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Internet est-il (devenu) de droite ?
Attention, derrière les belles valeurs prônées par les pionniers d'Internet, se cacherait désormais un "cyber-libertarianisme" qui s'attaque à l'Etat et promeut l'individualisme. C'est la thèse d'un auteur américain, David Golumbia.
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Publié en premiere instance sur Paris-Luttes.Info : https://paris-luttes.info/relecture-du-probleme-de-la-gauche
Auteur : @Siltaar
## Relecture du « problème de la gauche avec internet »
lundi 2 juin 2014 , par [Siltaar](../siltaar)
Plusieurs amis m’ayant demandé de les éclairer sur cet obscur billet
(http://internetactu.blog.lemonde.fr/2014/05/16/le-probleme-de-la-gauche-avec-internet/),
et les cyberlibertariens, je me suis contraint à le lire entièrement…
Pour commencer, Internet et le changement de civilisation qui
l’accompagne, dépassent tout simplement le clivage traditionnel
gauche/droite. Un peu comme la question écologiste s’abstrait, elle
aussi, de l’ancienne grille de lecture politique qui départageait
l’égocentrisme des riches et celui des pauvres. Avec bien sûr des
égarés-rêveurs pauvres de droite et de riches altruistes utopiques et
immodestes, croyant pouvoir changer l’ordre des choses, et muscler le
ventre mou de la masse.
Du coup, le titre du billet de blog que nous nous apprêtons à relire se
présente comme immodeste et racoleur. D’ailleurs le chapeau qui le suit
précise tout de suite qu’il n’y a pas qu’une seule gauche. Entre un
mouvement anticapitaliste et le PS aujourd’hui au pouvoir, il y a un
large spectre, composé de nombreuses nuances et orientations à gauche.
Ensuite, je suis bien plus habitué à parler des problèmes de la classe
politique avec Internet. Par classe politique, j’entends l’ensemble des
gens corrompus qu’on élit en espérant qu’en plus de s’en foutre
plein les poches ; ils vont en mettre un peu dans les nôtres ; et qu’on
pourra donc fermer les yeux. Je suis également plus habitué à parler des
problèmes de la démocratie représentative face à la démocratie
directe, rendue possible à de nouvelles échelles grâce à Internet, ou
des craintes générées par la méconnaissance d’un outil nouveau,
Internet, considéré par beaucoup comme la plus grande avancée de
l’humanité depuis l’invention de l’imprimerie, que du « problème
de la gauche avec Internet ». Alors voyons de quoi il en retourne.
> David Golumbia, auteur de La logique culturelle de l’informatique,
publie une intéressante tribune
(https://www.jacobinmag.com/2013/12/cyberlibertarians-digital-deletion-of-the-left/)
dans Jacobin, le magazine socialiste américain. Comment expliquer,
questionne-t-il, que si la révolution numérique produit de la
démocratie, déstabilise les hiérarchies, décentralise ce qui était
centralisé... bref, favorise les valeurs de gauche, celle-ci semble alors
plus dispersée que jamais, et même en voie de disparition dans les
démocraties les plus avancées ?
Ici, il faut situer le billet de blog original dans son contexte : il
émane des États-Unis, acteur dominant de l’Internet certes, mais non
représentatif des 95% restant de population mondiale. La vision de D.
Golumbia des "valeurs de gauche" apparaît donc fortement connotée. Les
États-Unis étant dépourvus de parti communiste, il est plus difficile
pour M. Golumbia de réaliser qu’un mouvement de gauche puisse être
centralisé et hiérarchique au possible…
D’ailleurs, lorsqu’il s’agit de "hiérarchie déstabilisée" et de
fonctionnement décentralisé, c’est plus aux mouvements anarchistes que
je pense.
Ensuite, je n’ai qu’à peu près 15 ans de recul en politique mais ce
que je constate en France, c’est que le PS n’est plus à proprement
parler de gauche, et laisse la place sur ce terrain à de nouvelles
formations. Ces formations semblent peut être éparpillées aujourd’hui,
mais leur nombre témoigne de la vivacité des pensées qu’elles
représentent. Ainsi, le lien entre la dérive droitière d’une classe
politique (nos énarques), c’est-à-dire l’abdication du politique face
à l’économique, et les prémisses des changements apportés par
Internet à nos sociétés [1] n’est pas évident.
D’ailleurs, ce n’est pas de la faute d’Internet si l’Europe est un
grand marché et pas une réalité sociale. Par contre, c’est via
Internet que j’échange avec des finlandais, des espagnols, des anglais,
des allemands, des polonais (et j’en oublie) pour coordonner nos efforts
dans le but de faire rejeter le traité commercial international ACTA
(https://fr.wikipedia.org/wiki/Accord_commercial_anti-contrefaçon) [2] par
le parlement européen (il faut remettre le couvert avec TAFTA
(http://www.laquadrature.net/fr/TAFTA) en ce moment), et avec des
brésiliens, des australiens, des islandais, des américains (et bien sûr
j’en oublie), quand il s’agit d’espionnage de masse
(https://www.nsa-observer.net/) des citoyens par leurs gouvernements et
celui des États-Unis.
Voilà concrètement ce qu’il est possible de faire avec Internet. Ça me
semble éminemment de gauche (notion de dévouement personnel à
l’intérêt général, lutte contre les dérives du capital…), et
c’était bien plus compliqué avant.
> Pour David Golumbia, la raison est à chercher dans le
cyber-libertarianisme. Ce terme introduit dans les années 90 par les
théoriciens des médias Richard Barbrook et Andy Cameron, auteurs de
"l’idéologie californienne" […] La journaliste américaine Paulina
Borsook a parlé de Cyberégoïsme. Et le philosophe des technologies
Langdon Winner de cyberlibertariens...
Avec cette citation, on découvre qu’on est en train de s’intéresser
à de l’idéologie californienne.
Je vais poursuivre parce qu’on me l’a demandé, mais d’habitude je
passe juste ma route. Ce n’est pas seulement parce qu’ils brassent des
millions que les gens de la Silicon Valley se croient puissants, mais aussi
parce qu’on leur accorde trop d’attention…
On parle donc du cyber-libertarianisme… Ici le préfixe cyber- (comme
l’auteur l’avoue lui même en fin d’article) n’apporte rien à
l’affaire.
On parle également de cyberégoïsme, ce qui semble étrangement faire
écho a mon introduction, qui définissait la politique comme un équilibre
des égoïsmes avec quelques égarés à contre courant de part et
d’autre nageant. Toutefois, on semble loin de la cyberchoucroute de
gauche.
> David Golumbia ne donne pas de définition précise de ceux qu’il
désigne sous ce terme.
Voilà qui n’est pas très motivant à poursuivre l’analyse, mais je
m’y suis engagé.
> […] Pour Golumbia, les tenants de cette utopie se retrouvent sous
quelques slogans simples comme : "l’informatisation nous rendra libres"
Et ce magnifique slogan serait de qui ? Un vendeur d’ordinateur ? Je ne
pense pas que "XXX" fera le bonheur des gens malgré eux.
Et mettez ce que vous voulez à la place du XXX, ça marche avec :
"l’informatisation".
> ou l’informatique est la mère de toutes les solutions.
>
> […]
>
> Parmi ces techno-enthousiastes, Golumbia range nombre de gourous des
nouvelles technos : Jimmy Wales, le fondateur de Wikipédia, Eric Raymond,
le théoricien du mouvement open source, John Perry Barlow, le cofondateur
de l’Electronic Frontier Foundation, Kevin Kelly, l’ancien éditeur de
Wired, le financier Peter Thiel, l’entrepreneur Elon Musk, Julian
Assange, le cofondateur de Google Sergey Brin et les membres du Front de
libération de la technologie...
L’auteur balance donc plein de noms, auxquels il semble vouloir faire
dire que chacun considère que l’informatique va décider à la place des
Humains, de mener une politique de gauche… Qu’en matière
d’informatique une politique de gauche se déroule naturellement, parce
que l’informatique serait sur le plan des échanges dématérialisés, le
nouveau marché à main invisible des échanges économiques matériels.
Je crois pourtant qu’on pourrait faire deux groupes avec ces
personnalités :
- Jimmy Wales (Wikipédia) ;
- Eric Raymond (La cathédrale et le bazar) ;
- John Perry Barlow (EFF) ;
- Julian Assange (WikiLeaks).
Puis :
- Kevin Kelly (Wired) ;
- Peter Thiel (PayPal) ;
- Sergey Brin (Google) ;
- Elon Musk (PayPal).
Les premiers me semblant plutôt de gauche et les autres de droite. Mais la
pertinence de cette suite de noms n’en serait pas vraiment mise en
évidence. Les uns ont contribué à mettre à disposition du monde entier
plein de connaissances gratuitement, les autres semblent l’avoir fait
pour s’enrichir (logique commerciale, pub, l’espionnage…).
Interpréter leurs différents discours comme étant un : laisser les
choses s’équilibrer sur Internet, sans interventionnisme d’état, et
tout ira bien ; me semble être un mauvais amalgame. Les uns souhaitent
qu’Internet reste un espace ouvert aux échanges, à la libre circulation
de l’information, l’espace où s’applique enfin l’article 11 de la
Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 [3] or il faut
pour cela qu’Internet reste neutre et soit le moins régulé possible par
les états. Les autres, souhaitant qu’Internet reste un moyen de
collecter des données sur les gens pour les revendre ensuite au plus
offrant. Ils ont en commun de souhaiter qu’Internet perdure comme il est
puisqu’ils on su en tirer leur parti, et souhaitent donc qu’on
n’affaiblisse pas le réseau par de nouvelles lois, qui seraient
forcément des restrictions (c’est la nature d’une loi).
Paradoxalement, depuis les révélations d’Edward Snowden sur
l’espionnage de masse des internautes (révélations admises par la
plupart des gouvernements et des grandes entreprises de l’Internet) on
voit émerger une nouvelle aspiration législative [4] pour le réseau, qui
protégerait ces utilisateurs contre les entreprises les plus rentables
d’Internet, comme on protège les citoyens d’un pays d’eux-même en
prononçant des peines d’inéligibilité…
> Dans la forme la plus aigüe du cyberlibertarianisme, explique-t-il,
l’expertise informatique est considérée comme directement applicable
aux questions sociales. Pourtant, comme Golumbia l’explique dans son
livre, les pratiques informatiques sont intrinsèquement hiérarchiques et
se concrétisent par l’identification avec le pouvoir.
J’en vois bien une, pour ma part, de forme de hiérarchie induite par
l’informatique, et elle se résume ainsi : soit tu contrôles la
technologie, soit c’est elle qui te contrôle. Si tu n’utilises pas de
logiciel libre, tu es enfermé dans des conditions d’utilisation
inacceptables [5] et tu es espionné. Pour garder le contrôle sur son
ordinateur, on a inventé le logiciel libre, et on voit donc aujourd’hui
qu’il faut en plus passer par du chiffrement pour ses communications [6]
.
La traditionnelle guerre entre le bien et le mal se déroule donc dans la
sphère numérique comme dans le monde physique. Les Humains poursuivent
les mêmes idées, et donc aussi les mêmes dérives. Je ne vois aucune
distorsion apportée par Internet sur ce sujet.
> Les hacktivistes, ceux qui promeuvent la nature libératoire de
l’informatisation massive, semblent pourtant indifféremment de droite
comme de gauche, comme si la technologie pouvait servir indifféremment les
fins politiques de chacun.
La technologie n’est pas une entité. La technologie c’est l’outil
dont s’équipent les un et les autres pour arriver à leur fins, du
propulseur à sagaies pour manger du bison, à l’ordinateur que vous vous
êtes offert pour échanger des courriels, et accessoirement lire
Wikipedia, regarder des vidéos de chatons et du porn.
Il me semble idiot de chercher un déterminisme de valeur dans une
technologie. Si des hommes ont tué des rivaux avec des propulseurs au lieu
de nourrir les moins habiles et les blessés de la tribu, c’est pas la
faute des propulseurs. Avait-on besoin de M. Golumbia pour se douter que
les entreprises commerciales utilisant internet pour offrir leurs services
(fussent-ils présentés comme gratuits), auraient des comportements
capitalistes ?
> Mais c’est mal observer combien la convergence est surtout libertaire,
estime Golumbia. L’open source par exemple est une commercialisation
délibérée de la notion de Logiciel libre non commercial imaginée par
Richard Stallman.
La séparation entre logiciel libre et logiciel open source est une
résurgence de clivage traditionnel gauche/droite dans le monde du logiciel
collaboratif en ligne. Toutefois, Richard Stallman n’a jamais pensé le
logiciel libre comme étant non-commercial. Il a lui-même gagné sa vie
des années en vendant des copies sur support physique d’un logiciel de
son cru (emacs).
De plus, contrairement à ce qu’estime Golumbia, ou son traducteur, la
différence entre libre et open source tient dans la garantie (assise sur
les lois de droit d’auteur) d’une non-restriction. Celle que le code du
logiciel, érigé en bien commun par une licence libre, restera libre dans
le futur [7] . Alors qu’un morceau de logiciel open source peut très
bien être converti en projet fermé, dit privateur (de liberté) par
Stallman, et retirer ainsi ses billes du pot commun.
> […] le mouvement du logiciel libre et de l’open source ont été
idéalisés et idéologisés en nous faisant croire que la collaboration
pouvait se faire sans régulation, sans organisation autre
qu’instrumentale, sans hiérarchies
Toutefois, si c’est pour nous le faire croire pendant 13 ans, l’âge de
Wikipedia, voire 31 ans, l’âge du système d’exploitation libre GNU
(avec divers noyaux dont Alix, puis Linux) alors, relativement à l’âge
de l’informatique elle même (environ 50 ans), c’est pas mal fiable
comme croyance quand même.
Et puis, "sans régulation" c’est un poil exagéré. Internet s’est
plutôt construit de manière autogérée, s’appuyant sur des textes non
contraignants mais reconnus et respectés par tous ceux qui voulaient
continuer à discuter ensemble. Des exemples à suivre, modestement nommés
Requête à Commentaires (RFC en anglais), pour définir à quoi ressemble
un courriel (http://tools.ietf.org/html/rfc2822) par exemple, et qui ont
aujourd’hui le prestige et l’impact que les lois n’ont plus tout à
fait concernant Internet.
> Or la nature libératoire de la technologie semble favoriser plutôt
certaines formes de libertés sur d’autres, notamment les plus
individuelles.
On en revient à oublier qu’Internet n’est que ce que les humains ont
pris le temps d’en faire. Quand tout va bien, les fourchettes servent à
manger. En temps de guerre civile, elles pourraient alors favoriser le
meurtre au corps à corps.
> Comment le solutionnisme sape les fondements mêmes de l’engagement
>
> Pour Golumbia, dès que les ordinateurs sont impliqués, les gens de
gauche - quand ils ne rejettent pas sans discussion toute approche
technologique - semblent perdre toute raison critique... acceptant sans
broncher "ces politiques de l’utopie numérique qui s’appuient sur un
discours de la transformation radicale".
En fait, j’aurais aimé que les hommes politiques de droite se fassent
eux aussi une raison critique vis à vis d’Internet, au lieu de nous
voter les HADOPI 1
(https://fr.wikipedia.org/wiki/Loi_Création_et_Internet#Opposition) et 2
(https://fr.wikipedia.org/wiki/Loi_relative_à_la_protection_pénale_de_la_propriété_littéraire_et_artistique_sur_internet)
(DADVSI
(https://fr.wikipedia.org/wiki/DADVSI#Pol.C3.A9miques_au_sujet_de_la_loi_DADVSI),
LOPPSI (https://fr.wikipedia.org/wiki/LOPPSI#Critiques)…) et autre
horreurs comme le TAFTA
(https://paris-luttes.info/spip.php?page=recherche&recherche=tafta) qui
vient. Certes, ceux étiquetés de gauche nous ont voté presque autant
d’affreusetés dès leur arrivée au pouvoir, comme la LPM (légalisant
un quasi-Prism à la française
(http://bugbrother.blog.lemonde.fr/2013/12/10/tout-ce-que-vous-avez-toujours-voulu-savoir-sur-la-lpm-et-que-vous-avez-ete-nombreux-a-me-demander/)).
Ma critique est donc moins clivée. Cette technologie nouvelle n’est
globalement pas bien appréhendée par les "élites" gouvernantes, quelque
que soit leur bord. Sinon ils n’essaieraient pas de faire passer des lois
inapplicables et/ou contraires à la constitution. Après si on veut parler
des intellectuels de gauche, on trouve des blogs (comme celui de Philippe
Aigrain (http://paigrain.debatpublic.net/)), qui ne perdent pas toute
raison critique et proposent un cadre législatif de gauche pour Internet
et notre usage actuel du réseau (majoritairement, en volume :
s’échanger des films et des musiques).
> Pour les cyberlibertariens,
Donc on n’a pas pu définir qui ils sont, mais on va leur faire dire des
trucs quand même.
> le monde politique est si radicalement transformé par la technologie
numérique que les anciennes règles ne s’appliquent plus et qu’il faut
donc trouver de nouvelles normes éthiques et politiques.
Je suis donc au moins d’accord avec le billet sur une chose, et ça
m’inquiète subitement, serai-je un cyberliber-truc ? Est-ce que la
technologie a sapé mon engagement ? Ah non, c’est bon.
Cette technologie m’a au contraire menée à d’autres personnes, qui
ont aiguisé mes convictions et ont partagé avec moi leurs modes
d’action. De GUL
(https://fr.wikipedia.org/wiki/Groupe_d%27utilisateurs_Linux) en GUL, le
long de mes études, j’en suis devenu vice-président du Groupe des
Utilisateurs de GNU/Linux de Paris, Parinux (https://www.parinux.org/). De
DADVSI en HADOPI, j’en suis arrivé à croiser les amis de la Quadrature
du Net sur les bancs réservés au public à l’assemblée nationale et
poursuivre la collaboration depuis tout en agissant concrètement en
devenant (après des années d’adhésion simple) trésorier d’un
fournisseur d’accès à internet, libre et associatif (FDN.fr
(http://www.fdn.fr)) et du Fond de Défense de la Neutralité du Net (FDN2
(http://www.fdn2.org)).
> Tant et si bien que les cyberlibertariens semblent désormais partout,
même s’ils revendiquent rarement ce titre.
Ce qui n’aide pas à définir le terme…
> Pour la journaliste Jessica Roy, "le narcissisme se fait passer pour du
futurisme éclairé" s’énerve-t-elle en dénonçant la méritocratie
sexiste, raciste et de classe des développeurs de la Silicon Valley.
La réalité de terrain des penseurs de gauche locaux n’est sûrement pas
belle à voir, mais parler "des développeurs de la Silicon Valley",
c’est déjà les réduire à un seul ensemble. C’est aussi amalgamer
des concepts (les développeurs sont des employés techniciens, pas des
philosophes), et c’est faire plus largement, le constat de notre
société occidentale : sexiste et raciste. Les dernières élections
parlent d’elles-même à ce sujet.
> Or, l’idée que le "code sauvera le monde"
Et elle sort d’où cette idée saugrenue ?
> rend toutes les autres formes d’engagement politique inutiles, voire
indésirables.
Je comprends en effet que de se dire : ça va se faire sans moi ; n’aide
pas à l’engagement politique. La problématique du passager clandestin
est vieille comme la société.
> "Les cyberlibertariens se concentrent sur la promotion d’outils,
d’objets, de logiciels et de politiques dont le principal attribut est
d’échapper à la réglementation et à l’application de la loi par
l’Etat. Ils dépeignent systématiquement le gouvernement comme
l’ennemi de la démocratie plutôt que sa réalisation potentielle.
Qui fait ça ? Pas les patrons cités précédemment. Vous ? Moi ? Quelques
bidouilleurs pour montrer que c’est possible, seuls dans leur savoir de
pointe ? Parfois, d’un coup, les révoltés de tout un pays quand débute
une révolution ? Mais alors oui, ils ne voient plus leur régime politique
comme la réalisation potentielle d’une démocratie.
Et puis, la démocratie un mauvais système, certains disent « le pire à
l’exception des autres connus ». Alors afficher la démocratie comme un
idéal, quand on voit comment elle se pratique chez nous, c’est faire
preuve au mieux de conformisme, au pire de complicité. La démocratie,
c’est le moyen d’exclure l’avis de 49,9% des gouvernés.
> En général, ils refusent d’interpréter le pouvoir des entreprises
sur le même niveau que le pouvoir gouvernemental
J’ai dit plus haut ma tristesse de voir le pouvoir gouvernemental baisser
son froc face aux puissances économiques. Ouf, ça ne parle finalement pas
de moi cet article.
> et suggèrent le plus souvent que des sociétés comme Google ou Facebook
ne devraient dépendre d’aucun contrôle gouvernemental."
On est donc entrain d’examiner une forme d’ultra-libéralisme, pour
trouver une raison à "l’échec" de "la gauche", on est bien content
d’avoir lu jusqu’ici.
> En fait, explique-t-il, quand les libertariens parlent de liberté, ils
l’utilisent dans une acception différente de celle que nous présumons :
Je n’arrive décidément pas à me résigner à faire "nous" avec cet
auteur…
> Et Golumbia de s’en prendre longuement à l’Electronic Frontier
Foundation, souvent marquée à gauche, alors que, comme le soulignait un
rapport de l’Electronic Privacy Information Center, l’EFF est avant
tout l’une des organisations de lobbying de Google et d’autres
entreprises des technologies (une accusation que l’EFF rejette).
L’EFF (https://eff.org/) se positionne comme un interlocuteur permanent
du gouvernement américain, proposant, à chaque question, la réponse la
moins pire. C’est une stratégie d’occupation du terrain qui peut se
défendre, mais qui les amène, suivant le contexte des questions posées,
à prendre des positions relativement contre-productives sur le long terme.
Toutefois je n’irai pas jusqu’à nier l’intégrité de
l’organisation, financièrement indépendante et foncièrement militante.
> La liberté de l’internet sonne bien souvent comme une valeur de
gauche, alors qu’elle ne l’est pas tant que cela dans les faits, note
Michael Gurstein du Centre pour la recherche informatique communautaire qui
remarque que la Coalition pour la liberté de l’internet (Internet
Freedom) est surtout une couverture pour s’assurer que la gouvernance de
l’internet ne nuise pas à la stratégie américaine globale.
Là pour le coup je vois une critique acceptable de ce qui a fait
l’essentiel de mon militantisme depuis 5 ans.
Internet est contrôlé selon certains aspects par les États-Unis. Avec
FDN, on arrive au meilleur niveau de contrôle que je connaisse de son
accès à Internet mais on constate alors que les noms de domaine, par
exemple, sont contrôlés en dernier ressorts par les États-Unis. Dans mon
milieu militant, on considère ça comme un problème, devenu grave avec
l’affaire WikiLeaks (où l’instance américaine qui contrôle les noms
de domaine en dernier ressort a usé de ses pouvoir pour tenter de faire
disparaître wikileaks.org). On constate qu’ils n’y sont pas parvenu,
et qu’il faut qu’on trouve un meilleur système pour la gestion des
noms de domaine.
La Chine ment au reste du monde pour contrôler son morceau géographique
d’Internet. Ils ne proposent pas d’alternative, mais juste une
surcouche à la dictature en place.
Le Brésil vient, depuis Snowden, d’entamer des démarches pour diminuer
sa dépendance vis à vis des États-Unis, et proposera peut-être un
système décentralisé (enfin) pour la gestion des noms de domaines. Si la
"coalition pour la liberté de l’Internet" est bien celle dont je fais
partie, c’est par omission, par faute de mieux, qu’on avance avec les
déséquilibres du système actuel. Et je suis fier de faire partie de ceux
qui ont aidé à contrer l’action de l’instance américaine en question
contre le site web wikileaks.org, y faisant clairement échec par la
multiplication des copies miroirs du site, hébergées un peu partout sur
tous les continents, en faisant le site le plus redondé du monde.
> Le Cyberlibertarianisme se retrouve même dans des projets louables,
comme Code for America, cette organisation "non partisane et non politique"
comme la présente Wikipédia […] des citoyens privés révisent le
fonctionnement gouvernemental en dehors de structures démocratiques
On retourne ici à mon constat de départ sur l’état de nos
démocraties, Internet semble juste étranger au phénomène. Les riches
écrivent des lois pour leurs intérêts propres sous n’importe quel
prétexte. Ce n’est pas nouveau.
> Pas de politique numérique de gauche sans stratégie sur les finalités
> […]
> "Les ordinateurs peuvent être utiles à la gauche, bien sûr", conclut
Golumbia.
Oui, il suffirait d’écouter les penseurs de gauche qui proposent leurs
visions sur la question.
> "Mais les buts de gauche ne peuvent être servis sans articuler
clairement ce que sont ces objectifs et comment ils doivent être atteints
Je résume donc : il faut le vouloir pour faire une politique de gauche.
> En pointant le fait que la technologie n’est pas dans les fondations de
la gauche
Là c’est gratuit comme affirmation. Le PCF, puisqu’on a commencé avec
lui, est pro-nucléaire. Ça me semble même mettre un peu trop de
technologie dans les fondation de la gauche pour le coup…
Toutefois, concernant Internet et en tentant de ne pas aller jusqu’à du
cyber-libertarianisme, il me semble que le réseau permet l’incarnation
Toutefois, concernant Internet et en tentant de ne pas aller jusqu’à du
cyber-libertarianisme, il me semble que le réseau permet l’incarnation
de certains concepts de gauche jusque là restés utopiques. Ainsi,
lorsqu’il s’agit de développer des logiciels, rédiger une
encyclopédie ou enregistrer des vidéos, c’est grâce au réseau des
réseaux que ceux qui savent peuvent produire selon leurs moyens, et mettre
ensuite leur travail à dispositions de tous, qui en profitent alors selon
leurs besoins.
C’est aussi grâce à Internet qu’il y a enfin suffisamment d’espace
pour que chacun puisse s’exprimer, et permettre un fonctionnement
égalitaire où il n’est plus justifié que quelqu’un parle au nom des
autres pour de basses considérations matérielles.
C’est peut être d’ailleurs cette dimension nouvelle que les penseurs
de gauche, devenus éminents (dans leurs analyses) entre autre par leur
compréhension des limites physiques habituelles du monde, n’ont pas su
explorer.
> L’impensé technologique de la gauche ne s’est-il finalement pas
retourné contre elle ?
Si sûrement. Et peut être en effet plus pour la gauche que pour la
droite, qui voit perpétuellement dans la technologie un moyen
d’économiser des emplois.
Toutefois, l’impensé technologique de la classe politique s’est aussi
globalement retourné contre elle, favorisant l’émergence d’une
conscience populaire. Et chaque attaque contre le réseau politise de
nouvelles générations d’internautes qui voulaient juste jouer en ligne,
ou regarder des vidéos de chatons. Chaque attaque contre le réseau, et
donc contre les gens qui sont au bout, réveille et révolte plus de gens,
et la pensée de gauche, abandonnée par le pouvoir politique en place (au
moins chez nous), est donc peut être seulement en train de se déplacer.
**P.-S.**
- La tribune
(http://internetactu.blog.lemonde.fr/2014/05/16/le-probleme-de-la-gauche-avec-internet/)
à l’origine de cette relecture ;
- Une autre critique par @rretSurImages
(http://www.arretsurimages.net/articles/2014-05-19/Internet-est-il-devenu-de-droite-id6783).
Crédit photo Fidelis
(https://secure.flickr.com/photos/vulpesfidelis/6615731019/in/photostream/).
[1] On pourra voir à ce sujet les conférences de Benjamin Bayart, par
exemple la vidéo « Internet et ses enjeux » :
http://www.fdn.fr/Internet-et-ses-enjeux.html ou encore ma petite
intervention au MakerFaire de Saint Malo en 2013 retraçant les menaces qui
pèsent sur Internet, et donc la liste de tous ceux qui sont dérangés par
son arrivée : https://twitter.com/Siltaar/status/396233254065283072
[2] L’accord commercial anti-contrefaçon, qui, contrairement à ce
qu’indiquait son nom, n’était pas un accord commercial, mais une
tentative d’instaurer un nouveau cadre juridique supra-national pour
lutter contre une « contrefaçon » qui englobe brevets, du droit
d’auteur, du droit des marques, médicaments génériques, ainsi que les
infractions au droit d’auteur sur Internet
[3] Déclaration universelle des droits de l’homme de 1789 :
http://www.assemblee-nationale.fr/histoire/dudh/1789.asp
[4] On le constate notamment avec l’adoption par le parlement européen
d’une réglementation autour de la protection des données personnelles
et donc de la vie privée : http://www.controle-tes-donnees.net/
[5] Heureusement, tu ne les lis pas. Et heureusement, certains le font pour
toi : http://tosdr.org/
[6] https://café-vie-privée.fr/
[7] Richard Stallman définit 4 libertés pour un logiciel : celle
d’utiliser le logiciel pour quelque usage que ce soit ; d’en étudier
le fonctionnement ; d’en redistribuer des copies ; et d’améliorer le
logiciel (et donc de diffuser vos améliorations au public). Plus
d’information sur : http://www.april.org/fr/articles/intro
Auteur : @Siltaar
## Relecture du « problème de la gauche avec internet »
lundi 2 juin 2014 , par [Siltaar](../siltaar)
Plusieurs amis m’ayant demandé de les éclairer sur cet obscur billet
(http://internetactu.blog.lemonde.fr/2014/05/16/le-probleme-de-la-gauche-avec-internet/),
et les cyberlibertariens, je me suis contraint à le lire entièrement…
Pour commencer, Internet et le changement de civilisation qui
l’accompagne, dépassent tout simplement le clivage traditionnel
gauche/droite. Un peu comme la question écologiste s’abstrait, elle
aussi, de l’ancienne grille de lecture politique qui départageait
l’égocentrisme des riches et celui des pauvres. Avec bien sûr des
égarés-rêveurs pauvres de droite et de riches altruistes utopiques et
immodestes, croyant pouvoir changer l’ordre des choses, et muscler le
ventre mou de la masse.
Du coup, le titre du billet de blog que nous nous apprêtons à relire se
présente comme immodeste et racoleur. D’ailleurs le chapeau qui le suit
précise tout de suite qu’il n’y a pas qu’une seule gauche. Entre un
mouvement anticapitaliste et le PS aujourd’hui au pouvoir, il y a un
large spectre, composé de nombreuses nuances et orientations à gauche.
Ensuite, je suis bien plus habitué à parler des problèmes de la classe
politique avec Internet. Par classe politique, j’entends l’ensemble des
gens corrompus qu’on élit en espérant qu’en plus de s’en foutre
plein les poches ; ils vont en mettre un peu dans les nôtres ; et qu’on
pourra donc fermer les yeux. Je suis également plus habitué à parler des
problèmes de la démocratie représentative face à la démocratie
directe, rendue possible à de nouvelles échelles grâce à Internet, ou
des craintes générées par la méconnaissance d’un outil nouveau,
Internet, considéré par beaucoup comme la plus grande avancée de
l’humanité depuis l’invention de l’imprimerie, que du « problème
de la gauche avec Internet ». Alors voyons de quoi il en retourne.
> David Golumbia, auteur de La logique culturelle de l’informatique,
publie une intéressante tribune
(https://www.jacobinmag.com/2013/12/cyberlibertarians-digital-deletion-of-the-left/)
dans Jacobin, le magazine socialiste américain. Comment expliquer,
questionne-t-il, que si la révolution numérique produit de la
démocratie, déstabilise les hiérarchies, décentralise ce qui était
centralisé... bref, favorise les valeurs de gauche, celle-ci semble alors
plus dispersée que jamais, et même en voie de disparition dans les
démocraties les plus avancées ?
Ici, il faut situer le billet de blog original dans son contexte : il
émane des États-Unis, acteur dominant de l’Internet certes, mais non
représentatif des 95% restant de population mondiale. La vision de D.
Golumbia des "valeurs de gauche" apparaît donc fortement connotée. Les
États-Unis étant dépourvus de parti communiste, il est plus difficile
pour M. Golumbia de réaliser qu’un mouvement de gauche puisse être
centralisé et hiérarchique au possible…
D’ailleurs, lorsqu’il s’agit de "hiérarchie déstabilisée" et de
fonctionnement décentralisé, c’est plus aux mouvements anarchistes que
je pense.
Ensuite, je n’ai qu’à peu près 15 ans de recul en politique mais ce
que je constate en France, c’est que le PS n’est plus à proprement
parler de gauche, et laisse la place sur ce terrain à de nouvelles
formations. Ces formations semblent peut être éparpillées aujourd’hui,
mais leur nombre témoigne de la vivacité des pensées qu’elles
représentent. Ainsi, le lien entre la dérive droitière d’une classe
politique (nos énarques), c’est-à-dire l’abdication du politique face
à l’économique, et les prémisses des changements apportés par
Internet à nos sociétés [1] n’est pas évident.
D’ailleurs, ce n’est pas de la faute d’Internet si l’Europe est un
grand marché et pas une réalité sociale. Par contre, c’est via
Internet que j’échange avec des finlandais, des espagnols, des anglais,
des allemands, des polonais (et j’en oublie) pour coordonner nos efforts
dans le but de faire rejeter le traité commercial international ACTA
(https://fr.wikipedia.org/wiki/Accord_commercial_anti-contrefaçon) [2] par
le parlement européen (il faut remettre le couvert avec TAFTA
(http://www.laquadrature.net/fr/TAFTA) en ce moment), et avec des
brésiliens, des australiens, des islandais, des américains (et bien sûr
j’en oublie), quand il s’agit d’espionnage de masse
(https://www.nsa-observer.net/) des citoyens par leurs gouvernements et
celui des États-Unis.
Voilà concrètement ce qu’il est possible de faire avec Internet. Ça me
semble éminemment de gauche (notion de dévouement personnel à
l’intérêt général, lutte contre les dérives du capital…), et
c’était bien plus compliqué avant.
> Pour David Golumbia, la raison est à chercher dans le
cyber-libertarianisme. Ce terme introduit dans les années 90 par les
théoriciens des médias Richard Barbrook et Andy Cameron, auteurs de
"l’idéologie californienne" […] La journaliste américaine Paulina
Borsook a parlé de Cyberégoïsme. Et le philosophe des technologies
Langdon Winner de cyberlibertariens...
Avec cette citation, on découvre qu’on est en train de s’intéresser
à de l’idéologie californienne.
Je vais poursuivre parce qu’on me l’a demandé, mais d’habitude je
passe juste ma route. Ce n’est pas seulement parce qu’ils brassent des
millions que les gens de la Silicon Valley se croient puissants, mais aussi
parce qu’on leur accorde trop d’attention…
On parle donc du cyber-libertarianisme… Ici le préfixe cyber- (comme
l’auteur l’avoue lui même en fin d’article) n’apporte rien à
l’affaire.
On parle également de cyberégoïsme, ce qui semble étrangement faire
écho a mon introduction, qui définissait la politique comme un équilibre
des égoïsmes avec quelques égarés à contre courant de part et
d’autre nageant. Toutefois, on semble loin de la cyberchoucroute de
gauche.
> David Golumbia ne donne pas de définition précise de ceux qu’il
désigne sous ce terme.
Voilà qui n’est pas très motivant à poursuivre l’analyse, mais je
m’y suis engagé.
> […] Pour Golumbia, les tenants de cette utopie se retrouvent sous
quelques slogans simples comme : "l’informatisation nous rendra libres"
Et ce magnifique slogan serait de qui ? Un vendeur d’ordinateur ? Je ne
pense pas que "XXX" fera le bonheur des gens malgré eux.
Et mettez ce que vous voulez à la place du XXX, ça marche avec :
"l’informatisation".
> ou l’informatique est la mère de toutes les solutions.
>
> […]
>
> Parmi ces techno-enthousiastes, Golumbia range nombre de gourous des
nouvelles technos : Jimmy Wales, le fondateur de Wikipédia, Eric Raymond,
le théoricien du mouvement open source, John Perry Barlow, le cofondateur
de l’Electronic Frontier Foundation, Kevin Kelly, l’ancien éditeur de
Wired, le financier Peter Thiel, l’entrepreneur Elon Musk, Julian
Assange, le cofondateur de Google Sergey Brin et les membres du Front de
libération de la technologie...
L’auteur balance donc plein de noms, auxquels il semble vouloir faire
dire que chacun considère que l’informatique va décider à la place des
Humains, de mener une politique de gauche… Qu’en matière
d’informatique une politique de gauche se déroule naturellement, parce
que l’informatique serait sur le plan des échanges dématérialisés, le
nouveau marché à main invisible des échanges économiques matériels.
Je crois pourtant qu’on pourrait faire deux groupes avec ces
personnalités :
- Jimmy Wales (Wikipédia) ;
- Eric Raymond (La cathédrale et le bazar) ;
- John Perry Barlow (EFF) ;
- Julian Assange (WikiLeaks).
Puis :
- Kevin Kelly (Wired) ;
- Peter Thiel (PayPal) ;
- Sergey Brin (Google) ;
- Elon Musk (PayPal).
Les premiers me semblant plutôt de gauche et les autres de droite. Mais la
pertinence de cette suite de noms n’en serait pas vraiment mise en
évidence. Les uns ont contribué à mettre à disposition du monde entier
plein de connaissances gratuitement, les autres semblent l’avoir fait
pour s’enrichir (logique commerciale, pub, l’espionnage…).
Interpréter leurs différents discours comme étant un : laisser les
choses s’équilibrer sur Internet, sans interventionnisme d’état, et
tout ira bien ; me semble être un mauvais amalgame. Les uns souhaitent
qu’Internet reste un espace ouvert aux échanges, à la libre circulation
de l’information, l’espace où s’applique enfin l’article 11 de la
Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 [3] or il faut
pour cela qu’Internet reste neutre et soit le moins régulé possible par
les états. Les autres, souhaitant qu’Internet reste un moyen de
collecter des données sur les gens pour les revendre ensuite au plus
offrant. Ils ont en commun de souhaiter qu’Internet perdure comme il est
puisqu’ils on su en tirer leur parti, et souhaitent donc qu’on
n’affaiblisse pas le réseau par de nouvelles lois, qui seraient
forcément des restrictions (c’est la nature d’une loi).
Paradoxalement, depuis les révélations d’Edward Snowden sur
l’espionnage de masse des internautes (révélations admises par la
plupart des gouvernements et des grandes entreprises de l’Internet) on
voit émerger une nouvelle aspiration législative [4] pour le réseau, qui
protégerait ces utilisateurs contre les entreprises les plus rentables
d’Internet, comme on protège les citoyens d’un pays d’eux-même en
prononçant des peines d’inéligibilité…
> Dans la forme la plus aigüe du cyberlibertarianisme, explique-t-il,
l’expertise informatique est considérée comme directement applicable
aux questions sociales. Pourtant, comme Golumbia l’explique dans son
livre, les pratiques informatiques sont intrinsèquement hiérarchiques et
se concrétisent par l’identification avec le pouvoir.
J’en vois bien une, pour ma part, de forme de hiérarchie induite par
l’informatique, et elle se résume ainsi : soit tu contrôles la
technologie, soit c’est elle qui te contrôle. Si tu n’utilises pas de
logiciel libre, tu es enfermé dans des conditions d’utilisation
inacceptables [5] et tu es espionné. Pour garder le contrôle sur son
ordinateur, on a inventé le logiciel libre, et on voit donc aujourd’hui
qu’il faut en plus passer par du chiffrement pour ses communications [6]
.
La traditionnelle guerre entre le bien et le mal se déroule donc dans la
sphère numérique comme dans le monde physique. Les Humains poursuivent
les mêmes idées, et donc aussi les mêmes dérives. Je ne vois aucune
distorsion apportée par Internet sur ce sujet.
> Les hacktivistes, ceux qui promeuvent la nature libératoire de
l’informatisation massive, semblent pourtant indifféremment de droite
comme de gauche, comme si la technologie pouvait servir indifféremment les
fins politiques de chacun.
La technologie n’est pas une entité. La technologie c’est l’outil
dont s’équipent les un et les autres pour arriver à leur fins, du
propulseur à sagaies pour manger du bison, à l’ordinateur que vous vous
êtes offert pour échanger des courriels, et accessoirement lire
Wikipedia, regarder des vidéos de chatons et du porn.
Il me semble idiot de chercher un déterminisme de valeur dans une
technologie. Si des hommes ont tué des rivaux avec des propulseurs au lieu
de nourrir les moins habiles et les blessés de la tribu, c’est pas la
faute des propulseurs. Avait-on besoin de M. Golumbia pour se douter que
les entreprises commerciales utilisant internet pour offrir leurs services
(fussent-ils présentés comme gratuits), auraient des comportements
capitalistes ?
> Mais c’est mal observer combien la convergence est surtout libertaire,
estime Golumbia. L’open source par exemple est une commercialisation
délibérée de la notion de Logiciel libre non commercial imaginée par
Richard Stallman.
La séparation entre logiciel libre et logiciel open source est une
résurgence de clivage traditionnel gauche/droite dans le monde du logiciel
collaboratif en ligne. Toutefois, Richard Stallman n’a jamais pensé le
logiciel libre comme étant non-commercial. Il a lui-même gagné sa vie
des années en vendant des copies sur support physique d’un logiciel de
son cru (emacs).
De plus, contrairement à ce qu’estime Golumbia, ou son traducteur, la
différence entre libre et open source tient dans la garantie (assise sur
les lois de droit d’auteur) d’une non-restriction. Celle que le code du
logiciel, érigé en bien commun par une licence libre, restera libre dans
le futur [7] . Alors qu’un morceau de logiciel open source peut très
bien être converti en projet fermé, dit privateur (de liberté) par
Stallman, et retirer ainsi ses billes du pot commun.
> […] le mouvement du logiciel libre et de l’open source ont été
idéalisés et idéologisés en nous faisant croire que la collaboration
pouvait se faire sans régulation, sans organisation autre
qu’instrumentale, sans hiérarchies
Toutefois, si c’est pour nous le faire croire pendant 13 ans, l’âge de
Wikipedia, voire 31 ans, l’âge du système d’exploitation libre GNU
(avec divers noyaux dont Alix, puis Linux) alors, relativement à l’âge
de l’informatique elle même (environ 50 ans), c’est pas mal fiable
comme croyance quand même.
Et puis, "sans régulation" c’est un poil exagéré. Internet s’est
plutôt construit de manière autogérée, s’appuyant sur des textes non
contraignants mais reconnus et respectés par tous ceux qui voulaient
continuer à discuter ensemble. Des exemples à suivre, modestement nommés
Requête à Commentaires (RFC en anglais), pour définir à quoi ressemble
un courriel (http://tools.ietf.org/html/rfc2822) par exemple, et qui ont
aujourd’hui le prestige et l’impact que les lois n’ont plus tout à
fait concernant Internet.
> Or la nature libératoire de la technologie semble favoriser plutôt
certaines formes de libertés sur d’autres, notamment les plus
individuelles.
On en revient à oublier qu’Internet n’est que ce que les humains ont
pris le temps d’en faire. Quand tout va bien, les fourchettes servent à
manger. En temps de guerre civile, elles pourraient alors favoriser le
meurtre au corps à corps.
> Comment le solutionnisme sape les fondements mêmes de l’engagement
>
> Pour Golumbia, dès que les ordinateurs sont impliqués, les gens de
gauche - quand ils ne rejettent pas sans discussion toute approche
technologique - semblent perdre toute raison critique... acceptant sans
broncher "ces politiques de l’utopie numérique qui s’appuient sur un
discours de la transformation radicale".
En fait, j’aurais aimé que les hommes politiques de droite se fassent
eux aussi une raison critique vis à vis d’Internet, au lieu de nous
voter les HADOPI 1
(https://fr.wikipedia.org/wiki/Loi_Création_et_Internet#Opposition) et 2
(https://fr.wikipedia.org/wiki/Loi_relative_à_la_protection_pénale_de_la_propriété_littéraire_et_artistique_sur_internet)
(DADVSI
(https://fr.wikipedia.org/wiki/DADVSI#Pol.C3.A9miques_au_sujet_de_la_loi_DADVSI),
LOPPSI (https://fr.wikipedia.org/wiki/LOPPSI#Critiques)…) et autre
horreurs comme le TAFTA
(https://paris-luttes.info/spip.php?page=recherche&recherche=tafta) qui
vient. Certes, ceux étiquetés de gauche nous ont voté presque autant
d’affreusetés dès leur arrivée au pouvoir, comme la LPM (légalisant
un quasi-Prism à la française
(http://bugbrother.blog.lemonde.fr/2013/12/10/tout-ce-que-vous-avez-toujours-voulu-savoir-sur-la-lpm-et-que-vous-avez-ete-nombreux-a-me-demander/)).
Ma critique est donc moins clivée. Cette technologie nouvelle n’est
globalement pas bien appréhendée par les "élites" gouvernantes, quelque
que soit leur bord. Sinon ils n’essaieraient pas de faire passer des lois
inapplicables et/ou contraires à la constitution. Après si on veut parler
des intellectuels de gauche, on trouve des blogs (comme celui de Philippe
Aigrain (http://paigrain.debatpublic.net/)), qui ne perdent pas toute
raison critique et proposent un cadre législatif de gauche pour Internet
et notre usage actuel du réseau (majoritairement, en volume :
s’échanger des films et des musiques).
> Pour les cyberlibertariens,
Donc on n’a pas pu définir qui ils sont, mais on va leur faire dire des
trucs quand même.
> le monde politique est si radicalement transformé par la technologie
numérique que les anciennes règles ne s’appliquent plus et qu’il faut
donc trouver de nouvelles normes éthiques et politiques.
Je suis donc au moins d’accord avec le billet sur une chose, et ça
m’inquiète subitement, serai-je un cyberliber-truc ? Est-ce que la
technologie a sapé mon engagement ? Ah non, c’est bon.
Cette technologie m’a au contraire menée à d’autres personnes, qui
ont aiguisé mes convictions et ont partagé avec moi leurs modes
d’action. De GUL
(https://fr.wikipedia.org/wiki/Groupe_d%27utilisateurs_Linux) en GUL, le
long de mes études, j’en suis devenu vice-président du Groupe des
Utilisateurs de GNU/Linux de Paris, Parinux (https://www.parinux.org/). De
DADVSI en HADOPI, j’en suis arrivé à croiser les amis de la Quadrature
du Net sur les bancs réservés au public à l’assemblée nationale et
poursuivre la collaboration depuis tout en agissant concrètement en
devenant (après des années d’adhésion simple) trésorier d’un
fournisseur d’accès à internet, libre et associatif (FDN.fr
(http://www.fdn.fr)) et du Fond de Défense de la Neutralité du Net (FDN2
(http://www.fdn2.org)).
> Tant et si bien que les cyberlibertariens semblent désormais partout,
même s’ils revendiquent rarement ce titre.
Ce qui n’aide pas à définir le terme…
> Pour la journaliste Jessica Roy, "le narcissisme se fait passer pour du
futurisme éclairé" s’énerve-t-elle en dénonçant la méritocratie
sexiste, raciste et de classe des développeurs de la Silicon Valley.
La réalité de terrain des penseurs de gauche locaux n’est sûrement pas
belle à voir, mais parler "des développeurs de la Silicon Valley",
c’est déjà les réduire à un seul ensemble. C’est aussi amalgamer
des concepts (les développeurs sont des employés techniciens, pas des
philosophes), et c’est faire plus largement, le constat de notre
société occidentale : sexiste et raciste. Les dernières élections
parlent d’elles-même à ce sujet.
> Or, l’idée que le "code sauvera le monde"
Et elle sort d’où cette idée saugrenue ?
> rend toutes les autres formes d’engagement politique inutiles, voire
indésirables.
Je comprends en effet que de se dire : ça va se faire sans moi ; n’aide
pas à l’engagement politique. La problématique du passager clandestin
est vieille comme la société.
> "Les cyberlibertariens se concentrent sur la promotion d’outils,
d’objets, de logiciels et de politiques dont le principal attribut est
d’échapper à la réglementation et à l’application de la loi par
l’Etat. Ils dépeignent systématiquement le gouvernement comme
l’ennemi de la démocratie plutôt que sa réalisation potentielle.
Qui fait ça ? Pas les patrons cités précédemment. Vous ? Moi ? Quelques
bidouilleurs pour montrer que c’est possible, seuls dans leur savoir de
pointe ? Parfois, d’un coup, les révoltés de tout un pays quand débute
une révolution ? Mais alors oui, ils ne voient plus leur régime politique
comme la réalisation potentielle d’une démocratie.
Et puis, la démocratie un mauvais système, certains disent « le pire à
l’exception des autres connus ». Alors afficher la démocratie comme un
idéal, quand on voit comment elle se pratique chez nous, c’est faire
preuve au mieux de conformisme, au pire de complicité. La démocratie,
c’est le moyen d’exclure l’avis de 49,9% des gouvernés.
> En général, ils refusent d’interpréter le pouvoir des entreprises
sur le même niveau que le pouvoir gouvernemental
J’ai dit plus haut ma tristesse de voir le pouvoir gouvernemental baisser
son froc face aux puissances économiques. Ouf, ça ne parle finalement pas
de moi cet article.
> et suggèrent le plus souvent que des sociétés comme Google ou Facebook
ne devraient dépendre d’aucun contrôle gouvernemental."
On est donc entrain d’examiner une forme d’ultra-libéralisme, pour
trouver une raison à "l’échec" de "la gauche", on est bien content
d’avoir lu jusqu’ici.
> En fait, explique-t-il, quand les libertariens parlent de liberté, ils
l’utilisent dans une acception différente de celle que nous présumons :
Je n’arrive décidément pas à me résigner à faire "nous" avec cet
auteur…
> Et Golumbia de s’en prendre longuement à l’Electronic Frontier
Foundation, souvent marquée à gauche, alors que, comme le soulignait un
rapport de l’Electronic Privacy Information Center, l’EFF est avant
tout l’une des organisations de lobbying de Google et d’autres
entreprises des technologies (une accusation que l’EFF rejette).
L’EFF (https://eff.org/) se positionne comme un interlocuteur permanent
du gouvernement américain, proposant, à chaque question, la réponse la
moins pire. C’est une stratégie d’occupation du terrain qui peut se
défendre, mais qui les amène, suivant le contexte des questions posées,
à prendre des positions relativement contre-productives sur le long terme.
Toutefois je n’irai pas jusqu’à nier l’intégrité de
l’organisation, financièrement indépendante et foncièrement militante.
> La liberté de l’internet sonne bien souvent comme une valeur de
gauche, alors qu’elle ne l’est pas tant que cela dans les faits, note
Michael Gurstein du Centre pour la recherche informatique communautaire qui
remarque que la Coalition pour la liberté de l’internet (Internet
Freedom) est surtout une couverture pour s’assurer que la gouvernance de
l’internet ne nuise pas à la stratégie américaine globale.
Là pour le coup je vois une critique acceptable de ce qui a fait
l’essentiel de mon militantisme depuis 5 ans.
Internet est contrôlé selon certains aspects par les États-Unis. Avec
FDN, on arrive au meilleur niveau de contrôle que je connaisse de son
accès à Internet mais on constate alors que les noms de domaine, par
exemple, sont contrôlés en dernier ressorts par les États-Unis. Dans mon
milieu militant, on considère ça comme un problème, devenu grave avec
l’affaire WikiLeaks (où l’instance américaine qui contrôle les noms
de domaine en dernier ressort a usé de ses pouvoir pour tenter de faire
disparaître wikileaks.org). On constate qu’ils n’y sont pas parvenu,
et qu’il faut qu’on trouve un meilleur système pour la gestion des
noms de domaine.
La Chine ment au reste du monde pour contrôler son morceau géographique
d’Internet. Ils ne proposent pas d’alternative, mais juste une
surcouche à la dictature en place.
Le Brésil vient, depuis Snowden, d’entamer des démarches pour diminuer
sa dépendance vis à vis des États-Unis, et proposera peut-être un
système décentralisé (enfin) pour la gestion des noms de domaines. Si la
"coalition pour la liberté de l’Internet" est bien celle dont je fais
partie, c’est par omission, par faute de mieux, qu’on avance avec les
déséquilibres du système actuel. Et je suis fier de faire partie de ceux
qui ont aidé à contrer l’action de l’instance américaine en question
contre le site web wikileaks.org, y faisant clairement échec par la
multiplication des copies miroirs du site, hébergées un peu partout sur
tous les continents, en faisant le site le plus redondé du monde.
> Le Cyberlibertarianisme se retrouve même dans des projets louables,
comme Code for America, cette organisation "non partisane et non politique"
comme la présente Wikipédia […] des citoyens privés révisent le
fonctionnement gouvernemental en dehors de structures démocratiques
On retourne ici à mon constat de départ sur l’état de nos
démocraties, Internet semble juste étranger au phénomène. Les riches
écrivent des lois pour leurs intérêts propres sous n’importe quel
prétexte. Ce n’est pas nouveau.
> Pas de politique numérique de gauche sans stratégie sur les finalités
> […]
> "Les ordinateurs peuvent être utiles à la gauche, bien sûr", conclut
Golumbia.
Oui, il suffirait d’écouter les penseurs de gauche qui proposent leurs
visions sur la question.
> "Mais les buts de gauche ne peuvent être servis sans articuler
clairement ce que sont ces objectifs et comment ils doivent être atteints
Je résume donc : il faut le vouloir pour faire une politique de gauche.
> En pointant le fait que la technologie n’est pas dans les fondations de
la gauche
Là c’est gratuit comme affirmation. Le PCF, puisqu’on a commencé avec
lui, est pro-nucléaire. Ça me semble même mettre un peu trop de
technologie dans les fondation de la gauche pour le coup…
Toutefois, concernant Internet et en tentant de ne pas aller jusqu’à du
cyber-libertarianisme, il me semble que le réseau permet l’incarnation
Toutefois, concernant Internet et en tentant de ne pas aller jusqu’à du
cyber-libertarianisme, il me semble que le réseau permet l’incarnation
de certains concepts de gauche jusque là restés utopiques. Ainsi,
lorsqu’il s’agit de développer des logiciels, rédiger une
encyclopédie ou enregistrer des vidéos, c’est grâce au réseau des
réseaux que ceux qui savent peuvent produire selon leurs moyens, et mettre
ensuite leur travail à dispositions de tous, qui en profitent alors selon
leurs besoins.
C’est aussi grâce à Internet qu’il y a enfin suffisamment d’espace
pour que chacun puisse s’exprimer, et permettre un fonctionnement
égalitaire où il n’est plus justifié que quelqu’un parle au nom des
autres pour de basses considérations matérielles.
C’est peut être d’ailleurs cette dimension nouvelle que les penseurs
de gauche, devenus éminents (dans leurs analyses) entre autre par leur
compréhension des limites physiques habituelles du monde, n’ont pas su
explorer.
> L’impensé technologique de la gauche ne s’est-il finalement pas
retourné contre elle ?
Si sûrement. Et peut être en effet plus pour la gauche que pour la
droite, qui voit perpétuellement dans la technologie un moyen
d’économiser des emplois.
Toutefois, l’impensé technologique de la classe politique s’est aussi
globalement retourné contre elle, favorisant l’émergence d’une
conscience populaire. Et chaque attaque contre le réseau politise de
nouvelles générations d’internautes qui voulaient juste jouer en ligne,
ou regarder des vidéos de chatons. Chaque attaque contre le réseau, et
donc contre les gens qui sont au bout, réveille et révolte plus de gens,
et la pensée de gauche, abandonnée par le pouvoir politique en place (au
moins chez nous), est donc peut être seulement en train de se déplacer.
**P.-S.**
- La tribune
(http://internetactu.blog.lemonde.fr/2014/05/16/le-probleme-de-la-gauche-avec-internet/)
à l’origine de cette relecture ;
- Une autre critique par @rretSurImages
(http://www.arretsurimages.net/articles/2014-05-19/Internet-est-il-devenu-de-droite-id6783).
Crédit photo Fidelis
(https://secure.flickr.com/photos/vulpesfidelis/6615731019/in/photostream/).
[1] On pourra voir à ce sujet les conférences de Benjamin Bayart, par
exemple la vidéo « Internet et ses enjeux » :
http://www.fdn.fr/Internet-et-ses-enjeux.html ou encore ma petite
intervention au MakerFaire de Saint Malo en 2013 retraçant les menaces qui
pèsent sur Internet, et donc la liste de tous ceux qui sont dérangés par
son arrivée : https://twitter.com/Siltaar/status/396233254065283072
[2] L’accord commercial anti-contrefaçon, qui, contrairement à ce
qu’indiquait son nom, n’était pas un accord commercial, mais une
tentative d’instaurer un nouveau cadre juridique supra-national pour
lutter contre une « contrefaçon » qui englobe brevets, du droit
d’auteur, du droit des marques, médicaments génériques, ainsi que les
infractions au droit d’auteur sur Internet
[3] Déclaration universelle des droits de l’homme de 1789 :
http://www.assemblee-nationale.fr/histoire/dudh/1789.asp
[4] On le constate notamment avec l’adoption par le parlement européen
d’une réglementation autour de la protection des données personnelles
et donc de la vie privée : http://www.controle-tes-donnees.net/
[5] Heureusement, tu ne les lis pas. Et heureusement, certains le font pour
toi : http://tosdr.org/
[6] https://café-vie-privée.fr/
[7] Richard Stallman définit 4 libertés pour un logiciel : celle
d’utiliser le logiciel pour quelque usage que ce soit ; d’en étudier
le fonctionnement ; d’en redistribuer des copies ; et d’améliorer le
logiciel (et donc de diffuser vos améliorations au public). Plus
d’information sur : http://www.april.org/fr/articles/intro
Libertarien et anarchiste sont synonymes et il y a plusieurs courants différents, le libertarisme à la sauce américaine étant l'un d'eux (c'est un peu une nostalgie d'un far west idéalisé). Essayer de trier les courants anarchistes sur une ligne droite/gauche est une entreprise vouée à l'échec.
Comme l'a précisé un asinaute, internet n'est ni de droite, ni de gauche, c'est la somme de ce que chacun en fait. Internet est donc naturellement libertarien/anarchiste.
Ce brave homme et ses théories fumeuses m'a d'ailleurs l'air de vouloir "civiliser" internet à sa sauce, ce qui rappelle des choses.
Comme l'a précisé un asinaute, internet n'est ni de droite, ni de gauche, c'est la somme de ce que chacun en fait. Internet est donc naturellement libertarien/anarchiste.
Ce brave homme et ses théories fumeuses m'a d'ailleurs l'air de vouloir "civiliser" internet à sa sauce, ce qui rappelle des choses.
Je trouve cet observatoire trop concis. Je ne comprends pas les nombreux raccourcis de pensées.
La liberté du loup dans la bergerie.
Essayez le même article en remplaçant "internet" par "imprimerie". Vous verrez, çà fonctionne aussi bien.
C'est fou ce que les internautes ressemblent aux humains. Pas plus réfléchis, pas moins réfléchis, pas plus cons, pas moins cons...Enfin bref, tout pareil...il peut y avoir une différence...c'est que dans la vraie vie le nombre de spectateurs pour un individu (réfléchi ou con) est souvent moins important!
Les exemples tirés de 14h42 ne sont franchement pas pertinents : d'abord, en quoi ces invités sont-ils représentatifs de l'Internet en général ? (à supposer d'ailleurs que celui-ci puisse être réduit à des représentants). Et, à tout hasard, leurs paroles n'auraient-elles pas plus à voir avec leur rôle de patron qu'avec leur activité numérique ? Enfin quel rapport ont-ils avec le libertarianisme, courant de pensée typiquement US ?
Au passage, la phrase qui se termine par "au profit d'un algorithme" n'a pas de sens, ou alors il faut m'expliquer en quoi un algorithme peut "profiter" de quoi que ce soit.
Au passage, la phrase qui se termine par "au profit d'un algorithme" n'a pas de sens, ou alors il faut m'expliquer en quoi un algorithme peut "profiter" de quoi que ce soit.
A mon sens, cette analyse commet plusieurs erreurs :
- D'abord, de considérer Internet et ses différents tenants comme un tout idéologique, alors que des idées et idéologies diverses ont cours sur Internet et la révolution numérique en général.
- Ensuite, de ne pas expliciter ce qu'on entend par "droite" et "gauche". Désolée, le libertarianisme et le bonapartisme, c'est deux pensées "de droite" mais ce n'est pas du tout pareil. Le marxisme-lénisiste, la social-démocratie et l'anarcho-syndicalisme itou pour la gauche.
- Enfin, de citer les invités de 14h42 hors contexte pour illustrer un tropisme de "droite libertaire". Euh, et eux, ils se revendiquent de quoi ? Ce ne serait pas intéressant de leur poser la question, plutôt, et de voir comment ils concilient x et y ?
Internet est une technique, mais qui est basée sur plusieurs utopies et les idéaux de plusieurs sphères. On y retrouve des principes de do it yourself, de coopération et des principes libertaires (les origines hackeurs). On y retrouve aussi des utopies de partage du savoir, de la recherche, de rencontre et de connexion des personnes (les origines scientifiques). Mais aussi l'idée de l'utiliser comme un outil de collecte d'information et d'espionnage (les origines militaires). Ou un formidable outil commercial, mais vu selon des optiques très différentes selon qu'on est parmi les blogueurs-entrepreneurs ou les géants type Amazon. Je n'essaie pas de faire le tour de tout, l'idée étant qu'Internet et l'idée que s'en font ceux qui l'utilisent est multi-forme.
On est actuellement en pleine transition d'Internet, qui est en train de passer du réseau ouvert de pionniers des débuts à quelques chose d'universellement utilisé mais de beaucoup plus contrôlé. Et on voit qu'il y a des lignes de faille très claires aujourd'hui et que ce que deviendra Internet dépend des options politiques qui sont prises en ce moment.
La ligne de faille principale, c'est sur l'ouverture ou la fermeture d'Internet. En gros : est-ce qu'on défend un modèle d'un Internet basé sur les même protocoles, le même service de base (neutralité du net) pour tous, ou est-ce qu'on encourage, au nom du "dynamisme économique", la mainmise de géants de plus en plus gros sur les services du net ? (Apple, Google, Amazon, Facebook). Est-ce qu'on réclame la mise en place d'outils ouverts (ouverts, ça veut dire que tout le monde peut en regarder le code et savoir ce que font réellement les outils), ou est-ce qu'on autorise la domination de boîtes noires, DRM, programme propriétaires et autres, lesquels peuvent faire plein de choses dont nous n'avons pas idées (comme : exploiter nos données personnelles, verrouiller des choses qui ne devraient pas l'être, etc.) ?
Le fait de dire qu'Internet est "de droite" ou "de gauche" ne donne en rien une grille de lecture aidant à se positionner sur ces questions. Cela n'aide pas plus pour évaluer et savoir ce qu'il faut faire face à l'impact qu'a Internet sur les autres aspects de la société, économique, politique et sociale. Parce qu'avant d'être de gauche ou de droite, Internet est. Il ne disparaîtra pas parce qu'il ne plaît pas à certains. Ce qu'il faut savoir, c'est la société que l'on veut avoir, avec l'Internet que l'on veut avoir, en prenant en compte l'ensemble de ses réalités, tant celles qui nous plaisent que celles qui ne nous plaisent pas.
- D'abord, de considérer Internet et ses différents tenants comme un tout idéologique, alors que des idées et idéologies diverses ont cours sur Internet et la révolution numérique en général.
- Ensuite, de ne pas expliciter ce qu'on entend par "droite" et "gauche". Désolée, le libertarianisme et le bonapartisme, c'est deux pensées "de droite" mais ce n'est pas du tout pareil. Le marxisme-lénisiste, la social-démocratie et l'anarcho-syndicalisme itou pour la gauche.
- Enfin, de citer les invités de 14h42 hors contexte pour illustrer un tropisme de "droite libertaire". Euh, et eux, ils se revendiquent de quoi ? Ce ne serait pas intéressant de leur poser la question, plutôt, et de voir comment ils concilient x et y ?
Internet est une technique, mais qui est basée sur plusieurs utopies et les idéaux de plusieurs sphères. On y retrouve des principes de do it yourself, de coopération et des principes libertaires (les origines hackeurs). On y retrouve aussi des utopies de partage du savoir, de la recherche, de rencontre et de connexion des personnes (les origines scientifiques). Mais aussi l'idée de l'utiliser comme un outil de collecte d'information et d'espionnage (les origines militaires). Ou un formidable outil commercial, mais vu selon des optiques très différentes selon qu'on est parmi les blogueurs-entrepreneurs ou les géants type Amazon. Je n'essaie pas de faire le tour de tout, l'idée étant qu'Internet et l'idée que s'en font ceux qui l'utilisent est multi-forme.
On est actuellement en pleine transition d'Internet, qui est en train de passer du réseau ouvert de pionniers des débuts à quelques chose d'universellement utilisé mais de beaucoup plus contrôlé. Et on voit qu'il y a des lignes de faille très claires aujourd'hui et que ce que deviendra Internet dépend des options politiques qui sont prises en ce moment.
La ligne de faille principale, c'est sur l'ouverture ou la fermeture d'Internet. En gros : est-ce qu'on défend un modèle d'un Internet basé sur les même protocoles, le même service de base (neutralité du net) pour tous, ou est-ce qu'on encourage, au nom du "dynamisme économique", la mainmise de géants de plus en plus gros sur les services du net ? (Apple, Google, Amazon, Facebook). Est-ce qu'on réclame la mise en place d'outils ouverts (ouverts, ça veut dire que tout le monde peut en regarder le code et savoir ce que font réellement les outils), ou est-ce qu'on autorise la domination de boîtes noires, DRM, programme propriétaires et autres, lesquels peuvent faire plein de choses dont nous n'avons pas idées (comme : exploiter nos données personnelles, verrouiller des choses qui ne devraient pas l'être, etc.) ?
Le fait de dire qu'Internet est "de droite" ou "de gauche" ne donne en rien une grille de lecture aidant à se positionner sur ces questions. Cela n'aide pas plus pour évaluer et savoir ce qu'il faut faire face à l'impact qu'a Internet sur les autres aspects de la société, économique, politique et sociale. Parce qu'avant d'être de gauche ou de droite, Internet est. Il ne disparaîtra pas parce qu'il ne plaît pas à certains. Ce qu'il faut savoir, c'est la société que l'on veut avoir, avec l'Internet que l'on veut avoir, en prenant en compte l'ensemble de ses réalités, tant celles qui nous plaisent que celles qui ne nous plaisent pas.
Des new-yorkais jacobins ! Avec de l'humour en plus :
1789-2014 © Jacobin magazine
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Le Libertarianisme est la forme la plus stupide de pensée politique.
Oui, comme à chaque fois, quant on découvre un nouveau continent les 1er à vouloir le posséder sont les personnes avides de pouvoir
Oui, comme à chaque fois, quant on découvre un nouveau continent les 1er à vouloir le posséder sont les personnes avides de pouvoir
Le comble de la sottise: " Internet n'est ni de droite ni de gauche, il est ce qu'on en fait"