Trump réélu : "les journalistes ont du mal à apprendre de leurs erreurs"
L'émission
  • Avec
    Arno Pedram et Alexis Pichard et Youna Rivallain
  • Presentation
    Alizée Vincent
  • Préparation
    Adèle Bellot
  • Réalisation
    Antoine Streiff
Réservé à nos abonné.e.s

On pensait ne connaître les résultats officiels qu'en cette fin de semaine, tant on nous promettait un match serré, mais le scrutin a été beaucoup plus clair que prévu : Donald Trump a remporté l'élection américaine, avec 295 grands électeurs, sur les 270 nécessaires. Une victoire-surprise, qui pose bien des questions, concernant notamment le travail des journalistes. 

Les médias sont-ils incapables de comprendre l'électorat des démocraties occidentales ? Cela a-t-il un sens, de présenter les supporters de Trump à travers leurs franges les plus extrêmes : milices d'hommes blancs sur-armés, tradwives et évangéliques ultra-conservateurs ? Pourquoi, à l'inverse, n'a-t-on pas idée de qui compose réellement les troupes de Kamala Harris, côté démocrate ? Parti à l'intérieur duquel la candidate a été présentée comme un modèle de réussite et de vertu, sans aspérité - une sorte d'héritière d'Obama - en dépit des débats sur ses positionnements politiques, comme la Palestine. 

Pour sonder la nuances dans ce tableau ultra-polarisé, trois invité·es : Youna Rivallain, journaliste spécialiste du fait religieux aux États-Unis pour La Croix, Alexis Pichard, chercheur en civilisation étasunienne et Arno Pedram, journaliste indépendant, notamment chez Disclose et Infomigrants, co-président de l'Association des Journalistes Antiracistes et Racisé·es (AJAR). 

"Lexique du bouffon" 

Entre 2016, date de la première élection de Donald Trump, 2020, date de sa défaite contre Joe Biden et 2024, le regard porté par les médias français sur Donald Trump et son électorat a-t-il évolué ? Youna Rivallain, présente aux États-Unis à l'occasion des trois dernières élections, répond : pas vraiment. En 2016, Donald Trump était présenté comme un "bouffon". En 2020, c'est la "peur" qui nous animait. En 2024, à nouveau, ses supporters et lui ont été dépeints comme des "outsiders". En face de cela, "on a eu du mal à comprendre en tant que médias français à quel point l'électorat de Kamala Harris était divisé".

"Beaucoup comparent Trump au roi Cyrus"

Le phénomène religieux le plus intense aux États-Unis ces dernières années est la sécularisation. Pourtant, le sujet n'est quasiment jamais abordé dans les médias. Ils ont plutôt plutôt montré un électorat utra-religieux, par le biais du catholicisme radical et des pasteurs évangéliques, omniprésents dans les reportages. S'il n'est pas toujours problématisé comme tel, ce focus ne sort pas de nulle part. Il se fonde sur une croyance, ancrée chez certains républicains : Donald Trump serait une forme de messie, expliquent Youna Rivallain et Alexis Pichard. 

Foklore de la tradwife

L'élection américaine de 2024 serait-elle l'élection "la plus genrée" de l'histoire des États-Unis, comme l'a annoncé Anne Sinclair sur la télé française ? Oui, à en croire les chaînes. D'un côté, elles ont montré l'image de la tradwife, image d'Épinal de l'électrice de Trump. De l'autre, les rédactions n'ont cessé de répéter que les femmes pourraient "faire basculer" le vote en faveur de Kamala Harris. Elles voteraient plus volontiers pour le parti Démocrate et seraient plus sensibles aux arguments en faveur des droits reproductifs. En réalité, "le genre a joué un rôle surtout chez les hommes", analyse Arno Pedram. Des hommes pro-Trump biberonnés à la culture masculiniste, et blanche suprémaciste, selon le journaliste. 

Pour aller plus loin : 

- Les articles de Youna Rivallain sur la nouvelle garde catholique conservatrice aux États-Unis et le futur vice-président, J.D Vance

- Le livre d'Alexis Pichard, Donald Trump et les médias, l'illusion d'une guerre (VA éditions, 2020)

- L'analyse du Monde sur la défaite de Kamala Harris

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