Israël aux JO : des jours de polémique, pas un mot sur Gaza
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Israël aux JO : des jours de polémique, pas un mot sur Gaza

Comment la polémique sur les propos de Thomas Portes révèle la couardise de la gauche et l'indifférence générale face au sort des Gazaouï·es

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Depuis une semaine, le député insoumis Thomas Portes fait l'objet d'attaques extrêmement virulentes pour avoir tenu des propos qui pourtant n'ont rien de nouveau. Cette polémique absurde agit comme un révélateur des couardises de la gauche et laisse un goût amer en invisibilisant le sujet de fond : le massacre en cours à Gaza.

Au milieu d'une actu chargée, cette fin juillet a vu une polémique prendre une ampleur inédite. Le 20 juillet, lors d'une manifestation de soutien aux Palestinien·nes, Thomas Portes, député LFI de la 3ème circonscription de Seine-Saint-Denis, a affirmé que "les sportifs israéliens" n'étaient "pas les bienvenus" aux Jeux olympiques de Paris : "Nous sommes à quelques jours d'une échéance internationale qui va se tenir à Paris, qui sont les Jeux olympiques", a-t-il dit. "Et moi, je suis ici pour dire que non, la délégation israélienne n'est pas la bienvenue à Paris. Les sportifs israéliens ne sont pas les bienvenus aux Jeux olympiques à Paris. Il faut utiliser cette échéance, tous les leviers que nous avons pour créer des mobilisations."

Diffusée sur les réseaux sociaux du député, la séquence a été reprise le soir-même par un compte X anonyme (1,3 millions de vues). Quelques heures plus tard, c'est le président du Crif, Yonathan Arfiqui reprend la vidéo et s'en prend à Portes, qualifié d'"irresponsable", de mettre "une cible dans le dos des athlètes israéliens, déjà les plus menacés des Jeux Olympiques". Arfi va jusqu'à dresser un parallèle avec les tragiques attentats des JO Munich en 1972, lors desquels onze athlètes israéliens avaient été assassinés par l'organisation palestinienne Septembre noir - instillant ainsi l'idée que les propos de l'élu constituent un appel à la violence.

Instrumentalisations politiques de toutes parts

Comme à chaque polémique, les adversaires politiques de LFI se ruent sur X. La sphère politico-médiatique de droite, anti-LFI et pro-israélienne, accuse le député de mettre une "cible dans le dos des athlètes", de les "mettre en danger" et de faire de la "provocation à la haine". Il est traité de "crapule antisémite" ou de "collabo". Marine Le Pen dénonce un "antisémitisme qui n'a pas sa place dans notre pays". Elle convoque elle-aussi 1972, tout comme Jordan Bardella: "C'est la même haine décomplexée et aveugle qui tua des athlètes israéliens aux JO de Munich en 1972." Julien Odoul qualifie le discours de Portes de "criminel". Même topo côté LR : Bruno Retailleau déplore des "propos à vomir", Geoffroy Didier un "antisémitisme haineux", quand Valérie Boyer estime que Portes fait partie des "députés qui, en sortant de l'arc républicain, ne méritent pas de porter l'écharpe tricolore". Impossible de différencier ces réactions de celles du gouvernement, puisque Gérald Darmanin reprend la même rhétorique au JT de France 2 et déplore "des relents antisémites évidents". Et d'ajouter  que le député LFI "n'attaque pas la délégation nord-coréenne ou iranienne, il attaque sciemment la délégation israélienne parce qu'ils sont juifs". Un procès d'intention diffamatoire ? Tout est bon pour s'en prendre à ses adversaires politiques. De son côté Stéphane Séjourné évoque des propos "irresponsables et dangereux" quand Emanuel Macron, au JT France 2, les qualifie d'"inadmissibles" en rappelant : "Moi j'ai toujours dit : c'est le Comité international olympique qui décidera, et nous, on ne fait pas de politique avec les Jeux".

Une certaine gauche s'indigne

Que la droite reprenne les mêmes éléments de langage que l'extrême-droite n'a rien d'étonnant. Mais que les alliés de LFI au sein du NFP fassent de même et hurlent avec la meute, sans aucun sens de la nuance, est plus inquiétant. C'est du moins le cas pour une grande partie du PS qui n'a plus de socialiste que le nom. Carole Delga déplore les mêmes "propos haineux", "irresponsables", "indignes" et convoque elle-aussi l'attentat meurtrier de 1972. Des membres des instances du parti abondent : les propos de Portes "contribuent à menacer la sécurité de la délégation israélienne aux JO de Paris 2024" (Nicolas Gaborit) et les "mettent en danger" (François Briançon). Pire, la sénatrice Marie-Pierre de La Gontrie demande que le député LFI fasse "l'objet d'une saisine du parquet pour incitation publique à la haine". Quand d'autres en profitent pour tenter de faire péricliter l'alliance du NFP, à l'instar de Stéphane Le Foll ou David Assouline, de nombreux observateurs déplorent le silence d'Olivier Faure. J'ai du mal à savoir si cela l'honore - de ne pas hurler avec la meute - ou si cela le discrédite - de ne pas saisir l'occasion pour faire preuve de probité et de courage politique.

Car du courage politique, il en fallait une bonne dose pour ne pas participer à ce qui ressemble à un lynchage médiatique. Discret, le PC a tout de même diffusé un communiqué dans lequel il "dénonce les déclarations de Thomas Portes" tout comme "les prises de position d'autres personnalités de tous bords visant à exclure les athlètes russes". De son côté, François Ruffin a affirmé qu'il ne partageait "pas du tout" la position de Thomas Portes, avant d'expliciter une position qui se trouve être... exactement celle du député du 93. Difficile de plaider la méconnaissance alors que le député de la Somme signait à ses côtés, quelques mois plus tôt, un courrier destiné au Comité international olympique pour réclamer des sanctions contre Israël. Alors pourquoi ce désaccord de façade ? Difficile de ne pas y voir une simple posture pour s'éloigner de LFI et d'un camarade vilipendé de toutes parts.

Chez les écolos, Marine Tondelier s'est montré discrète. Sandrine Rousseau n'a pas non plus brillé par son courage dans la matinale de BFM, assénant, à juste titre, qu'il y a "un besoin d'une position internationale" en rappelant qu'il y a "encore un conflit" (Ah ?) et qu'on "n'en parle plus" (Oh !). Mais précise en même temps que "ça n'est pas aux sportifs israéliens de subir cela" et en même temps qu'il y a "toujours eu une dimension géopolitique dans l'histoire des JO". Ce n'est pas moi qui critiquerai la nuance, mais la chorégraphie matinale de la députée écolo manquait de force, de cran et de cœur. Si elle botte en touche pour ne pas avoir à salir ses allié·es, on ne peut pas dire que sa prestation soit à la hauteur, là où il aurait fallu rappeler sans blêmir que les propos de Portes ne "ciblaient" pas les athlètes en tant que tels, que sa position n'était pas l'exclusion mais la bannière neutre, contrairement à ce qui était dit partout. Et qu'il est extrêmement dangereux d'essentialiser les Juif·ves comme les Israélien·nes et d'entretenir cet amalgames malsain qui non seulement pointe du doigt nos compatriotes juif·ves du matin au soir, mais vient parasiter toute critique libre des massacres en cours à Gaza. Qu'il ne fallait donc pas se laisser intimider par les accusations d'antisémitisme et qu'il y avait une urgence humanitaire à utiliser tous les moyens de mobilisation pour tenter d'infléchir la position française. Enfin, Rousseau aurait pu répondre avec fermeté lorsque le journaliste a osé lui demander si le fait de dire que "le drapeau israélien ne devrait pas flotter à Paris cet été" (Aymeric Caron), constituait une "phrase antisémite", plutôt que de botter en touche. Bref : on l'a connue plus énervée et plus téméraire. 

Interrogé par ASI à propos du manque de soutien reçu de la gauche, Thomas Portes dit ne pas être surpris : "Depuis des mois", dit-il, "nous sommes les seuls à gauche à tenir une ligne constante sur ce sujet et à ne céder sous aucune pression ou menace." À l'adresse de son "camp politique", il met en garde : "Aujourd'hui, c'est moi, demain, ce sera vous", et regrette que "pour faire allégeance au système, certains se livrent à un spectacle minable de « tireurs dans le dos »", et conclut : "La solidarité n'est pas une option, c'est une nécessité !"

Une couverture médiatique disproportionnée

Cette condamnation quasi-unanime de Portes s'est tenue sur une scène médiatique ayant couvert le sujet pendant plusieurs jours, de manière surdimensionnée. L'engrenage de l'emballement s'est rapidement mis en marche : dès le lundi matin, la question était de toutes les interviews de matinales et de tous les plateaux de touto(u)logues. CNews a consacré plus de 45 minutes au sujet. La ligne est claire, à l'image de l'édito de mini Praud : c'est le gros ouin-ouin des législatives. Une analyse que l'on retrouve dans tous les médias de droite, comme ici dans une tribune du Figaro Vox qui déplore "l'insupportable hypocrisie de ceux qui s'indignent des propos d'un député LFI après avoir fait alliance avec le NFP aux législatives".

Le Point consacre pas moins de dix papiers à la petite phrase du député insoumis. Jusqu'à pondre un article sur la non-réaction de Patrick Bruel, qui préfère... ne pas réagir. Les éditoriaux pleuvent pour acculer Portes. 

Surenchère scandaleuse

Cette unanimité médiatico-politique prend la forme d'une surenchère de calomnies indignes à l'encontre de l'Insoumis, et plus largement de LFI. "Antisémitisme à LFI : bientôt l'appel au meurtre ?" ose Étienne Gernelle dans le Point, infligeant à son lectorat une bouillie indigeste dans laquelle il convoque tour à tour Edwy Plenel (pourtant pas meilleur ami de LFI), les attentats de Charlie et l'affaire Dreyfus. Causeur estime que "ce qui se profile derrière les éructations du député", c'est que "le peuple juif doit être détruit, les Juifs doivent disparaître de la surface de la terre". Sur CNews, Julien Dray - dont les obsessions se radicalisent à mesure qu'il s'enfonce dans son nouveau fauteuil de bollo-polémiste - déroule le même fil : "Ça veut dire que chaque Israélien doit être assassiné, martyrisé ?"

Les outrances se poursuivent avec Damien Rieu, qui tweete "C'est toi Thomas Portes ?" en partageant la photo d'un membre du commando Septembre noir au balcon d'un appartement du village olympique de Munich, lors de l'attentat du 5 septembre 1972.

Raphaël Enthoven préfère flirter avec le complotisme : "Thomas Portes est-il simplement antisémite, ou est-il dans la main des organisations terroristes dont il se fait, à l'occasion, le porte-parole ?", et se fait le relai de la "Diaspora Defense Force" du publicitaire et porte-parole non-officiel de l'armée israélienne, Frank Tapiro. En adoptant des codes journalistiques, cette vidéo est un véritable outil de propagande. Si elle pointe quelques propos problématiques ou angles morts du discours de Portes, elle n'en est pas moins diffamatoire ("Le député semble prendre un plaisir tout particulier à mettre des cibles dans le dos des Juifs français") et véhicule également de fausses informations. À propos de sa rencontre avec Abu Amir Eleiwa, décrit par Tapiro comme "membre du Hamas", Portes répond à ASI que "ce sont des mensonges" et ajoute : "Quand j'ai organisé mon voyage en octobre, je l'ai fait en lien avec le ministre des Affaires étrangères, qui savait très bien quelles étaient mes rencontres". Il rappelle aussi qu'il "ne soutient évidemment pas le Hamas". 

Une seconde polémique fondée sur une interprétation fallacieuse du discours du député insoumis est également relayée dans la vidéo que partage Enthoven. Cette dernière est née via Guillaume Mélanie, un comédien qui a lancé le hashtag #PortesAuTribunal (plus de 113 000 tweets à l'heure actuelle) et en diffusant un modèle pour que chacun puisse porter plainte contre Thomas Portes. Mélanie a tweeté que l'Insoumis s'en prenait "aussi aux citoyens franco-israéliens qu'il tient responsables de ce qui se passe à Gaza" et mettait "une cible dans le dos de tous nos compatriotes franco-israéliens".  Sauf que le député LFI ne parle pas du tout des Franco-israélien·nes dans leur ensemble, mais uniquement de celle·ux qui sont engagé·es dans l'armée israélienne et commettent des crimes de guerre à Gaza. Ici encore, Portes parle d'un sujet sur lequel il est mobilisé depuis le début de l'offensive israélienne à Gaza.

L'interprétation fallacieuse des propos de Portes a pourtant été reprise par le vidéaste Bruce Benamran, qui a diffusé la fausse information auprès de ses 227 000 abonnés. Pire, Gabina Elbaz, la vice-présidente de la Licra, a annoncé sur BFM saisir le procureur de la République de Paris pour ces propos. Incompétence,  malhonnêteté ou biais de confirmation ? Peut-être les trois à la fois ? Pour l'élu de Seine-Saint-Denis, "ce n'est pas une méprise". Auprès d'ASI, il déplore : "C'est volontairement que mes propos sont dévoyés. Dans ma prise de parole, je dis « franco-israéliens complices de ce qui se passe dans la bande de Gaza ». Curieusement, le lien avec la bande de Gaza a disparu dans les attaques de mes adversaires."

La surenchère prend des formes d'anathème. Des députés RN réclament la levée de l'immunité parlementaire pour Portes et pour Aymeric Caron. Le maire LR de Nice, Christian Estrosi, franchit un niveau supplémentaire dans l'outrance, en allant jusqu'à réclamer "une procédure de dissolution" contre LFI. Même le dessinateur Plantu participe à ce flot d'hystérie collective, à travers un dessin titré tout en finesse "Thomas-Portes-ouvertes-à-l'antisémitisme", et sur lequel on peut voir le député LFI posant son pied sur la tête d'un athlète israélien décapité, en référence à une photo de février 2023 qui avait fait polémique.

Le premier concerné interprète cette surenchère dans les attaques comme une "ultime tentative d'étouffer les voix qui dénoncent le génocide qui s'affiche sous nos yeux". "Si l'attaque est aussi violente, c'est aussi car la bataille de l'opinion publique a, je crois, été gagnée par le camp de la Paix", analyse-t-il, "alors que nous accueillons les Jeux Olympiques, il faut mesurer l'isolement de la France sur la scène internationale. Du Canada à l'Espagne en passant par le Brésil, la Belgique, le Chili et même l'Italie, des sanctions ont été prises contre Israël via les embargos sur les armes."

Une revendication ancienne

Cette surenchère de calomnies pose d'autant plus question que les propos de Thomas Portes n'ont rien de scandaleux. Contrairement à ce qui est affirmé partout, il n'y a pas d'appel à la violence mais un appel à la "mobilisation". En mars dernier, Anne Hidalgo avait d'ailleurs tenu exactement les mêmes propos à l'égard des athlètes russes, sans que cela ne suscite pareil émoiSurtout, ces propos s'inscrivent dans un combat que le député porte depuis des mois. En janvier dernier, il appelait déjà à ce que "les athlètes israéliens participent aux JO sous bannière neutre, comme ce sera le cas pour les athlètes russes et biélorusses". Tout comme Aymeric Caron, qui s'était fendu d'une tribune titrée "JO de Paris : pourquoi il faut sanctionner Israël", rappelant que "chaque participant, qu'il le veuille ou non, représente plus que lui-même". En février, une trentaine de député·es insoumis·es - dont Portes et Ruffin, donc - accompagné·es de quelques écolos avaient adressé un courrier au président du CIO Thomas Bach réclamant "d'appliquer à Israël, lors des prochains Jeux Olympiques, les mêmes sanctions qu'à la Russie et à la Biélorussie, tout en laissant ouverte la possibilité d'une levée de ces sanctions en cas de cessez-le-feu durable"

L'idée de sanctionner Israël est loin d'être inédite. Une mobilisation internationale s'est organisée cet hiver derrière le hashtag #BanIsrael afin d'exclure Israël des Jeux olympiques, dans la foulée d'un appel signé par plus de 300 clubs sportifs, centres palestiniens de jeunesse et organisations de la société civile palestinienne. Des pétitions appuyant la démarche ont rassemblé des centaines de milliers de signatures à travers le monde (Diem 25 ou ici Eko).

Le Comité olympique palestinien a, lui aussi, réclamé des sanctions jusqu'à la dernière minute. En vain. Lors de l'arrivée à Paris de la délégation palestinienne, son président, Jibril Rajub, a déclaré que le Comité olympique israélien avait "perdu les droits moraux, sportifs, humanitaires et légaux de participer, en encourageant et, pour certains, en participant à la guerre, au génocide et au nettoyage ethnique en cours à Gaza", comme le rapporte l'Humanité.

C'EST POLITIQUE

D'après le Comité olympique palestinien, 300 athlètes, employé·es et bénévoles du monde sportif sont mort·es dans la bande de Gaza. Parmi ces morts, Hani al-Masdar, l'entraîneur de l'équipe olympique palestinienne de football. À son arrivée à Paris, le nageur du 100 mètre dos, Yazan Al Bawwab, a déclaré qu'il ne venait "pas pour les médailles" mais pour "atteindre le maximum de monde au sujet de la cause palestinienne". C'est politique.

Les contre-arguments qui tentent de dépeindre les Jeux de Paris 2024 comme un évènement apolitique résistent peu si l'on se tourne vers l'histoire des Jeux. Comme Portes l'a rappelé sur BFM, "l'histoire des JO est jalonnée de conflits géopolitiques, c'est un haut lieu de diplomatie. Les exemples récents sont légion." Et de dérouler : "La Yougoslavie en 1992 a été interdite de JO, l'Afrique du Sud pour sa politique d'apartheid a été bannie des JO pendant 25 ans, et les athlètes russes vont le faire sous bannière neutre". Mais la comparaison avec la Russie est refutée, comme chez BFM Story, où Olivier Truchot ne cache pas sa condescendance à l'égard du député LFI Aurelien Le Coq : "Donc pour vous, l'Ukraine et le Hamas, c'est la même chose ?". "Attaqué / attaquant", répond la chroniqueuse et politiste Virginie Martin, lorsque quelqu'un questionne sur X ce deux poids deux mesures. Cette réponse sommaire illustre l'unanimité des plateaux TV.

Elle reprend pourtant la rhétorique israélienne qui considère que tout a commencé le 7 octobre 2023, avec le massacre de 1170 personnes. Surtout, elle fait complètement fi du droit international : la Cour internationale de justice (CIJ) a estimé en janvier dernier qu'un "risque génocidaire" à Gaza était plausible. En mai, le procureur de la Cour pénale internationale a demandé des mandats d'arrêt contre Benjamin Netanyahu pour "crimes de guerre" et "crimes contre l'humanité". Et pas plus tard que la semaine dernière, la CIJ a estimé dans un avis consultatif, que l'occupation par Israël de territoires palestiniens depuis 1967 était "illégale" et qu'elle devait cesser "le plus rapidement possible".

Gaza et l'indignité collective

Sans entrer dans le débat de la différence de traitement réservé aux Israélien·nes et aux Russes - sur laquelle la Croix a publié un article très instructif - l'invisibilisation du massacre en cours à Gaza interpelle. Même à gauche, presque pas un mot. Dans ce cirque médiatique, la polémique visant Portes a réussi l'exploit d'effacer le fond du discours incriminé : faire cesser le massacre à Gaza. C'est pourtant le fond des revendications du député insoumis : faire bouger la diplomatie. 

Alors que les images insoutenables de corps d'enfants tués inondent chaque jour les réseaux, alors qu'une frappe israélienne sur une école abritant une "unité médicale de fortune" a fait 30 morts à Khan Younès ce samedi, et alors que Christina Assi et Dylan Collins, les journalistes de l'AFP blessés par Tsahal en octobre 2023 au Liban lors d'un reportage ont porté la flamme olympique, le président Macron a fait le choix de recevoir à l'Élysée le président israélien Isaac Herzog. Celui qui dédicace des bombes destinée à bombarder Gaza et avait déclaré à propos des Palestinien·nes : "Nous sommes en guerre et nous nous battrons jusqu'à ce que nous leur brisions l'échine." C'est politique.

Par son ampleur, par l'unanimité qu'elle a suscité, et par la malhonnêteté qui l'anime, cette polémique m'apparaît comme l'allégorie de l'instrumentalisation permanente des accusations d'antisémitisme. Allons même plus loin : n'est-elle pas le révélateur ultime des fractures au sein du NFP ? Cet emballement était pourtant l'occasion parfaite pour les membres de cette alliance - déjà bien abîmée - d'affirmer à l'unisson que l'urgence absolue était de faire cesser le massacre, que la France devait se saisir de cet évènement international pour employer tous les moyens diplomatiques afin d'oeuvrer en ce sens, et que définitivement non, considérer les jeux olympiques comme un haut lieu de la diplomatie, n'était pas "indigne", et enfin, que réclamer qu'une délégation israélienne concoure sous bannière neutre, n'était pas s'en prendre "aux Juifs". Auprès d'ASI, Thomas Portes décrit cette séquence - qui lui vaut des milliers de messages de menaces et d'appels incessants - comme un "moment de clarification politique". "Chacun assumera ses prises de positions", lâche-t-il.

Ce qui est certain, c'est qu'en calomniant le député de Seine-Saint-Denis, en le traitant d'antisémite comme seul contre-argument, en travestissant ses propos alors même que ce dernier a multiplié les interviews pour expliquer sa position et s'est même fendu d'un billet de blog, la sphère politico-médiatique et la gauche française ont fait ce qu'il savent faire le mieux depuis neuf mois : détourner le regard.

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