Des bulles, et de l'auto-aveuglement
que la suite occupée par Nicolas Sarkozy, maître du monde, dans son palace cannois, aurait coûté 35 000 euros...la nuit. Immondes insulaires. Heureusement, le chargé de com de Sarkozy, Franck Louvrier, s'est empressé de rectifier auprès de l'accrédité du Monde: ce n'est pas 35 000 euros. C'est dix fois moins, a-t-il minimisé, au soulagement général. Soit la très modique somme de 3500 euros la nuit. Ouf ! On respire ! Les finances du pays sont bien gardées. On est reconnaissant au président, à la veille de l'annonce d'un nouveau plan de rigueur, d'avoir pensé à prendre sa part du fardeau général (car "des suites existent au prix de 35 000 euros" précise l'homme de l'Elysée, pour faire bien mesurer l'ampleur du sacrifice présidentiel). Pour l'instant, cette intéressante enquête a peu transpiré dans les medias "mainstream".
Par exemple, Jean-Michel Aphatie, qui recevait sur RTL Alain Juppé, ministre des Affaires Etrangères, ne lui a pas posé la question, pas plus qu'il ne l'a interrogé sur le prix de sa propre chambre cannoise. Pas davantage qu'il n'avait posé la question, la veille, au conseiller présidentiel Guaino, qu'il recevait sur Canal+. Et comme c'est dommage: Aphatie n'aura pas d'occasion de se rattraper, puisqu'il n'officie "que" sur ces deux modestes médias. Et nulle part ailleurs, comme il l'a bruyamment rappelé dans un savoureux post d'insultes au journal Le Monde, qui a eu l'outrecuidance de le classer parmi les cumulards des médias. Cumulard, Aphatie ? Mais où ont-ils la tête, au Monde ? Qu'on se le dise, il n'officie pas "sur TF1, France 2, France 3, France 5, M6, France Inter, France Info, France Culture, ni dans aucun quotidien français ni dans aucun hebdomadaire, ni dans aucun mensuel, ni dans aucun trimestriel". Mais, à propos du nécessaire débat sur le cumul dans les médias, ou sur le prix des nuitées cannoises, il reste à Aphatie une chance de se rattraper, par exemple dans le débat haletant qui l'oppose chaque semaine à Alain Duhamel sur RTL.
Ni Aphatie, ni Franck Louvrier, conseiller de Sarkozy, ne voient manifestement la pertinence des problèmes soulevés par les questions qui leur sont posées. Ces deux exemples me rappellent l'affaire Busnel-de Vigan, dont nous traitions ici la semaine dernière. Si François Busnel est incontestablement plus courtois qu'Aphatie, lui non plus ne voyait pas le problème, consistant à recevoir dans son émission littéraire de France 5 sa compagne écrivaine Delphine de Vigan, et à la couvrir d'éloges, sans prévenir les télespectateurs du lien qui les unissait. Le point commun de ces trois histoires, de nature apparemment différente ? Trois formes d'inconscience. Ou comment la vie au coeur d'une bulle peut conduire à une forme aigüe d'auto-aveuglement.
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