Economistes : la guerre entre orthodoxes et hétérodoxes est déclarée
Rien ne va plus dans le petit monde des économistes divisés entre orthodoxes – les tenants d’une vision néolibérale de l’économie – et les hétérodoxes – les autres. Objet de cette guerre ouverte à coup de courriers au ministère ou de tribunes publiées dans les médias ? La création d’une nouvelle section d’économie au sein du Conseil national des universités (CNU) qui délivre, entre autres, les sésames pour enseigner. Cette nouvelle section souhaitée par l’Association française d’économie politique (AFEP) – qui regroupe les hétérodoxes – a tout d’abord été soutenue par la ministre de l’éducation Najat Vallaud-Belkacem avant qu'elle fasse volte-face sous pression des orthodoxes. Lesquels sont vent debout contre une nouvelle section "fourre-tout" qui va servir à caser les "ratés" ou "frustrés" du système universitaire. Ambiance.
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Derniers commentaires
« On ne nous a pas fait un seul cours sur Keynes, ni sur l’histoire des courants de pensées, ni sur la critique des théories économiques. L’excuse avancée par les professeurs, c’est que les autres écoles de pensée étaient obsolètes, inutiles pour comprendre le présent. »
Marx in the City, paru dans CQFD n°129
En gros, il faut avoir enseigné l'économie. J'ai eu la chance d'obtenir des qualifs CNU dans d'autres sections. 192h de TD ou TP par an ont suffi (typique d'un contrat doctoral élargi). Ma copine, avec moins d'une centaines d'heures, à l'étranger et pas en français, en a obtenu aussi. Bref, rien de dur. Peut-être est-ce plus strict en section 5, mais de toutes façons, ce n'est pas ce qui irrite les "hétérodoxes".
Il faut avoir publié dans des revues à comité de lecture, ou avoir parlé (présenté des affiches ?) dans des conférences internationales. Et là, franchement, qu'un mec en doctorat n'aie pas réussi à publier un seul article dans une revue à comité de lecture… Ça fera sourire tous ceux qui sont passés par là. Les "hétérodoxes" pourraient nous présenter des exemples de dossiers de qualif CNU qui ne sont pas passés ? Pour l'instant, j'en ai pas trop vu. Et mon petit doigt me dit que le bât blesserait.
Sans exemple plus flagrant, qui va croire qu'on crée cette section CNU pour autre chose que permettre de recruter des médiocres, certes, mais des médiocres qui ont des idées "satisfaisantes", dans la bonne ligne ?
Un peu rustre quand même arte.., (l'émission est millésimée 2014, mais le plateau à la fin aussi?) pour n'avoir rien dit sur Bernard Maris.
Je ne cherche pas à comprendre, mais voir qu'il y a des gens lucides sur la question me soulage d'un poids de fatalisme.
Je sais que je ne peux pas comprendre les débats sur l'économie, pourquoi faire mine d'être capable d'expertiser? Car personnellement je pense que c'est l'Allemagne, seulement elle et non pas la Grèce, qui devrait sortir de l'€. Question tourisme, c'est une évidence et le mark fort ceci-celà. C'est dire mon niveau.
Les paragraphes ne sont pas tous faciles, mais toujours de salubrité publique.
Pour quiconque à fait 5 mn de maths, 10 mn de physique, approché des modèles et s'est intorrogé sur la façon scientifiquement et rigoureusement défendable de considérer les choses, c'est limpide ! Et affligeant sur l'état de notre monde...
allez hop ! A vos lectures :-)
Ca fait des années que la guerre est déclarée:
La guéguerre des zéconomistes aura-t-elle lieu ?
Et de toute façon : Les économistes c’est comme le Père Noël, ça n’existe pas
Et comme le disait ce bon vieux Keynes en décrivant ce que devait être un économiste :
"Il doit être mathématicien, historien, homme d'Etat, philosophe, à un certain degré. Il doit comprendre les symboles et s'exprimer avec des mots. Il doit saisir le particulier en termes généraux et atteindre l'abstrait et le concret dans le même envol de la pensée. Il doit étudier le présent à la lumière du passé pour les besoins de l'avenir. Aucun aspect de la nature de l'homme et de ses institutions ne doit échapper entièrement à son regard. Il doit être, dans le même mouvement, résolu et désintéressé; aussi distant et incorruptible qu'un artiste, mais parfois aussi terre à terre qu'un politicien"
Ne soyez pas si modeste : selon les critères de J. Quatremer, vous l'êtes.
La réponse de l'AFEP à Tirole "La diversité intellectuelle n’est pas source d’obscurantisme et de relativisme mais d’innovations et de découvertes !" :
http://assoeconomiepolitique.org/lettre-ouverte-jean-tirole-la-diversite-intellectuelle-nest-pas-source-dobscurantisme-et-de-relativisme-mais-dinnovations-et-de-decouvertes/
Si vous voulez en savoir plus sur le Prix de la Banque de Suède et les motivations de ses créateurs, une vidéo (en angliche):
A propos du Nobel d’économie | Philip Mirowski – Why Is There a Nobel Memorial Prize in Economics?
http://assoeconomiepolitique.org/philip_mirowski_-_why_is_there_a_nobel_memorial_prize_in_economics/
Merci ,un grand merci Madame Jacques.
Que ça fait du bien !
Non seulement vous nous donnez de l'info, de la bonne , de la vraie mais en plus elle rend intelligent !
C'est trop rare pour ne pas le relever.
S'il reste une journaliste, vous êtes celle là !
Bref le constat est inquiétant et mérite diffusion.
Lire aussi Gaël Giraud : "l'illusion financière"
Quelque part, là-haut (ou ailleurs si cela vous convient mieux), Bernard Maris et Maurice Allais ont du fulminer grave en voyant le Tirole "péter un plomb"...
Ça m’est [s]un petit peu[/s] plus clair.
Ça fait une sacrée actualité économique qui vient de tomber ces derniers temps et nombreux sont ceux qui aimeraient les entendre !
Bien à vous !
Nop.
Principe(s) fondatemental(aux) de la science c'est plutôt l'objectivité, la reproductibilité de l'expérience indépendamment de l'observateur, etc., etc. La science est indépendante du point de vue de l'humain.
Parce que sinon, on peut appliquer votre principe de "science " à n'importe quelle religion, mouvement politique, etc.:
ex:
"le principe fondamental de la science", c’est-à-dire le jugement par les pairs de l'Eglise et la publication dans des revues de l'Eglise reconnues"
"le principe fondamental de la science", c’est-à-dire le jugement par les membres du Parti et la publication dans des revues du Parti reconnues"
Cela me fait penser à ce que j'ai connu dans les années 70 en Sorbonne. Les "orthodoxes" es lettres (Pommier et Deloffre à leur tête) n'avaient pas de mots assez durs contre les "hétérodoxes" (Barthes, évidemment, mais aussi Genette, Kristeva, enfin tous les "structuralistes") à qui on refusait une chaire ou une thèse "sur l'ensemble de leurs oeuvres" bien qu'ils enseignassent (flattons l'orthodoxie) à l'Ecole des Hautes Etudes, voire au Collège de France.
Ces professeurs n'avaient pas le droit non plus de diriger des thèses, c'est pourquoi j'ai renoncé à en entreprendre une (je souhaitais travailler sous la tutelle de Gérard Genette) dont le sujet (non orthodoxe alors) ne pouvait être déposé en Sorbonne.
"La notion d'hérésie est étroitement liée à celle de mystère."
"Il n'y a pas d'orthodoxie s'il n'y a pas d'hétérodoxie. Il n'a pas de doctrines communes, canoniques, s'il n'y a pas des hérésies qui s'en distinguent."
"Une doctrine se construit sur des déviations et des contestations"
"Dès qu'on essaye de poser un dogme, une doctrine - et on ne peut pas s'empêcher de le faire - et bien, le réel vous échappe."
"C'est intenable, toutes les fissures qu'il y a quand on essaye d'aller vers l'idéologie."
"Une pensée conceptuelle est à la fois dure, mais comme tout ce qui est dur, elle est fragile.
A partir du moment où il y a une pensée dure, l'un dit "c'est comme cela", aussitôt l'autre dit "c'est pas comme ça", c'est la violence. "
Athée, grâce à Dieu
Ça me fait un peu bizarre, cette critique du CNU sans contexte et me semble-t-il un peu hors-sujet.
A ma connaissance la fonction du CNU est effectivement de filtrer les docteurs candidats sur des postes universitaires, de façon à s'assurer qu'il a un niveau minimal en recherche et enseignement dans sa discipline. Dans la mesure où un jury de thèse peut parfois être constitué par copinage, je ne pense pas qu'il soit complètement idiot d'avoir un second filtre. De plus la thèse, même correctement évaluée, ne valide que le niveau en recherche, pas en enseignement, il n'est donc pas absurde de réclamer au candidat d'avoir un minimum d'expérience avant de l'envoyer enseigner à des générations d'étudiants. Enfin le vrai barrage pour avoir un poste universitaire ce n'est pas la qualification du CNU, dont les critères ne sont pas particulièrement stricts (au moins dans ma section), mais bien sûr le concours : avec des taux de recrutement de l'ordre de 10-15% parmi les candidats qualifiés, même si la qualif n'était pas requise je ne vois pas bien comment un non-qualifié pourrait espérer être pris ?
Ceci étant dit, il y a certainement aussi des critiques légitimes à ce système (à commencer par sa complexité et son côté franco-français).
ps: je ne connais pas les détails mais a priori je ne vois rien de choquant à ce qu'un docteur en histoire ne soit pas qualifié en sciences de l'information et de la communication.
Madame anne-Sophie, vous lire me rajeunit de presque cinquante j'ai failli écrire soixante ans !
C'est dire toutes les grâces que je vous rends.
Mais.
Bon. Alors commencer par le commencement. J’ai lu le début de la chronique. Le début seulement. Et mon sang a commencé à bouillir. Avant la fin des lignes en gras qui sont censées traduire l’intention de la rédactrice (du rédacteur).
Et dans ces lignes en gras on croit deviner qu’il y aurait comme une lutte entre les Huns et les Zôtres.
Ah bon ?
Je me souviens d’une époque où l’on pouvait assister aux cours de M. De Bernis. Dans ce cours, il nous parlait avec le talent que lui seul avait, de ce qui distinguait Morishima de ses autres collègues libéraux. Et M. De Bernis était un marxiste convaincu, comme Bernard Maris était convaincu que l’économie n’est pas une science, mais une façon de voir le monde.
C’était il y a presque cinquante ans.
Aujourd’hui, dans un amphi d’économie, je suis sûr que celui qui parle d’Oscar Lange, de Jean Gadrey ou de Christian Palloix en termes autre que critiques voit sa carrière cramée. For ever.
Et puis, de jours en jours, de mois en mois, d’année en année, je lis et j’entends toujours les mêmes rengaines répétées (à l’envi œuf corse) sur la dette ceci, les dépenses publiques cela, le coût du travail , la Macronitude…
Comme si tous ces princes qui nous gouvernent étaient sortis des langes déjà prêts à servir.
L’économie n’est pas une science, capable de nous donner les clés de la compréhension des choses. L’économie, c’est une façon de voir le monde. Et le regard de chacun est différent de celui de son voisin.
Heureusement.
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Pas de facheuse interprétation.
Oui et le problème c'est que cette façon de voir le monde (ou plutôt son courant mainstream) est aujourd'hui dominante dans les milieux d'affaires ainsi que chez les élites politiques et médiatiques, là où se fabrique le consentement.
Marx écrivait, en son temps, que la religion était l'opium des peuples. Aujourd'hui, il dirait sans doute que c'est la "science économique", dans sa version horthodoxe, qui distille ses vertus dormitives dans tout le corps social.
Ce qui fait du contenu de la formation des économistes, et donc du recrutement de ceux qui les forment, un enjeu politique majeur.
Ce n'est pas qu'une question de postes universitaires, même si, ne soyons pas naïfs, elle a sa place dans cette querelle autour du CNU. C'est surtout celle du choix de la musique dominante que l'on joue partout où on enseigne de l'économie : au collège, dans les lycées, dans diverses formations supérieures (autres qu'économiques), dans la formation continue, etc.
Demandez à Pirate, elle a eu la partition en mains.
Ceci dit, on a parfaitement le droit d'inventer autre chose.
Si l'on doit juger une idéologie c'est donc sur d'autres critères, et en l'occurrence les effets qu'elle a sur la société.
Et le capitalisme on comprend bien qu'en donnant le pouvoir à un petit groupe sur tous les autres par le biais de la propriété et en institutionnalisant ainsi l'exploitation du travail collectif et les inégalités, en favorisant la marchandisation et donc la destruction de notre écosystème, et aussi par la doctrine libérale la concurrence entre les peuples, et leurs systèmes sociaux, que cette idéologie est sans doute l'une des pires que l'on pouvait inventer.
Et si vous croyez que c'est la forme aboutie du capitalisme c'est que vous manquez d'imagination. Avec son évolution financière nous n'en sommes qu'à une étape intermédiaire.
Le risque que tout cela tourne en dictature de corporations financières plus puissantes que des pays et à un retour d'une nouvelle forme de totalitarisme a été maintes fois dénoncé.
http://www.historiographie.info/
Je profite d'un haut de forum pour signaler que l'extension Forums ASI a été mise à jour. Je sais, je spamme, faites-moi un procès.