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Le "tribalisme" en Guinée : la loupe et les pincettes
L'Afrique victime de ses "rivalités ethniques ancestrales" : l'explication a refait surface à l'occasion de l'élection présidentielle en Guinée et des violences qui l'ont suivie. Mais les pratiques journalistiques varient. Si certains médias choisissent de braquer leur loupe sur les explications ethniques, d'autres les prennent avec des pincettes.
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Derniers commentaires
article très très intéressant, on est content d'être abonné dans ces cas-là. et d'avoir un joli forum pour y exposer ses réflexions.
je suis en train de lire, de pierre clastres, la société contre l'état, dont je vais copier un petit bout de la 4ème de couverture :
"la division majeure de la société, celle qui fonde toutes les autres, y compris sans doute la division du travail, c'est la nouvelle disposition verticale entre la base et le sommet, c'est la grande coupure politique entre détenteurs de la force, qu'elle soit guerrière ou religieuse, et assujettis à cette force. la relation politique de pouvoir précède et fonde la relation économique d'exploitation. avant d'être économique, l'aliénation est politique, le pouvoir est avant le travail, l'économique est une dérive du politique, l'émergence de l'Etat détermine l'apparition des classes."
je pense que c'est une réflexion qui mérite d'être "travaillée" en regard des situations de conflit en afrique. elle permet à la fois de penser la situation coloniale, mais également les situations diversifiées du post colonialisme.
que les conflits ne soient qu'ethniques, c'est une paresse de la pensée de le croire. mais que rien d'ethnique n'apparaisse dans les conflits, je pense que c'est une erreur. les conflits politiques ont une dimension ethnique, de même que religieuse, linguistique, etc. il suffit de regarder autour de nous, notre histoire européenne, pour s'en convaincre. pour qui a parcouru la yougoslavie du temps de cette fédération, se réjouissant comme je l'ai fait de cette "fluidité" justement ethnique, religieuse, linguistique (je pense en particulier aux mariages inter-communautaires, l'échange de femmes étant à la base de la structuration des sociétés - mariages impliquant justement un brassage et religieux, et ethnique, et linguistique), la guerre en yougoslavie et son émiettement actuel autour d'"états" dont les communautés sont homogènes et voulues comme telles, bref, cette transformation laisse rêveur.
comme je ne suis pas raciste, je n'ai pas de raison de penser qu'il puisse en être autrement sur le continent africain. que l'ethnique ne soit pas une cause première des conflits,dans la mesure où on admet qu'ils sont politiques, j'en conviens. que par contre cela puisse devenir un aliment indispensable au feu qui alimente les conflits, ça, jusqu'à preuve du contraire, j'en suis persuadée.
je suis en train de lire, de pierre clastres, la société contre l'état, dont je vais copier un petit bout de la 4ème de couverture :
"la division majeure de la société, celle qui fonde toutes les autres, y compris sans doute la division du travail, c'est la nouvelle disposition verticale entre la base et le sommet, c'est la grande coupure politique entre détenteurs de la force, qu'elle soit guerrière ou religieuse, et assujettis à cette force. la relation politique de pouvoir précède et fonde la relation économique d'exploitation. avant d'être économique, l'aliénation est politique, le pouvoir est avant le travail, l'économique est une dérive du politique, l'émergence de l'Etat détermine l'apparition des classes."
je pense que c'est une réflexion qui mérite d'être "travaillée" en regard des situations de conflit en afrique. elle permet à la fois de penser la situation coloniale, mais également les situations diversifiées du post colonialisme.
que les conflits ne soient qu'ethniques, c'est une paresse de la pensée de le croire. mais que rien d'ethnique n'apparaisse dans les conflits, je pense que c'est une erreur. les conflits politiques ont une dimension ethnique, de même que religieuse, linguistique, etc. il suffit de regarder autour de nous, notre histoire européenne, pour s'en convaincre. pour qui a parcouru la yougoslavie du temps de cette fédération, se réjouissant comme je l'ai fait de cette "fluidité" justement ethnique, religieuse, linguistique (je pense en particulier aux mariages inter-communautaires, l'échange de femmes étant à la base de la structuration des sociétés - mariages impliquant justement un brassage et religieux, et ethnique, et linguistique), la guerre en yougoslavie et son émiettement actuel autour d'"états" dont les communautés sont homogènes et voulues comme telles, bref, cette transformation laisse rêveur.
comme je ne suis pas raciste, je n'ai pas de raison de penser qu'il puisse en être autrement sur le continent africain. que l'ethnique ne soit pas une cause première des conflits,dans la mesure où on admet qu'ils sont politiques, j'en conviens. que par contre cela puisse devenir un aliment indispensable au feu qui alimente les conflits, ça, jusqu'à preuve du contraire, j'en suis persuadée.
Merci, ravie de relire un article de Justine, surtout de cette qualité. Et un petit retour sur les anciens débats des années 1980-90. Vraiment bravo !
Une petite émission avec plusieurs journalistes qui travaillent sur l'Afrique m'intéresserait grandement.
Juste, déjà, savoir si c'est un choix, si tous les journalistes commencent par là pour aller ailleurs ensuite, etc.
Et puis comment on divise : quelques journalistes pour toute l'Afrique (comme on en parle jamais, y a peut-être pas tant de boulot.....:(
Je pense qu'il y aurait quelque chose d'intéressant à faire ; et ne serai sans doute pas la seule à aimer !
merci encore
ps : euh... pour les biblios... c'est bien, ça ne gêne pas. Et si dans deux ans je réalise que j'ai besoin d'infos là-dessus, j'ai tout sous la main. Pensez à cette jolie période, un jour, où tous les livres seront disponibles sur de grandes bibliothèques numériques.... Ce sera carrément pratique ;-)
Mais je ne suis pas sûre que ce soit vraiment très très grave, hein ?
Une petite émission avec plusieurs journalistes qui travaillent sur l'Afrique m'intéresserait grandement.
Juste, déjà, savoir si c'est un choix, si tous les journalistes commencent par là pour aller ailleurs ensuite, etc.
Et puis comment on divise : quelques journalistes pour toute l'Afrique (comme on en parle jamais, y a peut-être pas tant de boulot.....:(
Je pense qu'il y aurait quelque chose d'intéressant à faire ; et ne serai sans doute pas la seule à aimer !
merci encore
ps : euh... pour les biblios... c'est bien, ça ne gêne pas. Et si dans deux ans je réalise que j'ai besoin d'infos là-dessus, j'ai tout sous la main. Pensez à cette jolie période, un jour, où tous les livres seront disponibles sur de grandes bibliothèques numériques.... Ce sera carrément pratique ;-)
Mais je ne suis pas sûre que ce soit vraiment très très grave, hein ?
Bon article, qui reprend des thèses universitaires, que vous citez.
Mais les lecteurs pour qui la chose est entendue, aimeraient savoir ce qui se joue derrière les affrontements ethniques, quels programmes s'opposent, quelles familles politiques luttent pour le pouvoir.
Mais les lecteurs pour qui la chose est entendue, aimeraient savoir ce qui se joue derrière les affrontements ethniques, quels programmes s'opposent, quelles familles politiques luttent pour le pouvoir.
Ça valait le coup de prendre le temps de le lire (et même de le relire) cet article !
Merci Justine.
Merci Justine.
Et ben dit donc...l'Afrique bouleverse toujours autant les passions et la raison! Mais qui a commencé par négligé l'Afrique parce que elle ne répondait plus aux imperiums (ascendance, domination, hégémonie, suprématie , prédominance , prégnance , prééminence, règne, souveraineté )de sa majesté les colonisateurs?
La manipulation est souvent la même: "la division des peuples" par le mensonge, le chantage, la torture et la corruption. L'homme "blanc" n'a jamais abandonné l'Afrique, il en est resté le souverain coute que coute.
[quote=Jean-Jacques Jordi]
L'échec du modèle de colonisation à l'américaine, des naturalisations automatiques pour rétablir la dualité coloniale, une communauté en partie créée par le regard métropolitain, l'évolution de la dynamique associative, des terres permises à défaut de promises ?
http://felina.pagesperso-orange.fr/doc/alg/jordi_piedsnoirs.htm
T'chô.
La manipulation est souvent la même: "la division des peuples" par le mensonge, le chantage, la torture et la corruption. L'homme "blanc" n'a jamais abandonné l'Afrique, il en est resté le souverain coute que coute.
[quote=Jean-Jacques Jordi]
L'échec du modèle de colonisation à l'américaine, des naturalisations automatiques pour rétablir la dualité coloniale, une communauté en partie créée par le regard métropolitain, l'évolution de la dynamique associative, des terres permises à défaut de promises ?
http://felina.pagesperso-orange.fr/doc/alg/jordi_piedsnoirs.htm
T'chô.
Il me semble que le journaliste auteur de l'article ne devrait pas dire "(ce) raisonnement est faux".
L'article présente un point de vue universitaire contesté. Il aurait été utile de le signaler (le saviez vous que ce point de vue est contesté ?) et plus encore de ne pas décréter que ce raisonnement est vrai et que ceux qui pensent autrement ont "faux".
Vous pensez peut être défendre ainsi les vertus de la pensée antiraciste en niant l'ethno-mathématique électorale Guinéenne. Pourtant les faits sont là : les élections en Guinée ou au Congo Kinshasa ou en Côte d'Ivoire tournent à l'ethno mathématique c'est à dire que les populations votent selon leur ethnie. Cela pose un énorme problème (en particulier à l'occident) car cela remet en cause :
1. les frontières issues de la colonisation (auxquelles nous sommes très attachées, elles servent nos intérêts). Car si il y a vote ethnique c'est que les populations ne se reconnaissent pas comme participant d'une même nation.
2. Le principe : élection = démocratie (allez, crucifiez moi pour avoir osé dire ca). Si les riches et les pauvres d'une ethnie votent tous pour le candidat de leur ethnie et non selon leurs idées politiques alors en quoi les élections permettent elles de révéler la volonté commune d'un peuple qui choisi son destin?
En balayant ces graves questions (qui provoquent des morts à chaque élections) d'un simple : "c'est faux" vous devenez (allez tant qu'à m'être cramé...) le complice objectif du post colonialisme (ne le prenez pas mal, vous ne l'avez pas voulu)... Vous vouliez bien faire, lutter classiquement contre l'idée même de différence entre les hommes qui a tant fait souffrir l'Europe des années 40 (et avant et après aussi)...
Pourtant la simple application d'une règle basique du journalisme vous aurez protégé de cette erreur : "citer ses sources". Pourquoi doit on citer ses sources ? Ce concept va au delà de la simple mention du nom de l'auteur d'un raisonnent. Il permet de distinguer un point de vue (toujours contestable, partiel) d'un fait que vous avez pu vérifier. En affirmant "c'est faux", en ne mentionnant qu'un point de vue vous transformez un raisonnement en vérité irréfragable.
L'article présente un point de vue universitaire contesté. Il aurait été utile de le signaler (le saviez vous que ce point de vue est contesté ?) et plus encore de ne pas décréter que ce raisonnement est vrai et que ceux qui pensent autrement ont "faux".
Vous pensez peut être défendre ainsi les vertus de la pensée antiraciste en niant l'ethno-mathématique électorale Guinéenne. Pourtant les faits sont là : les élections en Guinée ou au Congo Kinshasa ou en Côte d'Ivoire tournent à l'ethno mathématique c'est à dire que les populations votent selon leur ethnie. Cela pose un énorme problème (en particulier à l'occident) car cela remet en cause :
1. les frontières issues de la colonisation (auxquelles nous sommes très attachées, elles servent nos intérêts). Car si il y a vote ethnique c'est que les populations ne se reconnaissent pas comme participant d'une même nation.
2. Le principe : élection = démocratie (allez, crucifiez moi pour avoir osé dire ca). Si les riches et les pauvres d'une ethnie votent tous pour le candidat de leur ethnie et non selon leurs idées politiques alors en quoi les élections permettent elles de révéler la volonté commune d'un peuple qui choisi son destin?
En balayant ces graves questions (qui provoquent des morts à chaque élections) d'un simple : "c'est faux" vous devenez (allez tant qu'à m'être cramé...) le complice objectif du post colonialisme (ne le prenez pas mal, vous ne l'avez pas voulu)... Vous vouliez bien faire, lutter classiquement contre l'idée même de différence entre les hommes qui a tant fait souffrir l'Europe des années 40 (et avant et après aussi)...
Pourtant la simple application d'une règle basique du journalisme vous aurez protégé de cette erreur : "citer ses sources". Pourquoi doit on citer ses sources ? Ce concept va au delà de la simple mention du nom de l'auteur d'un raisonnent. Il permet de distinguer un point de vue (toujours contestable, partiel) d'un fait que vous avez pu vérifier. En affirmant "c'est faux", en ne mentionnant qu'un point de vue vous transformez un raisonnement en vérité irréfragable.
J'ai eu grand plaisir à lire cette analyse fouillée qui rend bien compte du dilemme dans lequel sont plongés les journalistes pour rendre compte de ce genre de troubles. Bravo et merci.
Je me joins au concert de louanges, un article très bien fait, à la limite d'un court papier de recherche, qui apprend bien des choses en un nombre limité de lignes. Vraiment un très grand bravo, article d'utilité publique, et même de salubrité publique et journalistique. J'espère qu'il sera massivement lu !
Cet article me rappelle une soirée à laquelle j’assistais il y a une semaine. Cette soirée débat était organisée par la CIMADE sur les migrations africaines en présence d’un nigérian résidant en Mauritanie. Le sujet de la soirée était bien sûr les entraves mises en place par l’Europe notamment dans le cadre du dispositif Frontex.
J’y ai appris, en particulier, que 86 % des migrations africaines sont intra-régionales, que ces migrations étaient des phénomènes traditionnels et historiques de mobilité et solidarité et plus particulièrement au sein de la CEDEAO (Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest). En effet, la libre circulation des personnes y est reconnue avec l’abolition des visas, le droit de résidence et d’établissement. On est très loin du discours de Grenoble !
Le dispositif Frontex qui a pour but d’empêcher la migration vers l’Europe demande pour ne pas dire impose à chacun de ces états de maîtriser les migrations à l’intérieur de leurs frontières. Ce dispositif entrave ces migrations intra-africaines et les oblige à emprunter des routes plus longues et plus dangereuses en mettant à mal toute une économie basée sur la mobilité et la solidarité.
Tout cela pour souligner que d’une part c’est la solidarité entre ces peuples qui est mise en évidence et d’autre part c’est leur "tribalisme" voire leur hostilité qui y est décrite et même suscitée. De quoi se poser de nombreuses questions.
J’y ai appris, en particulier, que 86 % des migrations africaines sont intra-régionales, que ces migrations étaient des phénomènes traditionnels et historiques de mobilité et solidarité et plus particulièrement au sein de la CEDEAO (Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest). En effet, la libre circulation des personnes y est reconnue avec l’abolition des visas, le droit de résidence et d’établissement. On est très loin du discours de Grenoble !
Le dispositif Frontex qui a pour but d’empêcher la migration vers l’Europe demande pour ne pas dire impose à chacun de ces états de maîtriser les migrations à l’intérieur de leurs frontières. Ce dispositif entrave ces migrations intra-africaines et les oblige à emprunter des routes plus longues et plus dangereuses en mettant à mal toute une économie basée sur la mobilité et la solidarité.
Tout cela pour souligner que d’une part c’est la solidarité entre ces peuples qui est mise en évidence et d’autre part c’est leur "tribalisme" voire leur hostilité qui y est décrite et même suscitée. De quoi se poser de nombreuses questions.
Merci pour cet article sur un sujet rarement traité convenablement dans les médias. L'instrumentalisation des ethnies par des stratégies de conquête du pouvoir sont hélas monnaie courante en Afrique de la Guinée au Rwanda en passant par la Côte d'Ivoire. Des politiciens souvent sans scrupules actionnent des ressorts bien connus en opposant certaines communautés. Le coup de l'ennemi intérieur comme avec les Peuls sous Sékou Touré ou encore à travers le concept fumeux d'ivoirité plus récemment en Côte d'Ivoire ne sont que des stratégies politiques détestables et extrêmement dangereuses auxquelles ont recours certains politiciens. Stratégies d'autant plus efficaces en Afrique qu'elles s'appuient sur une grande pauvreté et des mécanismes de solidarité des sociétés africaines. Il n'est peut être pas inutile de rappeler que ces procédés ne sont pas spécifiquement africains et que l'Europe a connu de telles instrumentalisations (juifs, roms, etc.) avec des conséquences tout aussi effroyables. Bien sûr, c'est beaucoup plus simple de dire qu'il s'agit d'un conflit entre ethnies que d'expliquer les tenants et les aboutissants des stratégies des forces politiques en présence. Cela permet aussi de conforter des clichés sur le thème ces africains, ils en sont toujours à ces affaires d'ethnies, ils sont bons qu'à s'entretuer... On n'est pas loin du racisme ordinaire. C'est sûr, on peut se permettre ce genre de raccourcis douteux, ce n'est pas en France qu'un homme politique se permettrait de stigmatiser une catégorie ethnique...
Enfin, heureusement, il existe des journalistes capables de dépasser les clichés et de faire convenablement leur travail.
Enfin, heureusement, il existe des journalistes capables de dépasser les clichés et de faire convenablement leur travail.
Merci à Justine Brabant pour cet article. C'est comme une bonne émission D@ns le Texte : excellent, et à relire/revoir plusieurs fois pour en tirer toutes les facettes.
Je propose quelque chose, à partir des titres de journaux et d'agences mentionnés :
L'Agence France Presse signalait ainsi début novembre que "le pays redout[ait] une résurgence des violences politico-ethniques" (AFP), puis Le Monde notait à nouveau les "tensions redoutées entre Flamants et Wallons" (Le Monde), quand Le Figaro estimait déjà que "les rivalités tribales" étaient "au paroxysme" (Le Figaro).
Dans une dépêche parue le 16 novembre, sous le titre "les divisions ethniques menacent la Belgique", l'agence de presse explique ainsi les affrontements par "le réveil de rivalités ethniques ancestrales."
Vous avez vu où je veux en venir : pourquoi ces mentions "tribales", "ethniques" ne sont pas appliquées aussi à l'actuelle Belgique ?
Ben parce que en Belgique, c'est des Blancs civilisés, eux, mon bon monsieur (du Ku Klux Klan).
Autre exemple : je suis Réunionnais. Danyel Waro, chanteur/musicien réunionnais, vient de recevoir le "WOMEX 2010 Award for Artists", WOMEX qui est la grande messe annuelle de la "Musique du Monde".
Mais pourquoi dit-on "Musique du Monde", ou "musique ethnique" dès qu'il s'agit de musiques [s]du monde[/s]des anciennes colonies, alors que l'on dit "musique traditionnelle" quand il s'agit des trucs bretons (qui cassent les oreilles) ou des chants tyroliens (idem, mais avec la voix), ou de "musique classique" quand c'est des valses de Vienne ?
Les valses de Vienne sont pour moi franchement autant de la musique ethnique (de l'ethnie des Viennois huppés). Pourquoi ne jamais le dire ainsi ?
Qu'il y ait une vraie "Musique du Monde", c'est entendu ; mais ce terme ne devrait s'appliquer qu'aux musiques qui mélangent des éléments venant de coins différents du Monde ; par exemple, au Trio Miyazaki, qui associe le koto japonais (sorte de grosse cythare) avec le violon et l'accordéon (russe).
Ben parce qu'il ne faut pas confondre la musique de sauvages qui tapent au hasard sur des instruments en peaux de bêtes sauvages qu'ils ont chassés eux même avec des lances, et la vrai et belle musique si savamment mise au point par nos ancêtres [s]les Gaulois[/s] de nos douces contrées civilisées, mon bon monsieur (du Front National).
Conclusion : le racisme peut aussi s'exprimer de manière très subtile. C'est là qu'il est le plus difficile à combattre.
Je propose quelque chose, à partir des titres de journaux et d'agences mentionnés :
L'Agence France Presse signalait ainsi début novembre que "le pays redout[ait] une résurgence des violences politico-ethniques" (AFP), puis Le Monde notait à nouveau les "tensions redoutées entre Flamants et Wallons" (Le Monde), quand Le Figaro estimait déjà que "les rivalités tribales" étaient "au paroxysme" (Le Figaro).
Dans une dépêche parue le 16 novembre, sous le titre "les divisions ethniques menacent la Belgique", l'agence de presse explique ainsi les affrontements par "le réveil de rivalités ethniques ancestrales."
Vous avez vu où je veux en venir : pourquoi ces mentions "tribales", "ethniques" ne sont pas appliquées aussi à l'actuelle Belgique ?
Ben parce que en Belgique, c'est des Blancs civilisés, eux, mon bon monsieur (du Ku Klux Klan).
Autre exemple : je suis Réunionnais. Danyel Waro, chanteur/musicien réunionnais, vient de recevoir le "WOMEX 2010 Award for Artists", WOMEX qui est la grande messe annuelle de la "Musique du Monde".
Mais pourquoi dit-on "Musique du Monde", ou "musique ethnique" dès qu'il s'agit de musiques [s]du monde[/s]des anciennes colonies, alors que l'on dit "musique traditionnelle" quand il s'agit des trucs bretons (qui cassent les oreilles) ou des chants tyroliens (idem, mais avec la voix), ou de "musique classique" quand c'est des valses de Vienne ?
Les valses de Vienne sont pour moi franchement autant de la musique ethnique (de l'ethnie des Viennois huppés). Pourquoi ne jamais le dire ainsi ?
Qu'il y ait une vraie "Musique du Monde", c'est entendu ; mais ce terme ne devrait s'appliquer qu'aux musiques qui mélangent des éléments venant de coins différents du Monde ; par exemple, au Trio Miyazaki, qui associe le koto japonais (sorte de grosse cythare) avec le violon et l'accordéon (russe).
Ben parce qu'il ne faut pas confondre la musique de sauvages qui tapent au hasard sur des instruments en peaux de bêtes sauvages qu'ils ont chassés eux même avec des lances, et la vrai et belle musique si savamment mise au point par nos ancêtres [s]les Gaulois[/s] de nos douces contrées civilisées, mon bon monsieur (du Front National).
Conclusion : le racisme peut aussi s'exprimer de manière très subtile. C'est là qu'il est le plus difficile à combattre.
Justine brabant ou le vrai journalisme. Faut plus que je vote en début de journée, moua ! Je suis obligée d'attendre demain, zut.
C'est du bon @si en ce moment.
Yanne vous êtes très sévère.
C'est du bon @si en ce moment.
Yanne vous êtes très sévère.
Merci.
Merci.
Superbe comte rendu de la complexité... dont on ne sait que faire au final.
Car, entre un journaliste qui ne veut pas dire (et donc qui ne nie pas l'existence d'une coupure ethnique, bien au contraire), car, cela aggraverait le problème (en passant, on a le même problème à propos du traitement des banlieues françaises) et un universitaire qui de toute façon ne trouvera le travail journalistique pertinent que du moment où il reprendra à la lettre ses propres travaux, toujours plus subtiles, pointus (à défaut de reprendre ses conclusions qu'il se charge bien souvent de diluer dans la sus-dite complexité), on ne sait si ce prisme ethnique est pertinent ou non.
On ne le sait pas, car, il manque en fait l'essentiel, entre les politiques qui en jouent (et prouvent ainsi que cela peut se faire et donc existe bien), les journalistes qui en abusent (parce que c'est facile), et les universitaires qui font la fine bouche (parce que sinon à quoi ils servent), on ne sait pas selon quels critères et donc comment le peuple se décide. Emploie-t-il de tels critères ethniques pour légitimer son action ou s'associe-t-il de façon non ethnique, par exemple en terme de classe sociale...
yG
Car, entre un journaliste qui ne veut pas dire (et donc qui ne nie pas l'existence d'une coupure ethnique, bien au contraire), car, cela aggraverait le problème (en passant, on a le même problème à propos du traitement des banlieues françaises) et un universitaire qui de toute façon ne trouvera le travail journalistique pertinent que du moment où il reprendra à la lettre ses propres travaux, toujours plus subtiles, pointus (à défaut de reprendre ses conclusions qu'il se charge bien souvent de diluer dans la sus-dite complexité), on ne sait si ce prisme ethnique est pertinent ou non.
On ne le sait pas, car, il manque en fait l'essentiel, entre les politiques qui en jouent (et prouvent ainsi que cela peut se faire et donc existe bien), les journalistes qui en abusent (parce que c'est facile), et les universitaires qui font la fine bouche (parce que sinon à quoi ils servent), on ne sait pas selon quels critères et donc comment le peuple se décide. Emploie-t-il de tels critères ethniques pour légitimer son action ou s'associe-t-il de façon non ethnique, par exemple en terme de classe sociale...
yG
Excellent article, merci beaucoup !
On parle trop peu souvent de l'Afrique, et, en plus, quand on en parle ici en France, c'est très souvent pour en dire des conneries. En effet, je pense que de telles simplifications sont non seulement néfastes, mais aussi parfois - pas toujours, mais parfois - voulues... Cela permet de masquer les véritables sources des problèmes en Afrique. "problèmes"... on ne peut pas faire plus gros euphémisme... Mais bon, je ne vais pas me lancer dans une tirade sur les ravages du capitalisme en Afrique de la colonisation à nos jours... :-(
On parle trop peu souvent de l'Afrique, et, en plus, quand on en parle ici en France, c'est très souvent pour en dire des conneries. En effet, je pense que de telles simplifications sont non seulement néfastes, mais aussi parfois - pas toujours, mais parfois - voulues... Cela permet de masquer les véritables sources des problèmes en Afrique. "problèmes"... on ne peut pas faire plus gros euphémisme... Mais bon, je ne vais pas me lancer dans une tirade sur les ravages du capitalisme en Afrique de la colonisation à nos jours... :-(
Fantastique papier. A lire, et relire encore, pour en maîtriser tous les aspects.
A voté.
A voté.
Excellente recherche sur un thème peu connu !
Bravo !
Bravo !
C'est agréable de lire de nouveau vos articles, Justine.
Quoi ? On croyait vous avoir lâchée chez les sauvages, et vous nous confirmez que vous vivez chez des gens comme les autres, où la politique se fait à coups de coups bas, et que tout est toujours plus compliqué qu'on voudrait nous le faire croire.
D'ailleurs, êtes vous toujours en Afrique ou ètes-vous revenue à @SI pour de bon ?
En aparté, et sans vouloir être désagréable, je dois dire que la substance de l'article me semble un peu éthérée, c'est une impression diffuse que j'ai toujours eue avec vos papiers. Il y manque le noyau, une sorte de certitude forte. Votre approche ne me semble pas spécialement négative, pourtant, il y manque quelque chose qui attaque et qui soutient. En fait, il n'y a pas de chair.
Les personnages et les circonstances passent un peu comme des ombres.
Par exemple, ce serait bien de montrer les visages des deux prétendants aux élections quand vous parlez d'eux. Leurs visages et leurs noms permettraient de mieux fixer l'attention et de construire mentalement l'histoire que vous nous racontez autour d'un point d'approche et d'accroche.
Ce sont de très bons articles, et vous savez de quoi vous parlez, mais de la façon dont vous démarrez, et les thèmes que vous choisissez, ils pourraient être exceptionnels.
Je suppose que ça s'acquiert avec l'expérience.
Quoi ? On croyait vous avoir lâchée chez les sauvages, et vous nous confirmez que vous vivez chez des gens comme les autres, où la politique se fait à coups de coups bas, et que tout est toujours plus compliqué qu'on voudrait nous le faire croire.
D'ailleurs, êtes vous toujours en Afrique ou ètes-vous revenue à @SI pour de bon ?
En aparté, et sans vouloir être désagréable, je dois dire que la substance de l'article me semble un peu éthérée, c'est une impression diffuse que j'ai toujours eue avec vos papiers. Il y manque le noyau, une sorte de certitude forte. Votre approche ne me semble pas spécialement négative, pourtant, il y manque quelque chose qui attaque et qui soutient. En fait, il n'y a pas de chair.
Les personnages et les circonstances passent un peu comme des ombres.
Par exemple, ce serait bien de montrer les visages des deux prétendants aux élections quand vous parlez d'eux. Leurs visages et leurs noms permettraient de mieux fixer l'attention et de construire mentalement l'histoire que vous nous racontez autour d'un point d'approche et d'accroche.
Ce sont de très bons articles, et vous savez de quoi vous parlez, mais de la façon dont vous démarrez, et les thèmes que vous choisissez, ils pourraient être exceptionnels.
Je suppose que ça s'acquiert avec l'expérience.
Pour lire un nouvel article de Justine Brabant, il faut être patient, mais ça vaut toujours le coup.
Tiens ben illustration par l'exemple de la pertinence de ce dossier "TROUS NOIRS DANS L'INFORMATION" : je me rends compte que j'ai du en lire un sur 3, j'ai honte.
Houa, article impressionnant, sur un sujet rare et pointu. Merci beaucoup pour ce travail qui va mériter une deuxième et troisième lecture pour moi.
Article d'utilité nationale. D'aussi haute qualité, c'est rare partout.
Bravo pour cet article très fouillé qui combine savamment les niveaux de lecture ( bibliographie africaniste, discours coloniaux et post-coloniaux, manipualtions des hommes politiques, pratiques journalistiques). L'analyse des conditions de production des dépêches chez reuters ou de l'info sur RFI est très éclairante.
Sur Le Monde et sa traditionnelle perception ethniciste des conflits en Afrique, je conseille également la lecture de l'ouvrage de Jean Paul Gouteux, Le Monde, un contre-pouvoir ? désinformation et manipulation sur le génocide rwandais, L'esprit frappeur, 1999.
Sur Le Monde et sa traditionnelle perception ethniciste des conflits en Afrique, je conseille également la lecture de l'ouvrage de Jean Paul Gouteux, Le Monde, un contre-pouvoir ? désinformation et manipulation sur le génocide rwandais, L'esprit frappeur, 1999.