Le "populisme", c'est quoi ?
Alors que le terme «populiste» circule dans la parole publique comme une invective dont le sens serait admis par tous, il n’est pas inutile de se demander d’où nous tenons ce sens prétendument évident: la une du Monde de dimanche dernier sert de point de départ à une petite enquête lexicale qui fait apparaître que l’usage public de la notion s’est établi, depuis une décennie, dans un horizon sémantique éminemment discutable, que Le Monde, dans ses colonnes, se garde bien de discuter.
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L’ignorance des citoyens fait le jeu des groupes de pression et des ambitions politiciennes. Mais, au-delà de ces observations classiques, il faut souligner l’irrationalité de l’électeur, dont le vote est d’abord dicté par ses préjugés. Faut-il pour autant restreindre le suffrage à la fraction la plus compétente de la population.
Pourquoi se donner la peine de voter?? La probabilité qu’une seule voix modifie le résultat d’une élection est pratiquement nulle et se rendre aux urnes n’est pas sans coût, en termes de temps et d’activités sacrifiées. L’élection présidentielle américaine, à laquelle participent plus de cent millions de personnes, ne se joue jamais à un bulletin près. La leçon du scrutin contesté de 2000 n’était pas « votre voix peut faire la différence » mais plutôt « si vous vous donnez la peine de vous déplacer, remplissez au moins le bulletin correctement?(1) ».
Pourtant, bien des gens se soucient de voter. Nous les en félicitons et encourageons les abstentionnistes à suivre leur exemple. Nous avons tendance à croire que la participation politique est un bien sans mélange, un symptôme de santé et de vertu civiques.
L’économiste Bryan Caplan pense, lui, qu’augmenter la participation électorale est une erreur. Même à son niveau actuel – environ 50?% des inscrits lors de la présidentielle, pourcentage beaucoup plus faible que dans la plupart des démocraties, comme les Américains se le voient souvent rappeler –, il pense que c’est une mauvaise chose?(2). Caplan est le genre d’économiste (y en a-t-il d’autres?? cela doit bien exister) capable d’entamer le dialogue avec les profanes à la manière d’un bulldozer discutant avec une palissade. L’image de couverture de son livre montre un troupeau de moutons, censé symboliser la communauté des votants. Qui plus est, on dirait un troupeau de moutons clonés.
Les économistes et les politologues ne tiennent pas l’électeur moyen en haute estime, et Caplan énumère quelques-unes de leurs raisons. La thèse de son livre, cependant, est qu’ils ont mal compris le problème : ils pensent que la plupart des votants sont ignorants des enjeux. Caplan, lui, estime que la plupart se trompent à propos de ces enjeux, ce qui est différent, et que leurs idées fausses engendrent des politiques néfastes pour la société dans son ensemble. Si le gouvernement adopte de mauvaises mesures, pensons-nous généralement, c’est parce que le système fonctionne mal, et il fonctionne mal parce que les électeurs sont piètrement informés, sensibles à la démagogie, ou que des groupes de pression viennent contrarier l’intérêt général. Caplan pense que tout ceci est inhérent à la démocratie : non pas des anomalies du processus, mais ce que l’on peut attendre d’un système conçu pour satisfaire les désirs du peuple. « La démocratie échoue, affirme-t-il, parce qu’elle fait ce que veulent les électeurs. » On dit parfois que le meilleur remède contre les maux de la démocratie est plus de démocratie. Caplan pense que le meilleur remède est moins de démocratie. Il n’écrit pas tout à fait que le monde devrait être gouverné par les économistes, mais il n’en est pas loin.
Les connaissances politiques de l’électeur moyen ont été maintes fois évaluées et les résultats sont des plus médiocres. Les sondages effectués depuis 1945 révèlent qu’une majorité d’Américains est incapable de citer un seul des trois grands pouvoirs constitutifs de l’État, de définir les termes « progressiste » et « conservateur » ou encore d’expliquer ce qu’est la Déclaration des droits?(3). Plus des deux tiers ignorent en quoi consiste le célèbre arrêt Roe contre Wade [qui a autorisé l’avortement en 1973], ou quel est le rôle de la Food and Drug Administration [l’office de contrôle des produits pharmaceutiques et alimentaires]. Près de la moitié ne sait pas que chaque État est représenté par deux sénateurs, et les trois quarts ignorent la durée de leur mandat. Plus de 50?% des Américains sont incapables de citer le nom de leur député et 40?% ne connaissent pas celui de l’un ou l’autre de leurs sénateurs. Les électeurs ont une vision complètement déformée des dépenses publiques : ils croient que l’aide internationale représente 24?% du budget fédéral, par exemple, alors que le chiffre réel est d’environ 1?% [lire « L’ignorance de l’électeur », Books, novembre 2010, p. 68-72, et dans ce numéro, « Sainte ignorance » p. 29].
Mis à part cette méconnaissance des notions élémentaires, la plupart des gens ne pensent tout simplement pas en termes politiques. Par exemple, ils ne comprennent pas qu’on ne peut à la fois être favorable à une baisse des impôts et souhaiter une augmentation des dépenses publiques. Leur appréhension d’expressions comme « discrimination positive » et « protection sociale » est dangereusement aléatoire : si l’on demande aux gens s’ils approuvent une hausse du budget de la protection sociale, la plupart répondront non?; si on leur demande s’ils soutiennent une augmentation de l’aide aux démunis, la plupart répondront oui. En outre, dans la durée, les individus donnent des réponses différentes aux mêmes questions. Les citoyens ne consacrent tout bonnement pas beaucoup de temps à s’informer sur les questions politiques ou à réfléchir à leur propre position. Ils peuvent avoir un avis – interrogés sur la peine capitale ou les accords de libre-échange, la plupart s’exprimeront – mais celui-ci n’est fondé ni sur les faits ni sur une philosophie politique cohérente. Il relève plus de la posture que de la réflexion.
De bonnes raisons de ne pas s’informer
Depuis cinquante ans, il est courant d’expliquer l’ignorance des électeurs en termes économiques. Caplan cite le livre classique d’Anthony Downs An Economic Theory of Democracy [« Une théorie économique de la démocratie », 1957, non traduit en français]. Selon Downs, « il est irrationnel d’être politiquement bien informé parce que les maigres résultats obtenus ne justifient pas l’investissement en temps et en ressources diverses ». Autrement dit, ce n’est pas la peine de consacrer du temps et de l’énergie à me renseigner sur les candidats et les enjeux, car mon bulletin ne peut changer l’issue du scrutin. Jamais je n’achèterais une automobile ou une maison sans un examen approfondi parce qu’il m’en coûtera si je fais le mauvais choix. En revanche, si j’avais voté pour le candidat n’ayant pas ma faveur à chaque élection présidentielle depuis le début de ma vie de citoyen, cela n’aurait rien changé pour moi (ni pour personne d’autre). Cela n’aurait rien changé si je n’avais pas voté du tout. Ceci ne veut pas dire que je ne me rendrai pas aux urnes ni que je me désintéresserai du résultat. Simplement, rien ne m’incite à m’informer davantage sur les candidats ou sur les enjeux, parce que le prix de mon ignorance est, par essence, zéro. Si l’on en croit ce modèle économique, les citoyens ignorent tout de la politique non parce qu’ils sont stupides, mais parce qu’ils sont rationnels. Si personne ne vote, le système ne fonctionne pas. Mais si, moi, je ne vote pas, le système fonctionne très bien. Je trouve donc des moyens plus féconds d’occuper mon temps.
Les politologues ont proposé diverses théories pour sauver un tant soit peu la dignité du processus démocratique. L’une d’elles veut que les élections sont décidées par les quelque 10?% d’électeurs bien informés et dotés d’une vision politique cohérente. Selon cette thèse, les votes des autres s’annulent, puisque leur choix est effectivement aléatoire : c’est comme s’ils tiraient à pile ou face. Les candidats s’adressent donc aux citoyens avertis qui jugent sur le fond, rendant ainsi le résultat d’un scrutin politiquement significatif. Selon une autre thèse, l’électeur moyen se sert de « raccourcis » pour choisir un candidat. Le parti politique en est un évident : si l’on a décidé que l’on préfère les démocrates, on n’a pas vraiment besoin de plus d’informations pour voter?(4). Cela peut prendre aussi d’autres formes : les commentaires d’un collègue ou d’un parent réputé pour la pertinence de son jugement, une révélation médiatique, voire une photographie, qui peuvent être utilisés pour calculer à la va-vite la valeur d’un candidat. (Bien entendu, la question de savoir si ces raccourcis sont des substituts valables d’une information plus complète reste débattue.)
La sagesse des foules
Il existe aussi la théorie du « Miracle de l’Agrégation », pour reprendre l’expression de Caplan. Comme l’a montré James Surowiecki dans La Sagesse des foules, un grand nombre de personnes dotées de connaissances partielles et de degrés variés d’intelligence et d’expertise obtiendront ensemble de meilleurs résultats – ou des résultats plus exacts – qu’un petit nombre d’experts très intelligents de même sensibilité?(5). C’est ainsi que fonctionnent les marchés boursiers, mais cela peut s’appliquer à bien d’autres domaines : évaluer les chances de gain dans un pari sportif ou deviner le nombre de bonbons dans un bocal. Les informations et le sens politique dont dispose un électeur isolé sont limités, mais cent millions d’électeurs, disposant chacun d’une certaine quantité d’informations et d’un certain sens politique, donneront le résultat « juste ». Il y a enfin l’argument selon lequel les citoyens se comportent dans les urnes de la même manière que sur le marché, en fonction de leur intérêt personnel. Sur le marché, une attitude égoïste aboutit à l’intérêt général, et il devrait en être de même sur la scène électorale [lire ci-dessous « Une main invisible?? »].
Caplan pense qu’il est impossible de sauver la démocratie telle qu’elle est pratiquée aujourd’hui, et sa position est fondée sur une observation simple : « La démocratie est un bien commun, pas un marché. » Un bien commun est une ressource publique non réglementée : l’exemple classique, cité dans le célèbre article de Garrett Hardin « La tragédie des biens communs », c’est le terrain communal, un pâturage public sur lequel chacun peut faire brouter son troupeau?(6). Un éleveur a intérêt à faire paître autant de bêtes qu’il le peut, puisque la ressource est gratuite, mais la surexploitation du pré finira par le détruire. La recherche de l’intérêt individuel entraîne donc un préjudice collectif. (Hardin traitait de la croissance démographique : on peut être préoccupé par la surpopulation tout en décidant d’avoir un autre enfant, car l’inconvénient pour un individu d’ajouter une personne sur la planète est bien inférieur à l’avantage que lui procure cet enfant.)
Caplan rejette l’hypothèse que les électeurs ne s’intéressent pas à la politique et n’ont pas de véritables opinions. Il pense que les citoyens ont bel et bien des idées, qui sont fondamentalement des préjugés. Il qualifie ces convictions d’« irrationnelles » car, une fois traduites en décisions, elles aggravent la situation de tout le monde. Non seulement, selon lui, les gens ont des conceptions irrationnelles, mais ils les aiment. En langage économique, on peut tracer une courbe de la « demande d’irrationalité » : on renoncera à une quantité y de richesse pour consommer une quantité x d’irrationalité. Comme voter ne coûte rien ou presque, les électeurs sont libres d’être aussi irrationnels qu’ils le veulent. Ils peuvent se désintéresser des conséquences, tout comme le fermier peut se désintéresser des conséquences de l’ajout d’une vache sur le pré communal. « Le vote n’est pas une variante du shopping, explique Caplan. L’acheteur a des raisons d’être rationnel. Pas l’électeur. »
L’auteur soupçonne les citoyens de nourrir des opinions irrationnelles sur toutes sortes de sujets, mais il s’intéresse exclusivement à celles qui concernent la politique économique. L’individu moyen est selon lui victime de quatre biais cognitifs en la matière – quatre principaux champs de désaccord avec l’expert. Le non-économiste type ne comprend pas ou n’apprécie pas la façon dont les marchés fonctionnent (il est par conséquent favorable à la régulation et méfiant envers la recherche du profit), n’aime pas les étrangers (il a donc tendance à être protectionniste), assimile la prospérité à l’emploi plutôt qu’à la production (il surévalue donc la sauvegarde des postes existants), et pense généralement que la situation économique ne fait qu’empirer (il est donc partisan de l’intervention de l’État). Les économistes savent que ces opinions sont irrationnelles, puisque l’individu moyen bénéficie en réalité du jeu de la concurrence, qui permet de fournir le meilleur produit au meilleur prix?; il profite aussi du libre-échange, qui (pour le consommateur) abaisse en général le coût du travail et donc le prix des marchandises?; il tire enfin avantage du changement technologique, qui réoriente la main-d’œuvre des moins productives vers les plus productives des entreprises.
Des électeurs plus altruistes qu’on le croit
Les préjugés du non-économiste forment une vision profane du monde à laquelle les gens se cramponnent dogmatiquement, comme ils se cramponnaient naguère à leur foi religieuse, pense Caplan. Ils ne votent pas en fonction de leur intérêt personnel, suggère-t-il : ils sont beaucoup plus altruistes que ne le veut le modèle standard de l’électeur-consommateur. Ceci explique le phénomène – déconcertant pour bien des observateurs de la vie sociale – de l’ouvrier sidérurgiste soutenant la suppression des droits de succession et du producteur d’Hollywood favorable à son maintien. « C’est précisément parce que les gens mettent leur intérêt personnel de côté quand ils entrent dans l’arène politique, écrit Caplan, que les erreurs intellectuelles se transforment facilement en mesures stupides. » Les citoyens pensent vraiment que leur pays irait mieux si les profits étaient régulés, si les produits étrangers étaient taxés et si on empêchait les entreprises de réduire les effectifs. Les candidats qui flattent ces convictions ont davantage de chances d’être élus, pour le plus grand bénéfice des lobbies protectionnistes et anticoncurrentiels, pas pour celui de la population. Le résultat, à terme, est un déclin du niveau de vie.
Caplan y insiste : il n’est pas un fondamentaliste du marché, mais pense vraiment que la plupart des économistes placent trop haut le niveau optimal de l’intervention de l’État, car ils surestiment les vertus de la démocratie. Il fait quelques suggestions pour remédier aux maux du suffrage universel (bien qu’il ne s’y attarde pas, pour des raisons qui vous apparaîtront peut-être d’emblée en les lisant) : demander aux électeurs de passer un test de compétence en économie?; donner des voix supplémentaires aux citoyens les plus avertis en la matière?; réduire ou supprimer les actions de promotion de la participation électorale?; exiger davantage de leçons d’économie à l’école, même si cela oblige à supprimer certaines heures dans d’autres matières, comme les lettres classiques?; donner à la population des cours d’initiation à l’économie sans faire les réserves habituelles sur les limites du marché. Il a le sentiment que, si le pays était dirigé conformément aux convictions des économistes professionnels, tout le monde s’en porterait mieux?(7). À défaut d’atteindre cet idéal, il soutient tous les moyens nécessaires pour amener chaque électeur à penser comme un économiste. Il veut faire monter le prix du vote.
Il est difficile de savoir si ce livre a été écrit seulement dans l’intention de provoquer ou si ses recommandations doivent être prises au sérieux (et par qui??). Il conteste notamment certaines hypothèses sur le comportement électoral, émises par les tenants de ce qu’on appelle la théorie du choix collectif [lire ci-dessous « Une main invisible?? »]. Caplan a réuni un grand nombre de données qui révèlent des disparités importantes entre l’opinion du commun des mortels et celle des économistes : les premiers pensent que le prix de l’essence est trop élevé, par exemple, alors que la plupart des experts pensent qu’il est à peu près juste ou trop bas?; le quidam croit que la plupart des nouveaux emplois créés aux États-Unis sont mal payés, pas les économistes?; le commun des mortels pense que les dirigeants d’entreprise touchent des rémunérations excessives, pas les spécialistes. La thèse de Caplan?? Les opinions de l’électeur ne sont pas aléatoires, fruits d’une « ignorance rationnelle » : elles traduisent des biais systématiques découlant d’une compréhension erronée du fonctionnement des économies.
Les opinions stupides, rançon la stabilité démocratique
Mais, comme il le sait sûrement, bien qu’il n’y insiste pas suffisamment, les racines du problème, si c’en est un, sont plus profondes. Ce n’est pas une question d’information ou de manque d’information, mais de psychologie. La plupart des gens ne pensent pas en termes politiques, et ils ne pensent pas non plus comme des économistes. Ils exagèrent le risque de perte?; ils aiment le statu quo et le considèrent généralement comme une norme?; ils réagissent de façon excessive aux informations sensationnelles mais non représentatives (le phénomène de l’attaque de requin?(8))?; ils paieront des sommes extravagantes pour punir les tricheurs, même s’ils n’en tirent personnellement aucun avantage?; et ils placent souvent l’équité et la réciprocité au-dessus de l’intérêt individuel. La plupart des gens, même si on leur expliquait quel est le choix économiquement rationnel, rechigneraient à le faire car ils attachent de la valeur à d’autres choses – en particulier, ils veulent se protéger contre les inconvénients du changement. Ils préféreraient se sentir en paix avec eux-mêmes plutôt que de maximiser (même légitimement) leurs profits, et ils préféreraient ne pas avoir davantage de quelque chose plutôt que de courir le risque, même s’il est faible, d’avoir sensiblement moins [lire ci-dessous « Biais cognitifs »].
Autrement dit, les gens sont moins modernes que l’époque dans laquelle ils vivent, et l’incapacité des économistes à le comprendre est précisément ce qui peut leur donner l’air de bulldozers. « Quand la technologie met les individus au chômage, ils sont incités à trouver une nouvelle manière d’utiliser leurs talents », dit Caplan, à propos de la préférence pour l’emploi au détriment de la productivité. « Réduire les effectifs des salariés superflus les conduit à chercher des moyens socialement plus productifs d’exercer leurs capacités. » Ce mécanisme, explique-t-il, s’appelle la rotation de l’emploi. Il n’est pas difficile de comprendre pourquoi le commun des mortels envisage une perte d’emploi avec moins de sérénité.
Résoudre la tension entre des choix politiques « rationnels » et des préférences et angoisses « irrationnelles » – entre l’attrait d’une productivité accrue et le désir de sauvegarder un mode de vie – est le cœur même de la vie démocratique. C’est une opération délicate. Le scrutin universel la rend encore plus délicate. Si toutes les décisions relevaient du simple calcul économique, il serait peut-être en effet plus commode et préférable pour tout le monde de voir les seules personnes maîtrisant l’économie participer au processus politique. Mais bien des questions politiques n’ont pas de réponse optimale. Elles impliquent des valeurs âprement disputées : quand la vie commence-t-elle?? la liberté est-elle plus importante que l’égalité?? comment réussir l’intégration raciale (et d’ailleurs, que peut-on considérer comme une authentique intégration)??
À la fin, le groupe qui sort vaincu doit respecter le résultat, considérer comme légitimes les souhaits de la majorité. Ce n’est possible que s’il a eu l’impression de pouvoir s’exprimer, même si cette expression est, dans les faits, symbolique. Une vertu essentielle du régime démocratique est la stabilité. Tolérer des opinions stupides (pour parler comme un économiste) n’est qu’un modeste tribut à payer pour cela.
Cet article est paru dans le New Yorker le 9 juillet 2007. Il a été traduit par Béatrice Bocard.
Vous dites :
"Dire que nous ne sommes que des êtres humains et que nous pourrions donc nous retrouver tous dans cette simple humanité est illusoire et va entrainer des tensions incontrôlables."
C'est une phrase que j'entends, et sur laquelle on peut s'accorder. Il faudrait définir les notions de "contrôle", d'illusion. Sachant que tout idéal est forcément un peu illusoire, et que l'avenir et forcément un peu incontrôlable. En gros, il est illusoire d'espérer que les choses ne soient pas incontrôlables. Bref...
Par contre, de cette réflexion, vous passez à :
"Dans aucun pays au monde les tensions culturelles, religieuses, ethniques n'ont été effacées. Au contraire le communautarisme se développe partout où les libertés sont les plus fortement affirmées.
Aux USA les communautés noires, hispaniques, asiatiques, etc..... se regroupent parce que cela rassure de se retrouver avec des individus partageant ses valeurs."
Le particulier. On ne peut, si je résume, réunir les hommes sur leur simple appartenance à l'espèce humaine, parce que, par exemple, le communautarisme existe. Si l'appartenance à l'espèce humaine est de l'ordre du structurel, on ne peut voir selon moi le communautarisme que comme un aspect conjoncturel. Et vous n'avez aucune preuve que l'un induit l'autre. Les tension religieuses dans le monde ne sont pas le seul fait du religieux. D'ailleurs, il est souvent réducteurs de parler de tensions religieuses.
Je lisais cette semaine dans le canard enchaîné qu'un Imam homosexuel ayant découvert l'islam en Chine, militait aujourd'hui pour le MPT (aux USA of course).
Deuxième salve du particulier, vous me parlez de l'Union Européenne. Cette union à 50 ans. Un peu plus si l'on considère que les rois qui se mariaient en étaient les prémices. Mais quel âge à l'homme?
Gommer une particularité culturelle, ça commence quand un homme en rencontre un autre. C'est normal. Finalement, la culture, c'est un peu comme une stratégie pour communiquer autrement. Rien de bien extraordinaire que cette rencontre occasionne un échange, fasse évoluer le culturel. Si cette rencontre ne concerne pas deux mais mille personnes, le mélange se propage. Avec des heurts parfois.
Encore une fois, je parle là de votre argumentation qui prend un fait particulier, pour en faire une constatation sur le général. Mais sans se pencher sur les mécanismes qui vont de l'un à l'autre. Ou alors en allant beaucoup trop vite selon moi.
Cette argumentation vous amène à des conclusions que je ne partage pas et que je trouve erronées. Oui l'homme doit prendre conscience de sa finitude, oui il doit s'imposer des barrières. Mais votre analyse de l'ordre des choses étant conjoncturelles, orientée, les barrières que vous suggérez n'ont pas de réelle pertinences.
Je ne sais pas si vous allez bien le prendre mais vous me semblez assez idéaliste. Ce que je crains c'est que cet idéal se heurte à la réalité et que cela se fasse au prix de souffrances.
C'est tout à fait ça. Je dois être idéaliste, bien que je me crois pragmatique... Et nul besoin de craindre quoi que ce soit, cet idéal se heurte et se heurtera au prix de souffrance... C'est ça l'ordre des choses.
Je vous fait une réponse groupé sur un point précis. Le libéralisme.
Vous semblez tout deux assimiler Libéralisme et MPT.
Les questions que vous évoquez me travaillent beaucoup, mais je ne fais pas la même analyse que vous.
Je voudrais donc vous présenter une résumé de la façon dont je vois certaines choses pour que vous jugiez par vous même de mon libéralisme.
Je pense que nous sommes une espèce sur une planète.
Dans ces conditions, je pense que notre avenir est lié.
Je vois deux nécessités : s'assurer que la génération suivante vive au moins aussi bien que la précédente, et être heureux.
Par conséquent, je ne crois pas à la liberté d'initiative. On ne devrait pas avoir le droit de s'habiller comme on veut, de consommer ce qu'on veut, de se déplacer comme on veut, de produire ce qu'on veut, de se loger comme on veut....
L'intérêt général doit passer en premier.
Évidemment, le principal problème de se constat est l'aspect dictatorial de ce système. Je pense qu'il faut trouver dans l'ensemble de ces contraintes une forme de liberté. Ces concepts de culture, normes, valeurs sont pour moi bien abstraits. Je vois plus ou moins ce qu'il faut éviter. Stigmatisation, séparation, injustices, intolérance... Quant à ce qu'il faut faire, je dirais que l'avenir le dira... Ou pas.
Pour moi, le MPT a avoir avec le culturel et non avec l'intérêt général.
Je suis pour la liberté culturelle, je suis un libéral de la culture... Dans la mesure où elle ne nuit pas à l'intérêt général.
Nul besoin de le maintenir, je ne le nie pas : je vous apporte ma contradiction.
"Prouvez moi que vous n'êtes pas fou, et je vous croirai.
La moindre des choses me direz vous serait que ce soit moi qui m'en charge."
La charge de la preuve vous revient effectivement, c'est vous qui portez l'accusation.
"Pour les enfants, c'est pareil. C'est aux personnes qui sont contre le MPT de prouver que les enfants ne seront pas normaux."
Inexact : le mariage a toujours été réservé aux hétéros, c'est vous qui souhaitez changer cela : c'est donc à vous d'apporter les preuves que ce MPT n'enclenchera pas un changement de civilisation (et contredire Madame Taubira) et que cela n'aura pas de conséquences fâcheuses.
"Et vos théories sur la petite enfance qui serait une période différente, je pourrais trouver autant de théories qui disent l'inverse des vôtres."
Monsieur Rufo fait partie des nombreux experts qui partagent ce que vous nommez "mes théories". Vous pouvez sans doute présenter des pédo-psychiatres ou autres experts qui avanceront le contraire. Tout comme moi vous ne pouvez pas prouver vos assertions.
"C'est à vous de prouver ce que vous souhaiter interdire."
Non, c'est à vous de prouver ce que vous voulez autoriser. Pour mettre sur le marché un nouveau médicament on ne somme pas l'Etat de prouver que ce médicament est nocif, puis, sans réelle preuve à 100 % de cette nocivité on le lance sur le marché. Les laboratoires sont obligés de produire leurs tests et de faire la preuve de l'innocuité de leur médicament. Et en cas de doute, le médicament n'est pas lancé sur le marché.
Ce sont les LGBT qui veulent changer le mariage et la filiation : c'est à eux d'apporter des preuves.
En cas de doute, le principe de précaution devrait amener à censurer ce projet.
"Moi je suis moi même et je n'interdis rien du tout parce que justement je n'ai pas de certitudes."
Vous êtes vous même : je ne vois pas comment il pourrait en être autrement. C'est aussi mon cas, je suis aussi moi-même.
Si, vous avez la certitude que ce projet ne représente aucun risque de dérive : je suis certain du contraire.
"Sinon, dans ce que vous dites, il y a un argument qui tient la route.
Le problème de la GPA."
Cela sonne un peu condescendant de bien vouloir accorder du crédit à UN seul de mes arguments. De m'accorder cela n'invalide en rien mes autres arguments.
"Oui, ce concept, s'il devient commercial (bien avant e-bay je vous rassure) m'inquièterait énormément. L'idée qu'une femme pauvre soit contrainte de louer son Utérus à un couple riche me dérange.
Mais cela, arrêtez moi si je me trompe, existe déjà, vous l'avez dit, mais surtout, n'est en aucun cas réservé aux homosexuels.
Je ne vais pas insinuer que cette pratique commence à vous déranger au moment du MPT, mais je dis simplement que c'est un autre problème puisque il concerne 100% des couples concernés!"
N'insinuez rien, je vais l'écrire pour vous : cette pratique est effectivement plus dangereuse si elle devait être reconnue après le MPT (même si la pratique était encadrée).
La GPA n'est réservée à personne déjà du simple fait qu'elle est juridiquement interdite.
Ensuite je trouve étrange de vouloir justifier une pratique interdite sous prétexte que certains s'y livrent en réalité et en infraction. Je suis contre la légalisation du cannabis et contre la libre circulation des armes (même si des joints circulent déjà, tout comme des armes)
Et enfin la GPA ne concerne pas les homos comme elle concerne les hétéros :
- 100 % des gays qui voudront "faire" un enfant devront se le "faire faire" avec la GPA
- 100 % des hétéros qui voudront faire un enfant essaieront naturellement, puis AMP avec leurs propre "matériel génétique", puis FIV avec leur propre matériel génétique, puis FIV avec donneur tiers, puis GPA.....pour le peu d'hétéros qui n'auront pas réussi à faire un enfant via toutes ces autres techniques. Un très faible pourcentage des hétéros aurait recours à la GPA si elle était légalisée
Cela me semble important, tout de même, comme différence :
- 100 % des gays n'ont que la GPA pour avoir un enfant
- un très faible pourcentage d'hétéros pourront avoir recours à la GPA si de nombreuses autres possibilités ont échoué.
Je ne doute pas que vous le croyez, mais la reconnaissance des droits des homos à avoir des enfants par eux-même (avec l'adoption plénière) leurs permettra, à terme, d'avoir recours à la GPA. D'ailleurs, je ne sais pas pourquoi j'écris "à terme" puisque c'est déjà le cas. Et le moment ne va pas tarder où on nous expliquera que "puisque cela existe dans d'autres pays, il faut l'accepter en France sinon les gays iront dans d'autres pays acheter leur enfant avant de rentrer en France avec". Madame Taubira a déjà envoyé aux tribunaux d'instance une circulaire les autorisant à délivrer la nationalité française aux enfants nés d'une mère porteuse.
Certains paieront un prix à des tiers (femmes plus probablement peu aisées financièrement) pour s'offrir un enfant. Libre à vous de n'y voir aucun échange et aucune trace de libéralisme.
"Et encore une fois, si demain, des enfants ou des éventuelles mères porteuses se proposent sur E-bay, je serai contre."
Si vous attendez une manifestation aussi grossière qu'une vente E-bay pour réagir, vous allez être surpris. Je ne crois pas cela possible, mais si ça devait être le cas c'est que ce serait déjà trop tard et vous n'y pourriez plus rien faire.
"Vous n'avez aucune preuve, vous écrivez : "Les homos, pour moi, ne sont pas aptes à fournir un équilibre suffisant à l'enfant par rapport à la nécessité de l'altérité sexuelle". "Mais qui êtes vous pour affirmer une chose pareille?"
Et qui êtes vous pour soutenir le contraire ? Vous n'avez pas de preuve du contraire non plus.
Vous n'êtes sans doute pas seul à penser ce que vous pensez, mais moi non plus :
http://www.psychologies.com/Famille/Etre-parent/Mere/Articles-et-Dossiers/Homos-et-parents/9
"Et puis la nécessité de l'altérité, ça sort d'où?"
C'est ce qui vous a permis de naître et ce qui fait qu'une femme est différente d'un homme.
"Vous faites un amalgame entre faire un enfant, partie facile, et l'élever, là où les choses se gâtent."
Facile de faire un enfant ? Je ne connais pas un couple d'homo qui y soit arrivé, et cela ne va pas arriver de si tôt.
Il y a la contraception pour ne pas le faire n'importe quand, les cycles à respecter, l'alimentation à surveiller, des examens à passer. Les homos vont sous-traiter cela auprès de fournisseurs : les mères-porteuses.
Et je n'ai jamais nié la capacité des homos à élever des enfants quand les choses se gâtent vraiment : après la petite enfance, pendant l'adolescence etc....
"Encore une fois, vous choisissez ce qui vous arrange et déformez le reste. 100% des couple ne pouvant pas faire d'enfant ont recours à une aide extérieure."
Et 100 % des couples pouvant faire des enfants sont hétéros. 0 % sont homos
" Aucune statistique ne confirme votre crainte quant à la santé mentale des futurs rejetons."
Aucune statistique n'invalide ma crainte.
"Ce n'est pas une question de recherche de liberté à tout crin."
C'est une question de participer à une tendance libérale, économique et sociétale, qui se généralise.
"Ma vision à long terme repose plus sur ce que seront les individus que la façon dont ils auront été élevés. Vous, vous avez tellement les idées claire que vous savez à l'avance qui à le droit de quoi faire et qui n'a pas le droit."
Je ne suis ni meilleur ni pire que vous : je suis comme vous, j'ai mes opinions, mes convictions et je les défends.
Je désapprouve les dérives que ce projet impliquera, vous postulez que ces dérives sont illusoires.
"C'est ça le diktat. avoir une vision et l'imposer aux autres (homos et hétéros). Et ne me dites pas que j'impose la mienne. Je n'interdis pas à autrui ce qui n'est nuisible pour personne."
Et bien si, vous imposez la vôtre. Sous prétexte que vous refusez de voir certains enchaînements logiques et implacables (MPT, AMP, GPA) vous postulez que ce projet n'apportera que de bonnes choses et qu'il ne nuit à personne.
Moi je soutiens que d'imposer la notion de parent social à tous, avec les dérives que cela induit, sera néfaste pour tous.
Donc je refuse ce que vous appelez diktat : pour moi ce "diktat" sera imposé par l'activisme LGBT.
Taubira "C'est une réforme de société et on peut même dire une réforme de civilisation"
Une minorité d'individus imposent une réforme de civilisation à la totalité de la population pour se voir reconnu un droit (la filiation) qui nécessite l'intervention d'un tiers et qui implique d'imposer la notion de "parent social". Une petite minorité impose sa vision à la large majorité pour satisfaire leur volonté. La majorité se plie aux volontés des individus : libéralisme (il n'y a rien au-dessus de la volonté individuelle)
"Si vous souhaitez l'interdire, c'est que vous êtes prêts à priver certaines personnes de liberté pour que la civilisation ressemble à l'image que vous voulez. Le reste n'est à mon avis que spéculation."
Précisément, nous sommes d'accord. Je veux restreindre la liberté des homos de vouloir faire des enfants (alors qu'ils en sont incapables) pour conserver la prévalence du modèle existant et éviter l'institutionalisation du parent social (qui implique AMP, GPA, multiparentalité, commerce des enfants etc....). Je m'oppose à cette vision libérale du monde. Nous ne sommes pas obligés d'institutionnaliser la volonté d'un groupe de personne sous prétexte que "cela ne change rien à mon quotidien". Mais il est permis de s'y opposer quand on perçoit, à moyen et long terme, des dérives que l'on condamne.
Les homos, eux aussi, veulent imposer leur monde : ils vont sans doute gagner. Je m'inclinerais devant cette probable victoire mais je ne serai toujours pas d'accord.
Je voulais réagir, à l'origine, à votre réponse faite au post de Komodor.
Mais finalement, notre échange m'aura permis je l'espère de clarifier ma pensée. Vous répondez à Komodor que le texte de
Michéa exprime bien le problème de la bienpensance. Problème que vous rapprochez du sujet du MPT. En rapprochant ces deux objets, bienpensance et MPT, vous donnez une nouvelle dimension à la position anti MPT. combattre la bienpensance.
Mais de mon point de vue, la bienpensance, c'est celle qui est représentée par l'église, par Frigide, par l'UMP. Celle qui à le dessus depuis toujours sur ce sujet.
Pour moi, je suis celui qui lutte contre la bienpensance que vous représentez.
Après, je ne voulauis pas forcémment relancer le débat; Vous êtes contre, je ne le comprends pas trop, mais comment vous dire que vous ne pouvez pas être sûr de ce que vous faites en privant certaines personnes d'agir dans leur coin sans vous nuire, à partir du moment où je n'ai aucune preuve à disposition. Ou plutôt si, j'ai une preuve. Il n'y a aucun élément qui démontre qu'un enfant élevé par un couple homo est moins heureux qu'un enfant élevé par un couple hétéro. Pas de statistique sur la masse des couples. Vous faites le choix de croire une chose, moi je ne crois que ce que je vois.
Mais en donnant une dimension plus large, "je lutte contre la bienpensance", c'est une façon de de voler un argument qui ne vous appartient pas en propre.
"Je prends comme argument le fait que libéralisme peut se retrouver avec des sens différents suivant la personne qui l'utilise ou bien suivant le secteur dont on parle. Le fait est que la pensée libérale est pour certaine personne à l'origine du capitalisme."
Pas d'accord avec votre début : libéralisme a un sens qui ne dépend pas de celui qui l'emploi. en économie le libéralisme est :
le fait que les libertés économiques (libre-échange, liberté d'entreprendre, libre choix de consommation, de travail, etc.) sont nécessaires en matière économique et que l’intervention de l’État doit y être aussi limitée que possible.
Que le libéralisme ait un lien avec la capitalisme je ne le nie pas. Mais vous ne pouvez pas assimiler l'un à l'autre.
"Vous pouvez ne pas être d'accord, mais le fait que certaines personnes disent une chose et vous, le contraire prouve au moins qu'il n'y a pas de consensus."
Pas d'accord : si j'utilise une définition précise d'un terme précis il ne relève pas de l'opinion d'affirmer que ce mot à un tout autre sens (admis par personne). Le libéralisme n'est pas égal à capitalisme, ce n'est pas une affaire d'opinion ou de point de vue.
"Pardonnez moi ce procédé qui consiste à prendre des bouts de posts."
C'est un peu cavalier mais je ne vous en veux pas plus que cela.
"Je veux simplement montrer que vous êtes dans la caricature du camps adverse (même si vous nuancé en disant que ces propos ne me concernent pas toujours)."
Je dénonce les caricatures réelles de l'autre camp en précisant que tous les "membres" de l'autre camp de procèdent pas ainsi. J'explique que, pour beaucoup de pros le simple fait d'être anti peut servir à taxer d'homophobie. Les médias et bon nombre de forumeurs en profitent pour nous mettre dans le même sac que le GUD, le FN et autres extrémistes....
Je trouve cocasse que vous qualifiez caricatural le simple fait que je dénonce une caricature à laquelle se livrent mes contradicteurs.
Un type me traite de connard et vous dénoncez ma violence si je lui demande vivement de retirer ce qu'il vient de dire (sans insulte ni violence de ma part).
"Et finalement, vous utilisez l'attitude prétendument caricaturale des uns pour en faire un arguent supplémentaire de votre clairvoyance."
Clairvoyance non. Mais utiliser les amalgames, les procès d'intention, les caricatures, les sous-entendus, les accusations en homophobie (implicite ou inconsciente) est une réelle preuve de faiblesse. J'ai, moi-même, la faiblesse de croire que ces excès plaident en ma faveur je l'avoue. Mais vous n'allez tout de même pas me rendre responsable des dérives de mes opposants ?
"dans ce genre de débat houleux, assimiler le désir d'adoption d'un couple homo à l'achat par une célébrité d'un enfant, pouvait conduire certains poils à se dresser. J'ai précisé "par maladresse", pour expliquer que chaque propos pouvait conduire à une interprétation et que finalement, la critique d'homophobie se trouve dans le débat, elle lui est propre."
Je comprends cela. Mais je ne vais tout de même pas me censurer moi-même devant des faits qui valident mes pires craintes alors que mes contradicteurs passent leur temps à me dire que ces craintes sont imaginaires.
"Ce n'est peut être ^pas très clair, mais à mon avis il est illusoire de se dire vierge d'homophobie étant donné le caractère floue de ce critère."
Encore une fois nous ne sommes pas d'accord : l'homophobie signifie avoir peur des homos (sens propre) ou les haïr (sens détourné). Je n'ai ni peur ni la haine des homos. Je pense que vous non plus, d'après ce que vous me dîtes.
Ne vous laissez pas emporter par ce relativisme qui tendrait à nous faire croire que le sens des mots n'est que celui que lui prête celui qui l'emploie.
D'être intrigué, interpelé, "dérangé", surpris etc......par la vue d'une personne handicapée, noire (dans un village n'en comportant pas au quotidien), blanche (dans un village n'en comportant pas au quotidien), de deux homos qui s'embrassent etc....n'a rien qui puisse s'apparenter à une "phobie" quelconque : c'est juste une réaction compréhensible face à une morphologie, un appareillage, une couleur, des pratiques etc....peu répandues. Cela surprend seulement car c'est inhabituel : comme de voir une femme de 2,20 mètres de l'autre coté du couloir.
On a tout de même le droit d'être surpris etc...par quelqu'un ou quelque chose d'inhabituel ? Si on ne nourrit aucune haine, aucune violence physique ou verbale, pas de "phobie" ici.
A la vue des nombreuses réactions et débats dans ce forum, le "populisme" semble bien un sujet qui noue de nombreuses contradictions.
Au cours d'une discussion avec un collègue à propos de Chavez, le mot "populiste" est arrivé sur la table.
J'ai voulu en savoir un peu plus sur le "populisme" et en me baladant sur internet j'ai trouvé cet article, qui clarifie pas mal de choses:
http://leportique.revues.org/index906.html
Voilà ma petite contribution à ce forum très alimenté...(pas réussi à tout lire...)
Merci à Judith pour son analyse enrichissante.
Bien à vous.
"Le populisme est la rencontre avec une entité fictive héritée de la philosophie politique. C'est un dialogue imaginaire instauré avec un interlocuteur collectif – le peuple – disposant d'un accès privilégié à la connaissance du réel et du vrai. "
Le peuple est donc d'emblée une "entité fictive" et l'interlocuteur d'un "dialogue imaginaire", dès l'introduction.
Arrêtons nous là : cette vision explique par elle même pourquoi le peuple ne vote plus.
Ce message a été supprimé suite à la suppression du compte de son auteur
Sur le populisme
La véritable maladie de notre démocratie, c'est l'élitisme. (Et sur ce sujet, lire "La révolte des élites" de Christopher Lasch.)
Je rejoins Judith Bernard quand elle dit que sous ce terme, on cherche à cataloguer négativement, et "fascistement" surtout, tout ceux qui se réclament de cette pensée "extrêmiste".
C'est un procès d'intention insoutenable : "tu n'es pas d'accord avec la pensée dominante, donc tu es fasciste". La pensée dominante est tout le temps la pensée unique, relayée par les médias dont les propriétaires font des banquets au Fouquet's (ou en Suisse) et où ils invitent leurs amis du personnel politique. Ce sont elles les personnes déconnectées de la réalité quotidienne, et non pas nous, pauvres hères, qui allons au boulot tous les jours! Ras le bol de tout ça.
Mais j'irais un peu plus loin en disant que le vrai populisme ne s'arrête pas au pouvoir de l'argent. Le populisme, c'est "le gouvernement du peuple, par le peuple, et pour le peuple" (Lincoln), et qu'au fond, c'est ça qui définit le mieux la démocratie.
Le gouvernement "du" peuple, ça veut dire que c'est lui qui dirige le peuple.
Le gouvernement "par" le peuple, ça veut dire que les dirigeants viennent du peuple (on voit déjà là qu'il y a un problème...)
Le gouvernement "pour" le peuple, ça veut dire qu'il dirige dans les intérêts du peuple (et là le problème saute aux yeux!).
Populisme = démocratie. L'étymologie du mot ne laisse d'ailleurs aucun doute, puisque peuple = demos en grec.
Celui qui a "ressorti des cartons" le mot populisme est M. François Hollande soi-même, au moment de la campagne du référendum de 2005. Il visait expressément les tenants du NON de gauche, qui avaient pourtant des arguments fort intelligents et dont la suite a montré qu'ils étaient absolument justifiés. J'étais à l'époque au PS. De là date ma haine pour ce Hollande qui ne vaut vraiment rien (ou alors peut-être comme président du Conseil général de Corrèze, qui sait ?) et ma sensibilité à fleur de peau sur ce mot "populisme". Ma sympathie pour Mélenchon ne s'en trouve que renforcée.
à Gamma gt : on écrit : la prochaine fois, je ferai comme d'habitude, je fermerai ma gueule ! (C'est du futur et non du conditionnel)
A part ça, bravo Judith
Tout d'abord, notons que dans 90 % des cas le mot "populisme" est employé comme synonyme pervers de "démagogie". A tel point qu'on a du mal à imaginer ce que pourrait être un populisme non-démagogique, ce qu'essaye d'esquisser en creux Judith Bernard.
Mais il faut alors s'étendre un peu sur la démagogie, ce qui n'est pas fait dans ce long article (ceci explique peut-être cela !). Passons.
Imaginons maintenant qu'on emploie "populisme" à bon escient, c'est à dire comme la doctrine qui donne raison au peuple face aux élites. C'est le terme "élite" qu'il faut maintenant définir ! Judith Bernard le cantonne aux élites économiques, c'est à dire aux riches, ce qui n'est pas faux tout en étant loin d'être juste. Mon voisin est un poissonnier débile qui a fait fortune, un riche qui ne fait pas partie de l'élite. Et il y a des élites pauvres.
Bref, "populisme" est un mot qui veut dire ce qu'on a envie d'y entendre, comme "élite". Comme il manque parfois des mots pour définir des concepts ou des sentiments, je peux affirmer que ces deux-là brouillent les idées et les raisonnements au lieu de nous aider à penser.
Vous permettez que je vous appelle Judith ?
Putain ! Que c'est beau !
Il y a tout : le détricotage du discours élitistico-culpabilisant qui nous explique que le populisme c'est caca... parce que c'est pas eux. En effet, si vous donnez le pouvoir au peuple, ça ne peut être que le bazar à brève échéance. C'est vrai, quoi, merde !
Il y a tout : la dénonciation du kidnapping du terme populisme au profit de ceux qui doivent nous faire peur.
Populisme égale "Ein Reich, ein Volk, ein Führer". Pour les sinisants, je traduis. Un pouvoir(1) , un peuple, un guide.
Populisme a été ressorti des cartons lorsqu’il a fallu trouver un nom conforme à la culture (2) du temps de cerveau humain disponible pour désigner ce qu’avant on aurait pu baptiser fascisme, xénophobie, racisme, haine de la démocratie et que sais-je encore. Comme la drague du client potentiel ne pouvait exclure personne, il a fallu trouver un vocable qui ne choque pas ces clients potentiels là. Et pour remplacer fascisme, xénophobie, racisme, haine de la démocratie on a trouvé populisme. En plus, c’est très ambigu parce que des voix parmi les plus autorisées ont utilisé cet appel au peuple : rappelez vous le bruit et l’odeur du grand (plus de 1,8m) Jacquot et le nettoyeur à pression du petit (moins de 1,7m) Nicolas. Populisme est un terme chargé de souffre et de parts de marché.
Il y a tout et en particulier la mise en lumière de la perversion de trop « d’élites intellectuelles » prêtes à saborder toute action démocratique au nom de la lutte contre le populisme, ce nouveau mal du siècle.
Pas mal de ces têtes pensantes et dépensantes nous abreuvent de discours sur le populisme de Mélenchon ou du PCF. Et nous revoilà rendus à la case départ : de quoi la dénonciation du populisme est-elle le nom ?
(1) C'est compliqué de traduire Reich. Enfin ça dépend du contexte. Dans l’histoire on pourrait dire royaume ou empire. Et dans l’histoire on pourrait aussi dire nazisme. Et là ça pue un max.
(2) Au sens où on cultive, par exemple, les fraises : pour les amener à maturité au bon moment.
Il y a un seul questionnement par rapport à cette mise en exergue, en quelques années, du mot populiste qui, vous l'expliquez signifie en creux "antisémite". D'ailleurs, peut-être inconsciemment, vous reprenez un raisonnement qui a été fait par un important intellectuel juif, à en juger par son nom.
Je me suis toujours demandée à quel niveau s'était placée la manipulation pour faire croire aux intellectuels juifs que les antilibéraux étaient forcément antisémites. Ou si le phénomène découlait naturellement de leur position de dominant. Il n'y a évidemment pas que les juifs qui le croient ou font semblant d'y croire parce que ça les arrange, mais ça retient puissamment les intellectuels juifs de souscrire aux idées antilibérales.
Traditionnellement, de nombreux intellectuels juifs étaient anti-libéraux, or il est actuellement difficile d'en trouver dans nos rangs. L'intox lexicale que vous décrivez marche très bien.
J'ai vu qu'à la fin du mois sortait un film de Margarethe Von Trotta (un des grands films sur les médias, L'honneur perdu de Katharina Blum, est son premier film) sur Hannah Arendt au moment où elle commence à se faire reprocher ses idées à propos du totalitarisme dans le cadre de ses articles autour du procès Eichmann. Comment le fait d'avoir expliqué comment certaines élites juives en Europe avaient participé à la Shoah et en avaient tiré des avantages (relatifs mais réels), avait provoqué un tollé et l'avaient disqualifiée.
Avant que vous ne poussiez de hauts cris, je vous ferai remarquer qu'en Europe, tout le monde s'était déculotté devant les nazis, et évidemment les élites juives comme les autres. Le grand nombre de victimes juives n'en fait pas un peuple victime dans son entier.
Vous savez que certaines œuvres musicales ont été composées dans le camp de Theresienstadt. Clairement, personne ne pouvait composer quoi que ce soit à Auschwitz. Il existait des camps plus doux que les autres.
Alors, après, vous pouvez en penser ce que vous voulez, le problème, c'est de ne pas pouvoir le dire sans se faire traiter de tous les noms.
Je suis impatiente de voir comment le film va être reçu. Dans la bande-annonce, le problème est abordé, sans doute est-il traité dans le film.
Car on en vient au problème de base, qui constitue le nœud central des anti-antilibéraux, mais pose bien d'autres questions :
La peur d'une nouvelle Shoah peut-elle tout justifier ? Au risque d'isoler les Juifs des mouvements intellectuels.
Vous me direz, c'est le problème des Juifs.
Certes ! Mais ils ont toujours été de puissants moteurs de l'intellectualisme en France et en Europe. Si leur pensée se tarit, c'est tout le corps politique qui est en souffrance, et souffrira.
Et ce que j'en dis.. Je suis juste une petite fonctionnaire d'origine bretonne....
Oui, je sais, c'est une contribution qui fait considérablement avancer le débat.
donc je suis 68-tard)-populiste- à la retraite...
yes !
gamma
ps super ton article.
A sa lecture, j'ai l'impression de comprendre qu'on assiste à une manifestation assez originale de novlang orwélienne. En effet, ici, c'est pas qu'on élimine ou substitue un mot gênant (chose assez classique, genre "personne en difficulté" pour "miséreux"), mais on en "crée" un (entre gillemets, car le terme existait déja, donc c'est du détournement en fait) spécifiquement destiné à disqualifier les opinions contestataires.
Et vous, que faites vous? Je vous le demande!!!
Cette chronique n'est rien moins qu'un encouragement, la justification que ces illuminés ne manqueront pas de brandir pour légitimer les critiques futures qu'il ne manqueront pas de formuler....
Non vraiment, Mme Bernard, je ne vous comprends pas....
Je voudrais vous en proposer une autre, dans la continuité : pourquoi cette référence omniprésente aux "années 30" comme quelque chose d'abominable? La période qui me vient d'abord à l'esprit quand on me dit "années 30", c'est le Front Populaire. Et je me demande s'il n'y a pas dans ces discours récurrents sur les horribles années 30 une volonté d'effacer des mémoires le Front Populaire et sa postérité. A moins que, dans l'esprit de ces locuteurs, le Front Populaire ait été une période horrible?
Il se manifeste inlassablement et avec une constance qui pourrait presque forcer le respect. Il trouve sa substance dans un dénigrement systématique des émissions populaires, des journalistes qui nous éclairent , je pense notamment à l'excellent Guillaume Roquette qui ce matin a pris la défense avec beaucoup de talent des manifestants opposés au mariage pour tous ou aux émissions de télé-réalité comme confessions intimes ou Koh lanta.
Ne parlons pas de tous ces économistes qui se prétendent atterés et qui cherchent à nous faire croire qu'une autre économie est possible.
Méfions nous également de tous ces Cassandre qui jettent l'opprobre sur nos grands champions qui choisissent parfois de s'exiler afin de fuir cette chasse fiscale menée par un pouvoir crypto-bolchevique.
Il est temps de revenir à des valeurs saines, rehabiliter les cultures populaires comme la corrida, le répertoire d'artistes majuscules comme Patrick Sébastien ou de louer les mérites de journalistes intègres comme Eric Brunet qui aujourd'hui encore nous a démontré avec brio que des pays comme le Bostwana ou le Congo constituaient des modèles économiques.
Le mépris de ces fonctionnaires de la pensée, de ces intellectuels subventionnés, de cette Intelligentsia interlope pour les classes populaires et leurs défenseurs au sein de monde médiatique est plus que préoccupant.
Il est temps de réagir et revenir à de saines valeurs, le travail, la flexibilité, l'individualisme bienveillant, la libre entreprise et lutter contre ces populistes de gauche qui ne cherchent qu'à nous démotiver.
"Ohé, partisans, ouvriers et paysans, c'est l'alarme"
C'est hétéroclite, de retrouver dans le même mouvement de protestation des agriculteurs et des travailleurs? Il me semble que ces deux catégories ont pourtant quelque chose d'essentiel en commun, "le bas de la société" comme vous le dites si bien, sans en tirer pourtant, comme conséquence, que c'est tout sauf "hétéroclite".
Par contre, on pourrait qualifier d'hétéroclite la catégorie qui regroupe "les exploitants agricoles", comme si l'agro-industriel de la Beauce avait quoi que ce soit de commun avec le montagnard qui vend à perte le lait de ses vaches et va faire le perchman l'hiver pour survivre. Ou la catégorie "salarié", qui met dans le même sac le PDG et le smicard. Ou la catégorie "chef d'entreprise", qui mélange allègrement Bernard Arnault et le petit artisan qui travaille seul ou presque, l'épicier du coin et Édouard Leclerc.
source: Dario Fo, Die Zeit, 14.03.2013, page 52
À propos du mouvement 5 étoile et de l'accusation de "populisme" (au sens des médias) à l'encontre de Grillo et de Berlusconi:
[quote=Dario Fo]Populisme signifie: par l'ironie ou le théâtre dénoncer les manigances de la classe dominante en enseignant des possibilités de défense et de libération. Le populisme est une affaire sérieuse.
[...]
Démagogie signifie feindre l’intérêt pour une classe dominé, la charmer avec de l'attention, pour mieux l'exploiter et obtenir ses voix.
Nous devons utiliser les mots plus clairement. Seul les escrocs veulent faire croire qu'être populiste signifie être sournois (perfide).
http://en.wikipedia.org/wiki/People%27s_Party_(United_States)
Très différent du boulangisme, peronisme, cinquième républiquanisme (un homme en face à face avec le peuple).
Pour le coup de balai, selon Bernard Langlois de Politis, ça vient de la SFIO et d'affiches datant de 1932.
Quant à la trouille du peuple et de sa violence potentielle à l'égard des élites auto-proclamées, il suffit de revisionner l'échange dans "les nouveaux chiens de garde" entre BHL et Barbier pour saisir l'effroi qui les prend quand les pouilleux abandonnent les pancartes pour séquestrer ceux qui leur font violence quotidiennement.
On peut contester les structures, certes, mais il n'y a pas de honte ou d'infamie à désigner nommément ceusses qui en profitent comme ceusses qui les défendent pour qu'ils assument leurs responsabilités.
Derrière, par exemple, le Cercle des Economistes, il y a des noms et quand dans une émission de Mermet, la bande de François Ruffin va les interroger, ils braillent bien évidemment au climat des années 30 où on jetait en pâture au peuple des noms. Le subterfuge est toujours le même, il convient de ne pas y céder.
Merci pour cet article très à propos. Ce pendant, je dois avouer que ce passage m'a posé problème :
[quote=Judith]Ce sont donc les structures qu’il conteste, pas les personnes qui en bénéficient.
Je crois que le structuralisme reste une conception très minoritaire et que, bien souvent, la vision morale (voire moralisatrice) prend le dessus. Il est souvent bien plus simple et rapide de s'en prendre aux agents car ils ont la propriété attrayante de crystaliser les affects de manière beaucoup plus spéctaculaire que les structures, qui sont diffuse et qu'il faut repérer par la théorie.
"Certes, Hollande a ouvert la brèche à cet amalgame odieux, avec sa funeste ânerie du "je n’aime pas les riches" (2006, sur le plateau d’A vous de juger). Sans doute croyait-il s'attirer les suffrages du "peuple" à qui les élites prêtent cet instinct nauséabond, mais le fait est qu’il n’a pas persisté dans ce discours, constatant probablement l’absence totale d’efficacité d’une posture politique aussi bas de gamme."
Pourquoi jouer ainsi les vierges effarouchées ? Cette vanne spontanée d'Hollande, appelée ici "discours" sans aucune raison, est sûrement ce qu'il a dit de plus drôle et de plus rafraîchissant dans toute sa carrière ! Lui reprocher, c'est justement aller dans la même direction que ceux qui crient au populisme à la moindre invective un peu passionnée et caustique.
Cet article a un bon fond et pose les bonnes questions, mais à trop prendre de telles pincettes sémantiques, il retombe au final dans les travers dénoncés, c'est dommage. La révolte anti-oligarchie s'est toujours nourrie d'une longue tradition d'outrance satirique qui ne pèse pas ses mots. C'est Hara-Kiri, entre autres. Et il faut en être fier.
Si l'on veut bien arrêter de jouer sur les mots 5 secondes, bien que cette chronique le fasse à merveille, tout le monde comprend que derrière le terme populiste, on désigne une malhonnêteté intellectuelle, un amalgame, une caricature.
Quand monsieur Lordon vient nous expliquer sur votre plateau que le système financier international privé de toutes réglementation génère par essence les crises dans lesquelles nous sommes emportés, il me semble qu'il fait une analyse scientifique, une expertise, de la situation pour nous aider à mieux la comprendre. Il fait appel à notre raison, il fait confiance à notre intelligence. C'est un discours enrichissant qui sert le rôle de citoyen qui incombe à chacun d'entre nous, quand bien même on ne serait pas d'accord avec sa vision du monde.
Quand monsieur Melenchon joue le jeu médiatique, et traite, par le biais de son lieutenant, un ministre de "salopard". Quand monsieur Mélenchon publie un livre intitulé "Qu'ils s'en aillent tous" au prétexte qu'il ne fait que citer le mot d'ordre des révolutionnaires sud américains, alors que sont propos est tout simplement de déconsidérer la totalité de la classe politique française (voir européenne). Et j'en passe...
Mon propos est-il de dire que Mélenchon est populiste quand les autres politiques ne le sont pas ? Non, la campagne présidentielle de Hollande a eu son lot de raccourcis minables (et c'est justement rappelé dans la chronique), les propos quotidiens de Monsieur Copé nous montrent à quel point la caricature est une arme médiatique efficace quand il s'agit de combler l'absence de discours politique et philosophique.
Je constate seulement qu'@si a cette tendance à monter au créneau pour défendre Mélenchon alors qu'il est parfois indéfendable. Dommage de vouloir masquer ses défauts au lieu de lui demander de s'améliorer.
Partant :
- Se demander ce qui serait bon pour le peuple est vain : comment avoir cette information ? Quel peuple ? Comment décider du bon ?
- Se conformer aux souhaits que le peuple exprime le plus massivement est rentable et logique à court terme : refuser la pensée complexe car faiblement mobilisatrice, lui préférer la caricature et les amalgames. Le niveau moyen d'éducation, la montée de l'individualisme et du chacun pour soi, la perte des valeurs autres que celles de l'argent.....mis en scène par TF1 facilitent le boulot.
Nous sommes dans une société de plus en plus binaire (le fond rejoins la forme avec l'envahissement de l'espace par l'informatique). La nuance, l'esprit d'analyse désertent de plus en plus de lieux (virtuels comme réels) : si tu ne partages pas mon opinion t'es un extrémiste facho "quelquechose"o-phobe. La police de la pensée nous encercle : on ne peut plus parler de rien sauf pour témoigner de son accord avec la doxa du moment sous peine d'être un "phobe".
Je remarque au passage que les virtuoses du "t'esquun-phobe" révèlent d'avantage leur propre peur (et non haine) des arguments des autres. Pour tout balayer, en dernière analyse, le "t'esquun-phobe" est promptement dégainé : il a le mérite de clore le débat et de faire surgir la "réalité" des intentions (cachées) des uns et des autres. Ils ont eux-mêmes peur de se surprendre ayant la moindre volonté d'accorder le moindre crédit à l'argument de leur opposant. Tout est à jeter dans ce que dit l'autre, sinon cela signifierait qu'il aurait raison.....
Dans le royaume du 1 et du 0 aucun nuance et aucun doute n'est permis : t'es populiste ou fréquentable, tes idées pues (ou menacent de remugler, consciemment ou pas) ou elles sont conformes.....n'allez pas chercher d'explications au risque de vous retrouver inévitablement rangé du coté 1 ou 0.
"Il s'agit d'un mouvement ou d'une doctrine faisant appel de façon exclusive ou préférentielle au "peuple" ou aux "masses" en tant qu'entités indifférenciées. Y sont niées ou minorées les classes, leurs antagonismes et singulièrement le prolétariat urbain comme avant garde révolutionnaire. L’idéologie populiste accompagne donc souvent les entreprises nationalistes."
à cette époque, il ne nous serait jamais venu à l’idée de parler de "peuple". De dire quelque chose comme "place au peuple". On parlait de peuple populaire pour bien marquer une forme d'antagonisme de classe.
Merci
Votre article sur le mot "populisme", comme celui de Lordon pour le mot "gauche", est éclairant pour décortiquer le langage que la propagande médiatique insuffle incidemment durant le temps de cerveau disponible de ses lecteurs et auditeurs.
@si une fois de plus sort du mainstream.
Bien à vous.