Sarkozy, mouillé dans Karachi ? Le Monde et Mediapart divergent (encore)
Sarkozy était-il impliqué dans l'affaire Karachi ? Cette question revient depuis que la justice s'est emparée du dossier. Les juges d'instruction Renaud Van Ruymbeke et Roger Le Loire viennent de rendre une ordonnance d'incompétence de 168 pages dans laquelle ils se dessaissisent du dossier et demandent le renvoi d'Edouard Balladur (Premier ministre à l'époque des faits) et de François Léotard (ministre de la Défense) devant la Cour de Justice de la République. Nicolas Sarkozy (ministre du Budget à l'époque), lui, n'est pas renvoyé. Dans les médias, les interprétations divergent. Et notamment, une nouvelle fois, entre Le Monde et Mediapart.
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Derniers commentaires
S'il désapprouvait ce système de financement occulte, rien ne l'empêchait de remettre sa démission or il ne l'a pas fait. A minima sa responsabilité politique est engagée
Cet article m'impute des propos que je n'ai pas tenus. J'espère qu'ils seront rectifiés après ce message - le journaliste est subitement injoignable.
Contrairement à ce qui est indiqué dans cet article, ce ne sont pas les journalistes de Mediapart qui estiment que Sarkozy doit être entendu comme témoin assisté par la CJR, mais ce sont les juges eux-mêmes ! C'est ce qu'ils ont écrit noir sur blanc dans une ordonnance, datée du 6 février (comme cela est mentionné dans Mediapart) : « Il apparît au vu des éléments recueillis par l'information qu'il appartient à la Cour de Justice de la République d'entendre M. Sarkozy sous le statut de témoin assisté sur son rôle es-qualité de Ministre du Budget ».
Voilà ce qui a été écrit dans Mediapart : « Le statut de témoin assisté est une bizarrerie du droit français, qui consacre le fait qu'il existe des indices contre quelqu'un dans un dossier judiciaire, mais que ceux-ci ne sont pas suffisamment "graves et concordants" pour justifier une mise en examen. »
Ensuite, je n'ai jamais dit que Sawari II fut le plus petit contrat. C'était le plus gros ! J'ai expliqué que ce fut celui pour lequel le volume de commissions effectivement versées au réseau Takieddine était le plus faible, par rapport aux autres, notamment Agosta et Mouette. Cela n'a rien à voir. L'enveloppe de commissions promises était la plus importante, mais l'oukaze chiraquienne de 1996 a empêché le versement des commissions — ce qui ne fut pas le cas dans les autres contrats puisque les paiements ont été accélérs de manière dérogatoire. La lettre citée par Le Monde ne parle que de Sawari II. Nous ne l'avons pas citée parce que ce n'est pas ce contrat qui est susceptible d'impliquer Sarkozy.
Je n'ai jamais dit que Sarkozy avait validé la création de Heine, société écran au Luxembourg de la Direction des constructions navales (DCN), contre l'avis de son administration dans le marché des sous-marins Agosta. Ce que Sarkozy a fait contre l'avis de sa propre administration, c'est l'autorisation du paiement anticipé de commissions occultes au réseau Takieddine dans le cadre du contrat Mouette (Arabie saoudite). Témoignages et documents le prouvent.
Comme cela est écrit dans Mediapart, bien entendu, que Matignon était à la manœuvre. Mais il faut être aveugle pour ne pas voir que Sarkozy a été un pion dans un vaste système de détournement d'argent sur les ventes d'armes du gouvernement Balladur. Est-ce que cela relève d'un délit pénal ? Ce n'est pas à moi de le dire, mais aux juges. Mais contrairement à ce qu'il a toujours affirmé, oui, Nicolas Sarkozy a eu à connaître des dessous financiers des contrats en cause.
Quand à l'affaire Bettencourt, ce qu'écrit @si est absurde et faux. Mediapart n'a jamais affirmé que l'abus de faiblesse était constitué contre Sarkozy. En revanche, les juges ont écrit dans leur ordonnance du 7 octobre ceci : « Il résulte de l’information que la situation de faiblesse apparente de Liliane Bettencourt était parfaitement connue de Nicolas Sarkozy, lorsque celui-ci s’est présenté à deux reprises à son domicile les 10 et 24 février 2007. Il existe également des charges suffisantes à l’encontre de Nicolas Sarkozy d’avoir le 24 février 2007 sollicité un soutien financier illégal d’André et Liliane Bettencourt de nature à entraîner pour eux des conséquences gravement préjudiciables. En revanche, il n’est pas démontré de lien direct entre ce comportement abusif de Nicolas Sarkozy et l’acte préjudiciable consenti par Liliane Bettencourt de mises à dispositions d’espèces. »
Voilà: pas d'abus de faiblesse, mais un financement politique illicite, écrivent les juges. Pourquoi n'a-t-il pas été poursuivi ? Parce qu'il était prescrit... Ce sont les faits. Rien qu'eux.
(J'ai croisé la route d'un policier vraiment sympa à qui j'ai dit "dingue ce que vous ressemblez à Fabrice Arfi". Trop déçue, il n'a pas compris l'ampleur du compliment, je crois qu'il a imaginé que j'évoquais un personnage de dessin animé. Authentique.)
D'abord, je n'étais pas subitement injoignable pour me dérober contrairement à ce que tu sous-entend, j'étais pris par d'autres choses.
Quelques éléments de réponses maintenant.
- Je n'écris pas que ce sont les journalistes de Mediapart qui pensent que l'audition comme témoin assisté est inévitable. Tout le paragraphe sur ce passage est basé sur ce que vous expliquez de l'ordonnance du juge. Mais puisque cela semble incompréhensible, je l'ai rajouté une troisième fois.
- Sur le contrat Sawari II j'ai corrigé ta citation. En effet, c'était le plus gros contrat, mais vu qu'il a été stoppé par Chirac comme tu le dis, les commissions ont été minimes ( 6 millions de francs si je ne me trompe pas) et donc les plus petites. C'est dans ce sens là que j'ai écris plus petit. Ce n'était pas clair. J'ai donc corrigé. Don't acte sur ce point.
- Enfin, loin de moi l'idée de dire si oui ou non "Sarkozy a été un pion dans ce système" comme tu l'écris dans ce forum. Je me contente de rapporter les divergences d'approche réelles entre Le Monde et Mediapart.
Par ailleurs, comme tu l'écris toi même dans ce message sur le forum et sur Mediapart, "le statut de témoin assisté est une bizarrerie du droit français, qui consacre le fait qu'il existe des indices contre quelqu'un dans un dossier judiciaire, mais que ceux-ci ne sont pas suffisamment "graves et concordants" pour justifier une mise en examen".
. Il existe donc des indices contre Nicolas Sarkozy, ils ne sont pas suffisamment "graves et concordants" pour que les juges aient décidés de le mettre en examen. C'est bien sur ce point que Le Monde et Mediapart présentent les choses de manière différentes. Mon rôle ne se borne, encore une fois, qu'à le signaler et à tenter de comprendre pourquoi.
Voilà, bien à toi,
David Medioni
Les juges n'ont pas décidé de ne pas mettre Sarkozy en examen, comme tu l'écris. Ils ne le peuvent tout simplement pas. Ils auraient pu l'entendre comme témoin. Mais comme ils ont trop d'indices contre lui, ils ne le peuvent pas non plus. Le droit le leur interdit. C'est pourquoi ils réclament la convocation de Sarkozy comme témoin assisté devant la CJR, qui, seule, décidera. Comme elle décidera de la mise en examen ou non de Balladur et Léotard. Jamais, nous n'avons dit que Sarko devait être mis en examen, mais que, contrairement à ce qu'il a toujours dit, il est bien impliqué à titre personnel dans le dossier. Ce que démontre de façon incontestbale l'ordonnance des magistrats.
Ma divergence de fond avec Le Monde réside dans la judiciarisation permanente des esprits. Comme si le monde était divisé en deux parties entre légal et illégal. L'interprétation pénale d'une information journalistique peut varier selon plein de critères d'appréciation différents (vice de forme, prescription, élément intentionnel insuffisant...). Cela ne change rien à l'information.
De ce point de vue, l'affaire Bettencourt est un cas d'école. Quand Sarkozy a obtenu un non-lieu sur l'abus de faiblesse, tout le monde a dit - et lui le premier : "Il est blanchi". C'est plus compliqué que cela, comme expliqué dans mon précédent commentaire. Pour les juges, les charges sont suffisantes pour qualifier un délit de financement illicite. Le problème ? Il est prescrit. Et l'abus de faiblesse, lui, n'était pas constitué, selon les magistrats. Donc, au final, pas de poursuites pénales. Est-ce que pour autant les faits journalistiques révélés sur le financement de la campagne étaient faux ? Non. C'est pourquoi ce que l'on appelle le "journalisme de PV" n'est vraiment pas mon ami. Non pas qu'il n'y ait pas de choses intéressantes dans des procès-verbaux, mais le traitement journalistique des affaires ne peut pas, à mon sens, être lu par ce seul prisme.
Bien à toi, bien à vous tous.
Merci...