de travail pour les candidats à l'immigration sont soumis à l'accord du ministère du travail (Cf. p.22).

Sur ce plan, on peut en déduire que la loi en question ne va pas changer grand-chose dans les faits, si ce n'est de pouvoir brandir cette idée "d'objectifs chiffrés", de "quotas" ou de "contingents", dont aucun n'est l'euphémisme de l'autre et peut servir tout aussi bien cette intention de faire une sorte de slogan, où les questions humaines se réduisent à des questions de nombres. Et le plus inquiétant c'est que si, comme le dit le rapport, les quotas ne sont pas conformes à la Constitution en matière familiale ou de droit d'asile, cette immigration n'en est pas moins durement frappée - avec ou sans nouvelle loi. Pour ma part, je suis marié à une étrangère et nous avons un enfant. Selon la loi, mon épouse a droit à un titre de séjour du seul fait qu'elle est mère d'un enfant français : mais malgré nos demandes orales et écrites, ce droit lui est refusé et nous devons tous les ans prouver que nous n'avons pas fait un mariage blanc. Je vous laisse imaginer mon inquiétude pour le cas où il m'arriverait quelque chose : je vois difficilement mon épouse s'engager dans une bataille juridique pour faire reconnaître son droit de vivre avec son fils. Nous avons aussi connu des refus complètement illégaux de lui délivrer un titre de séjour lui permettant de travailler, auquel elle avait droit après notre mariage, et les files d'attentes où on voit des femmes enceintes attendre deux heures et demi en plein soleil pour aller affronter des fonctionnaires qui "ignorent" leurs droits élémentaires.

Alors, voyez-vous, Judith, l'objectif chiffré, qu'on l'appelle "quotas" ou "contingents", c'est un bien vilain symptôme qui s'exhibe. Et je ne peux que vous remercier de le combattre.
Que dire a part que depuis l'ouverture du site j'ai "voté" pour toutes vos chroniques.
Merci Judith, vous pouvez continuer à "pointer inlassablement les mêmes entourloupes"
Merci pour cette chronique aussi bonne que les précédentes. Vos textes sont si bons et si convaincants qu'il n'y a jamais rien à ajouter, à part: merci.
Magistrale, vraiment.

Oui la double pensée et aussi le double langage.

A ajouter à votre liste de "bons" livres pour les vacances, la propagande de Goebbels, qui décrit par le menu,

ce que nos bons disciples accomplissent chaque jour.

Un véritable mode d'emploi publicitaire.


http://anthropia.blogg.org
Merci Judith. Je sais je ne suis que la 3000è à vous le dire mais tous vos articles sont d'utilité publique.
Ils permettent de mesurer à quel point tordre les mots et contourner les significations permet d'atteindre tous les objectifs politiques que l'on souhaite.

D'un côté la simplification extrême à la sauce présidentielle, ses désormais célèbres doubles négations manquantes, des phrases qui commencent invariablement par "c'est quand même formidable", et qui se terminent par des relatives mal construites, ou des complément de nom écorchés. Enfin un président capable de dire "la voiture à Dédé" ! Le nivellement par le bas, ou la réalisation de la démocratie parfaite.

De l'autre, une pseudo complexification du langage, recours à une sorte de jargon indéterminé, qui passe par un brouillage sémantique permanent. Les mots sont vidés de leur sens, en prennent un autre, ce sont des valises que l'on peut alternativement remplir puis vider à souhait, à sa convenance. Rien ne veut plus rien dire, tout veut désormais tout dire. Fantastique.

Je me demande parfois si l'objectif premier de nos gouvernements n'est pas d'appauvrir l'école, de l'étouffer jusqu'à son dernier souffle, afin que tous nous perdions les outils pour penser. Dans 1984 chaque mot qui disparaît est un concept perdu. Liberté, espoir sont rayés de la langue. Révolution aussi. Et tous les mots qui aident à penser la critique avec. "Simplifions" est l'objectif de la novlangue.

C'est la raison pour laquelle les cours de lettres sont fondamentaux. Je n'ai pas d'enfants, mais si j'en avais je les ferai baigner dans ma bibliothèque, et je leur expliquerais combien ce que le monde estime comme nul est en fait une immense richesse. Judith relevait dans un article passé combien ce qu'elle fait est compris comme négligeable. J'écris des livres. Des articles. je pense le monde. J'analyse. Je donne à mes étudiants. Des livres, des idées, de la matière à réfléchir, à se construire.

Certes, pas de compétences pour directement créer de la richesse, au sens économique.

On me le dit aussi tout le temps. De la recherche ? En droit ? Mais ça ne sert à rien ! Ben non. Z'avez raison.

En général ces conversations amènent invariablement les mêmes fulgurances : je demande à mes interlocuteurs les raisons pour lesquelles la France est aux yeux du monde un pays si particulier.

Et la réponse tombe, immuable : Condorcet, Helvétius, La Mettrie, d'Holbach, Diderot, Voltaire, Rousseau, Turgot... Sans parler de la littérature.

Juste des mots ?
Chronique très intéressante. Cela fait déjà plusieurs années que les politiques pratiquent l'art du camouflage sémantique plus ou moins assumé.
Il y a des mots tabous en politique. Quand une réforme ne passe pas (dans l'opinion, au sein de la classe politique) ou quand a un mot est trop marqué idéologiquement, les politiques préfèrent en changer plutôt que de changer leur politique. C'est ce qu'on appelle une 'Escroquerie du langage".

> Discrimination positive devient volontarisme républicain
Quand Nicolas Sarkozy était ministre de l'Intérieur, il a lancé l'idée de discrimination positive (encore et toujours, l'immigration). Chirac, Villepin et cie étaient farouchement contre l'idée. Mais Nicolas Sarkozy a voulu faire croire que c'était le mot qui faisait peur. Dès lors, dans ses dernières interventions médiatiques sur le sujet, il finissait systématiquement par lâcher : "si le mot discrimination positive vous gêne, on peut le changer, appelons ça "volontarisme républicain", peu importe". Voilà, changeons le mot plutôt que l'idée.

> Plan de rigueur devient rigueur dans la gestion
Quand Christine Lagarde avait annoncé à la rentrée 2007 que le gouvernement préparait un "plan de rigueur" dans la fonction publique, il y a eu une levier de boucler de la part des responsables de la droite inquiets que ce mot si impopulaire soit lancé dans les médias. Le jour même, Claude Guéant assure qu'il n'y a pas de plan de rigueur mais un plan de "valorisation de la fonction publique". C'est le même projet, mais on emploie une expression qui rassure. En gros, on va diminuer drastiquement le nombre de fonctionnaires mais on va essayer de bien traiter les survivants. De son côté, le Premier ministre avait expliqué qu'il n'y avait pas de plan de rigueur, mais de la "rigueur dans la gestion". Là, c'est finalement la marque "plan de rigueur" qui ferait peur selon Fillon, mais être rigoureux dans la gestion, cela fait plus sérieux.
Encore une fois, seuls les mots changent, le projet politique reste.
> Fonction publique : un plan de rigueur qui ne dit pas son nom

> "Changement", mot usé en politique, devient "rupture", "rénovation", "refondation"
Il y a aussi les mots usés, qui ont été utilisés tellement de fois, qui ont suscité tellement d'espoir déçu, qu'il est préférable de changer. Par exemple, le mot "changement" a quasiment disparu du vocabulaire politique. Très utilisé dans les années 1980, "le changement dans la continuité", "le président du vrai changement", le mot a perdu de sa force de percutions. Tous les hommes politiques disent qu'il faut changer, mais ça ne change pas ! Alors changeons le mot ! Nicolas Sarkozy l'a très vite compris et nous a servi le mot "rupture" à toutes les sauces. Les socialistes, eux, ont dû en trouver un autre. Le changement est indispensable : on parle alors de "rénovation", "refondation".
> Les slogans présidentiels depuis 1965 : "un choix juste fait avec force pour la France unie"

> Quand la crise économique se ralentit
Avec les deux chocs pétroliers, les pays développés sont entrés dans l'ère du chômage de masse. A la fin des années 1970 et début des années 1980, la France est entrée en période de "crise économique". Mais aujourd'hui, le terme de crise économique est tabou. Il fait trop peur. A la limite, "crise financière" peut être utilisé puisque les politiques ne se sentent pas responsables de cette crise (c'est la faute à la bourse), "crise monétaire" à la rigueur, cela passe aussi (c'est la faute à la BCE). Mais quand la politique économique d'un gouvernement peut être mise en cause, alors là, on ne parle plus de crise économique mais de "ralentissement de la croissance". Ca ralentit, mais ne vous inquiétez pas, ça va forcément raccélérer.
Quel que soit le mot employé, la situation est la même : faible croissance, chômage qui augmente ou emplois précaires qui se généralisent. Mais point de crise économique. Seulement un ralentissement.
Parfois, manipuler les mots ne suffit plus, alors on passe à une manipulation comptable (après le vocabulaire, les mathématiques).
> Chiffres du chômage : la petite manipulation comptable de Christine Lagarde

> Ségolène Royal s'est aussi spécialisée dans le recyclage lexical
Dans les "Contes de la télé ordinaire" (trop sympa, je fais de la pub pour un chroniqueur d'ASI), David Abiker a montré comment Ségolène Royal a inventé un nouveau lexique, non pour inventer une nouvelle politique mais pour recycler certaines idées en leur donnant un coup de neuf de façade. David Abiker avait parlé de "mots images".
Exemple : les maisons de correction deviennent des "maisons de proximité", les "emplois jeunes de Jospin" deviennent des "emplois tremplins".
Et quand les mots ne font pas partie de la culture politique d'un de ses acteurs,il suffit d'un pré-fixe pour adoucir une expression. Par exemple, le discours sur l'entreprise est plutôt un discours de droite. La gauche préfère plutôt parler d'égalité, de droits du salarié, si bien que lorsque Ségolène Royal parlait des entreprises, elle mettait en avant l'idée de "éco-industries" (on insiste sur l'écologie) ou "d'entreprise citoyenne" (la proximité rassure face au côté impersonnel d'une multinationale).
> David Abiker, Contes de la télé ordinaire, Michalon, 2008

> Quand les tabous ne sont plus tabous
Finalement, Nicolas Sarkozy a compris avant les autres les ressorts de la communication politique moderne : faire passer une décision difficile par un vocabulaire rassurant, qui ne heurte pas l'opinion. Et lorsqu'une mesure pose problème, alors il est préférable de changer de vocabulaire pour faire passer la pilule. Celui qui gagne la bataille sémantique gagne la bataille politique. "Travailler plus pour gagner plus", "crise du pouvoir d'achat" étaient des expressions plus percutantes que "le problème de la vie chère", chère à Ségolène Royal.
Même le mot "tabou" a été digéré par Nicolas Sarkozy, puis par la droite dans son ensemble. Il n'y aurait plus aucun sujet tabou, la langue de bois aurait disparu. Le tabou n'est plus tabou.
En réalité, de nombreux sujets restent encore tabous, mais ils avancent désormais masqués par un camouflage sémantique généralisé.
Je terminerais cette petite note par une citation de... Dominique de Villepin ! Voilà ce qu'il disait à l'Université Paris Dauphine en mai dernier à propos de la posture de Nicolas Sarkozy : "en politique, la transparence est toujours le maquillage de quelque chose. La transparence, c'est montrer ce que l'on veut bien montrer (...) mais à charge pour le journaliste d'être suffisamment curieux pour regarder ce qu'il y a derrière le rideau et ce qui intéresse les citoyens, c'est de comprendre les mécanismes complexes de la décision politique".
> Quand Dominique de Villepin s'en prend à la presse, jugée trop complaisante à l'égard du pouvoir


Sébastien Rochat
www.politique.net
Non Judith, il ne faut pas craindre de dire et redire ce que vous dénoncez et qui est l'antidote absolument nécessaire à la perversité de la "Com" actuelle laquelle agit comme un poison insidieux pour le seul bénéfice des nouveaux "Big brother"...
Car à mon humble avis notre nouveau roi Midas (rien à voir avec l'enseigne "auto"), celui qui veut tout transformer en OR et qui n'est actuellement qu'au stade BLING-BLING, est le digne réprésentant d'une caste mondialisée qui ne voit plus que son intérêt, cyniquement, ou qui est suffisamment lobotomisée pour tenir à la fois le discours justifiant son action et le discours d'une morale devenue pure façade : leur main gauche ignore ce que fait la droite et vice versa ...
Sont-ils malades de leur incohérence ? Je l'ignore mais ce que j'observe, c'est qu'ils rendent "malades" ceux qui veulent rester cohérents avec eux-mêmes et avec le monde, ce dernier n'étant pas réduit à un coffre-fort rempli aux as !!!!!!!!!!!!
Merci Judith pour ce brillant exposé...
@si a énormément gagné en passant sur le net, ce dernier lui permettant de s'étendre sur d'autres formes d'expression, et ainsi d'utiliser remarquablement l'écrit.
Je ne veux pas là jouer « vieux jeu », mais l'écriture c'est tout de même le meilleur format pour exprimer une idée.

Anthony [ un autre blog est possible ]
Bonjour Judith,

juste une précision lexicographique qui s'impose néanmoins dans une telle chronique.
l'adjectif chafoin (qui d'ailleurs s'écrit chafouin...) vient de chat et de fouine, et signifie sournois, rusé. On le traduit souvent à tort (cf l'Académie Française tout d même !) par petit, malingre, à cause d'une citation de Saint Simon 'L'abbé Dubois était un petit homme maigre, effilé, chafouin, à perruque blonde, à mine de fouine". Aujourd'hui ce terme prend bizarrement le sens de contrarié, mais d'où celà vient-il ?
enfin le terme va tout de même fort bien à ce Ministre,

salutations

ronan

Difficile, quand on tient une chronique de décryptage médias à orientation linguistique (même en ne prenant la parole que deux fois par mois), de ne pas avoir l’impression de se répéter et de pointer inlassablement les mêmes entourloupes. Entourloupes qui ont pour effet, et c’est là leur extrême nocivité, non de nous révolter contre un système inepte ou manipulateur, mais de nous donner l’impression, par le flou qu’elles diffusent chroniquement, qu’on ne comprend pas tout, et qu’au fond, ce n’est pas très grave.

À ceci s’ajoute un phénomène que pourrait, j’imagine, parfaitement illustrer Sébastien Böhler, à savoir que la répétition sert uniquement le pouvoir.

Certes, la pédagogie passe par la répétition, mais celle-ci a le tort aussi de tout transformer rapidement en évidence.

Or, l’évidence ne fait plus réagir, elle est la norme, ce que vise effectivement le pouvoir, mais pas l’opposition qui dénonce justement cette évidence, cette nouvelle norme.

Combien de fois, Judith, n’avez-vous pas lu ici ou sur l’ancien forum d’asi télé, que ce que vous dénonciez été tout à fait connu (le fait que les présentateurs du journal fasse ceci, que les politiques s’expriment comme cela, etc…), une évidence donc. Ce que certains de vos lecteurs ont aussitôt traduit par peu pertinent, alors que, alors que…

Le constat, tout aussi évident, que je fais ici pourrait être excessivement démoralisant pour ceux qui luttent contre ce que le pouvoir s’échine à transformer jour après jour en évidence (à coup de campagne publicitaire, par exemple), mais l’alternative est le silence.

Or, dans le silence, les forces d’opposition sont isolées, ne peuvent donc se dénombrer, mais aussi compter les unes sur les autres.

Merci donc de continuer à vous répéter, Judith. Cela n’a rien d’évident, je le sais pertinemment.


yG
Autant Sarkozy fait dans la langue "toute simple, sans fioritures", voire carrément populaire et fautive, autant ses... interprètes ? s'ingénient à recourir aux subtils artifices de la périphrase technocratique. Pas la même école, certainement. Pas le même milieu, non plus. Mais, all in all, tous semblent persuadés que le langage est un matériau qui se pliera sans encombre à leurs fins : faire passer des couleuvres pour des spaghetti (oui, je pense à mon déjeuner de tout à l'heure). Heureusement, le langage n'est pas que transformation de la réalité, il est aussi instrument et donc trace visible de cette transformation. Quant à dire qu'il leur suffira de changer la pensée des destinataires pour que ce travail devienne imperceptible, c'est accorder à ces stratèges un génie politique qu'ils n'ont pas : ce sont des séducteurs, chacun dans leur rôle, pas des idéologues.
Merci Judith , ce texte est un petit bijou. Ça me rappelle (s'il le fallait) pourquoi je suis abonné à asi.
Comme C@mille, 1984 m'a tellement marqué qu'il a été une étape dans ma compréhension du monde dans lequel on vit. Ca me donne envie de me replonger dans cet ouvrage pour en savourer tous les petits détails... en redoutant d'y voir trop de ressemblances avec la société actuelle.
Justement analysé.

Et que la novlangue est triste, sans odeur et sans saveur !

Sans abus de pastiche, pour la route des vacances :

« …quand des équipages entiers de mots en chômage repartaient équipés à neuf ; depuis paticaine jusqu’au musilier farin, prêts pour le grand branlecon de babas. »

(Tocnurne, G-A. Masson)
Par sleepless :"Vous pointez là toute la perversité d'un certain monde politique qui ne se soucie plus de politique mais de communication."
Pas mieux. Et ça m'effraie tous les jours.
Merci Judith.
Si je comprends bien, en disant non au quota, mais oui au contingent, la commission Mazeaud autorise une loi qu'elle réprouve? Et chacun continue sa route en ayant sauvé les apparences...
Merci Judith.

Et Brice, qui sent bien qu’une victoire linguistique est une victoire idéologique, et qu’il suffit de changer les mots pour faire croire qu'on change les choses,

Vous pointez là toute la perversité d'un certain monde politique qui ne se soucie plus de politique mais de communication.
Article très agréable qui remplit mon contingent de bonheur pour aujourd'hui.
1984... Ce livre m'a fait passer à l'age adulte.
Forcément, en cette periode estivale, la France préfère chercher à percer les secrets des lofteurs que les secrets de langages d'Hortefeux.
Comme toute l 'année, d'ailleurs... non ? Hop, au trou de mémoire !
Merci pour cette chronique.
Little Big Brother, voilà qui lui va pas mal, à Sarkozy, patron de Hortefeux, avec sa manie de tutoyer et de toucher tout le monde, pour s'assurer de leur soutien émotionnel pendant qu'il les soumet avec sa novlogique. A-t-il seulement jamais lu "1984" ? Y puise-t-il consciemment toute sa méthodologie ou croit-il réellement être un génial politicien qui parvient toujours à ses fins, à la fin ?

Je ne sais pas pourquoi, mais j'ai du mal à l'imaginer avec autre chose qu'un Levy sur les genoux, sur le pont des paquebots de ses amis, en vacances. Par mieux pour Hortefeux.

Alors, 1984, Brave New World ou Fahrenheit 451, je ne crois pas que ce soit à leur programme, constitutionnel ou non. Une lecture d'extraits devant les élèves debout et en rangs, avant chaque rentrée, dans chaque lycée, ça aurait de la gueule, pourtant, non ?
De manière générale, on a l'impression que Sarkozy et les siens ont entièrement adopté les méthodes de Tony Blair. Quelque chose me dit que le poste des honoraires pour les "spin doctors" (Thierry Saussez etc.) en tout genre a sacrément augmenté. Si le peuple n'accepte pas certains faits, c'est parce qu'il a mal compris, "que nous ne l'avons pas expliqué assez bien et qu'il convient de faire un travail de pédagogue". Le peuple Irlandais a voté non au référendum ? Eh bien, il va falloir faire un travail de pédagogie et le faire voter de nouveau.

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