Pourquoi la critique française a raté "Agora"
Agora, superproduction de l’espagnol Alejandro Amenabar, fut parfaitement négligé lors de sa présentation au festival de Cannes 2009, royalement méprisé par la critique internationale, et en conséquence ignoré par le public lors de sa sortie en salles en Janvier 2010. Si le large désintérêt qui accueille certaines œuvres ambitieuses est un phénomène fréquent dans l’Histoire du Cinéma, il est beaucoup moins fréquent qu’un tel accueil appuie de façon inquiétante le propos même de l’œuvre. Alors que le film sort en DVD, explications.
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En s’arrêtant sur Hypatie, et en imaginant qu'elle fut à deux doigts de décrypter le mouvement elliptique des planètes autour du Soleil,
Oula! Cette dame ne fut pas la première à décrire un système héliocentrique, puisque ce modèle existait des siècles avant elle. De plus elle n'aurait pu en déduire du mouvement elliptique, car même Copernic ne le pouvait, il fallut attendre Kepler et les progrès des techniques d'observation dans les mesures, pour le déduire, selon les fameuses lois de Kepler, qui inspirèrent ensuite Newton pour l'élaboration de la théorie de la gravité universelle.
J'apprécie régulièrement vos chroniques, comme j'en avais vu une sur "Agora", j'ai acheté, vu, visionné le DVD avant de la lire. Expérience tout à fait intéressante de se laisser guider par un critique/analyste de films pour la découverte.
Ce qui m'a dérangé le plus dans "Agora", c'est la musique. Je n'ai peut-être pas saisi les références, mais cette musique pseudo sacrée qui ressemble à de la soupe instrumentale m'a exaspéré.
Je me rappelle aussi la musique d'"Avatar" qui avait suscité en moi les mêmes réflexions. On peut être écolo, soucieux du bien commun, humaniste sans pour autant écouter de la musique de supermarché, virant hippie. On peut ajouter à cela la scène de danse de "Matrix reloaded".
Par cette intervention, je vous soumet un sujet de chronique sur la musique de film.
Faite moi découvrir encore des films.
PS : Je viens de commander "Les fils de l'homme"
Il est magnifique, tout simplement. Il y a certainement tout ce que vous y mettez, sans nul doute, mais il y a aussi, et c'est surtout ça qui m'a frappée, et que je n'avais pas vu dans l'article, le ressort de la haine des femmes, et le désir du retour d'une société masculine par les chrétiens fanatiques.
Et c'est dans ce sens là aussi qu'on fait le rapport avec les talibans.
Le choix d'Alexandrie, aussi, est très symbolique, car il y a en Egypte aujourd'hui une régression à l'oeuvre qui est terrifiante.
Dommage que les personnages soient tellement stylisés dans le symbole qu'ils en manquent un peu d'humanité, le cinéma espagnol a un côté un peu trop raide, et le film n'est pas loin de ce défaut. Mais tout le reste est tellement parfait que ça en fait un grand film.
Merci de me l'avoir fait connaître.
pourquoi tu dis que la presse est passé à côté du film ? il me semble que 19 critiques presse c'est pas mal non ?
Je fais partie des gens qui auront eu besoin de votre critique pour m'intéresser au film et le voir en DVD. J'imagine que l'expérience au cinéma doit être meilleure, mais j'ai tout de même beaucoup aimé.
Le seul aspect qui m'a franchement interloqué était ce que vous appelez le coup de stabylo. A suivre le film sous cet angle il faudrait avoir la peau très claire pour être philosophe, le cheveu plus brun pour être pragmatique et un profil de moudjahidin perse pour être fourbe et habile politicien. Certes il s'agit de chrétiens, mais ce casting est si proche de celui des aventures de Tintin ou de celles de Blake et Mortimer qu'il ne laisse pas indifférent. Comme Abenabar applique ici ce « stabylo » au développement contradictoire de la philosophie, de la recherche scientifique et de l'intégrisme religieux, je m'interroge plus avant: vise-t-il à sensibiliser le spectateur visé (occidental) au développement récent de l'intégrisme musulman, ou ne suggère-t-il pas plutôt (ou en même temps) que l'aptitude à la raison critique aurait un camp, génétique comme culturel ? Je ne sais pas trop, mais j'avoue qu'après avoir lu "Les Grecs, les Arabes et nous: Enquête sur l'islamophobie savante", ce choix de casting appliqué à l'histoire des sciences me laisse songeur.
J'ai été un petit peu décontenancé, il est vrai, au début du texte, par le propos très général concernant la grande épopée du néo-platonisme à travers les siècles, et dont les interférences avec le projet du réalisateur auraient pu être mises davantage en lumière.
Mais l'analyse de l'extrait où les deux prédicateurs rivaux s'affrontent me semblent vraiment d'une grande justesse, et le chroniqueur a su mettre en mots l'impression que je n'avais fait que ressentir à la vision de l'oeuvre, cette mobilité extrême du chrétien face au païen statufié, appuyée encore par les jeux de caméra.
A ce point de mon commentaire, j'aimerais adresser une requête à l'auteur : ne connaissant pas en effet le terme de "focale" dont il parle, je n'aurais pas dédaigné une petite note technique m'en révélant le sens. Pensez au néophytes !
Certes je pense que ce film porte - notamment - sur le cours et la vie des civilisations, leur naissance et leur chute, et sur les hommes en tant qu'ils y sont confrontés. La figure de Davus, l'esclave, me semble à cet égard importante, puis qu'elle renvoie au rôle des inégalités sociales dans ces révolutions. Mais Davus est aussi une personne qui réagit aux événements.
Bien sûr, le film raconte d'autres histoires tout aussi prenantes qui s'imbriquent avec celle, plus fondamentale et impressionnante, de la mort d'un monde : l'histoire d'une enquête passionnée autour de la révolution des étoiles, et des efforts opiniâtres déployés par Hypatie pour résoudre une énigme scientifique ; l'histoire de l'amour que plusieurs hommes lui vouent mais qui reste sans réponse.
C'est enfin une réussite éclatante de rénovation d'un genre : le péplum, qui, de Mankiewicz à Ridley Scott, en passant par Amenàbar, ne cesse de révéler ses possibilités.
Merci donc pour cette mise au point, et j'attends avec patience votre nouvelle chronique, M. Djoumi.
D'un naturel bavard à l'orale, l'écrit m'ennuie assez rapidement, surtout si c'est pour répéter les mêmes choses...
Aussi en une phrase, j'approuve de A à Z, beaucoup d'analyse similaire me sont venu à l'esprit en regardant le film.
Et je ne suis que trop d'accord sur le reste de l'article (mépris pour certains films récents, faillite de la critique etc.)
C'est tout simplement agréable et apaisant de voir que d'autres personnes partagent votre culture et votre vision du monde.
Thx Rafik et bonne continuation sur ASI.
• Sur ce qu’on pourrait y « découvrir » avec ici toute la symbolique du voile :-)
Même si tendancieux (le propre d’une chronique, ce que JB s’évertue à rappeler), l’aiguillage est pertinent en venant compléter le brillant article d’Eric Nuevo – merci pour lien :-)
Très amusantes, les références aux textes des chroniques primaires dont le « sens » critique manifeste le sens unilatéral du terme « critique » qui privilégie un jugement de valeur défavorable, en s’ancrant inévitablement dans une culture « de classe »… même si pour l’article de Télérama, « apparemment, RD ne l’a pas lu entièrement » :-)
L’angle cosmogonique et cosmologique choisi par le cinéaste m’apparaît fondamentalement approprié pour mettre en scène cette « page de l’Histoire, inédite au cinéma » et de ce point de vue efficacement analysé dans cette chronique – percutante démonstration de ce choix de narration tout à fait adapté à ce projet :-)
Ce qui perce éminemment de ce dit projet ressort incontestablement d’une problématique (constante apparemment chez ce cinéaste) de « perspectives » dans tout les sens du terme et en particulier à savoir d’où l’on se situe. Assurément, on peut convenir sans conteste que « tout est question de point de vue » – ainsi faut-il pouvoir se détacher de la contingence terrestre pour embrasser un panorama cosmique :-)
Bravo au cinéaste pour sa perspicace aspiration, habilement décortiquée par RD : se situant au centre ou à la périphérie du cercle, notre « vision humaine » s’avère immanquablement « voilée » :-)
La sensibilisation par analogies et correspondances ne peut qu’être difficilement prégnante pour une société incrustée dans la pesanteur et l’engourdissement, alors que par ailleurs l’idéalisme peut également rendre aveugle « aux multiples indices » :-)
Pour ma part, je conteste que la brillante philosophe astronome soit présentée en manque de foi, bien au contraire, sa position terrestre donc force d’attraction gravitationnelle conditionnant sa croyance en voilant son regard elle ne peut que nécessairement déplorer : "L’idée de ne pas avoir de centre, elle me brise le cœur". Hypatia enseignait les sciences alors que l’hypothèse de l’héliocentrisme avancée par Aristarque de Samothrace (-220/-143) n’avait pas été retenue. Le tracé dans le bac à sable se réfère au modèle épicycloïdal augmenté d'une double excentricité que Ptolémée envisagea selon la théorie des épicycles d’Hipparque, dit le Rhodien.
Par contre, totalement d’accord que le réalisateur donne à voir « le processus de décadence inhérent à toutes les grandes civilisations en fin de course » et que l’analogie religieuse devrait être frappante (je conviens qu’elle m’a particulièrement sautée aux yeux). Eric Nuevo évoque un Alexandrin qui remarque qu'il n’avait pas conscience qu'il y eût autant de chrétiens dans la cité.
« Au-delà du duel théologique, …, se trame un autre conflit. » – jolie expression, merci :-)
Ce qui manque à l’affiche française ressort primordialement de la séparation indiquée par l’étoffe qui recouvre l’épaule gauche du personnage, le tissu sombre marquant visuellement le pan obscurité de l’agora en diagonale du pan luminosité :-)
Avec la trajectoire d’une figure lumineuse (superbe prestation de l’actrice principale), le film illustre la déchéance de l'agora, remplacée par l’église (mot français venant du mot grec ekklèsia, lequel ne désigne pas du tout le même lieu), le cinéaste mettant en scène ce renversement.
La chaste philosophe enseignait, entre autres, la philosophie de Plotin dont la pratique philosophique se trouvait soutenue par des exercices spirituels, s’agissant d’assurer le passage de l’intelligence à l’Un :-)
J'aime votre chronique, à chaque fois j'attends avec impatience le fameux lundi sur deux. A chaque fois c'est agréable de vous lire, et souvent je vous suis complètement sur ce que vous dites. Alors lundi dernier, quand j'ai vu que votre chronique parlait d'un film dont je n'avais pas entendu parler, je me suis dit qu'avant de vous lire, il me fallait voir le film. Vous m'avez donné envie de le voir, parce que je vous faisais suffisamment confiance : un film qui mérite une de vos chroniques ne doit pas être mauvais.
Donc je l'ai vu, avant de vous lire, et merci. J'ai aimé. Beaucoup. Je ne saurai dire quand, où, pourquoi, mais ce film que d'aucuns considèrent comme banal m'a touché profondément. C'est émotionnel, ça ne s'explique pas, c'est comme ça.
Mon commentaire n'apporte sans doute rien au débat, mais j'avais besoin de le dire.
Merci Rafik de chroniquer sur @si, et vivement le lundi suivant.
(PS : alors bien sûr, bravo à Daniel Schneidermann pour ce choix. Donner une chronique à Rafik Djoumi me fait encore plus aimer @si)
Merci de me faire prendre conscience d'être passée à côté de tant d'autres choses.
Vous avez fait une allusion au parallélisme entre "Le Labyrinthe de Pan", "Babel" et "Les Fils de l'Homme" (je vais aller creuser çà d'ailleurs) qui m'a ramené à une réflexion que je m'étais faite en voyant "Démineurs", film dans lequel j'ai trouvé quelques correspondances avec "Avatar" (je sens que j'ai déclenché le détonateur du Yannick G, mais je vais faire comme si je n'avais rien vu...), principalement concernant les héros des deux films et la question de leurs (quête d') identités.
Tous les deux arrivent sur une autre planète (l'Irak/Pandora), où ils ne peuvent se déplacer que dans le scaphandre adéquat (le suit de démineur/l'avatar), finissent par se sentir des étrangers dans leurs mondes d'origine (la confusion de Jake pendant son initiation/les scènes des céréales et de la cuisine dans "Démineurs"), et ne se sentent vivants que dans cet environnement hostile qu'ils finissent par faire leur (Jake en se transférant dans le corps de son avatar/James en obtenant sa dose d'adrénaline). Et le dernier plan de "Démineurs", avec la passerelle de l'hélico qui s'ouvre et laisser entrer la vague de châleur dans l'appareil m'a directement renvoyée à l'arrivée de la navette sur Pandora.
Après, je suis peut être à côté de la plaque...
http://www.telerama.fr/cinema/films/agora,399895,critique.php
J'ai noté quelques fautes, cependant, quoiqu'excusables:
sa sé passé ya tro lontant koi)
Serait plutôt écrit: "sa c passer ya tro lontan[s]t[/s] koi lol".
Dit en d'autres termes, que cache en vérité le fameux voile d'Isis qu'Hypatie n'a pas réussi à découvrir ?
Cool, ça, c'est de la critique télévisée. Un anarchiste de droite, vous voulez dire... un républicain ?
Quoi qu'il en soit, la seule question qui compte, c'est de savoir si cela transparaît dans l'œuvre télévisée de HBO, cette chaîne câblée tellement fasciste qu'elle a produite au hasard Oz (série carcérale loin d'être manichéenne) et The Wire (de David Simon loin d'avoir des sympathies pour le K.K.K., si j'en présume par sa série et la nouvelle qu'il réalise à la Nouvelle Orléans).
"Il faut dire qu’en l’absence d’autres films abordant cette page d’Histoire, le marketing se sentit lui aussi obligé d’aller chatouiller l’évocation péplumesque romaine, comme en témoigne la terrible affiche française ci-dessous."
Soulignons bien le mot marketing, c'est à dire le diffuseur, auquel devons-nous le rappeler, les critiques ne sont aucunement affiliés. Autrement dit, amalgamer rapidement certaines critiques avec le choix malheureux du distributeur n'est qu'un procédé grossier pour accentuer le discrédit.
"Affiche espagnole: une femme digne, au visage lumineux, sépare la lumière de l’orage, surplombant une foule hostile qui menace une architecture ordonnée.
Affiche française: une hystérique, tâchée de sang menstruel, tente de fuir un beau bordel enflammé, sur fond de parchemin froissé et jauni "
Pour le sang menstruel, il est peut-être dans le film, mais l'affiche ne l'évoque aucunement, puisque jaillissant sur les bras, sur le torse et sur la cuisse. Idem avec la notion d'hystérie, ce n'est pas parce qu'une femme panique qu'elle est hystérique, sauf à reproduire des clichées sexistes.
Deux éléments qui soulignent que Rafik force largement le trait, en déformant et en rapprochant ce qui n'a pas à l'être (orientation politique d'un producteur de série et la série elle-même, sang de l'affiche et sang menstruel) pour soutenir son propos contre une certaine critique hexagonale.
En ce qui me concerne, les deux affiches sont ratés, elles le sont parce que le titre du film est raté, le film, comme le cercle dont on ne sort pas, tournant, d'après ce que j'en ai compris et constaté, autour de la figure d'Hypatie dont le réalisateur n'a pas eu le courage de faire le titre de son film, lui préférant le terme générique, collectif, donc anonyme, mais au combien plus évocateur du péplum, d'Agora (oui, cela veut dire espace aussi et patati et patata, le réalisateur a voulu donner une vision depuis l'espace et machin truc. Alors qu'au final, sans le personnage central de Rachel Weisz, le film, comme l'affiche d'un côté comme de l'autre des Pyrénées, s'effondre semble-t-il.).
yG
J'ai vu le film et j'ai été pénétré par sa dimension scientifique. J'ai cependant regretté son manque d'élan et son caractère souvent abscons. Cependant, c'est bien un morceau d'intelligence et certaines paroles/dialogues sonnent justes.
Je me suis beaucoup amusé à voir les chrétiens d'aujourd'hui essayer de défendre ceux d'hier présentés dans le film en ne voyant pas le parallèle avec les musulmans d'aujourd'hui (certainement décontenancés par le fait que pour une fois, ils tiennent le "mauvais" rôle dans un péplum :mrgreen: ).
J'ai aussi beaucoup aimé la mise en lumière des travaux de Kepler, scientifique allemand ignoré par le commun des mortels français au profit de son homologue italien Galilée.
J'ai été également surpris de voir que ce film été passé complétement inaperçu par la plupart des gens, y compris dans le milieu scientifique et astronomique dans lequel j'évolue.
Merci encore pour cette chronique ;)
Stéphane
Encore une fois les rôle des femmes est réévalué dans cette épisode historique. On ne sait pas grand chose de la contribution scientifique de Hypatie (jouée par Rachel Weisz) mais Amenabar en fait une scientifique de renom.
Le film est quand-même d'un bon niveau.
On pourrait aussi parler du grand film oublié de 2008 : « Stella » de Sylvie Verheyde, bien plus intéressant que « Entre les murs » sorti la même année (ainsi que le grand oublié de 2010 : Fantastic Mr Fox).
J'essaierai de le louer quelque part. Et cela vous fera une critique de plus.
Mais en même temps, ce ne serait que ça !
Je n'ai pas pu m'empêcher en vous lisant de penser au film Cloverfield dont le parti pris est exactement contraire. C'est une façon de filmer au ras de l'individu. Mais chaque image est symbolique, et renvoie à une vision du monde post 11 septembre.
Avec cette image de la tête de la statue de la Liberté qui est propulsée à travers une rue de Manhattan, comme dans un jeu de quilles. Une image presque ludique bien qu'effrayante.
Mais une image qu'on peut aussi projeter en disant : quelque chose s'est passé à Manhattan, et notre liberté a été décapitée.
Et toujours cette certitude qu'une image au centre du monde, une figure de nature cosmogonique et féminine, est la première victime des évènements. Une incarnation de la souveraineté et de la légitimité. Une figure qui semble intangible et immortelle et qui est détruite en un rien de temps.
Et une dernière question, encore plus prégnante : est-ce que les germes de la destruction ne sont pas en nous ? A l'intérieur même de nos sociétés dévastées et aveugles ?
Le cinéma interpelle notre passé, notre avenir, et notre présent. Il le fait de façon métaphorique, mais il parle de la fin d'un monde. Jamais il ne l'a fait autant qu'aujourd'hui.
Cela peut vouloir dire que nous sommes prêts à accepter un monde nouveau, de la destruction créatrice.
Mais cela peut aussi vouloir dire que nous disparaîtrons, et que nous le savons.
En moins d’une minute, les enjeux scientifiques, philosophiques, politiques et humains de son film ? Raccourci saisissant, c’est vrai ! Mais quand on n’a pas grand chose à dire c’est vite dit, forcément !
Et le cinéaste connaît les focales courtes et longues, leurs effets respectifs… Les contre-plongées aussi ? Je le crois pas, quand j’étais jeune, enfin dans la préhistoire je veux dire, on n’avait aucune idée de tous ces trucs compliqués. Les progrès, c’est quand même stupéfiant !
En fait “Retourner voir Avatar” me semble une suggestion pertinente… Dès l’instant où le cinoche a atteint un tel degré de perfection, grâce à l’imparable Cameron qui, après nous avoir scotchés avec “Titanic” (Leonardo DiCaprio et la bande son de Céline Dion il faut s’accrocher quand même) a tenté de nous finir avec ses ânes peints en bleu et équipés de queues… Pourquoi s’emmerder avec des trucs de seconde zone ? Restons donc dans la stratosphère que le malheureux réalisateur de ce navet dépourvu de canard aimerait rejoindre, semble-t-il, avec sa caméra pour exploration intestinale dans les clips publicitaires pour la prévention du cancer colo-rectal.
C’est fou comme il est difficile de sortir de la merde, finalement !
***
Pas adoré non plus. Sympa, oui, et bizarre qu'on en ait si peu parlé. Après, y avait pas mal d'affiches. Idem pour Prince of Persia (toutes proportions gardées : rien à voir, vraiment) : beaucoup d'affiches, mais j'en n'ai pas du tout entendu parlé.
Mais à la lecture de votre chronique, je me sens toute bête. Je suis sortir ravie d'avoir vu un film sympa, et plutôt divertissant en fait. Et ravie aussi de cette toute petite réflexion sur la religion, que j'ai lue complètement n'importe comment (votre argumentation est édifiante), mais c'est comme ça que je l'ai lue ! Pour moi, une bonne critique du chrisitanisme, et donc une bonne critique de toutes les religions, qui ont en germe l'intolérance. Comme quoi, on projette ses propres idées sur un film.
Je suis restée au premier degré (je n'ai pas réfléchi des heures et des heures là-dessus). Après, j'ai pas tout à fait tort non plus ; au premier degré, il y a tout de même une opposition entre le bon sens, la science, la justice, et la croyance, la foi, l'intolérance et l'injustice (un petit peu manichéen tout de même, mais c'est un peplum, malgré tout).
Parce qu'il n'y a pas à dire, les religions polythéistes de l'Antiquité, notamment la religion grecque, sont tout de même super en phase avec la nature, le monde et son fonctionnement. Et, mine de rien, assez tolérante. J'idéalise sans doute un peu trop certains aspects de cette culture et de cette mentalité, mais je ne crois pas qu'il y ait eu de guerres de religion en Grèce (je parle de la Grèce, pas de Rome, ne vous méprenez pas). Des tas de guerre de "sous", pour savoir qui contrôlait tel sanctuaire, etc.
A lire, de Vidal Naquet : "Les Grecs croyaient-ils en leurs dieux ?". C'est une norme purement sociale, essentiellement sociale, la religion grecque. Des croyances, certes, une certaine superstition.
Mais aux origines mêmes de la religion grecque, il y a cette idée de faillibilité des dieux, parce qu'ils sont plusieurs. Ces dieux sont la nature ; on essaie de la maîtriser en les maîtrisant eux. Rien là-dedans de totalement irrationnel, indémontrable, comme on peut le trouver dans les religions monothéistes.
Ouh ! je pourrais parler des heures !
j'adore cette chronique, et j'ai énormément de chance : tout pour l'instant ne parle que de choses que j'ai vues et que j'ai globalement aimées.
Hâte d'une prochaine chronique sur ce que je ne connaîtrais point, pour avoir envie d'y courir. Et toujours aussi contente d'en apprendre plus sur quelque chose que je n'ai fait que voir, sans regarder.
Merci Rafik !
Merci pour vos réflexion et votre œil.
Je peux vous embaucher pour mes cours d'initiation à l'analyse de l'image ? J'ai besoin d'un expert ! Un petit dossier Avatar + Agora, ça m'irait bien ! Je suis prof de lettres classiques, je précise... et ce n'est pas une blague !! J'aime le cinéma et l'analyse filmique mais bon, l'iufm... enfin voilà... j'ai besoin d'une formation, une vraie !
Merci !
vous m'avez (vraiment) donné envie d'aller voir ce film.
ça faisait une paye ( jamais, quoi) que je n'avais vu un article qui associe Hermès Trimegiste à un une critique ciné. Histoire de raffraichir les neurones des crétins incapables d'autres références que le crypto facho "Rome".
Merci, merci
A voté !!
je vous trouve un peu sévère avec la critique de Télérama, car si elle pose la question que vous rapportez, c'est surtout, pour laisser entendre en quoi ce péplum n'en est pas un, la suite d'ailleurs en fait foi à mon humble avis
"Il faut dire que le héros de cette vaste fresque n'est pas un guerrier bas du front, mais une femme, la belle Hypatie, philosophe, astronome, mathématicienne, qui a vraiment existé. Alejandro Amenábar (Mar adentro, Les Autres) en fait le symbole d'une époque charnière. Celle où le christianisme dogmatique est en passe de dominer le monde occidental. Et où l'obscurantisme menace la science et la raison. Toute ressemblance ou similitude avec le monde d'aujourd'hui est évidemment volontaire et délibérée. Amenábar use du péplum comme d'un prétexte pour condamner avec virulence tous les fanatismes. Ces chrétiens, qui, en brûlant les livres, en saccageant la bibliothèque, commettent un véritable viol de la culture, rappellent des ravages plus contemporains, commis au nom de la religion. Le film offre d'ailleurs une représentation très « moderne » de la violence : les corps s'enchevêtrent, les chairs cèdent, dans un affolant effet de réel, façon reportage."
je ne pense pas que cela rende parfaitement justice au film, mais la seule mention de la question, lui fait dire il me semble, ce qu'elle ne dit pas...
cordialement
JP
Un peu de culture n'a jamais fait de mal !
Il présentait la fin tragique de cette femme, aussi remarquable qu'inconnue, et la destruction de la bibliothèque d'Alexandrie (évènement également peu enseigné), comme la victoire de l'obscurantisme sur la science.
Sagan savait de quoi il parlait : il dû combattre les conservateurs US qui s'élevaient contre "l'image dégradante de l'humanité" que véhiculait la plaque d'or représentant un homme et une femme nus. La plaque fut finalement retouchée : on effaça un petit trait vertical sur le pubis de la femme...
Je ne suis pas qualifié pour juger des mérites cinématographiques de ce film, mais il me semble que le rappel de cette période d'étouffement de la raison au nom de la lutte du bien contre le mal n'est, hélas, pas inutile.
Les contemporains de Clovis étaient-ils conscients d'entrer dans un millénaire d'assoupissement de la pensée scientifique ?
Et que penser des nombreux critiques qui snobent un film dès qu'il cherche à être autre chose que du pur entertainment ?
Bref il n'est parfois pas inutile de filmer l'Histoire avec une caméra embarquée sur un satellite.
Maintenant, après voir lu ça, je pense que je chercherai à réfléchir en le regardant, à analyser les plans, les images, les motifs des fauteuils pour donner sens à tout ça au lieu de me laisse porter par le souffle du film.
PS : Didier Péron, Cécile Mury, François Bégaudeau, Marie Sauvion, Thierry Méranger, Julien Abadie, Vincent Ostria, Thomas Sotinel, sont priés de venir chercher leurs beaux costards sur mesure sur le site d'ASI :-D
PSS : quand je lis :""On a juste envie de lui gueuler la solution à l'écran, tellement c'est évident. Et on se demande comment une femme censée être un intelligence supérieure de son époque ne voit pas cette évidence"…. Bah ca me laisse pantois !! C'est vrai quoi, en 2 ou 3 clics sur wikipédia, cette dinde d'Hypatie aurait trouvé la réponse de suite ! C'est à se demander pourquoi on a pas découvert l'évolution darwinienne dès l'antiquité, tellement c'était évident ! Sont cons les gens d’avant….
Kieslowski saturait ses œuvres de métaphores plus grossières les unes que les autres, tellement téléphonées qu'on y voyait la patte du démiurge réalisateur (qu'il était par sa pratique et son regard d'ailleurs) sur l'écran.
Bref, tout cela pour dire qu'à la fin, il n'en reste pas moins que tout cela se résume à "Attention les barbares brûles les livres et à l'analogie historique appuyée, hier, c'était des fanatiques chrétiens et aujourd'hui des fanatiques musulmans".
Ok, c'est noté, and so what ?
C'est la faute aux élites qui n'écoutent pas les barbares ?
Et si elles les écoutent que doivent-elles faire face à eux, se soumettre ou leur rentrer dans le lard ?
Amenabar, je n'ai pas saisi à vous lire, propose-t-il une (des) solution(s), ou se contente-t-il de faire des analogies, ce que l'histoire permet toujours, et de rester un formaliste ?
yG
ps: Pour le succès en Espagne, une hypothèse que vous n'avez pas évoqué, je crois, à moins que je sois passé à côté, le stupide nationalisme/patriotisme, le réalisateur étant espagnol. C'est moins intellectuel que la notion de renversement chronologiques des élites que vous soulignez, mais pas moins crédible.
Si je peux toutefois me permettre de chipoter sur un tout petit détail ? Je ne crois pas qu'il soit tout à fait juste de dire que la civilisation égyptienne a "jeté les bases" du monothéisme durant les quelques années du règne d'Akhénaton. En effet, si ce pharaon avait bien promu le petit dieu Aton au rang suprême, il ne faut pas oublier qu'il existait encore à ce moment-là un autre dieu, Akhénaton lui-même. On peut d'ailleurs remarquer sur cette image que le trône de Néfertiti (à droite) est orné du symbole du papyrus et du lotus (les deux plantes représentant les deux terres, la Haute Égypte et la Basse Égypte) qui en font donc un trône royal. Or, si la reine est le roi, le roi ne peut qu'être un dieu, non ?
Quoi qu'il en soit, je trouve l'analyse très convaincante !
On peut y voir l'incapacité d'un camp comme l'autre finalement à préserver des connaissances ... et leur destruction qui pourrait si ça se trouve avoir donné un retard incroyable à l'humanité sur la compréhension de sa place dans l'univers ... et dans son environnement.
A mon avis, ni l'un ni l'autre.
C'est surtout un film qui se voudrait visionnaire, mais qui ne l'est pas. Et qui se voudrait un péplum intelligent et qui ne l'est pas non plus.
Peut-être que j'attendais trop de la part d'Amenabar, mais je suis sorti de la salle avec une impression mitigée, soit de trop, soit de trop peu. Toutes les scènes "d'envolées" cosmiques, par exemple, sont superbes; mais comme elles viennent en contrepoint à une histoire qui ne raconte pas grand-chose (ou qui raconte mal les choses, ce qui revient au même), elles tombent à plat. Il est louable d'avoir voulu parler de féminisme, d'atronomie, de science, de guerres de religions et de plein d'autres choses dans un peplum. Mais il aurait fallu savoir doser tout ça.
Tout le film est à l'image de ces scènes où Weisz trace des cercles dans le sable et les regarde d'un air pénétré. On a juste envie de lui gueuler la solution à l'écran, tellement c'est évident. Et on se demande comment une femme censée être un intelligence supérieure de son époque ne voit pas cette évidence (même empêtrée dans ses carcans et ses croyances - puisque justement, Amenabar se tue à nous démontrer par ailleurs qu'elle sait très bien s'en débarrasser).
C'est un film pataud, qui ne sait jamais sur quel pied danser; et qui hésite constament entre sa recherche de spectacle et son désir d'insuffler de l'intelligence à ce spectacle.
A mon avis, c'est là qu'il faut rechercher la réponse à la question "pourquoi la critique française a raté Agora". Tout simplement parce que, malgré les grands airs qu'il se donne, c'est un film comme les autres qui passe aisément sous le radar de la critique.
(et je profite de ce post pour souhaiter la bienvenue à Rafik, que je suis suis depuis bien longtemps chez Mad Movies et consorts - et dont l'arrivée par ici me réjouit.)
Il est vrai qu'il ne me semble pas adapté à l'air du temps ...