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Delphine De Vigan et le travail, d@ns le texte
L'univers du travail, encore. Pas celui des usines et des mines, mais le tertiaire et ses photocopieuses, ses ordres donnés par mail, ses humiliations derrière les portes numérotées, ses armées silencieuses, au petit matin, dans les couloirs du RER. C'est le sujet du dernier livre de Delphine de Vigan, Les heures souterraines (éd. JC Lattès).
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Derniers commentaires
Bonjour,
je suis en train de regarder l'émission, et je suis sur le point de lire Les Heures souterraines. Je vous donne une réaction à chaud de la première partie de l'émission : je ne comprends pas le très long développement sur le plaisir de circuler à vélo dans Paris pour aller déjeuner à Saint-Germain. Ce n'est pas une pique contre l'auteur mais je ne saisis pas très bien l'intérêt de cette digression avec le texte proposé. Puisque l'auteur affirme qu'elle ne prend plus les transports et ne perçoit plus la ville comme autrefois, du temps qu'elle était salariée, pourquoi continuer à bavarder sur le sujet ? Il me semble que l'entrée dans le vif du sujet est longue.
Bien à vous,
je suis en train de regarder l'émission, et je suis sur le point de lire Les Heures souterraines. Je vous donne une réaction à chaud de la première partie de l'émission : je ne comprends pas le très long développement sur le plaisir de circuler à vélo dans Paris pour aller déjeuner à Saint-Germain. Ce n'est pas une pique contre l'auteur mais je ne saisis pas très bien l'intérêt de cette digression avec le texte proposé. Puisque l'auteur affirme qu'elle ne prend plus les transports et ne perçoit plus la ville comme autrefois, du temps qu'elle était salariée, pourquoi continuer à bavarder sur le sujet ? Il me semble que l'entrée dans le vif du sujet est longue.
Bien à vous,
Je vous aime tous les deux ! Je viens enfin d'avoir une connexion haut débit et je vous retrouve après de longs mois. Aussitôt vue la dernière partie de votre émission j'écris ceci à un ami :
Une émission littéraire te plaira, parce que c'est une émission où l'on prend le temps d'aller au cœur, parce qu'il n'y a rien pour divertir le spectateur et qu'il n'y a pas besoin de divertir quand on attaque la mort frontalement par un exercice de vie, parce que l'animatrice et son comparse se laissent toucher par l'auteur-e qu'ils interviewent et parce qu'ils sont souvent émerveillant d'intelligence et de respect pour ce que joue l'auteur-e dans son œuvre.
C'est sur la chaine Internet de décryptage animée par Daniel Schneiderman. L'émission s'appelle "Dans le texte". Elle est animée par la grande Judith Bernard avec le noble Hubert Arthus.
C'est ici : http://www.arretsurimages.net/emission.php?id=3
Une émission littéraire te plaira, parce que c'est une émission où l'on prend le temps d'aller au cœur, parce qu'il n'y a rien pour divertir le spectateur et qu'il n'y a pas besoin de divertir quand on attaque la mort frontalement par un exercice de vie, parce que l'animatrice et son comparse se laissent toucher par l'auteur-e qu'ils interviewent et parce qu'ils sont souvent émerveillant d'intelligence et de respect pour ce que joue l'auteur-e dans son œuvre.
C'est sur la chaine Internet de décryptage animée par Daniel Schneiderman. L'émission s'appelle "Dans le texte". Elle est animée par la grande Judith Bernard avec le noble Hubert Arthus.
C'est ici : http://www.arretsurimages.net/emission.php?id=3
Merci beaucoup pour cette émission, c'était très très bien. Je vais la revoir sans doute dans quelques mois, je sens que cette émission fait partie de celles qu'il est plus qu'intéressant de revisiter, comme un bon livre.
Note 1: M'sieu Arthus, c'est quoâââ le "temps simenonien" ? (18:20)
Note 2: c'est moi (ou mon PC) ou bien il y a par moments une musique de fond parasite dans la bande son de cette émission ?
Note 1: M'sieu Arthus, c'est quoâââ le "temps simenonien" ? (18:20)
Note 2: c'est moi (ou mon PC) ou bien il y a par moments une musique de fond parasite dans la bande son de cette émission ?
Bonjour,
Je n'ai pas repéré dans les commentaires une objection sur un point de détail qui fait que Hubert Arthus pose une question de style à Delphine de Vigan. Hubert Arthus. fait observer que tant dans "Jours sans faim" que dans "Les heures souterraines" jamais le problème auquel est confronté le personnage principal n'est nommé explicitement dans le texte et ni même dans la conscience des personnages. Il demande à Delphine de Vigan "comment fait on alors pour écrire sur un sujet sans le nommer ?"
Hubert Arthus a certainement mal lu "Jours sans faim" car l'anorexie est explicitement nommé dès la page 20 : «Anorexique, ça sonne comme anorak, mais ça fini en hic.» Laure a parfaitement conscience de ce mal puisque, je continue la citation, «plus tard elle comprendra qu'elle cherchait ça, entre autres choses, détruire son corps pour ne plus rien percevoir du dehors, ne plus rien ressentir d'autre dans sa chair et dans son ventre que la faim.»
A partir de son erreur, Hubert Arthus tente ensuite de faire un parallèle entre ce livre et "Les heures souterraines" alors qu'il ne peut y en avoir. Les constructions mentales des personnages principaux de ces deux livres s'opposent ainsi que leur relation aux autres. Dans "jours sans faim" Laure fuit la réalité à travers l'anorexie tandis que dans "Les heures souterraines" Mathilde tente de comprendre la réalité de ce qui lui arrive. Les oppositions ne s'arrête pas là puisque dans "jours sans faim" le docteur Brunel fait ce qu'il peut pour que Laure sente qu'elle existe, qu'elle a sa place dans le monde et elle en est presque amoureuse de ce docteur, il y a continuellement dans ce livre un lien avec les autres qui permet à Laure de s'en sortir, la confiance y est également omniprésente tandis que dans "Les heures souterraines" tous les liens sautent les uns après les autres et les rapports aux autres s'enfoncent désespérément dans le conflit (pour mathilde) ou dans la distanciation (pour Thibault), les deux personnages sont confrontés à la défiance, l'issue ne trouve pas sa source dans le rapprochement mais bien au contraire dans une rupture brutale avec ce qui l'a sauvée dans un premier temps pour Mathilde et avec sa compagne pour Thibault.
Mais peut-être est-ce moi qui me trompe.
Je n'ai pas repéré dans les commentaires une objection sur un point de détail qui fait que Hubert Arthus pose une question de style à Delphine de Vigan. Hubert Arthus. fait observer que tant dans "Jours sans faim" que dans "Les heures souterraines" jamais le problème auquel est confronté le personnage principal n'est nommé explicitement dans le texte et ni même dans la conscience des personnages. Il demande à Delphine de Vigan "comment fait on alors pour écrire sur un sujet sans le nommer ?"
Hubert Arthus a certainement mal lu "Jours sans faim" car l'anorexie est explicitement nommé dès la page 20 : «Anorexique, ça sonne comme anorak, mais ça fini en hic.» Laure a parfaitement conscience de ce mal puisque, je continue la citation, «plus tard elle comprendra qu'elle cherchait ça, entre autres choses, détruire son corps pour ne plus rien percevoir du dehors, ne plus rien ressentir d'autre dans sa chair et dans son ventre que la faim.»
A partir de son erreur, Hubert Arthus tente ensuite de faire un parallèle entre ce livre et "Les heures souterraines" alors qu'il ne peut y en avoir. Les constructions mentales des personnages principaux de ces deux livres s'opposent ainsi que leur relation aux autres. Dans "jours sans faim" Laure fuit la réalité à travers l'anorexie tandis que dans "Les heures souterraines" Mathilde tente de comprendre la réalité de ce qui lui arrive. Les oppositions ne s'arrête pas là puisque dans "jours sans faim" le docteur Brunel fait ce qu'il peut pour que Laure sente qu'elle existe, qu'elle a sa place dans le monde et elle en est presque amoureuse de ce docteur, il y a continuellement dans ce livre un lien avec les autres qui permet à Laure de s'en sortir, la confiance y est également omniprésente tandis que dans "Les heures souterraines" tous les liens sautent les uns après les autres et les rapports aux autres s'enfoncent désespérément dans le conflit (pour mathilde) ou dans la distanciation (pour Thibault), les deux personnages sont confrontés à la défiance, l'issue ne trouve pas sa source dans le rapprochement mais bien au contraire dans une rupture brutale avec ce qui l'a sauvée dans un premier temps pour Mathilde et avec sa compagne pour Thibault.
Mais peut-être est-ce moi qui me trompe.
Perso, je ne lis jamais les accroches, ni les 4ieme de couv, donc je n'ai pas ressenti d'arnaque.
Non, le dévoilement qui m'a un peu gêné, c'est la qualité de veuve de l'héroïne qui arrive au bout de 150 pages. Je sais que c'est l'auteure qui l'a fait. Mais cela m'a un peu embêté. disons que je n'ai plus envie d'aller lire ce livre. De toute façon, je ne vais pas lire les 150 premières pages en me laissant aller au texte puisque je saurais.
Autant vos incursions dans le texte m'ont incité à lire "ce que je sais de Véra Candida" , et votre voix et vos analyses raisonnaient pendant que je lisais les passages relatifs à Rose Bustamente. Expérience très intéressante comme rompre la solitude de la lecture jusque dans l'attachement au personnage.
Mais là j'en sais trop.
Et pourtant je suis intéressée par cette auteure, alors je me sens titiller par le livre " les jolis garçons" , et là boum j'apprends le coup de théâtre c'est à dire qu'à la fin du roman l'héroïne parle à un personnage inexistant et que cela change tout le regard que l'on a sur le récit que l'on vient de lire. Bon ben celui là c'est fichu aussi.
Peut être que d'autres ont plus lu de livres que moi, et qu'il leurs est aisé de faire salon mais s'il vous plait pourriez vous juste faire un peu attention aux petits lecteurs comme moi.
merci par avance
Non, le dévoilement qui m'a un peu gêné, c'est la qualité de veuve de l'héroïne qui arrive au bout de 150 pages. Je sais que c'est l'auteure qui l'a fait. Mais cela m'a un peu embêté. disons que je n'ai plus envie d'aller lire ce livre. De toute façon, je ne vais pas lire les 150 premières pages en me laissant aller au texte puisque je saurais.
Autant vos incursions dans le texte m'ont incité à lire "ce que je sais de Véra Candida" , et votre voix et vos analyses raisonnaient pendant que je lisais les passages relatifs à Rose Bustamente. Expérience très intéressante comme rompre la solitude de la lecture jusque dans l'attachement au personnage.
Mais là j'en sais trop.
Et pourtant je suis intéressée par cette auteure, alors je me sens titiller par le livre " les jolis garçons" , et là boum j'apprends le coup de théâtre c'est à dire qu'à la fin du roman l'héroïne parle à un personnage inexistant et que cela change tout le regard que l'on a sur le récit que l'on vient de lire. Bon ben celui là c'est fichu aussi.
Peut être que d'autres ont plus lu de livres que moi, et qu'il leurs est aisé de faire salon mais s'il vous plait pourriez vous juste faire un peu attention aux petits lecteurs comme moi.
merci par avance
Bientôt midi, ce mardi 27 octobre, et aucun @sinaute n'a encore signalé le dossier (en 6 volets) que télérama a initié hier sur la thématique de la souffrance au travail ?
Ben voilà, c'est fait !
Ben voilà, c'est fait !
Quelle femme remarquable.
Moi qui ne lit pas de roman, je vais faire une entorse.
Delphine De Vigan est d'une grande justesse, et je suis très impressionnée.
Pour ce qui est des rapports complexes entre le travailleur et le travail, je vous propose une référence, parmi d'autres en psychosociologie clinique, qui explique ce "doute" ou ces allers-retours que Judith souligne :
Il xs'agit du système psychique organisationnel qui est un espace de négociation ou d’ajustement réciproque entre l’individu et l’organisation :
« Il y a correspondances entre le mode de fonctionnement organisationnel et le mode de fonctionnement psychique des individus qui composent l’organisation. (...) Les organisations ont un mode de fonctionnement dominant qui sollicite un certain type de personnalité et une mode de fonctionnement psychique particulier. En ce sens, on peut dire que les organisations cherchent à produire un certain type d’individu, à le façonner à leur image, à l’adapter à leurs exigences. (...) Mais cette production n’est pas à sens unique. Les individus investissent les organisations à partir et en fonction de leur propre fonctionnement psychique (investir = choisir et agir sur). Ils cherchent à adapter les entreprises à leurs propres désirs. Ils contribuent à produire des organisations qui satisfassent des règles, des procédures, des dispositifs..., autant d’expressions institutionnalisées de leur investissement psychologique. » (Aubert et De Gaulejac, 1991).
Le problème intervient lorsqu'il y a "divorce", la voie de garage etc...
Merci pour ce très beau moment à tous les trois.
Moi qui ne lit pas de roman, je vais faire une entorse.
Delphine De Vigan est d'une grande justesse, et je suis très impressionnée.
Pour ce qui est des rapports complexes entre le travailleur et le travail, je vous propose une référence, parmi d'autres en psychosociologie clinique, qui explique ce "doute" ou ces allers-retours que Judith souligne :
Il xs'agit du système psychique organisationnel qui est un espace de négociation ou d’ajustement réciproque entre l’individu et l’organisation :
« Il y a correspondances entre le mode de fonctionnement organisationnel et le mode de fonctionnement psychique des individus qui composent l’organisation. (...) Les organisations ont un mode de fonctionnement dominant qui sollicite un certain type de personnalité et une mode de fonctionnement psychique particulier. En ce sens, on peut dire que les organisations cherchent à produire un certain type d’individu, à le façonner à leur image, à l’adapter à leurs exigences. (...) Mais cette production n’est pas à sens unique. Les individus investissent les organisations à partir et en fonction de leur propre fonctionnement psychique (investir = choisir et agir sur). Ils cherchent à adapter les entreprises à leurs propres désirs. Ils contribuent à produire des organisations qui satisfassent des règles, des procédures, des dispositifs..., autant d’expressions institutionnalisées de leur investissement psychologique. » (Aubert et De Gaulejac, 1991).
Le problème intervient lorsqu'il y a "divorce", la voie de garage etc...
Merci pour ce très beau moment à tous les trois.
Je me suis régalé ! Rien d'autre à dire.
Incroyable une émission d’une telle qualité !
Ayant consacré le temps supplémentaire que nous offre l’heure d’hiver (c’est bien son seul avantage) à regarder la totalité de l’émission, y compris les vingt premières minutes déjà vues cette semaine, pour ne pas couper la continuité, je me suis régalé incroyablement…
Ce choc de sensibilités, d’intelligence, est vraiment stupéfiant. Delphine, Judith et Hubert sont stratosphériques, tous les trois à la même altitude de pensée.
Sur la violence dans laquelle le pire est de ne pas trouver l'origine - comme dans les erreurs judiciaires finalement - le débat est totalement extraordinaire : si on sait d'où vient la violence au moins n'a-t-on pas totalement perdu le contrôle, au moins peut-on espérer se défendre, ou éventuellement ne plus commettre la même erreur dans le futur. Si on ne sait pas d'où elle vient on est réduit au rang d'objet !
Oui ! Bien sûr ! La qualité des humains ne se définit qu’en fonction de leurs déchirures et en fonction de la manière dont ils les ont surmontées… Et s’ils peuvent transformer leurs blessures en œuvre d’art c’est vraiment magnifique !
Il y a tant à dire sur tout cela : l’entreprise est devenue, en trente ans, une véritable broyeuse de destins. Elle n’a pas toujours été ainsi, même si depuis le taylorisme (1880) il aurait peut-être fallu se poser un peu plus de questions sur les finalités du travail, sur la nécessité de produire toujours plus et sur les bénéficiaires réels de la manne récoltée en travaillant toujours plus et toujours plus vite…
Cependant il n’est pas inutile de réaliser que sans travail rien à bouffer !
Anorexie totale et automatique…
Comment payer les agriculteurs et éleveurs qui font le boulot si on ne travaille pas ? (J’ai posé la question le plus simplement possible, mais la réalité est exactement là !)
Reste à tenter de comprendre comment les entreprises se sont déshumanisées à ce point. D’abord l’explosion du tertiaire n’est pas une bonne chose, pour ma part ayant travaillé très longtemps dans l’industrie je pense que les valeurs humaines y sont beaucoup plus respectées que dans le tertiaire, ne serait-ce que parce que les compétences et savoir-faire sont bien plus évidents.
De plus notre industrie en pleine déroute c’est une très mauvaise nouvelle :
- Qui fabrique les ordinateurs et les produits high-tech ?
- Qui fabrique les belles bagnoles rentables ?
- Qui fabrique les deux roues motorisés qui envahissent nos villes ?
- Qui fabrique l’électroménager dont nous ne saurions nous passer ?
- Qui fabrique les baskets dont nos enfants ne sauraient de passer ?
On pourrait continuer ainsi sur douze pages, y compris la bouffe : regardez donc d’où viennent les trucs que vous bouffez… La réalité est très simple, nous ne faisons plus grand chose de “sale” ou de “fatiguant” (ceux qui travaillent encore dans le domaine industriel ou agricole ont tout mon respect, j’espère avoir été clair).
Sur l'industrie je regrette que vou n'ayez pas cité le magnifique roman de mon ami Gérard Mordillat qui a pour titre Les Vivants et les Morts (quelle photo !) en cours de tournage pour France 2 (8 épisodes de 52 minutes, rien moins...)
Ayant travaillé aussi dans le tertiaire j’ai été éjecté trois fois de mes confortables fauteuils de “cadre sup” par les “repreneurs” des boîtes dans lesquelles j’exerçais mes modestes talents à la satisfaction générale (jusque là)… J’ai donc découvert ce que c’est de se faire jeter comme un Kleenex.
Et encore j’ai échappé à la placardisation, mais j’ai des amis et des membres de la famille qui se sont fait prendre dans la nasse… Et c’était ignoble !
Là on rejoint tout doucement le livre, son auteur(e), et les difficultés de vie qui finissent par faire de la littérature. Car tout est littérature, bien-sûr, y compris le RER ou le bus…
Cet homme malheureux que décrit Delphine me ressemble aussi pour avoir attendu plus d’un an que la femme que j’aimais (à l’époque) daigne quitter son mari, comme elle l’avait annoncé. Et comme elle ne l’a jamais fait…
La littérature n’est-ce pas la façon de montrer le réel après l’avoir fait passer à travers les filtres de l’intelligence et de la sensibilité, sans oublier de jouer avec les mots et leurs sonorités, leurs rythmes ?
Il y aurait mille choses encore à dire sur cette exquise émission, sur cette exploration subtile du texte de la (très) belle Delphine menée par la magnifique Judith et l’excellent Hubert qui trouve toujours mieux sa place Dans le Texte avec beaucoup de finesse.
Peut-être vais-je arrêter là le cirage de pompes, j’ai peur que la prochaine émission ne soit foirée pour cause de sécurité excessive… Toujours rester dans l’insécurité c’est le secret !
Amitiés à Judith et merci à tous les trois pour ce moment de bonheur !
***
Ayant consacré le temps supplémentaire que nous offre l’heure d’hiver (c’est bien son seul avantage) à regarder la totalité de l’émission, y compris les vingt premières minutes déjà vues cette semaine, pour ne pas couper la continuité, je me suis régalé incroyablement…
Ce choc de sensibilités, d’intelligence, est vraiment stupéfiant. Delphine, Judith et Hubert sont stratosphériques, tous les trois à la même altitude de pensée.
Sur la violence dans laquelle le pire est de ne pas trouver l'origine - comme dans les erreurs judiciaires finalement - le débat est totalement extraordinaire : si on sait d'où vient la violence au moins n'a-t-on pas totalement perdu le contrôle, au moins peut-on espérer se défendre, ou éventuellement ne plus commettre la même erreur dans le futur. Si on ne sait pas d'où elle vient on est réduit au rang d'objet !
Oui ! Bien sûr ! La qualité des humains ne se définit qu’en fonction de leurs déchirures et en fonction de la manière dont ils les ont surmontées… Et s’ils peuvent transformer leurs blessures en œuvre d’art c’est vraiment magnifique !
Il y a tant à dire sur tout cela : l’entreprise est devenue, en trente ans, une véritable broyeuse de destins. Elle n’a pas toujours été ainsi, même si depuis le taylorisme (1880) il aurait peut-être fallu se poser un peu plus de questions sur les finalités du travail, sur la nécessité de produire toujours plus et sur les bénéficiaires réels de la manne récoltée en travaillant toujours plus et toujours plus vite…
Cependant il n’est pas inutile de réaliser que sans travail rien à bouffer !
Anorexie totale et automatique…
Comment payer les agriculteurs et éleveurs qui font le boulot si on ne travaille pas ? (J’ai posé la question le plus simplement possible, mais la réalité est exactement là !)
Reste à tenter de comprendre comment les entreprises se sont déshumanisées à ce point. D’abord l’explosion du tertiaire n’est pas une bonne chose, pour ma part ayant travaillé très longtemps dans l’industrie je pense que les valeurs humaines y sont beaucoup plus respectées que dans le tertiaire, ne serait-ce que parce que les compétences et savoir-faire sont bien plus évidents.
De plus notre industrie en pleine déroute c’est une très mauvaise nouvelle :
- Qui fabrique les ordinateurs et les produits high-tech ?
- Qui fabrique les belles bagnoles rentables ?
- Qui fabrique les deux roues motorisés qui envahissent nos villes ?
- Qui fabrique l’électroménager dont nous ne saurions nous passer ?
- Qui fabrique les baskets dont nos enfants ne sauraient de passer ?
On pourrait continuer ainsi sur douze pages, y compris la bouffe : regardez donc d’où viennent les trucs que vous bouffez… La réalité est très simple, nous ne faisons plus grand chose de “sale” ou de “fatiguant” (ceux qui travaillent encore dans le domaine industriel ou agricole ont tout mon respect, j’espère avoir été clair).
Sur l'industrie je regrette que vou n'ayez pas cité le magnifique roman de mon ami Gérard Mordillat qui a pour titre Les Vivants et les Morts (quelle photo !) en cours de tournage pour France 2 (8 épisodes de 52 minutes, rien moins...)
Ayant travaillé aussi dans le tertiaire j’ai été éjecté trois fois de mes confortables fauteuils de “cadre sup” par les “repreneurs” des boîtes dans lesquelles j’exerçais mes modestes talents à la satisfaction générale (jusque là)… J’ai donc découvert ce que c’est de se faire jeter comme un Kleenex.
Et encore j’ai échappé à la placardisation, mais j’ai des amis et des membres de la famille qui se sont fait prendre dans la nasse… Et c’était ignoble !
Là on rejoint tout doucement le livre, son auteur(e), et les difficultés de vie qui finissent par faire de la littérature. Car tout est littérature, bien-sûr, y compris le RER ou le bus…
Cet homme malheureux que décrit Delphine me ressemble aussi pour avoir attendu plus d’un an que la femme que j’aimais (à l’époque) daigne quitter son mari, comme elle l’avait annoncé. Et comme elle ne l’a jamais fait…
La littérature n’est-ce pas la façon de montrer le réel après l’avoir fait passer à travers les filtres de l’intelligence et de la sensibilité, sans oublier de jouer avec les mots et leurs sonorités, leurs rythmes ?
Il y aurait mille choses encore à dire sur cette exquise émission, sur cette exploration subtile du texte de la (très) belle Delphine menée par la magnifique Judith et l’excellent Hubert qui trouve toujours mieux sa place Dans le Texte avec beaucoup de finesse.
Peut-être vais-je arrêter là le cirage de pompes, j’ai peur que la prochaine émission ne soit foirée pour cause de sécurité excessive… Toujours rester dans l’insécurité c’est le secret !
Amitiés à Judith et merci à tous les trois pour ce moment de bonheur !
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Bouh la la, je dois être trop sot, sûrement, mais je trouve ces émissions soporifiques et ennuyeuses. Comme les articles de A Korkos.
C'est de la masturbation intellectuelle où les protagonistes s'écoutent parler, à grand renfort de ''mon rapport à'' alors que l'on doit dire ''par rapport à'' ou ''mon rapport avec''.
Ensuite, ils nous disent aimer la langue et ne voient même pas qu'ils la triture et la torture sans répit à cause des modes du milieu littéraire.
C'est de la masturbation intellectuelle où les protagonistes s'écoutent parler, à grand renfort de ''mon rapport à'' alors que l'on doit dire ''par rapport à'' ou ''mon rapport avec''.
Ensuite, ils nous disent aimer la langue et ne voient même pas qu'ils la triture et la torture sans répit à cause des modes du milieu littéraire.
Si c'était celui de me faire lire, il est pleinement réussi. J'ai lu Michel Vinaver, Chloé Delaume. Delphine de Vigan et Véronique Ovaldé sont en attente, il faut d'abord que je finisse Naomi Klein (j'attendais désespérement la sortie en poche de la Stratégie du choc mais je ne pouvais plus d'attendre, alors j'ai cédé).
Merci.
Merci.
Quid d'Eric Naulleau?! Ca fait plusieurs émissions auquels il n'intervient pas. A-t-il arrêté sa collaboration avec "Dans le texte" ?
J'en suis à la minute 22... Maintenant dodo, coucouche panier, papattes en rond, demain travail très tôt...
Mais je me régale à l'avance de la suite !
Des commentaires plus argumentés à partir de demain...
Mais déjà merci à Judith ! C'est vraiment magnifique.
***
Mais je me régale à l'avance de la suite !
Des commentaires plus argumentés à partir de demain...
Mais déjà merci à Judith ! C'est vraiment magnifique.
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Étonnant que personne n'ait évoqué ne serait-ce que le titre de Stupeur et tremblements, un des deux livres d'Amélie Nothomb que j'ai lus, et qui parle précisément d'une placardisation "exotique", dans une entreprise nippone... Non pas que la référence soit indispensable, mais elle s'impose d'elle-même.
J'aurais du mal à parler du fond du sujet - étant encore une inactive -, mais il me semble qu'une chose essentielle (pour moi) a été dite : si l'univers laboral en général, et de l'entreprise en particulier, est devenu un topos dans la description de l'aliénation moderne, il est possible, ou il a été possible d'y trouver une forme de satisfaction, qui n'est pas le bonheur, mais qui y participe. Cette réalité-là, même narrée au passé, d'un travail nourrissant une passion, étant une passion, la plupart des récits contemporains, qu'ils soient témoignages ou textes littéraires, en font le deuil. Je crois à la complexité dont parle Delphine De Vigan, j'entends cette parole ambivalente qui est la sienne, et je ne me souhaite pas autre chose : les deux faces de cette énigme apprivoisée.
edit : ah, et, quand j'ai lu les premières lignes de la présentation de l'émission, j'ai pensé au livre de J. Bernard dont je n'ai encore lu que le résumé, et que j'emprunterai à la bibliothèque de... Lyon. Du coup, je n'ai pas trouvé l'accroche DSienne raccoleuse... Enfin bref, je vais lire ce bouquin, et celui de Delphine De Vigan si le service des acquisitions a fait du zèle.
J'aurais du mal à parler du fond du sujet - étant encore une inactive -, mais il me semble qu'une chose essentielle (pour moi) a été dite : si l'univers laboral en général, et de l'entreprise en particulier, est devenu un topos dans la description de l'aliénation moderne, il est possible, ou il a été possible d'y trouver une forme de satisfaction, qui n'est pas le bonheur, mais qui y participe. Cette réalité-là, même narrée au passé, d'un travail nourrissant une passion, étant une passion, la plupart des récits contemporains, qu'ils soient témoignages ou textes littéraires, en font le deuil. Je crois à la complexité dont parle Delphine De Vigan, j'entends cette parole ambivalente qui est la sienne, et je ne me souhaite pas autre chose : les deux faces de cette énigme apprivoisée.
edit : ah, et, quand j'ai lu les premières lignes de la présentation de l'émission, j'ai pensé au livre de J. Bernard dont je n'ai encore lu que le résumé, et que j'emprunterai à la bibliothèque de... Lyon. Du coup, je n'ai pas trouvé l'accroche DSienne raccoleuse... Enfin bref, je vais lire ce bouquin, et celui de Delphine De Vigan si le service des acquisitions a fait du zèle.
Le 1er passage lu (à propos de ces noms de RER) résonne avec le moment de la discussion sur le choix de l'auteur de NE PAS nommer explicitement le thème central de ses livres. D'ailleurs elle dit "Quand on a le bon mot, une grande partie du chemin est faite". Vraiment un beau concentré, ce passage des RER, avec ces noms en soi vides de sens mais aux conséquences bien réelles.
Il a peu été question du travail du personnage masculin, qui est pourtant l'exact contraire de celui de l'héroïne, avec son aspect virtuel et désincarné. Pourtant le roman est parsemé de quelques unes de ces visites médicales, de vraies rencontres, elles. Même amputé, ce personnage me semble davantage toucher à la plénitude des rapports humains.
Il a peu été question du travail du personnage masculin, qui est pourtant l'exact contraire de celui de l'héroïne, avec son aspect virtuel et désincarné. Pourtant le roman est parsemé de quelques unes de ces visites médicales, de vraies rencontres, elles. Même amputé, ce personnage me semble davantage toucher à la plénitude des rapports humains.
Y a un long développement d'Hubert Artus sur la déshumanisation du travail tertiaire, malencontreusement mis en contraste avec la mine de charbon. La haveuse au fond de la mine n'est pas spécialement humaine non plus. Réponse de Vigan : ben oui, c'est ça la modernité, on risque plus de se couper la main.
849 000 accidents du travail et maladies professionnelles ayant entrainé un arrêt de travail en 2007 contre 831 000 deux ans plus tôt. 1449 morts (+15% en un an). Les mutilation, les accidents accompagnent le développement du salariat et comme par hasard, c'est dans l'intérim que les accidents sont les plus fréquents, c'est-à-dire là où la pression est la plus forte, les relations de travail les moins humaines.
J'ai plein de camarades qui ont laissé des doigts dans des presses hydroliques. Ca fait partie du paysage. Au début de l'année, une de mes copines a postulé pour un emploi de charcutière chez Carrefour. La vendeuse avait été déplacé au rayon "culture". Elle a remarqué qu'il manquait des bouts de doigts à certaines de ses collègues, y compris celle qui vend les DVD et les bouquins. La sécurité de la machine à trancher du saucisson avait sauté, histoire de couper des tranches jusqu'au rogaton.
Les TMS, c'est la malade des ouvrières à la chaine qui manipulent des petits objets, notament. C'est aussi celle des secrétaires.
Y a pas lieu d'opposer le tertiaire et le secondaire.
849 000 accidents du travail et maladies professionnelles ayant entrainé un arrêt de travail en 2007 contre 831 000 deux ans plus tôt. 1449 morts (+15% en un an). Les mutilation, les accidents accompagnent le développement du salariat et comme par hasard, c'est dans l'intérim que les accidents sont les plus fréquents, c'est-à-dire là où la pression est la plus forte, les relations de travail les moins humaines.
J'ai plein de camarades qui ont laissé des doigts dans des presses hydroliques. Ca fait partie du paysage. Au début de l'année, une de mes copines a postulé pour un emploi de charcutière chez Carrefour. La vendeuse avait été déplacé au rayon "culture". Elle a remarqué qu'il manquait des bouts de doigts à certaines de ses collègues, y compris celle qui vend les DVD et les bouquins. La sécurité de la machine à trancher du saucisson avait sauté, histoire de couper des tranches jusqu'au rogaton.
Les TMS, c'est la malade des ouvrières à la chaine qui manipulent des petits objets, notament. C'est aussi celle des secrétaires.
Y a pas lieu d'opposer le tertiaire et le secondaire.
Merci à vous, Judith et Hubert d'avoir semé des pépites au cours de cette petite heure par vos lectures (trop brêves, trop peu nombreuses) mettant en évidence la distance humoristique sur la réalité triviale, par vos questions à l'auteure sur ses fondamentaux personnels, vos interpellations sur les résonances avec les autres ouvrages,...
Ces "pépites me donnent une forte envie de lire cette auteure qui semble si bien s'emparer de notre vie "moderne" dans ses créations romanesques qu'elle restitue l'ossature et la complexité (par le refus des étiquettes) de notre condition humaine actuelle.
Longue vie à "Dans le texte" !!
Ces "pépites me donnent une forte envie de lire cette auteure qui semble si bien s'emparer de notre vie "moderne" dans ses créations romanesques qu'elle restitue l'ossature et la complexité (par le refus des étiquettes) de notre condition humaine actuelle.
Longue vie à "Dans le texte" !!
Message 1/5 du 22/10/09.
J'ai particulièrement apprécié lorsque Judith met en relief la distinction entre haine au travail et la haine du travail (quatrième partie de l'émission). De Vigan déclare sur cette question être dans l'ambivalence, comme son personnage, puisque comme elle, le travail l'ayant sauvé, elle ne peut se résoudre à condamner une structure qu'elle décrit pourtant comme aliénante de bout en bout.
Comme le dit Judith, c'est peut-être justement parce qu'elle attendait un sauveur (le travail) qu'elle est aussi indulgente envers ce qu'il peut causer comme tort, générer comme violence...
Soit, comme Judith le remarque également, une situation (celle de la personne sauvé par le travail) bien particulière, loin d'être générale.
J'ajouterai, autre hypothèse complémentaire, que De Vigan ressent ce rapport au travail aussi parce qu'elle était cadre, soit un rapport bien particulier au travail, qui entraîne une estime de soi tout aussi particulière, ne pas être dedans, être du bon côté du tripalium, pas du côté des broyés, mais de ceux qui broient, en théorie tout au moins, comme le découvre d'ailleurs difficilement le personnage.
Autre élément amusant, De Vigan lorsqu'elle parle de travail l'oppose immédiatement à.... oisiveté. Alors qu'elle pourrait l'opposer à œuvrer ou à s'activer, s'occuper. Étonnant, comme si, bien que vivant désormais de sa plume, elle n'était pas sortie du "cadre" qu'elle dépeint et dans lequel elle a vécu et continue de penser lisiblement...
yG
J'ai particulièrement apprécié lorsque Judith met en relief la distinction entre haine au travail et la haine du travail (quatrième partie de l'émission). De Vigan déclare sur cette question être dans l'ambivalence, comme son personnage, puisque comme elle, le travail l'ayant sauvé, elle ne peut se résoudre à condamner une structure qu'elle décrit pourtant comme aliénante de bout en bout.
Comme le dit Judith, c'est peut-être justement parce qu'elle attendait un sauveur (le travail) qu'elle est aussi indulgente envers ce qu'il peut causer comme tort, générer comme violence...
Soit, comme Judith le remarque également, une situation (celle de la personne sauvé par le travail) bien particulière, loin d'être générale.
J'ajouterai, autre hypothèse complémentaire, que De Vigan ressent ce rapport au travail aussi parce qu'elle était cadre, soit un rapport bien particulier au travail, qui entraîne une estime de soi tout aussi particulière, ne pas être dedans, être du bon côté du tripalium, pas du côté des broyés, mais de ceux qui broient, en théorie tout au moins, comme le découvre d'ailleurs difficilement le personnage.
Autre élément amusant, De Vigan lorsqu'elle parle de travail l'oppose immédiatement à.... oisiveté. Alors qu'elle pourrait l'opposer à œuvrer ou à s'activer, s'occuper. Étonnant, comme si, bien que vivant désormais de sa plume, elle n'était pas sortie du "cadre" qu'elle dépeint et dans lequel elle a vécu et continue de penser lisiblement...
yG
[quote=Larédaction]L'univers du travail, encore
Encore ?
...
Encore. Encore ! Encore ! Encore ! Encore ! Encore ! Encore !
Encore ?
...
Encore. Encore ! Encore ! Encore ! Encore ! Encore ! Encore !
tu n'es pas fataliste .... Judith
moi si !
super, ton émission,
comme d'habitude,
faut nous surprendre... maintenant;-)
gamma
moi si !
super, ton émission,
comme d'habitude,
faut nous surprendre... maintenant;-)
gamma
" Judith .../... donne la raison à la fin de l'émission, procédant à un dévoilement personnel inattendu, ... "
Je ne suis pas sûr d'aimer cette appel à regarder l'émission pour des raisons qui ne sont pas celles de chercher à mieux découvrir le texte de D. Le Vigan.
Je cherche mes mots, le premier qui vient n'est pas forcément le plus juste mais c'est " un peu racoleur ".
Je ne suis pas sûr d'aimer cette appel à regarder l'émission pour des raisons qui ne sont pas celles de chercher à mieux découvrir le texte de D. Le Vigan.
Je cherche mes mots, le premier qui vient n'est pas forcément le plus juste mais c'est " un peu racoleur ".