Crise au Media : bolchevisme et coolitude
Incontestablement, c'est l'émission du Media la plus réussie depuis le lancement. Encore sous le coup de l'annonce des départs de Aude Rossigneux et Noël Mamère, les mencheviks de l'aventure, en pleine polémique sur la Syrie (un des motifs du départ de Mamère), la petite équipe du Media se met en scène devant les caméras. Debout, groupés, c'est un pack de millenials, droit dans ses baskets, qui se pose devant les caméras.
La présidente, Sophia Chikirou (invitée l'automne dernier sur notre plateau), introduit et conclut l'émission. Elle maintient son amitié à Mamère, et l'invite, pour le lendemain, à "venir exposer ce qu'il semble présenter comme un désaccord"
. Tu as un désaccord, camarade ? Passent les fantômes des grandes exclusions du PCF, dans les années 60.
Communication de crise en direct : la communicante est dans son élément. Elle improvise beaucoup, lit (un peu) un texte préparé. Elle avance sur un fil. Elle hésite juste ce qu'il faut. Est émue juste ce qu'il faut. Quand elle se retourne vers le pack, on lui rappelle de regarder la caméra. Rires. Ah oui c'est vrai, les Socios ! Com' interne, com' externe : si elle s'est regardée ensuite, la professionnelle s'est sans doute trouvée excellente. Elle aura eu raison.
L'équipe qui se met en scène est celle des anonymes. Les stars (Lancelin, Miller) sont absentes. Dans des tours de parole apparemment spontanés -qui veut intervenir ? Quelqu'un veut encore dire quelque chose ?- , sans aucun maître ni maitresse de cérémonie, chacun.e vient remercier les Socios de leur soutien, étaler son ressenti, expliquer combien l'épreuve a été dure à vivre. C'est un exorcisme collectif, une cellule psychologique. "On n'a pas explosé en vol"
constate une rescapée, encore étonnée. Théophile Kouamouo explique que s'il croisait Brigitte Rossigneux dans la rue, il lui ferait la bise. On réaffirme le principe de la présentation tournante. Chikirou appelle aux candidatures : "Serge, je crois que t'as envie d'essayer ?"
Serge acquiesce.
Spontanéité apparente, et unanimité du groupe qui panse ses plaies : coolitude et bolchevisme sont dans un bateau. "On n'est pas toujours d'acccord, on débat beaucoup"
répétent plusieurs millenials. Mais pas ce soir. Pas une question à la cheffe, qui s'est placée hors-champ, comme pour se faire oublier. Pas une note dissonnante : on n'est pas en Assemblée Générale, mais plutôt dans une veillée de deuil de ce premier acte, qui a passé si vite, avec son rêve de gauche arc en ciel. Maintenant, chacun le sait au fond de lui, on va rester entre soi, dans le combat, et mort aux faibles.
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