Après notre série d'été sur l'effondrement en 2018, cette année, Arrêt sur images a choisi de revenir sur le sujet. Pour faire face à la crise climatique, à la disparition de la biodiversité, en somme au désastre environnemental qui frappe déjà notre planète et les êtres humains qui vivent dessus, une solution est avancée. Et elle prend de plus en plus de place dans les médias : la décroissance. Ce concept, ou ce projet politique, a fait une nouvelle percée en 2021, lors de la primaire écologiste. Il était alors porté par la candidate Delphine Batho, favorable à une réduction globale de la production et de la consommation, afin de respecter les limites planétaires en matière d'environnement, tout en garantissant une plus grande justice sociale. Mais la décroissance est-elle un projet politique viable ? Ou est-elle un tabou médiatico-politique à lever ?
C'est la question qu'on pose justement à Delphine Batho, députée écologiste Nupes des Deux-Sèvres, ancienne ministre de l'écologie sous François Hollande, et ancienne candidate en 2021 à la primaire écologiste. Face à elle, David Cayla, économiste, membre des Économistes atterrés, et critique du concept de décroissance. En plateau, un débat dense à propos de ce que revêt politiquement le projet de décroissance, et ses implications tant conceptuelles que pratiques.
Agitation ou croissance ?
L'économiste Timothée Parrique s'est imposé ces derniers mois comme une des figures majeures de la décroissance, notamment grâce au succès de son livre Ralentir ou périr (Seuil, 2022). Chez Blast, il disait préférer parler "d'agitation" que de "croissance", critiquant notamment la notion de PIB, qui selon lui n'est pas adaptée pour comprendre le monde. Si David Cayla le rejoint sur les limites du PIB, il défend l'importance de cet indicateur. Pour lui, ne plus le prendre en compte serait une erreur : "Ne plus regarder quelque chose, ce n'est pas être plus éclairé. C'est se donner un point aveugle."
Décroissance et démocratie
Dans sa critique des décroissants, David Cayla perçoit souvent une forme d'hypocrisie : ils veulent moins de consommation et de production, mais n'assument pas les contraintes qui pèseraient en conséquence sur les populations. Batho, elle, assume sur notre plateau. Mais elle refuse le terme de "contrainte", car selon elle, "il ne peut y avoir de politique de décroissance qui ne soit pas choisie démocratiquement". De plus, pour elle, la contrainte, "c'est le mur qu'on est en train de se prendre", avec les catastrophes climatiques qui s'enchainent et s'aggravent. Mais pour Cayla, vouloir diminuer production et consommation, c'est exactement ce que revêt l'austérité économique. Pas du tout, et même au contraire pour Batho : "C'est le prix pour l'obsession de la croissance, l'austérité."
Pour aller plus loin
- Timothée Parrique développe ses thèses et travaux chez Blast.
- Dans la revue Le temps des ruptures, David Cayla questionne le concept de décroissance, développé par Parrique.
- Sur son blog, Parrique répond à Cayla, en affirmant qu'il faut "décroire pour décroître".
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