Un voyage dans les musiques de films
La mort du compositeur anglais John Barry est l'occasion de rappeler le rôle prépondérant de la musique dans le souvenir cinématographique (exemple de James Bond, évoqué par une simple signature musicale). Et si toutes les musiques imaginables ont été utilisées au cinéma, tous les styles n'y sont pas égaux. Formé au Jazz et à la Pop, John Barry a dû, comme beaucoup d'autres, suivre des règles instituées par la musique symphonique d’inspiration austro-hongroise qui, 80 ans après son arrivée à Hollywood, continue de fournir les bases quasi-incontournables du genre.
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Derniers commentaires
Bizarrement, j'ai toujours qu'il y avait une similitude entre le thème de "James Bond" et les arrangements du "Poinçonneur des Lilas" :
John Barry : http://www.youtube.com/watch?v=Ii1tc493bZM
Serge Gainsbourg : http://www.youtube.com/watch?v=StI_p567_NE&feature=related
J'ai un peu la même impression (peut-être même en plus) avec "L'eau à la bouche" : http://www.youtube.com/watch?v=TojXB8uOiA4&feature=related
Est-ce juste le fruit de mon imagination ?
Où l'on apprend par exemple que " « JB » était un obstiné : il a toujours tenu tête aux réalisateurs, étant sûr de lui et de ses idées. Personne ne pouvait influer sur la perception musicale du grand chef à la baguette d’or."
En opposition, donc, à la formulation "John Barry a dû, comme beaucoup d'autres, suivre des règles instituées par la musique symphonique d’inspiration austro-hongroise". Non, John n'a pas été obligé de suivre des règles...
J'apporte aussi mon grain de sel. Il est toujours mal aisé de parler d'écoles esthétiques au XXe siècle. Certes, la musique holywoodienne est très influencée par Wagner, Mahler, Strauss, par Ravel, Stravinsky, Debussy, voire Bartok (peut-on ajouter Janacek? je ne sais pas, trop peu de culture en musique de film). Mais elle est surtout à l'image de la nation américaine: un melting-pot.
La seule école qui n'est pas influencé la musique de film américaine, c'est l'Ecole de Vienne (Schoenberg, Berg et Webern). Et cela, c'est très important car la musique de film se doit d'être "facile" d'écoute. Cela a pour conséquence que le style de l'avant-garde n'a jamais eu trop sa place dans le cinéma (sauf notamment chez Kubrick), même si cela va un peu mieux maintenant.
En parlant de cela, la remarque de Rafik (« mais n'est-ce pas là la raison d'être [ = être bourgeoise] de la culture viennoise ?») me fait tiquer. Non, la musique viennoise n'est pas bourgeoise. Ecoutez les trois viennois cités plus haut (ce que vous avez déjà fait, je pense) et vous jugerez que cela est loin d'être bourgeois. C'est le choix de l'industrie cinématographique de l'époque, qui est bourgeois.
Keep up the good work!
"Prochaine chronique: années 60-70, la mort de l'Empire austro-hongrois."
...J'attends avec impatience !
J'espère aussi que Rafik nous touchera quelques mots de l'utilisation diégétique de la musique, bien différente de la simple illustration. J'ai en tête quelques séquences très réussies où la musique est inclue dans l'action, voire y joue un rôle prépondérant, et apporte un je-ne-sais-quoi qui rend une scène intense, en vrac :
- "Que sera sera" chantée par Doris Day dans l'Homme qui en savait trop (elle chante pour signaler sa présence à son fils séquestré à quelques pièces de là) ou dans le même film, l'attente du coup de cymbale dans l'orchestre, qui correspond au moment où l'assassin doit tirer, et qu'on attend tout en le redoutant.
- La scène de torture dans Le bon, la brute et le truand (l'orchestre joue pour cacher les cris, et "plus l'orchestre joue fort, plus Wallace cogne"). Pour continuer avec Sergio Leone on pourrait parler de l'homme à l'harmonica, qui balance sa mélodie lancinante comme le leitmotiv de sa vengeance, ou encore la petite boite à musique qui accompagne les duels de "l'Indien" dans "Et pour quelques dollars de plus..."
- Dj Cut Killer qui installe sa sono a sa fenêtre dans "La Haine" et fait résonner sur les murs d'une cité transformée en poudrière un mémorable mix "Nique la Police (assassin) / "Je ne regrette rien" (Piaf)...
- Alex rendu fou et physiquement malade par la 5eme symphonie de Beethoven dans Orange mécanique...
Voilà pour ce qui me vient spontanément, à chacun de compléter la liste avec ses exemples...
Je suis sûr que Rafik saura nous en dire quelquechose d'intéressant !
http://nullco.com/TSN/
Enfin il parait ...[/large]
Mais (il y a toujours un mais...) j'ai quand même failli m'étrangler (j'étais en train de manger) quand j'ai lu ceci:
... tandis que Dmitri Chostakovitch compose près d’une quinzaine de partitions pour le grand écran. Cette musique pour films soviétique est néanmoins tenue par les rênes du réalisme socialiste imposé par Staline. Son rapport aux images s’en tient donc à l’abstraction intellectuelle, au symbolisme approuvé par la cause révolutionnaire (souvent par le jeu du contrepoint musical). Il est hors de question, pour ces compositeurs, de céder à un quelconque sentimentalisme qui leur vaudrait l’accusation de "formalisme bourgeois" équivalent à une mise à mort. Cette terreur sourde [...] va très largement contribuer à la stagnation, voire à la régression musicale, suite à quelques mois d’expérimentation tous azimuts.
Mékeskidi ??!!?!? Mais ça va pas non ?
D'abord, Shostakovich en a fait plutôt fait au moins 36, de musique de films, pas "une quinzaine". Mais peut-être vous arrétiez-vous à 1939 (début, parce que ça fait 16 si on compte l'année 39 en entier : il en a fait deux cette année là).
Ensuite, et c'est cela qui m'a le plus choqué, il y a le "Il est hors de question, pour ces compositeurs, de céder à un quelconque sentimentalisme " et la "stagnation" après quelques mois. Ben mon bon monsieur, on n'a pas écouté les même musique de films de Shostakovich. Pour le sentimentalisme, rien que dans Ovod (Le Taon, The Gadfly, 1955), c'en est plein de musique sentimentaliste (comme la romance, la nocturne, etc.), et la scène Cuuuuûûlte où le cardinal s'entretient avec le révolutionnaire (le fameux "Taon") alors fait prisonnier, et ... qu'il découvre que c'est son propre fils (*). La scène est totalement sans musique jusqu'à ce coup de tonnerre symphonique terrible, qui s'enchaine (au moment où le prisonnier dit "Padre!") sur un pizzicato sublimant la plainte nostalgique des cordes. Rhâââ, trop bon !!! (et acteur principal absolument exceptionnel).
Et la stagnation de quelques mois ? C't'uneblaguenon ?
Certes il y a eu de sacrées expérimentations dans les années 30, comme Odna (Seule, Alone, 1931), musique hallucinante, par exemple avec l'utilisation du Theremine, premier instrument électronique (la musique dans la tempête de neige est terrible), musique à foutre une crise d'apoplexie à un Austro-hongrois.
Et La nouvelle Babylone (1929), le premier.
Mais ce n'est pas parce qu'il y a eu de telles expérimentations au début que la suite ne vaudrait pas grand chose. C'est toujours au début qu'on expérimente, après on prend ce qui semble le mieux compte tenu de l'expérience acquise lors des expérimentations. Sinon à quoi ça sert d'expérimenter si c'est pour oublier tout de suite sous prétexte de toujours expérimenter ?
Quand j'écoute Gadfly (déjà décrit), Hamlet (1964), 5 jours 5 nuits (1960), certaines parties du Young Guard (1948), je ne trouve absolument pas qu'il y ait stagnation. C'est du grand et beau Shostakovich.
Ok, The Fall of Berlin, c'est effectivement de la musique de propagande soviétique, mais c'est un peu le thème unique du film (n'empêche que le "Storming Seelov Heights (Zielona Gora)" est quand même sacrément bien).
Et ne venez pas me dire que toute cette musique n'est que de l'Austro-hongrois (même si bien sûr une partie l'est).
Allez, je vous pardonne, personne n'est omniscient, personne n'est parfait. Pour la peine, vous allez gentiment me faire prochainement une superbe chronique rien que sur les films russes ayant eu un certain Dimitri Shostakovich comme compositeur de leur musique. ;-)
(*) oui, il y a un cardinal qui a un fils (fruit de ses oeuvres...) : c'est quand même un film soviétique, hein, fallait quand même s'y s'attendre, à ce que l'Eglise se fasse ridiculiser.
merci !
Je l'ai pris comme un désir d'amener des précisions et de rétablir des subtilités à la suite d'une chronique qui, effectivement, est le condensé brutal, forcément vulgarisateur, d'une Histoire nettement plus complexe.
(je pense que "condensé brutal" pourra faire sourire Daniel, lui qui a failli tourner de l'oeil quand il a découvert la longueur de mon texte. Il m'a donc gentiment proposé de le scinder en deux parties. La seconde partie ressemble donc plus à une conclusion qu'à un nouveau voyage dans la musique de film des années 70 à 2000.)
Ceci dit, pour répondre à quelques points :
- j'ai choisi l'angle de "l'Empire austro-hongrois" parce qu'il met en lumière une influence culturelle bien localisée, à la fois dans l'espace et dans le temps, et qu'il offre un contraste, facile à appréhender pour le lecteur, avec la "culture hollywoodienne" qui se forme durant ces années à Los Angeles. Je me suis donc servi de la nationalité des trois compositeurs principaux cités dans cet article. Mais il va sans dire que leur bagage musical se mêle étroitement à celui de leurs voisins allemands et qu'ils connaissent aussi bien les contours du poème symphonique tel qu'il existait en France (Berlioz) ou en Russie (Rimski-Korsakov)
- Concernant Wagner, son influence (énorme) sur la structure de la musique de film équivaut, à mes oreilles, à son influence sur la musique tout court. Et c'est vrai que, son omniprésence est telle que je n'ai pas pris la peine de le citer (je ne le cite même pas dans la seconde partie, au sujet de Star Wars, film qu'il a pourtant inspiré sur un plan plus que musical). J'ai préféré m'en tenir aux influences directes des compositeurs cités; via leurs professeurs notamment.
- Rien à rajouter sur ce que vous écrivez au sujet d'Aaron Copland. Précisons toutefois que, parmi les films sur lesquels il a travaillé, Le Poney rouge (1949) est celui qui flirte le plus ouvertement avec le genre du Western. Mais cela n'aura pas suffi, à l'époque, à imposer ce style sur un genre qui pourtant l'appelait de tous ses vœux.
- Concernant le rapport des patrons de studio à la musique, ce que je soulignais était leur méfiance vis-à-vis d'une musique qu'on pourrait qualifier de "locale". Je n'ai jamais suggéré qu'ils se détournaient des grands compositeurs de l'époque (Korngold en est un exemple tout de même). Et lorsque vous citez les nombreuses biopics qui se font à l'époque sur les compositeurs, ceci rejoint ce que je disais concernant la place de la musique dans le cinéma américain des années 30; elle doit "justifier" de sa présence. Il ne leur serait pas forcément venu à l'idée d'engager Stravinsky pour qu'il compose "l'underscore" d'un film de gangsters par exemple (et d'ailleurs, ce dernier aurait-il accepté ?)
- Dans le même ordre d'idée, Irving Thalberg (qui, justement, est l'un de ceux qui ont aidé les patrons de studio à s'émanciper de leurs modèles de la vieille Europe) tentait régulièrement de monter des opérations de prestige. Mais ce faisant, en important des grands noms de la scène vers le cinéma, il faisait ce que faisaient ces patrons; il habillait le cinéma d'un prestige venu d'ailleurs, et d'Europe notamment.
- Enfin, concernant le terme "intègre", je l'ai tout simplement chipé dans le livret du CD de la musique des Grands espaces. Je ne sais pas s'il veut dire quelque chose "musicalement", mais il m'a semblé qu'il désignait assez bien la tenue mélodique des morceaux de Moross, la régularité des mesures, et qu'il correspondait assez bien à la mentalité de l'Ouest que cette musique avait la prétention de capturer.
Voilà, pour dire qu'en résumé je suis bien d'accord avec les évènements que Djac rapporte dans son post; mais je pense qu'ils ne contredisent pas les différentes propositions de la chronique.
Bah voyons.
Bien évidemment, celui qui accumule des approximations et des catégorisations taillées à la serpe est un érudit, celui qui tente de rétablir les faits est un cuistre. Bah voyons.
J'ai trouvé votre post très intéressant et je ne pense pas que cela soit le fond qui vous soit reproché mais plutot la forme.
Je persiste donc, même et surtout si votre culture est "véritable".
Donc : il faudrait laisser libre cours aux approximations.
CQFD.
Vouloir à tout prix trouver des approximations et des inexactitudes par principe, ça amène à critiquer tous azimuts, à l'aveuglement... vous fatiguez !!! (je me répète mais je suis tellement fatigué !)
Alors que c'est bien le cœur de la chronique qui est inexact.
Moi c'est ça qui me fatigue, voyez : vouloir à tout prix justifier l'erreur, en rajoutant de l'erreur. Et être très content de soi.
Lorsqu'il vient à la maison nous emprunter une plaquette de beurre ou un demi-litre d'huile, je lui dis toujours:
"-Djac, mon bon Djac, mmmmm...écoute, tu sais que je te reçois toujours avec plaisir à la maison, maiiis...tu sais que tu encombres les rues avec tes machins, là! Bon encore, les majorettes, la fanfare et les chars, ça passe encore, maiiiis.... la patrouille de France, t'es sûr que c'est nécessaire? Tu sais que ça fait flipper les clébards à chaque fois, non?"
Incorrigible, qu'il est. Le gars. Djac.
Vous savez, l'autre jour, sur France Info, j'entends le chroniqueur soi-disant drôle du matin nous causer astronomie. J'ai l'habitude, je sais quelques bricoles, et encore, je ne suis absolument pas professionnel. Mais ça fait mal, toujours, je ne m'y fais pas.
Le gars évoque un article de Ciel et Espace à propos d'Alpha Orionis. Alpha de la constellation d'Orion, plus connue sous le nom de Bételgeuse. Oui, beetlejuice. C'est comme Uranus, ça ne fait rire que les américains. En français, faut dire, ça ne donne rien.
Bon, eh bien le journaliste, il appelle Bételgeuse, Alpha de la galaxie d'Orion. Je vois bien que constellation ou galaxie, ça ne vous empêchera pas de pioncer. Moi, si. Je ne peux pas. Plus de quarante ans après c'est même pire, je deviendrais violent, la radio au micro-onde, ce genre d'horreur me vient tout à coup. Je crie alors qu'il n'est que six heures du matin. J'en pleure. Je sue. Je change de couleur. Je commence à me demander si je ne devrais pas, une fois, y aller, carrément, au siège de la station, et lancer un J'Accuse tonitruant à la fiole de ces tchouk tchouk nougat. Leur dire que j'ai compris que dans tous les domaines qui ne sont pas de ma compétence, c'est forcément pareil. C'est du flan, ça ne veut rien dire. C'est de l'épate mais ça fout des idées reçues dans la tête des gens, dans la mienne donc, que c'est même eux, cette source, qu'ils disent parfois n'importe quoi parce que personne ne sait rien et ne leur dira, qu'ils gagneront éternellement leur croûte à nous apprendre des faussetés qui font que le monde est cubique, un pavé collé qui n'avance pas, alors que ce devrait être une sphère qui roule.
Parce qu'une constellation, c'est un groupe d'étoiles alignées par un effet de perspective, et dont les contours ont été arbitrairement choisis par l'homme. Nous n'avons pas les mêmes d'une civilisation à l'autre. Une sorte de cône dont le sommet est dessiné par l'observateur, et la base, une projection virtuelle sur un fond du cosmos qui n'existe pas. Le contenu du cône est classifié par les astronomes comme appartenant à la constellation.
Une galaxie, c'est une concentration d'étoiles, de matière, de gaz, de particules de toutes sortes, qui peut compter entre quelques millions et plus de mille milliards de masses solaires, plus ou moins retenues par un centre de gravité commun.
Je sais bien que ça ne paiera pas la facture de cacao. Mais puisqu'ici, nous avons la possibilité de réagir et de commenter ce qui est transmis par le chroniqueur, je ne vois pas pourquoi il faudrait s'abstenir, les forums ne sont donc là que pour soutenir Mélenchon, dire son aversion pour Elisabeth Lévy ou déclarer notre amour éperdu à nos préférés de l'équipe d'@si ?
C'est une contribution d'humeur, mais bon, même s'il y a du contenu chez Rafik - qu'on aime ou pas sa fascination pour les genres - il n'est pas infaillible, y a tout de même d'autres plumes ici. D'ailleurs, Rafik lui-même, je ne suis pas le premier à le rappeler, a été recruté suite à un article pour le moins soutenu dans sa critique envers Judith Bernard. Plus soutenu que celui de Djac Baweur.
Et en plein coeur de son domaine de compétence, il a de quoi monter légèrement en température, et il demeure très correct, non ?
Remarquable article où l'érudition le dispute à la pédagogie, et où l'humour discret nappe délicieusement la profondeur du sujet. Et puis, comme toujours, la modestie de l'auteur lui épargne la cuistrerie. Ce qui n'est pas le cas de certain commentateur bien lourd (et long).
Suis bien d"accord avec vous, trop de bave sur ce forum !!!
Sans vouloir trop commenter sur ce qui n'est qu'un chapitre de chronique, j'aimerais juste placer 3-4 trucs :
1) J'ignorais cette expression de "mickeymousing", pour une approche musicale (certes un peu désuette) dont je suis pourtant assez fan. On peut déjà mentionner que c'est resté très présent jusqu'à récemment (on le retrouve encore souvent chez l'indémodable John Williams), et que le très très cruellement regretté John Barry jouait volontiers de ces effets. Une façon de lui rendre hommage en illustrant cela serait de mettre en ligne la scène exemplaire de l'araignée dans "Doctor No", où un James Bond crispé reste immobile dans son lit en attendant qu'une mygale finisse de se promener sur lui, avant bondir et de l'aplatir avec une chaussure : la musique de suspense se termine alors avec des ploum ploum parfaitement sychrones avec les coups de chaussure, ce qui me faire rire à chaque fois.
2) Deux exemples modernes -mais très différents- de la fusion entre musique et effets sonores me sont venus à l'esprit en regardant cet extrait de "Captain Blood". D'un côté les génériques de Morricone intégrant des coups de feu dans "Le Bon la Brute et le Truand" ou des sabots et des feulements de pumas dans "Sierra Torride", effets sonores absents des bandes originales publiées sur disques. D'un autre côté l'étrange musique métallique de Maurice Jarre qui, dans "Mad Max 3", se situe entre l'accompagnement musical destiné au spectateur et l'environnement sonore urbain et technologique des habitants de Bartertown (en particulier 1:20 à 3:20 - dans l'idéal il faudrait pouvoir voir le panoramique qui révèle en simultané cette cité industrielle de bric et de broc).
3) Une autre référence pour les bandes originales sur internet : j'utilise beaucoup Soundtrack Collector de mon côté.
4) Pour les plus anglophones. Sur son remarquable blog, Djak Notre Bon Djak nous avait renvoyés à un spectacle pédagogique de Bill Bailey dans lequel le géantissime comique musical britannique décrypte l'effet d'évocation de certains instruments symphoniques et de certaines formules, à grand renforts d'exemples dans la musique classique et dans la musique de film, et de va-et-viens entre les deux. Il a été ôté de youtube pour des raisons de copyright, mais on le trouve encore ici (pour nous autres qui ne sommes pas près de le voir arriver en DVD). Sans vouloir trop anticiper sur les années 70, son sketch sur les musiques à la Schifrin (en particulier la série Starsky & Hutch) est aussi visible ici.
Me réjouis de lire les chapitres suivants.
L'influence majeure vient de là, tant du point de vue dramatique (les leitmotives - c'est lui ! - et leur développement, ou la mélodie continue), que de l'orchestration (les nappes de cordes, les cuivres, les plans sonores) et de l'harmonie tonale triturée et étirée par les notes étrangères des voix intérieures (voir le fameux accord de Tristan, emblématique des ambiguités tonales provoquées par ce style d'écriture).
Qui plus est, ce style ne doit rien à quoi que ce soit de véritablement hongrois (même si politiquement on a eu droit à l'Empire Austro-hongrois, ça n'en fonde pas un style musical pour autant).
Il faudra m'expliquer "au symbolisme approuvé par la cause révolutionnaire (souvent par le jeu du contrepoint musical)", parce que, dans le genre, la musique d'Alexandre Nievsky par exemple ne se fait pas d'abord remarquer pour son contrepoint (c'est le moins qu'on puisse dire), encore moins pour son abstraction intellectuelle...
Attention, car "Il est hors de question, pour ces compositeurs, de céder à un quelconque sentimentalisme qui leur vaudrait l’accusation de "formalisme bourgeois"" concernant Prokoviev est une autre déformation, car Prokoviev avait un style et un penchant naturellement porté vers un modernisme solide et rythmique, et une volonté de clarté pour une musique qui parle au "peuple", si bien qu'il n'a jamais eu à se forcer à écrire de la musique qui plaisait au régime (d'autant que "sentimentalisme" est un terme assez flou, or Prokoviev usa aussi d'un lyrisme assez sensuel sans que cela n'ai déplut au régime ; de plus, le régime, c'était Staline qui faisait évidemment la pluie et le beau temps, or si celui-ci aimait beaucoup en écouter, il était nul en musique. Non seulement, outre les disposition perverses de Staline à distiller la terreur, les interdits en musique étaient donc du à des problèmes de politiques internes n'ayant rien à voir avec le style musical à proprement parler, mais en plus les jugements émis sur telle ou telle musique pouvaient être parfaitement fantaisistes, au gré des caprices du dictateur.
Attention donc à ne pas caricaturer trop vite en "sentimentalisme interdit par les révolutionnaires...")
Ensuite : "C’est donc un son purement gershwinesque"
Sauf que Gershwin est issu d'un melting-pot à forte tendance Europe de l'est et yiddish, et a appris notamment avec un émigré hongrois (Edward Kileny) qui connaissait très bien Schoenberg (autrichien) et fondait vraisemblablement son enseignement sur le traité d'harmonie de ce dernier...
Gershwin n'a eu de cesse d'être complexé sur sa technique musicale, et a toujours pris des cours et des conseils : entre autres chez Berg (autrichien), ou chez Schillinger (russe), leur influences respectives étant très importantes.
Quant à Copland, il a exactement le même genre de background de départ : juif et russe d'origine, même professeur ; de passage au Conservatoire américain de Fontaineblau en plein Paris des années folles, assistant aux premières parisiennes des Noces de Stravinsky, ou du Pierrot Lunaire de Schoenberg, par exemple. C'est par le biais de cette vie parisienne, notamment influencé par Stravinsky (qui est resté très longtemps à Paris, avant d'émigrer aux États-Unis), qu'il va rejeter la grandiloquence germanique, et préférer la clarté du style français (comme Debussy et Ravel) et la mise en valeur des style baroques et classiques. Ainsi, pour faire vite, le style "americana" de Copland est très directement inspiré de Stravinsky, quelques accents jazzy en plus, - Stravinsky qu'il est donc plutôt étrange (pour ne pas dire plus) de ne pas voir figurer dans cet article (Elmer Bernstein s'inspirant par exemple directement de la symphonie en trois mouvements de celui-ci...).
La dette à Rachmaninov (autre russe) est assez grande également (à noter par exemple le motif principal de Citizen Kane, issu de l'Ile des Morts de Rachmaninov, musique de... Bernard Hermann).
Pour comprendre bien plus précisément et plus finement les avatars d'une musique "savante" proprement américaine (parce qu'ici, c'est quand même taillé à la serpe), et des rapports entre celle-ci et Hollywood (les producteurs n'ont rien à voir avec la constitution complexe d'une musique proprement américaine), une seule adresse : The Rest is Noise, d'Alex Ross.
On peut aussi noter que les studios et producteurs n'étaient à l'origine pas aussi "bouchés" que pourrait le laisser entendre l'article, et que la phrase "le manque de prestige lié au cinéma tient encore à distance les compositeurs les plus acclamés" est fausse : par exemple, le directeur musical de la Paramount, Boris Morros, s'était donné pour mission de recruter des grands compositeurs (Schoenberg,Stravinsky, Copland, Weill et même Chostakovitch qu'il a essayé de se faire "prêter" par l'URSS).
"les gens de cinéma avaient au moins une qualité : ils étaient fous de musique", note Alex Ross - il faut voir, par exemple, le nombre de biopics dans les années 40 sur la vie de grands compositeurs.
Irving Thalberg, directeur de production de la MGM, après avoir entendu la Nuit transfigurée de Schoenberg, voulu le rencontrer, et ça tombait bien puisque Schoenberg était féru de cinéma et désireux d'écrire de la musique pour le cinéma ; celui-ci annonça alors qu'il ne s'engageait que si on lui donnait carte blanche pour toute la bande-son du film, y compris les dialogues.
"- Qu'entendez-vous par carte blanche ? demanda Thalberg incrédule.
- Je veux dire que je travaillerai avec les acteurs, répondit le compositeur. Il faudrait qu'ils parlent sur certaines hauteurs de notes correspondant à la tonalité de la musique, un peu comme dans Pierrot Lunaire, mais en moins difficile, bien sûr." (in. The Rest is Noise)
Suite à quoi Schoenberg demanda un cachet hallucinant de 50000 dollars de l'époque - et la MGM laissa tomber, la Paramount ensuite aussi...
Pour Stravinsky, les producteurs étaient conscients que d'avoir son nom au générique suffirait à en garantir le succès ; Louis B.Mayer, un des patrons de la MGM, est allé jusqu'à lui offrir 100000 dollars de l'époque (1,5 millions d'euros !!!) - mais apparemment Stravinsky, bien qu'enthousiaste lui aussi à écrire pour le cinéma, demandait des délais infiniment trop longs, et un droit de regard sur le produit fini trop exorbitant, les studios ont fini là encore par laisser tomber.
Enfin, une précision sur Mendelssohn : Korngold ne lui a pas juste piqué "des" thèmes, il a fait un arrangement d'une œuvre entière de Mendelssohn : la musique de scène du Songe d'une nuit d'été (Ein Sommernachtstraum op 61) pour chœur et orchestre (et donc en particulier ceci).
Excellent article !
Je me permets, si vous voulez en savoir plus sur la Musique de film, de vous conseiller la consultation de Cinezik.fr, référence dans le domaine depuis 5 ans (cela permettant de rectifier une omission, puisque l'article l'oublie dans sa webographie).
Le lecture de ce site peut anticiper les prochains numéros de l'article de Rafik, notamment sur le dernier épisode que j'imagine au sujet des compositeurs d'aujourd'hui (en lisant dans le site les interviews de Patrick Doyle, Hans Zimmer, Klaus Badelt, Cliff Martinez, Marvin Hamlisch, John Ottman, Michael Giacchino, Christopher Young...).
Concernant la discussion au sujet du Leitmotiv, je signalerais l'un de mes compositeurs préférés : Bernard Herrmann, qui excellait dans l'exercice d'associer une phrase musicale à un élément du récit (personnage, objet ou situation...). L'hommage de la Cinémathèque à Hitchcock permet de revenir sur ce maître de la musique de film.
Grand amateur de musique post-romantique à la Mahler, je sais désormais pourquoi j'apprécie aussi les grands classiques d'Hollywood.
Avec impatience, le décryptage de la Marche Impériale zt de l'Hymne Rebel, j'attend.
Est-ce que motif et leitmotiv veulent dire la même chose?
Quand vous parlez de structure harmonique intègre, est-ce un terme musical, ou bien le sens habituel, par opposition à corrompu? Parce que comme il est ailleurs question du style bourgeois comme "raison d'être de la culture viennoise" (un sacré raccourci!), on a l'impression d'une opposition entre pur et impur.
I) Grandeur et décadence de l'empire austro-hongrois"
I) comme I) II) III)... ?
Je m'en vais prestement lire (et écouter !) ça !