Gaz à Rouen : itinéraire d'une fuite médiatique
Alerte au gaz. Une usine chimique située à Rouen a donné l'alerte lundi 21 janvier suite à une fuite d'un gaz malodorant qui s'est répandu dans la ville. L'information s'est d'abord cantonnée aux médias locaux avant que l'AFP ne s'en empare dans la nuit de lundi à mardi au moment où le "nuage gazeux" atteignait Paris. Dès les premiers communiqués de la préfecture de Seine-Maritime, et dans les communiqués qui ont suivi des ministères de l'Intérieur, de la santé et de l'écologie, la non toxicité de ce gaz était systématiquement soulignée. Mais de quel gaz s'agit-il exactement ? Est-il réellement inoffensif ? Pourquoi un gaz jugé non toxique peut-il entraîner des nausées ? Autant de questions qui se sont répandues après la phase de communication officielle.
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http://www.tendanceouest.com/rouen/actualite-57999-le-rapport-officiel-sur-lubrizol-est-sortiles-causes-de-laccident-enfin-etablies.html?version=cherbourg
J'ai travaillé sur des sites où de l'H2S était présent jusqu'à 20 000 ppm dans des tuyaux, et quand on les purgeait, on pouvait quand même rester autour sans masques à gaz car dès qu'ils passent à l'air libre, la concentration diminue drastiquement (ça n'empêchait pas évidemment de faire gaffe, et d'avoir des appareils de mesure en permanence).
A de bas niveaux de concentrations, il est logique que les autorités disent que c'est inoffensif. Si ce n'était pas le cas, il faudrait tous les jours alerter l'opinion sur le fait que les voitures émettent un gaz mortel (essayez de respirer 5 min directement au pot d'échappement!).
Si vous êtes déjà passé à côté d'une raffinerie, ces odeurs sont monnaie courante (exemple celle de Donges dont on sait qu'on approche à l'odeur).
Quelle aurait été la marche à suivre à votre avis sur cette fuite? Annoncer que la fuite de gaz pourrait être mortelle?
On voyait le nez des autorités et de la directrice de l'entreprise pousser petit à petit ;o(
Imaginons que ce genre d'incident qui d'après nos édiles s'est produit dans un site hyper sécurisé se soit produit dans un autre site qualifié lui aussi comme hyper sécurisé comme une centrale nucléaire…
A jouer avec le feu, à un moment on se brule.
La base concernant les produits chimiques, c'est la consultation de leur fiche sécurité officielle, qui nous donne les phrases de risques (R) lesquelles sont indépendantes de la concentration. Les seuils de concentrations limites tolérables, c'est un autre sujet lié à la sécurité qui s'appelle : les valeurs limites (concernant donc les seuils de concentration à ne pas dépasser).
Les phrases de risques nous disent si un produit est toxique ou s'il ne l'est pas. C'est donc une information brute, indépendante de la concentration (mais dont le caractère s'aggrave de manière évidente avec la concentration).
Quand on prend la fiche du produit dont nous parlons celui-ci apparaît : TOXIQUE (avec le symbole à tête de mort), HAUTEMENT INFLAMMABLE, et DANGEREUX POUR L'ENVIRONNEMENT (avec l'arbre et le poisson morts).
Les journalistes (et à fortiori les pouvoirs publics) ne peuvent donc pas écrire : NON TOXIQUE, puisque que selon la fiche de sécurité (qui fait autorité en la matière) ce n'est pas le cas !
L’honnêteté est donc d'écrire : « un gaz toxique mais dont les concentrations à plus de X mètres de la source sont en deçà des valeurs limites de dangerosité pour les adultes...» PAR EXEMPLE.
Je le répète : je suis étonné qu'ASI ne publie pas la fiche sécurité du produit à côté des annonces AFP qui titrent la non toxicité alors qu'il y a totalement toxicité !
Il y a quelques années, je devais utiliser de la fluoresceine pour un traçage, un produit couramment utilisé pour cela et la DDASS m'avait demandé des précisions sur la dangerosité du produit. La lecture de sa fiche sécurité était des plus anxiogène pour un non spécialiste. J'avais contourné le problème en comparant cette fiche à celles, encore plus effrayantes, du bleu patenté et de la tartrazine, 2 autres colorants utilisés dans... le pastis.
Balancer une fiche sécurité dans le grand public, IMHO, ça n'a pas grand sens... J'imagine la perplexité des journalistes chargés de l'enquête!
Dans le cas présent, je présume qu'il n'y a guère eu le temps d'avoir des concentrations du nuage qui a atteint les habitants, donc une forte incertitude sur les concentrations auxquelles ils ont été exposés? Pour cela il faudrait des modèles de dispersion (en temps réel?), comme à Fukushima, où l'on a vu la langue radioactive s'approcher dangereusement de Tokio puis virer à la faveur d'un changement de vent.
Si on peut se fier à leurs informations lemonde.fr affirme qu'il s'agit du methanethiol (methyl-mercaptan) et
lefigaro.fr donne un lien vers les fiches sécurité dans lesquelles on peut constater que c'est le plus toxique des mercaptans.
Après avoir lu votre article, navigué sur quelques sites d'info, et après avoir lu l'article du nouvel Obs en lien; je n'ai toujours pas la réponse à une question simple.
Quelle est la nature exacte, la molécule, de ce gaz ?
Mercaptan: c'est la famille de composé, les thiols. A peu de chose prés ils ont tous la même odeur (difficile de faire la différence même pour un chimiste).
Methanethiol: c'est un exemple de cette famille. Celui que l'on ajoute au gaz de ville. CH[sub]3[/sub]SH (1 Carbone, 3 Hydrogène, 1 soufre, 1 Hydrogène).
Mais la molécule qui est dégagé n'est pas donnée. Comme l'indique le toxicochimiste interrogé par le nouvel Obs, la toxicité peut fortement varier.
J'en arrive à 3 hypothèses:
1-L'entreprise elle-même ne sait pas quelle(s) molécule(s) est(sont) dégagée(s)
Je n'y crois pas, ils savent ce qu'il y a dans leur cuve. Même s'il y a une erreur de manipulation, on peut "a posteriori" savoir ce que l'on a mélangé. Ou alors et c'est TRES GRAVE on a affaire à une entrepris SEVESO qui ne sait pas ce qu'elle fait.
2-L'information est volontairement retenue.
Par qui ? L'entreprise ? je les vois mal refuser de donner l'info à l'Etat... quoique...
Par le prefet, l'état ? ... Pourquoi ? Pour cacher la toxicité. Pour éviter que tout le monde vérifie sur internet.
J'avoue ne pas être bien convaicu.
3- Par les journalistes ?
Tous incompétent notoire en chimie (allez en paix mes frères, je ne vous en veux pas...) incapable de comprendre l'information.
Ou incapable de restituer une information qu'ils ont, et là c'est plus grave.
Ou encore : "de toute façon personne va comprendre, c'est pas la peine de rentrer dans le détails"... Encore plus grave.
Comme aucun des spécialistes interrogé n'a le gaz exacte, je reviens à l'hypothèse 1 ou 2...
C'est vrai que l'odorat humain est très sensible à cette famille de produit. La toxicité peut être nul même avec une odeur assez forte. C'est le cas de toutes les personnes un peu éloignées du site. Mais je me pose quand même des questions pour ceux qui habitent aux alentours (500-1000m ?).
Enfin, comme d'habitude: "les niveaux mesurés sont en dessous des seuils..."
Donnez les résultats des mesures !!! Quelle valeur en ppm ? A quelle distance de l'usine ? Qui a pris les mesures ? parce-que je suis quasi-certains qu'il n'y a pas de capteur au thiols au-delà des murs de l'entreprise...
Retour au 3 hypothèses...
Je fini par un constat simple et sans appel.
L'information scientifique est nul, zéro, raz des paquerettes (entreprise, état, journalistes), mais ce n'est pas nouveau.
La culture scientifique est nul, zéro, raz des paquerettes (politiques, citoyens), mais ce n'est pas nouveau.
Rholàlà, suggéreriez-vous que si tant qu’un événement n'a pas eu lieu à Paris, pour les journalistes parisiens il n'existe pas ? Petit malveillant, je parie que vous ne buvez que du Breizh cola !
le mercaptan qui s'est libéré par hasard
Par hasard : qu'en termes élégants ces choses-là sont dites...