"Patrick Drahi n'est pas le seul méchant"
C'est l'histoire d'un milliardaire des télécoms devenu un grand patron des médias, un de ces fameux milliardaires qui contrôlent les médias français, et dont l'empire menace aujourd'hui de s'écrouler. C'est l'histoire de Patrick Drahi, patron de L'Express, de Libération, de BFM, de RMC, etc. Tous ces médias sont contrôlés par le groupe Altice, dont l'action vient de chuter de plus de 50% en un mois. Comment les médias, les siens et les autres, ont-ils laissé pressentir la fragilité de ce groupe avant les évènements des dernières semaines ? Pour en discuter : Elsa Bembaron, journaliste au Figaro, auteure de Patrick Drahi : l’ogre des networks (L'Archipel), Jérôme Lefilliâtre, journaliste à Libération, qui a récemment écrit sur le "très haut dépit" de SFR. Et Benoît Boussemart, économiste marxiste, qui étudie depuis plusieurs années l'empire Drahi de près.
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Derniers commentaires
Drahi n'est qu'une marionnette de la finance;
il y a déjà eu 1 expérience LBO mondiale en 2008, 2010;
qui a payé ?
à bon entendeur salut;
je n'ai pas compris Mme Elsa Bembaron quand elle a parlé de l'exemple Legrand:
cette boîte française a été rachetée en LBO par KKR, qu'est-ce que KKR ?
est-ce toujours français ? qui détient désormais le fric ? y-a-t-il eu des compressions de personnel etc ?
cela m'aurait intéressé comme questions;
car mr Jérôme Lefilliâtre, journaliste à Libération et Mme Elsa Bembaron, journaliste au Figaro ces 2 titres
de journaux sont détenus par la nébuleuse Drahi: vous pouvez disparaître de cette nébuleuse pour faire du cash:
est-ce que vous serez licenciés ? votre nouveau patron aura-t-il une autre culture du journalisme ?
Ok... Faudra dire ça aux employé.es qui vont se faire un burn out ou pire.
Il faudrait appeler cette émission TINA.
la petite nuance est que DELL et EMC sont toutes les 2 des entreprises très rentables et que les synergies sont indiscutables, le rachat et la fusion font sens. mais ce rachat reste quand meme un OVNI par son ampleur et le fait que la boite acheteuse soit non cotée..... ce qui ne change pas la finalité il s'agit toujours de croître et de faire plaisir aux actionnaires, certes beaucoup moins nombreux : ca n'est parce qu'on est pas cote que les objectifs de rentabilités changent... meme si il y a en théorie moins/peu de hedge fund et de fonds de pensions dans l’actionnariat non coté pour fixer des objectifs "déraisonnables"
sinon intéressant que libe puisse publier ce qu'il veut ... comme quoi on peut être milliardaire avoir des méthodes de voyou cote management et ne pas faire d’ingérence dans les medias détenus. c'est sur ce point que dassault/bolore different de Drahi... ca ne rend pas le personnage sympathique pour autant.
Quand a la methode du LBO en elle meme, elle n'est pas choquante a condition qu'il n'y ait pas une fuite en avant ou la dette est systématiquement remboursée par de nouveaux achats ... et donc de nouvelles dettes sans que l’activité courante permette de rembourser la dette globale sur le long terme.
Utiliser les benefices pour rembourser une dette plutot que de partir en dividendes fait sens en soit ...a condition de ne pas avoir les yeux plus gros que le ventre.
Et comme cela est si bien rappelle par les invites ca n'est pas different de l'investissement immobilier.... une personne dans mon entourage est millionnaire virtuel grace a de simples investissements immobiliers (acheter 4 appartements a credit avec 8 colocataires ) mais en réalité son patrimoine net après dette est a peine positif pour l'instant.
Ce message a été supprimé suite à la suppression du compte de son auteur
Les LBO sont certainement le dispositif qui expose le mieux du monde l'application systématique de la contrainte actionnariale/financière dans ce que FL appelle le "capitalisme de basse pression salariale", et le rapport de force implacable entre le Travail et le Capital dans le prélèvement infini de plus-value.
Les LBO montrent aussi de façon exemplaire la contradiction inhérente entre la réduction des coûts (salariaux mais aussi d'investissement) et l'objectif de pérennité d'une société capitaliste: car la société idéale sans travailleurs et sans fonds propres (du "capital" au sens non financier, c'est-à-dire pour SFR des fils enterrés dans le sol et des antennes) est une aporie.
Ce type de financement par levier justifie encore plus le chantage à l'emploi et à la réduction des coûts salariaux qu'un financement par fonds propres: comme c'est l'entreprise cible du LBO elle-même qui finance le rachat par le cash qu'elle réalise grâce à son activité opérationnelle, la contrainte de remboursement - et paiement des intérêts - est "internalisée" sous peine de faillite. Ce dispositif fige dans le marbre des exigence de rentabilité délirantes, que même une société par action classique ne pourrait exiger, au delà des 15% de rentabilité (ROE) déjà intenables dans une situation "régulière".
Sans surprise, ces dispositifs de LBO sont sans cesse loués par les ayatollahs de la "science économique" orthodoxe, au prétexte qu'ils permettent de favoriser une extraction chimiquement pure du profit, contre des managers un peu trop complaisants qui conserveraient des travailleurs trop peu productifs et payés trop cher. Selon la "théorie de l'agence", les LBO permettent en effet d'obliger les managers d'aligner systématiquement leur gestion uniquement sur l'objectif patrimonial de maximisation des profits, en cassant les coûts partout où c'est possible - y compris si cela casse du même coup la société elle-même.
C'est donc bien une mesure de défiance vis-à-vis des dirigeants et de l'encadrement qui fonde les LBO dans la théorie économique orthodoxe: il s'agit avant tout de discipliner les gestionnaires de l'entreprise de façon à ce que le "return on equity" soit l'objectif unique.
C'est en ce sens qu'il faut comprendre la phrase incroyable de Drahi devant la commission parlementaire lors de la reprise, taxant SFR de "fille à papa qui dépensait l'argent, sans payer les factures, car le cash était absorbé par la maison mère"; ou encore à une autre occasion lorsqu'il déclare "je n’aime pas à payer les salaires. Je paye aussi peu que possible". Et c'est en ce sens aussi qu'il faut comprendre les désorganisations internes liées au licenciement massifs et les mesures d'économie touchant la moindre machine à café: ces intégristes du néolibéralisme sont des fous furieux prêts à tout pour détruire l'outil de travail et les conditions minimales de productivité au nom de la sacro-sainte "valeur pour l'actionnaire".
Ce dispositif illustre de façon exemplaire une contradiction inhérente au capitalisme purement financier, puisque la rentabilité passe obligatoirement par la destruction de valeur (licenciements massifs, arrêt de tous les investissements, y compris R&D...) et donc in fine par la réduction de l'activité (le chiffre d'affaire), soit par défection des clients, soit par démotivation et désorganisation complète du travail, soit par retard technologique du fait de la destruction des capacités de production.
Or c'est exactement ce qui se produit avec SFR depuis la reprise par Numéricâble!
Car c'est l'activité même de la société, donc son volume de ventes qui permet de financer le remboursement du levier initial: le pari est donc absurde, puisque Drahi doit casser SFR pour lui faire cracher du cash...ce que SFR ne pourra plus faire lorsqu'elle sera détruite!
En outre, le financement par levier dilue le risque qui repose in fine sur la collectivité, en particulier en cas de faillite.
En effet, non seulement le repreneur ne prend aucun risque financier car par définition il n'engage aucun fond propre, mais les banques qui prêtent sont tout aussi irresponsables: elles ne conservent pas ces créances, qui sont revendues illico sous forme de titres obligataires, et vont se loger un peu partout dans les bilans d'autres banques, des fonds divers...de la même façon que les crédits subprime titrisés de la grande crise de 2008.
C'est donc la collectivité qui paye: tout d'abord les salariés licenciés, et ceux qui restent dont on presse le citron, les fournisseurs non payés ou sous payés, les clients qui voient le service se dégrader et en cas de faillite l'Etat à travers tous les dispositifs d'aide au reclassement, l'indemnisation des impayés, les défauts de cotisations etc..
Quand à la perte financière éventuelle - la seule qui justifie la "prise de risque" des tenants du néolibéralisme - elle est diluée dans les actifs des différents fonds détenant les titres obligataires - qui prennent habituellement leurs pertes et profits en régime normal - et ne réapparaît alors que sous forme de risque-systême (une autre méga crise) comme on l'a déjà connu: là encore, les pertes potentielles des propriétaires de titres pourris seront effacés par la création monétaire si une nouvelle crise survenait, comme c'est toujours le cas, selon la règle d'or du capitalisme prédateur de casino - privatisation des sur-profits et socialisation des pertes.
Pour toutes ces raisons, il faut évidemment interdire les LBO.
Pour mémoire, F Hollande avait promis de le faire en 2011 pour terrasser son "ennemie sans nom et sans visage", pour bien sûr s'empresser de ne rien faire une fois élu. Le seul programme à ma connaissance qui préconise l'interdiction des LBO est celui de la France Insoumise.
Hélas, de tout cela il n'aura pas été question dans l'émission. Encore une occasion ratée.
Je n'ai jamais compris que l'on puisse voir de la beauté dans les édifices bâtis avec le sang et la sueur des gens qui bossent pour rien... et je parle d'édifices dans tous les sens du termes.
D'abord, un certain nombre d'oublis, voire de contre-vérités, s'y sont glissées.
Par exemple, entendre Lenglet expliquer qu'un LBO permet de ne pas glisser un centime pour financer l'acquisition, c'est une blague... Jamais une banque n'acceptera de financer une telle opération si l'acquéreur, accompagné ou non d'un pool d'investisseurs, n'injecte pas de fonds propres dans la holding. Si j'en crois Wikipedia, en fonction de la cible, la dette d'un LBO est comprise entre 1 et 4 fois les fonds propres. Il me semble que Drahi a largement dépassé ce ratio (j'ai souvenir de 1/7, voire 1/0, à vérifier néanmoins, car je ne retrouve plus ma source).
J'aurais en plus aimé que cette émission apporte des réponses à un certain nombre de questions :
1. Quelles acquisitions Patrick Drahi a-t-il réussies par LBO dans le passé ?
2. À ma connaissance, la spécificité des derniers LBO d'Altice est de ne pas respecter les ratios habituels (Dette/résultat d'exploitation, fonds propres/dette), d'être nettement au-delà de ce qui est habituellement admis ? Est-ce le cas ?
3. Qui sont les partenaires bancaires de Drahi ?
4. Sait-on pourquoi ils ont accepté de tels risques ?
5. Connaît-on les contreparties, et les filets de sécurité imposés par les banques, mais aussi par les autres investisseurs privés ?
6. Quel est l'impact d'une variation de cours de bourse, alors que celui-ci n'a aucune influence sur la trésorerie d'Altice ? Y a-t-il des clauses qui modifient les conditions du prêt en cas de variation forte du cours de Bourse, comme le suppose Martine Orange dans un article de Mediapart ?
Martine Orange aurait avantageusement remplacé la journaliste du Figaro, peut-être bonne biographe, mais bien piètre technicienne... Avec ses arguments "c'est de la finance, pas de la morale" ou l'extraordinaire "faut être objectif", on était dans le parfait exemple du "c'est celui qui le dit qui y est"...
Quand on lui demande si "le LBO, ça marche", elle cite l'exemple de Legrand racheté par KKR et Wendel, alors que ça n'a rien à voir. Si trouver des "LBO qui ont marché" lui suffit à dire que ça Drahi a peut-être raison, alors tant mieux pour elle... Elle pourrait peut-être rappeler que KKR est le fonds spécialisé dans les LBO, que la cible Legrand était parfaite, puisqu'elle n'était pas chère, avec une marge de manoeuvre stratégique et managériale importante (ce n'était plus qu'une carcasse) et un potentiel commercial très important (un outil industriel en état de marche, une marque qualitative, donc des prix élevés). Rien à voir avec SFR, acheté très cher alors que les prix des abonnements telcos étaient en plein chute... Le Diable se cache dans les détails, et c'est bien des détails techniques qui nous ont manqué, pour comprendre ce qui pourrait pêcher dans la stratégie Drahi !
Enfin, nous expliquer que "la convergence, ça va marcher, parce qu'il y a des smartphones", c'est digne d'un conte du Père Castor. Le minimum, quand on a connu les délires de Jean-Marie Messier, et l'échec cuisant d'Orange entre 2007 et 2012, c'est d'être prudent sur ce terrain... Dans le même genre, la fusion entre AT&T et Time Warner est d'ailleurs largement menacée aux Etats-Unis.
Franchement, je crois que ça vaudrait de faire une émission technique sur le sujet, pour essayer de vraiment comprendre les spécificités des LBO Drahi, les raisons qui ont poussé ses partenaires bancaires à le suivre, et les filets de sécurité à disposition de tous ces gens, qui les poussent à prendre tant de risques (j'ai comme le sentiment que l'État n'est pas loin... peut-on imaginer qu'il y ait des garanties écrites quelque part, tant Bercy était présent lors de la revente de SFR ?).
Que c'est un peu dangereux donc il faut un patron courageux face au danger.
Drahi clairement est courageux.
On peut voir que Messier a l'air de vivre a peu près correctement d'avoir provoqué une gamelle historique chez Vivendi. On peut dont espérer la même chose pour Drahi si ça tournait mal.
Messier d'ailleurs nous a sagement prévenu que si c'est pas Drahi c'est les GAFA qui vont nous manger, alors autant être exploité par quelqu'un de plus proche.
J'ai quand même remarqué qu'en terme de maitrise de technologie d'innovation pour manger le monde, les GAFA sont un peu mieux équipés que Drahi.
Drahi sans technologie avec 50 milliards de dettes, pour nous protéger de Google/Apple/Facebook/Amazon qui ne savent plus quoi faire de leur cash et qui ont une technologie en avance sur tout le monde. ??
Soudain je doute de la sagesse de Messier. Finalement, il a peut être eu tord très tôt, plutôt que raison trop tôt....
DS: "Mais quelle est la vrai valeur de l'action, la valeur d'aujourd'hui ou celle d'il y a un mois"
Benoît Boussemart: "c'est celle que VOUS lui accordez vous à un moment donné"
Bravo : Le principe de l'économie moderne posé en deux phrases. Et sa vacuité.
"Pourquoi est-ce que je t'échangerai ma chèvre contre ce tas de métal jaune brillant?"
"Fais moi confiance..."
Tous les sujets sont abordés mais on a chaque fois l'impression d'esquiver l'enjeu principal et la conclusion qui pourrait être tirée de cette histoire pour la rendre plus générale et plus universelle.
On ne saura pas pourquoi les marchés financiers ont encore commis une nouvelle erreur magistrale d'appréciation, si ce n'est entendre la sempiternelle rengaine sur la spéculation, comme si la spéculation n'était pas cosubstantielle aux marchés financiers et si elle ne se basait pas sur de gros problèmes de fond (a-t-on vu beaucoup de spéculation sur les obligations de l'Etat norvégien ?).
On omettra les problèmes considérables qui guettent Drahi bien avant le "mur de remboursement" de 2021-2022 : Altice aujourd'hui perd de l'argent et à besoin d'emprunter en permanence pour financer son déficit courant, et qui va donner de l'argent à une boîte pareille qui croule sous les dettes et n'a aucuen perspective d'amélioration ? Comme pour la crise de 2007-2008, il y aussi un problème tout bête de "liquidité" que quand il n'y a plus d'argent, on ne peut plus payer, et l'activité s'arrête là (voir les papiers de Lordon très clair à ce sujet).
On parlera de convergence entre les tuyaux et les contenus en se contentant d'annôner que "la techno existe" mais sans nous en expliquer le modèle économique. A la fin des années 90, des studios de cinéma aux US avaient acheté les salles de cinéma, en espérant pouvoir améliorer le débouché de leur production. Mais comment faire tourner des salles de cinéma avec les seuls films des studios propriétaires sans que celles-ci boivent le bouillon? Comment rentabiliser les films maisons s'ils ne sont pas diffusés dans les autres salles de cinéma ? De la même façon, comment SFR va-t-il gagner de l'argent avec des contenus si ceux-ci ne sont pas exclusifs d'une manière ou d'une autre, ce qui pose la question de leur rentabilité à travers leur seul réseau propre? Soit Libé permet à SFR de gagner du fric parce qu'elle a un contenu exclusif à moindre prix, ou SFR permet à Libé de gagner du fric parce qu'il a plus de débouchés, mais que les deux en gagnent en même temps relève du miracle. Tous ces stratégies n"ont pas été abandonnées parce que la techno n'existait pas et parce que d'autres ont eu raison trop tôt (au passage un extraordinaire auto-panégyrique de Messier, on est en plein délire), mais bien parce que toutes ces stratégies d'intégration verticale (entre amont et aval des activités) ont été abandonnées par la plus grande partie des trusts capitalistes parce que la rentabilité n'était pas au rendez-vous (Apple ne sait même pas produire les puces et écrans de ses téléphones).
Enfin à un moment l'économiste entre deux filiales de Drahi évoque que tout ceci va mener à court terme à une nouvelle crise financière majeure, et ah oui "très bien", revenons à notre mouton Drahi - mais la crise financière majeure qui guette, et déjà annoncée par bien d'autres, n'est-elle pas malgré toute justement le principal intérêt de l'affaire Drahi, et la façon dont les médias, et en premier lieu les deux journalistes, ne semblent pas s'y intéresser ?
Mais bon on invite une journaliste du Figaro pour causer critique du capitalisme et un journaliste d'un journal de Drahi pour causer critique de Drahi et à la fin de l'émission, il n'y a que quelqu'un qui n'aurait jamais fait de critique des médias depuis 20 ans qui découvrirait la frustration qui en découle. Mais vu le nombre de fois où Daniel coupe ses invités, il ne semblait pourtant pas moins frustré que les spectateurs qui s'expriment ici.
Et qd celle du figaro ose dire : c'est la finance et pas les bisounours" Où est la réponse de Schneidermann : La finance ne peut être déconnectée de la réalité car des milliers/millions de gens en souffriront. D'ailleurs les crises montrent que ce n'est pas un monde à part.
Je veux des interlocuteurs qui ne soient pas du même avis et qui posent de vraies questions de société.
Comment, Monsieur Schneidermann pouvez-vous être crédible sans remettre en question la pseudo "objectivité" de ces "journalistes".
Vous devriez vous défaire de l'esprit du "journal" Le Monde.
Moi, j'aurais invité Frédéric Lordon ou plein d'autres qui argumentent et remettent en cause ce système.
Sitôt cette déclaration faite, aucun intérêt à cette émission. Autant aller prendre un MOOC sur la finance sur internet.
Je note aussi le joli "Y'a pas que drahi qui fait ca, c'est pas le seul méchant." Et alors?
Tout d'abord, silence radio sur les conséquences sociales et sanitaires désastreuses de la stratégie de rachats du vampire Drahi. 30% d'effectifs en moins, c'est non seulement des milliers de gens jetés dans la pauvreté et le chômage, mais aussi burnouts, suicides et conditions dégradées chez ceux qui restent. La qualité du travail s'en ressent et c'est ce qui explique en partie le mécontentement des clients de SFR. En tant que salarié, comment continuer à bien bosser en assurant en plus du sien le boulot de la personne sur trois qui a été virée, assorti d'un gel sinon d'une baisse de salaire ? Il faut bien comprendre que Drahi ne rachète pas des mammouths obèses et inertes, mais des sociétés très compétitives qui ont déjà subi beaucoup de ces plans de réduction des coûts dans le passé. Dans ce contexte, son petit jeu de coupes budgétaires s'apparente à priver de nouilles les veilles de compétition un marathonien déjà très affûté : ça ne peut pas continuer à fonctionner longtemps.
Il est étonnant de constater qu'aucun média grand public ne propose de faire le rapport direct entre les thérapies de choc des docteurs Mabuse du capitalisme financier et ce qu'on appelle pudiquement le mal-être au travail. D'un côté, les Envoyé Spécial et autres magazines "de société" dénoncent mauvaises conditions de travail, stress, burnout et méthodes de management fascisantes et de l'autre, un journalisme d'enquête "de haute volée" se gargarise des révélations des Paradise Papers et se targue de décrypter les montages financiers les plus complexes, mais ne va jamais jusqu'à faire le lien entre les deux. On a une manifestation criante de ce blocage mental dans l'exclamation d'Elsa Bembaron lors de cette émission : "mais c'est de la finance, pas de la morale !", comme s'il s'agissait d'une bulle abstraite n'ayant aucune conséquence sur la vie réelle de millions d'êtres humains.
Pourtant, constater ce qui se passe dans les tranchées de la vie quotidienne en entreprise peut nous éclairer facilement sur ce qui intéresse tout le monde, c'est à dire la vraie nature des motivations des grands financiers comme Drahi. Puisque le régime qu'il fait subir à ses joujoux n'est pas soutenable, on peut se demander si Drahi n'est pas de la même trempe que les acheteurs vautours qui se saisissent d'une proie en difficulté en prétendant l'assainir mais en aspirent en réalité tous les avoirs, sauf que lui est un dépeceur à moyen terme plutôt qu'à court terme.
Dans ce cadre, la question de fin d'émission sur l'indépendance éditoriale de Libé est presque dénuée de sens - Drahi rachète des médias pour compléter son activité télécoms mais il aurait aussi bien pu se payer une usine de ketchup pour aller avec une chaîne de fast-foods. Ce qui s'écrit dans Libération lui importe autant que le goût d'une sauce tomate-oignon et dans son modèle mental, c'est bien normal. Le métier et les savoir-faire ne l'intéressent pas, contrairement à sa propre ascension et à la gloriole d'avoir "fait un coup" et monté des groupes qui ont l'apparence et la taille de réussites.
Tout cela n'a visiblement pas effleuré l'esprit des invités qui auraient pu éclairer la situation sur ce point : Jérôme Lefiliâtre qui a dû connaitre le départ d'un certain nombre de ses collègues de chez Libé, et Benoît Boussemart, économiste dont on n'a pas vu l'ombre du début d'une illustration de la qualité de "marxiste".
Lui en a-t-on seulement laissé l'occasion ? C'est la frustration de toute la deuxième partie de cet ASI où une technique défaillante (ou un Benoît Boussemart atteint d'une surdité malvenue ?) a fini par aboutir à un économiste qu'on entendait continuer à parler en voix off pendant que Jérôme Lefilliâtre répondait à Daniel par-dessus. Il me semble pourtant qu'il aurait été intéressant de laisser chacun des interlocuteurs s'exprimer jusqu'au bout.
Dans cette émission on voit que Drahi a déménagé de Paris aux Pays Bas.
"C'est de l'évasion fiscale, pas de la finance".
J'aime pas les gens de droite.
J'aime pas la droite.
Je vous hais de tout mon cœur petits égoïstes de merde. (message destiné à madame)
Un souhait : laisser parler les invités au lieu de les interrompre avant d'avoir pu exprimer leurs idées. Au final, ils doivent s'y reprendre à plusieurs fois pour s'expliquer. C'est souvent le cas, et cette émission là c'est pire. En plus, lorsque vous chercher à les interrompre, visiblement, vous n'écoutez plus vos invités. C'est pas rédhibitoire, juste agaçant. Tant que j'y suis, est ce possible de monter le son ? merci.
"En deux ans, l'empire de Patrick Drahi, Altice, a doublé sa dette à 50 milliards
Le propriétaire de SFR n'a pas d'échéance de remboursement majeur avant 2022. Après avoir beaucoup réduit les coûts, il est sous pression pour générer des revenus.
Le groupe va terminer l'année avec une dette nette de 49,282 milliards d'euros, soit 5,7 fois son Ebitda. Un montant qui a doublé en deux ans. C'est un « exploit " dont peu d'entreprises peuvent se targuer et qui a conduit les analystes de Bloomberg Intelligence à classer récemment le groupe parmi les 50 entreprises à surveiller dans le monde, en 2017, parce qu'elles vont faire face à des « défis inhabituels. »
(...)
Dennis Okhuijsen, le directeur financier d'Altice, explique que tout est sous contrôle, car le groupe possède beaucoup d'actifs qui lui permettent de supporter sa dette. « Nos cash flow sont massifs, on fait de très belles marges d'Ebitda et plus de 85 % de notre dette est à taux fixe », souligne-t-il
(...)
Pourtant, fin 2015, les investisseurs s'inquiétaient de l'ampleur de l'endettement du groupe. En quelques mois, Altice a alors perdu la moitié de sa valeur en Bourse. Patrick Drahi a même été contraint de céder 7,5 % d'Altice (dont il a le contrôle avec un peu plus de 60 %) dans le cadre d'une opération complexe de refinancement de son holding personnel, Next.
S'il a perdu la valeur économique de ces titres, il en a cependant conservé la propriété. Le message du marché était alors clair et Goldman Sachs l'a résumé dans une note invitant Altice à stopper les acquisitions
(...)
C'est donc sur sa capacité à faire croître l'activité que le tycoon est particulièrement attendu. Notamment sur SFR, le pilier du groupe, en difficulté et dont Moody's a dégradé la note à l'automne 2015. « Altice a prouvé qu'il savait rentabiliser très rapidement ses acquisitions grâce à sa gestion éprouvée des réductions de coûts, explique un analyste financier. Les équipes doivent désormais faire la démonstration qu'elles savent faire croître l'activité. " Altice affirme qu'il n'y a pas d'effet « domino " d'un pays à l'autre pour ses activités. Mais s'il échoue sur un territoire, les investisseurs, où qu'ils soient, pourraient commencer à douter"
Il n'y a que Boussemart qui ait utilisé le terme de rentabilité de manière pertinente, et on aurait tous gagné à l'écouter un peu plus. C'est bien dommage.
C'est dommage cet invité apporte pourtant un éclairage intéressant à l'émission et explique que ce qui a été dit au début est faux. Il fini par être coupé alors qu'il apporte des précisions notamment sur la rentabilité vs EBITDA... bizarre de le couper à ce point.
Même sur les éventuels fonds qui joueraient le titre à la baisse, un éclairage intéressant qui arrive un peu tard.
Après, les actionnaires ont sans doute aussi peut être comparé avec Orange et la dette des 2 groupes. Mais pourquoi que maintenant ?
Il y a une émission très intéressante sur les LBO en 2015 sur France 2 où plusieurs cas de LBO étaient cités.... dommage que le sujet ne soit pas plus approfondi.
De même que les doutes (sur le montage) des ministres et des concurrents au moment du rachat de SFR par Numericable, ne sont pas évoqués. Il y avait pourtant matière à citer. Ces doutes avaient prévus les suppressions de postes.
ensuite nous aurons la mme du figaro toute aussi amusante, nous expliquer qu'il n'y avais aucun probleme "il faut juste expliquer les choses", ah si on avais bien tout expliqué, mais non la méthode du lbo est tout a fait performante économiquement..., mais s'agit il ici de produire? ou d'extraire la plus-value plus efficacement ?
Ce n'est pas du Ponzi, sinon à la marge du système (dans l'exemple évoqué dans la vidéo, d'ailleurs) : on n'emprunte pas à Pierre pour rembourser Jacques ; on fout un pistolet (= dette) sur la tempe de Pierre, dont on sait que les poches sont pleines (= niveau d'EBITDA), pour qu'il nous file la thune afin de rembourser l'emprunt ayant permis à Jacques d'acheter son pistolet. C'est donc plutôt un braquage en bande organisée, où l'armurier est bien content d'être mis dans la boucle.
Par contre, j'en ai marre de l'argument : "c'est de la finance, pas de la morale" (Elsa Bembaron) - ou son père spirituel "on parle de capitalisme, pas de morale" (j'ai travaillé en conseil financier et en private equity). Ca fait vraiment : "t'es un enfant ou quoi ? J'ai lu Nietzsche pour les nuls, et je peux te dire qu'être un homme du XXI siècle, un vrai, ça passe déjà par savoir faire la différence entre business et morale mon gars".
Sauf que la finance, en tant qu'activité humaine, peut être soumise à des jugements moraux. Décrire le montage et décrypter la stratégie d'un magnat dans un contexte de marché particulièrement agressif, aussi intéressantes ces considérations fussent-elles, n'exonère pas d'évoquer aussi le niveau de casse sociale qu'engendrent de telles manoeuvres, inspirées seulement par l'ego d'un homme et la rapacité de ses compagnons de voyage. De son côté, la puissance publique a d'ailleurs validé les PSE et PDV déployés par SFR, étant effectivement parfaitement légaux. Qui a dit que licencier - pardon, "se séparer de salariés volontaires" - était si compliqué dans notre pays ?
Autrement dit, la question porte moins sur Drahi que sur le système qui permet à une ambition aussi dévastatrice de s'exprimer à plein tube. Malgré sa discrétion dans les médias, Drahi sera d'autant plus sous les feux des projecteurs que certains ne manqueront pas de souligner avec vice son origine ou sa nationalité pour laisser entendre que c'est le Diable incarné. Pourtant, parmi les plus grands dangers ambulants, et les moins connus du grand public, les fonds de private equity du style Blackstone, KKR, Carlyle et autres, brièvement évoqués dans la vidéo, détiennent la palme. Il n'y a qu'à voir les cannibales qui y travaillent - et je dis bien : "cannibales".
Enfin, les dernières interventions des deux journalistes, qui certes traduisent une évidence, n'en demeurent pas moins édifiantes tant elles semblent énoncées de façon naturelle...