Chut ! Canal+ va en correctionnelle
Admettons qu'il y existe une grande chaîne de télévision privée, diffusant un talk show où accourt ventre à terre tout le personnel politique du pays, et une émission de marionnettes, également très regardée, et fort influente. Imaginons maintenant que l'auteur de ces marionnettes soit l'objet d'une tentative de déstabilisation, ourdie par...les services de sécurité de sa propre chaîne. Son téléphone est écouté. On envisage de piéger son scooter avec de la cocaïne, pour le faire "tomber" pour trafic de drogue. On envisage de lui faire donner une sévère bastonnade. Le PDG de la chaîne est (au minimum) au courant de tous ces projets. Après une longue enquête judiciaire, ce PDG est renvoyé en correctionnelle.
Si ce pays (imaginaire) est doté d'une presse libre, on peut facilement supposer que l'affaire fera la "Une" de cette presse, plusieurs jours de suite. Le PDG en question ne pourra plus paraître en public, sans être soumis à une rafale de questions sur son implication dans le complot contre le chansonnier. Que saviez-vous ? Qu'avez-vous ordonné ? Qu'avez-vous empêché ? Des questions normales de journalistes libres. Pas forcément parce que la presse aimerait particulièrement la victime de ces manigances, ni même par vertu, et évidemment en gardant à l'esprit la présomption d'innocence du PDG, mais parce que l'information est simplement...intéressante, en raison de la notoriété et du pouvoir de ses protagonistes.
Parfois, affleure une explication à cet inexplicable silence. Par exemple, un grand hebdomadaire, le Nouvel Obs, est dirigé par M. Denis Olivennes, ancien président de Canal+, à l'époque où y sévissaient les écouteurs de paroliers, et les piégeurs de scooter. On comprend qu'il ne pousse pas ses troupes à l'investigation. Mais ailleurs ? C'est un des nombreux mystères de la presse libre.
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