Brésil et Antarctique : la semaine sans Trump d'un journaliste du NYTimes
Une semaine sans Trump. C'est ce qu'a tenté de faire Fahrad Manjoo, journaliste au New York Times. Pendant une semaine, il a tenté de s'informer sans jamais lire quoi que ce soit sur le président des États-Unis. La raison ? "J'ai commencé à me demander si nous n'étions pas en train de faire une overdose de Trump dans l'actualité, à l'exclusion de tout le reste, explique Manjoo. Il a établi une résidence semi-permanente dans tous les médias, qu'ils soient politiques ou non".
Pas d'actualité Trump pendant une semaine, la tâche s'est révélée plus difficile que prévue, pour Manjoo, qui dit s'être plongé dans les méandres du site de la BBC, de Reddit, ou encore des réseaux sociaux : "Même quand je trouvais des actualités non-Trump, raconte le journaliste, la plupart était reliées à des actualités Trump", raconte-t-il. Que ce soit les Golden Globes, avec ses discours d'acteurs et actrices anti-Trump, le Super Bowl et ses spots publicitaires pour la tolérance, ou bien même des épisodes de la série Big Bang Theory (dans laquelle le scénariste a inclus un message anti-Trump à la fin), Trump est partout.
"J'ai ignoré Trump pendant une semaine. Voilà ce que j'ai appris",
Article de Farhad Manjoo pour le New York Times, 22 février 2017
Le "Chaos" du Brésil et la crevasse de l'antarctique
Pendant que Trump accapare l'essentiel de l'attention médiatique, le monde continue de tourner. L’État Islamique recule en Irak et en Syrie, raconte notamment le journaliste du Times. Il fait ainsi référence aux forces armées irakiennes qui, aidées par les forces américaines, reprennent peu à peu le contrôle de la ville de Mossoul, l'un des bastions du groupe terroriste. Manjoo évoque aussi, sans donner plus de détails, un Brésil "au bord du chaos". Depuis plusieurs semaines, des officiers de police font en effet grève pour demander une augmentation voire, pour certains, le versement de leurs salaires (dans certains États, le pouvoir n'a plus les moyens de payer ses fonctionnaires). Des grèves qui ont eu pour résultat l'augmentation d'activités criminelles dans certaines parties du pays (pillages, ou encore meurtres). L'armée a par exemple été dépêchée à Rio de Janeiro pour assurer la sécurité du carnaval, qui débute le 24 février prochain.
Manjoo est allé également fouiller du côté des sciences, s'intéressant à Zealandia, un possible nouveau continent immergé, dont les seules terres émergées seraient la Nouvelle-Zélande et la Nouvelle-Calédonie (une partie de la communauté scientifique réfuterait l'appellation de "continent" pour cette vaste terre, qui fait a priori les deux-tiers de l'Australie). Le journaliste du New York Times mentionne enfin un iceberg en formation dans l'Antarctique : une crevasse géante se développe depuis 2014 sur la barrière de glace Larsen C, accrochée au continent Antarctique. La barrière devrait bientôt se déchirer complètement, créant un iceberg "grand comme les Bouches-du-Rhône" - la comparaison est du Huffington Post.
La faute aux réseaux sociaux ?
Malgré cette actualité variée, Trump reste omniprésent. Le 45ème président des États-Unis est probablement la personnalité publique dont on a le plus parlé ces dernières décennies, suppose Manjoo. Il en veut pour preuve les analyses de MediaQuant, une entreprise américaine qui mesure notamment la récurrence de certains noms. L'entreprise recense toutes les mentions d'une marque ou d'une personnalité et, pour chaque mention, y attribue virtuellement un dollar. Une manière de calculer la "valeur publicitaire" d'une personnalité. "En janvier, Monsieur Trump a brisé les records de MediaQuant, écrit Manjoo. En un mois, il a reçu l'équivalent [virtuel, ndlr] de 817 millions de dollars en couverture médiatique". Par comparaison, l'ancien président des États-Unis Barack Obama obtenait des chiffres qui oscillaient entre 200 et 500 millions de dollars.
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6 d'entre eux sont liés à Trump
Comment expliquer cet emballement médiatique autour de Trump ? Le journaliste du Times pointe du doigt les réseaux sociaux, qui fonctionnent comme des accélérateurs lorsqu'il s'agit de relayer les actualités sur Trump. "Contrairement aux médias de la vieille école, les médias d'aujourd'hui travaillent en regardant les retours sur les réseaux sociaux, [ce qui forme] une boucle. Chaque histoire qui montre un quelconque signe de vie sur Facebook ou Twitter est copié sans fin par tous les médias, devenant impossible à éviter".
Pour le journaliste, il est urgent que les médias retrouvent un équilibre entre Trump et le reste de l'actualité : "Trump sera probablement président pendant les quatre prochaines années. Et ce n'est probablement pas une bonne idée d'être concentré sur un seul sujet pendant aussi longtemps."
Mais Manjoo lui-même n'est pas à l'abri de la dérive, et un coup d’œil à la liste de ses articles récents suffit pour le comprendre. La plupart des articles du journaliste du Times de ces dernières semaines, bien que ne traitant pas toujours directement de Trump, le mentionnent. A l'exemple d'un article sur l'importance des travailleurs immigrés dans la Silicon Valley – en pleine polémique sur le "Muslim Ban". Ou d'un autre article, datant du 11 février, intitulé : "Trump partout, Trump tout le temps". "Aussi important que Monsieur Trump soit, il n'est pas tout – et ce serait bien que l'écosystème médiatique le reconnaisse", conclut Manjoo dans son article sur sa semaine sans Trump.
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