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FN : banalisation par l'économie, mode d'emploi
Le Parisien présentait samedi un "banc d’essai", façon supermarché, des programmes d'Emmanuel Macron et de Marine Le Pen sur le pouvoir d’achat. Un dossier qui a donné lieu à un éditorial pour le moins étrange et à un constat : toute critique d'une politique de la relance par la demande est décidément bannie des journaux mainstream.
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Excellente chronique, comme toujours avec vous.
Espérons que les sympathies assez macronistes du taulier en chef ne brideront pas votre liberté d'expression. Mais OÙ pourrait-on vous lire sur les questions européennes, que vous traitiez si bien à La Tribune (du moins tant qu'on vous a laissé les mains libres) ?
Espérons que les sympathies assez macronistes du taulier en chef ne brideront pas votre liberté d'expression. Mais OÙ pourrait-on vous lire sur les questions européennes, que vous traitiez si bien à La Tribune (du moins tant qu'on vous a laissé les mains libres) ?
Vous allez chez Médiapart mais vous ne quittez pas ASI, hein ?
Le banc d’essai du pouvoir d’achat, déjà très contestable en soi puisque le pouvoir d’achat dépend surtout de l’activité, du niveau des salaires et de l’inflation, autrement dit de la politique économique d’ensemble, est donc ici fondamentalement biaisé.
C'est surtout cela qui est frappant: l'incapacité à comprendre les phénomènes macro-économiques et en particulier les effets pervers d'agrégation de la part des journalistes et du grand public.
Keynes n'avait rien d'un communiste - bien au contraire - mais il fut le premier à théoriser ces effets.
Le drame est que l'absence d'instruction économique dans la population, conjuguée à la néo-libéralisation des esprits depuis 30 ans et au discrédit systématique jeté sur Keynes du fait de la propagande de masse fait que ces effets échappent aujourd'hui totalement à l'écrasante majorité des citoyens.
Jamais l'idéologie de l'"électeur-consommateur" et entrepreneur de lui-même, maximisant sa courbe d'utilité individuelle n'aura été aussi puissante qu'aujourd'hui, et il n'est guère étonnant qu'un quotidien grand public présente une élection à la manière d'un banc d'essai de Que Choisir ou 50 millions de consommateurs.
Or ces effets d'agrégation produisent des catastrophes bien connues depuis Keynes - et bien avant lui F List - dans un régime capitaliste, conduisant à des situations macro-économiques de crises récurrentes et de sous-production structurelle, allant dans le sens inverse des effets attendus décisions micro-économiques individuelles, y compris lorsque ces décisions individuelles sont rationnelles
Quelques exemples:
-la valorisation de l'épargne individuelle, pour des motifs de précaution ou de spéculation, conduit au niveau macro-économique à une baisse de la capacité productive, donc du niveau d'activité et de richesse globale, donc in fine de la rémunération de cette même épargne (sans parler des pertes de revenus induites qui réduisent la capacité même d'épargne de la majorité des ménages).
-la lutte acharnée de la BCE contre l'inflation, qui maintient le niveau d'activité en deçà des capacités productives et exerce une pression déflationniste sur les salaires, ainsi que sur le volume global d'activité, donc de l'emploi et des revenus distribués, appauvrissant in fine les travailleurs-consommateurs...au prétexte de protéger leur pouvoir d'achat.
-la recherche individuelle de la part du consommateur des produits au meilleurs prix, qui entraine en régime de libre échange international le déplacement d'activités dans les pays à faible coût de production, détruisant ainsi sur place des emplois industriels, tout en exerçant une pression à la baisse sur les salaires...ce qui in fine réduit ce même pouvoir d'achat des salariés soit du fait de la perte d'emploi, soit du fait de la stagnation salariale voire la baisse du salaire réel.
-la baisse d'impôts et de cotisations qui en réduisant la capacité de dépense publique réduit à la fois la capacité d'investissement de l'Etat, le versement de revenus de transfert et de revenus aux agents de l'Etat (les "stabilisateurs automatiques" qui amortissent les crises) et la fourniture de services publics (qui forment un versement en nature), réduit le niveau d'activité global et in fine appauvrit les contribuables (aussi bien en termes monétaires que non monétaires)...et du fait de la baisse des capacités contributives, appauvrit encore plus l'Etat et les organismes sociaux, faisant exploser leur dette.
-la multiplication des régimes de retraite par capitalisation, qui détourne une partie de la dépense vers l'épargne, et met en concurrence les banques et gestionnaires d'actifs qui réclament un taux de rendement des titres délirant...et conduisent aux licenciements "boursiers" et à l'austérité salariale nécessaires afin de faire cracher du profit de court terme au dépens de l'investissement, et in fine détruit les emplois et écrase les salaires et donc la capacité d'épargne des futurs retraités ne pouvant plus cotiser durant leur vie active...et se trouvant à terme dépourvus de retraite.
-l'ubérisation des activités chère à Macron, qui non seulement détruit toutes les protections liées aux statuts professionnels traditionnels, en faisant de chaque propriétaire de maison ou de voiture un éventuel prestataire de service, facilite certes à court terme une concurrence acharnée et une baisse des tarifs des services, mais qui à long terme produit invariablement, faute de profits suffisants, la disparition des moins rentables et une concentration oligopolistique conduisant à une explosion des tarifs.
La plaie n'est donc pas l'"économicisme" en lui-même, mais cet "économicisme" de bistrot, celui qui regarde le petit bout de la lorgnette du "portefeuille" du salarié-consommateur, et qui entraine l'appauvrissement de la majorité des travailleurs... et in fine conduit de lui-même le capitalisme vers sa propre destruction.
Le plus fou dans l'histoire, c'est que jamais le niveau d'éducation n'a été aussi élevé dans le pays avancés, et qu'en dépit de cela, jamais le niveau d'obscurantisme et d'ignorance en matière de mécanismes macro-économiques aussi élémentaires n'a été aussi répandu.
C'est surtout cela qui est frappant: l'incapacité à comprendre les phénomènes macro-économiques et en particulier les effets pervers d'agrégation de la part des journalistes et du grand public.
Keynes n'avait rien d'un communiste - bien au contraire - mais il fut le premier à théoriser ces effets.
Le drame est que l'absence d'instruction économique dans la population, conjuguée à la néo-libéralisation des esprits depuis 30 ans et au discrédit systématique jeté sur Keynes du fait de la propagande de masse fait que ces effets échappent aujourd'hui totalement à l'écrasante majorité des citoyens.
Jamais l'idéologie de l'"électeur-consommateur" et entrepreneur de lui-même, maximisant sa courbe d'utilité individuelle n'aura été aussi puissante qu'aujourd'hui, et il n'est guère étonnant qu'un quotidien grand public présente une élection à la manière d'un banc d'essai de Que Choisir ou 50 millions de consommateurs.
Or ces effets d'agrégation produisent des catastrophes bien connues depuis Keynes - et bien avant lui F List - dans un régime capitaliste, conduisant à des situations macro-économiques de crises récurrentes et de sous-production structurelle, allant dans le sens inverse des effets attendus décisions micro-économiques individuelles, y compris lorsque ces décisions individuelles sont rationnelles
Quelques exemples:
-la valorisation de l'épargne individuelle, pour des motifs de précaution ou de spéculation, conduit au niveau macro-économique à une baisse de la capacité productive, donc du niveau d'activité et de richesse globale, donc in fine de la rémunération de cette même épargne (sans parler des pertes de revenus induites qui réduisent la capacité même d'épargne de la majorité des ménages).
-la lutte acharnée de la BCE contre l'inflation, qui maintient le niveau d'activité en deçà des capacités productives et exerce une pression déflationniste sur les salaires, ainsi que sur le volume global d'activité, donc de l'emploi et des revenus distribués, appauvrissant in fine les travailleurs-consommateurs...au prétexte de protéger leur pouvoir d'achat.
-la recherche individuelle de la part du consommateur des produits au meilleurs prix, qui entraine en régime de libre échange international le déplacement d'activités dans les pays à faible coût de production, détruisant ainsi sur place des emplois industriels, tout en exerçant une pression à la baisse sur les salaires...ce qui in fine réduit ce même pouvoir d'achat des salariés soit du fait de la perte d'emploi, soit du fait de la stagnation salariale voire la baisse du salaire réel.
-la baisse d'impôts et de cotisations qui en réduisant la capacité de dépense publique réduit à la fois la capacité d'investissement de l'Etat, le versement de revenus de transfert et de revenus aux agents de l'Etat (les "stabilisateurs automatiques" qui amortissent les crises) et la fourniture de services publics (qui forment un versement en nature), réduit le niveau d'activité global et in fine appauvrit les contribuables (aussi bien en termes monétaires que non monétaires)...et du fait de la baisse des capacités contributives, appauvrit encore plus l'Etat et les organismes sociaux, faisant exploser leur dette.
-la multiplication des régimes de retraite par capitalisation, qui détourne une partie de la dépense vers l'épargne, et met en concurrence les banques et gestionnaires d'actifs qui réclament un taux de rendement des titres délirant...et conduisent aux licenciements "boursiers" et à l'austérité salariale nécessaires afin de faire cracher du profit de court terme au dépens de l'investissement, et in fine détruit les emplois et écrase les salaires et donc la capacité d'épargne des futurs retraités ne pouvant plus cotiser durant leur vie active...et se trouvant à terme dépourvus de retraite.
-l'ubérisation des activités chère à Macron, qui non seulement détruit toutes les protections liées aux statuts professionnels traditionnels, en faisant de chaque propriétaire de maison ou de voiture un éventuel prestataire de service, facilite certes à court terme une concurrence acharnée et une baisse des tarifs des services, mais qui à long terme produit invariablement, faute de profits suffisants, la disparition des moins rentables et une concentration oligopolistique conduisant à une explosion des tarifs.
La plaie n'est donc pas l'"économicisme" en lui-même, mais cet "économicisme" de bistrot, celui qui regarde le petit bout de la lorgnette du "portefeuille" du salarié-consommateur, et qui entraine l'appauvrissement de la majorité des travailleurs... et in fine conduit de lui-même le capitalisme vers sa propre destruction.
Le plus fou dans l'histoire, c'est que jamais le niveau d'éducation n'a été aussi élevé dans le pays avancés, et qu'en dépit de cela, jamais le niveau d'obscurantisme et d'ignorance en matière de mécanismes macro-économiques aussi élémentaires n'a été aussi répandu.
On ne peut guère aller plus loin dans la banalisation du Front National.
Bah si, on peut aller plus loin dans la banalisation du Front National.
Par exemple, on peut imprimer officiellement des bulletins de vote au nom de Marine Le Pen, et les laisser à disposition des électeurs pour qu'ils les glissent dans l'urne. Si cela n'est pas de la banalisation du Front National, je ne sais pas ce que c'est.
Bah si, on peut aller plus loin dans la banalisation du Front National.
Par exemple, on peut imprimer officiellement des bulletins de vote au nom de Marine Le Pen, et les laisser à disposition des électeurs pour qu'ils les glissent dans l'urne. Si cela n'est pas de la banalisation du Front National, je ne sais pas ce que c'est.
Ce "banc d'essai" du Parisien est d'autant plus ridicule qu'il est évidemment mensonger : qui peut croire qu'on sera tous gagnant avec Macron ou Le Pen ...
Et pourquoi pas comme titre plutôt:
"économie, diabolisation par le FN: mode d'emploi"
"économie, diabolisation par le FN: mode d'emploi"
"toute critique d'une politique de la relance par la demande est décidément bannie des journaux mainstream."
Ce n'est pas l'inverse de ce que dit la conclusion ?
Ce n'est pas l'inverse de ce que dit la conclusion ?
Il ne me semble pas.
L'article (de Romaric) aurait pu citer aussi Keynes ou Stiglitz en ce qui concerne la relance par la demande... mais il est déjà très complet ! Presque aussi bien qu'un article d'Anne-Sophie ! ;-)
L'article (de Romaric) aurait pu citer aussi Keynes ou Stiglitz en ce qui concerne la relance par la demande... mais il est déjà très complet ! Presque aussi bien qu'un article d'Anne-Sophie ! ;-)
Je suis un peu perdu alors...
L'article du Parisien n'est-il pas une critique des politiques de relance par la demande, justement ?
L'article du Parisien n'est-il pas une critique des politiques de relance par la demande, justement ?
a moins qu'il parle de critique positive effectivement il semble dire le contraire de ce qu'il pense.
Enfin il faut quand même faire attention quand on veut argumenter en faveur des politiques de relance... si on regarde les tentatives par le passé les résultats ne sont pas brillants, Le New deal peut être mais avec des circonstances tellement particulières....
Mais bon on peut aussi dire que les politiques de l'offre ne fonctionnant pas, autant alterner entre les 2, sur un malentendu l’économie finira par repartir.
Dans le cas de MLP je n'y vois pas franchement une politique de relance mais plutôt des cadeaux électoraux dans un programme plutôt délirant qui creuseront juste la dette et le déficit , surtout maintenant qu'elle n'envisage plus vraiment une sortie de l"euro.
Dans les cadeaux électoraux on peut aussi citer la reforme de la taxe d'habitation de Macron.... qui saupoudre une politique de l'offre avec un petit peu de social.
Enfin il faut quand même faire attention quand on veut argumenter en faveur des politiques de relance... si on regarde les tentatives par le passé les résultats ne sont pas brillants, Le New deal peut être mais avec des circonstances tellement particulières....
Mais bon on peut aussi dire que les politiques de l'offre ne fonctionnant pas, autant alterner entre les 2, sur un malentendu l’économie finira par repartir.
Dans le cas de MLP je n'y vois pas franchement une politique de relance mais plutôt des cadeaux électoraux dans un programme plutôt délirant qui creuseront juste la dette et le déficit , surtout maintenant qu'elle n'envisage plus vraiment une sortie de l"euro.
Dans les cadeaux électoraux on peut aussi citer la reforme de la taxe d'habitation de Macron.... qui saupoudre une politique de l'offre avec un petit peu de social.
"Au point que l’on pourrait se demander si, plus qu’un combat contre le FN, certains ne mènent pas d’abord un combat contre toute forme de politique de relance de la demande. Quel qu’en soit le prix."
Conclusion à encadrer. Merci !
Conclusion à encadrer. Merci !
Merci Romaric Godin.
L'austérité, la vache sacrée des médiocrates...
L'austérité, la vache sacrée des médiocrates...
Intéressante chronique, merci Romaric.
(incroyable, ça rime)
(incroyable, ça rime)
https://www.lesechos.fr/16/05/2014/LesEchos/21689-037-ECH_gary-becker--l-economiste-qui-voyait-l-economie-partout.htm Il y a, au sein du FN, tout une gamme de variantes du racisme. Toutes n'ont pas le même impact économique. Un racisme brutal, à la Marion Maréchal, découragerait les investisseurs. Alors qu'un racisme plus soft, plus humain pourrait contribuer à rendre le climat plus propice à la prise de risques.